Les Regrets
Joachim Du Bellay
1558
Les Regrets est un recueil que Du Bellay a écrit à Rome. Il y offre sa vision de la ville. L'ouvrage est composé de cent quatre-vingt-onze sonnets. Du Bellay dénonce la société romaine, il chante ses malheurs, il détaille son ennui, mais surtout il souligne sa mélancolie et sa profonde désillusion. Il se rend compte que Rome est un endroit qui est loin d'être respectable. Elle devrait être la ville sainte, mais elle est la ville de la débauche. Du Bellay parle alors de sa nostalgie de la France, son pays natal qui lui manque profondément. Il parle ainsi de ses "regrets".
L'intérêt de l'œuvre tient à ce que la tonalité élégiaque laisse peu à peu place à la satire. En effet, Du Bellay n'est pas tendre avec la Rome moderne. Il dénonce sa corruption, ses fastes et sa luxure. Il est horrifié par la dépravation des hommes d'Église, le Pape en premier. Malheureusement, quand il rentre en France, il s'aperçoit que la cour du roi n'est pas bien différente de celle du pape. La satire touche donc la religion et le pouvoir.
Le théoricien de la Pléiade
Joachim Du Bellay est le théoricien du mouvement de la Pléiade. Il prétend créer une poésie française nouvelle. Il affirme que le français vaut les autres langues, et qu'elle peut devenir aussi poétique que le grec ou le latin. Le poète se fait donc un défenseur de sa langue.
Il estime qu'il faut néanmoins enrichir le français. Il explique que pour cela, il faut imiter les auteurs antiques. Il faut rénover la poésie, et abandonner les modèles médiévaux. Le mot d'ordre est "imitation". C'est la naissance de la Pléiade, groupe poétique réunissant autour de Du Bellay les poètes Ronsard, Peletier du Mans, de Baïf, Jodelle et Pontus de Tyard.
Le recueil
Les influences
Les influences du poète sont principalement antiques. Il aime particulièrement Pétrarque, maître du lyrisme amoureux. Le thème principal des Regrets est bien la passion du poète pour une femme. Il y parle de l'absence ou le rejet de l'aimée. Le sonnet est la forme consacrée par Pétrarque, et Du Bellay l'utilise ici. Il fait l'éloge des femmes, des qualités de la grande dame, elle est divinisée, idéalisée.
Pierre de Ronsard est aussi un modèle pour Du Bellay. Ils ont rédigé ensemble le recueil La Défense et illustration de la langue Française en 1549. Du Bellay est toutefois plus proche des latins, et Ronsard des grecs.
La construction
Les sonnets de Du Bellay circulent déjà avant d'être réuni en un seul recueil. Celui-ci n'est donc pas pensé pendant que les poèmes sont écrits, il est réfléchi une fois que les poèmes sont terminés. Le recueil s'organise en trois parties. D'abord, "Les Regrets", où le poète décrit sa mélancolie alors qu'il est exilé à Rome. Puis, il y a les poèmes satiriques contre Rome, et contre la forme. Ce sont les poèmes les plus nombreux. Enfin, il y a les poèmes de louange. Du Bellay s'adresse surtout à des amis restés en France. Certains critiques ont remis en cause l'organisation du recueil, qui semble un peu bancale, et ne paraît pas suivre de règles particulières.
Les thèmes
Les thèmes sont divers. Le premier est bien sûr Rome. La ville tient une place importante dans l'œuvre de Du Bellay, qui l'idéalisait avant d'être profondément choqué par ce qu'il y découvre. Rome devient alors le rêve perdu. Les illusions s'opposent violemment à la réalité.
La nostalgie est également au cœur des sonnets. Du Bellay pleure son pays. Il lui manque. La ville d'Angers devient la plus belle, plus que Rome, et le poète regrette d'avoir quitté sa patrie.
L'éloge concerne les amis français restés en France. Le recueil est d'ailleurs dédié à son ami Olivier de Magny, et peut se lire comme un long poème élégiaque qui lui est adressé.
Heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme celui-là qui conquit la Toison
Et puis s'en est retourné, plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Du Bellay
Les Regrets
1558