Sommaire
IUn texte philosophique sur la religionALe christianismeBLa philosophieIILes procédés littérairesALe recours à l'exemple et l'analogieBLe raisonnement concessif et le syllogismeCLe raisonnement par l'absurdeIIILes deux infinisPensées
Blaise Pascal
XVIIe siècle
L'œuvre Pensées, est faite de notes et de fragments publiés à titre posthume. Pascal voulait faire une grande apologie de la religion chrétienne. Il se consacre à ce projet les dernières années de sa vie, mais meurt avant d'avoir terminé. La construction de l'ouvrage final n'est donc peut-être pas celle qu'il aurait souhaitée, et le projet n'a pas abouti.
Une légende voudrait que Pascal ait commencé son entreprise après le "miracle de la Sainte Épine" du 24 mars 1656 à Port-Royal-des-Champs. La nièce de Pascal, Marguerite Périer, est guérie après qu'on lui ait appliqué une épine de la couronne du Christ sur une fistule lacrymale. L'auteur est alors convaincu qu'il doit défendre la religion chrétienne. L'œuvre pourtant n'est pas simplement une suite d'articles en défense de la foi chrétienne. On y trouve surtout la vision de Pascal sur de nombreux sujets comme l'Homme, la vie, la mort. Les écrits sont essentiellement métaphysiques.
Un texte philosophique sur la religion
Le christianisme
Pascal avait défendu son projet à Port-Royal. L'auteur s'adresse avant tout aux chrétiens. Il parle à plusieurs reprises des "vrais chrétiens". Il explique les raisons qui les conduisent à suivre les coutumes en fonction de Dieu. Pascal déplore que la majorité des chrétiens ait perdu le sens même de Dieu. C'est pour cela qu'il écrit les Pensées. Il veut rappeler ce qu'est la véritable foi chrétienne. Il entend surtout la défendre et montrer sa supériorité sur toutes les autres croyances. Certains passages sont ainsi contre l'islam ou contre la religion juive.
Pascal souligne que la foi chrétienne est la meilleure, puisqu'elle permet la rédemption. Surtout, il assure qu'il est préférable de croire, cela nous permet d'être sauvés si Dieu existe.
La philosophie
L'auteur jauge deux philosophies qui s'opposent : le pyrrhonisme de Montaigne et le dogmatisme de Descartes. Pascal montre que la vérité peut être approchée si on considère les deux visions. C'est leur combinaison qui permet de toucher à la vérité.
Pascal condamne l'extrémisme. Il pense que le doute est acceptable. Contrairement à Descartes, il ne croit pas que l'esprit/l'intelligence humaine puisse tout démonter ; mais il ne croit pas non plus que l'Homme est parfaitement démuni. Le but de Pascal est de faire réfléchir l'Homme à sa position. Il ne faut pas s'attacher de façon aveugle à certaines idées.
Le philosophe affirme qu'il faut néanmoins passer par Dieu.
L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature ; mais c'est un roseau pensant. Il ne faut pas que l'univers entier s'arme pour l'écraser : une vapeur, une goutte d'eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt, et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien.
Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C'est de là qu'il faut nous relever et non de l'espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser: voilà le principe de la morale.
Blaise Pascal
Pensées
XVIIe siècle
La grandeur de l'Homme est grande en ce qu'il se connaît misérable. Un arbre ne se connaît pas misérable.
C'est donc être misérable que de se connaître misérable ; mais c'est être grand que de connaître qu'on est misérable.
Les procédés littéraires
Le recours à l'exemple et l'analogie
Pascal recourt beaucoup à l'exemple. Cela permet de rendre plus claire l'idée qu'il est en train de défendre. Il y a un côté pédagogique dans l'utilisation d'exemples. Parfois, comme l'œuvre n'a pas été terminée, il n'y a que les exemples, et pas l'argumentation qu'ils doivent défendre. Par exemple, le fragment 17 illustre le fait que l'Homme juge les autres d'après les apparences.
Pascal utilise aussi l'analogie. Pour montrer que l'Homme se trompe dans ses jugements, qu'il a un mauvais point de vue, Pascal compare sa vision à l'Art, aux tableaux de peinture.
Le raisonnement concessif et le syllogisme
Dans son art de persuader, Pascal affirme qu'il vaut mieux amener l'adversaire à réaliser qu'il se trompe, plutôt que de défendre clairement son opinion. Il faut faire en sorte de rendre le locuteur disponible. Si on s'oppose à lui violemment, le dialogue est impossible. On appelle cela le raisonnement concessif. Il permet à l’auteur de prétendre aller dans le sens de son destinataire afin de mieux montrer en quoi sa pensée est fausse. Pascal l’utilise surtout lorsqu’il évoque les dogmatistes et les pyrrhoniens au fragment 122.
Quelle chimère est-ce donc que l'homme ? Quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradictions, quel prodige ? Juge de toutes choses, imbécile ver de terre, dépositaire du vrai, cloaque d'incertitude et d'erreur, gloire et rebut de l'univers.
Pascal
"Fragment 122", Pensées
Le raisonnement par l'absurde
Pascal utilise le raisonnement par l'absurde. Cela signifie qu'il tire des conclusions illogiques d'une hypothèse. Ainsi, il finit par valider le contre de son idée première. On peut citer par exemple le fragment 123. On y lit : "Si l'homme était heureux, il le serait d'autant plus qu'il serait moins diverti, comme les saints et Dieu..." Pascal part donc d'abord d'une hypothèse qui n'existe pas. Il imagine, il invente, pour mieux ensuite souligner qu'il a raison.
Ce raisonnement par l'absurde est beaucoup utilisé par Pascal. Il permet d'invalider toutes les autres propositions.
Les deux infinis
Pascal évoque deux infinis dans l'œuvre. Il y a l'infiniment grand, et l'infiniment petit. L'infiniment grand est ce que l'Homme voit, puis ce qu'il imagine. Pascal choisit de prendre comme point de référence l'Homme pour mieux souligner sa petitesse par rapport au Cosmos. Il y a donc le ciel, la nature, l'infini, tout ce qui dépasse l'humain.
L'infiniment petit est présenté comme un autre prodige. Pascal invite le lecteur à imaginer un autre univers, quelque chose qu'il ne peut pas voir. L'infiniment grand serait alors contenu dans l'infiniment petit. Lorsqu'il parle de ce qui est petit, Pascal ne cesse de le lier au grand, et le grand semble finalement bien petit. Le lecteur peut éprouver une forme de vertige, perdu entre les deux infinis. Le philosophe cherche en fait à persuader que l'homme est disproportionné par rapport au monde qui l'entoure. C'est trop grand, ou trop petit, mais impossible à comprendre, à saisir. Il reste la foi, qui permet de sauver l'Homme, de le rassurer.