Sommaire
ILe genre du romanALe Nouveau RomanBUn retour vers la traditionIILa structure de l'œuvreALe titreBUn roman à deux voixIIILe désert : une parabole de la libertéDésert
Jean-Marie Gustave Le Clézio
1980
Le roman relate deux histoires parallèles. L'une se passe au début des années 1900 et l'autre à la fin du siècle. Le livre commence avec l'histoire des hommes bleus. Ce sont les ancêtres de Lalla. Nour raconte le voyage de son clan, en caravanes. L'autre histoire est celle de Lalla Hawa. Elle ne connaît pas sa mère qui est morte à sa naissance et vit au Maroc chez sa tante Amma. Elle va souvent se promener sur les dunes. Elle rencontre Hartani, un jeune berger muet, et va aussi voir Es Ser, à qui les dieux ont donné un corps bleu. Lalla va aussi souvent voir Naman, un pêcheur âgé qu'elle prend un peu pour un père. La jeune fille travaille pour apporter de l'argent à Amma. Sa tante cherche à lui faire épouser un riche mari, mais Lalla refuse. Elle va se réfugier chez Hartani.
La marche que fait Nour avec sa caravane est très longue. Plusieurs personnes meurent.
Lalla est enceinte, elle va à Marseille sur un bateau de la Croix-Rouge. Elle va vivre avec Amma qui est venue là avant elle. Elles habitent dans un quartier pauvre. Lalla se lie d'amitié avec Radicz, un jeune mendiant de quatorze ans. Elle est embauchée par un photographe comme mannequin. Avec l'argent, elle repart dans le désert, après la mort de Radicz.
Nour et les siens sont attaqués par des chrétiens. Nour est un des seuls survivants. Il va rejoindre des parents dans une ville voisine. Lalla, de retour au Maroc accouche de son enfant. À la fin du roman, elle tient l'enfant dans ses bras.
Le genre du roman
Le Nouveau Roman
L'expression "Nouveau Roman" vient d'Émile Henriot. Elle qualifie surtout les romans d'Alain Robbe-Grillet et de Nathalie Sarraute. Ils ont innové une nouvelle forme d'expression. Les auteurs refusent les catégories traditionnelles au genre romanesque. L'intrigue et le personnage ne sont plus au cœur de l'écriture.
Le Clézio a été influencé par ce mouvement. Il utilise souvent la technique de collage, travail sur la forme littéraire initiée par les écrivains du Nouveau Roman. Il s'intéresse particulièrement à cela dans son ouvrage Le Procès verbal, qui le rendit célèbre.
Un retour vers la tradition
Dans ce roman toutefois, Le Clézio semble revenir à des valeurs du roman traditionnel. Les personnages sont très caractérisés, et ils évoluent dans des cadres bien précis. L'auteur cherche à rendre son récit crédible, il y a un souci de réalité. Lalla est décrite physiquement, on connaît son histoire.
La construction du récit est aussi traditionnelle. L'évolution est chronologique. L'auteur place son personnage principal au cœur de l'histoire. Toutefois, il laisse aussi au lecteur le soin de deviner certaines choses, d'interroger le personnage.
La structure de l'œuvre
Le titre
Le titre de l'œuvre est très sobre, très bref. Le lecteur se demande de quel désert parle l'auteur. Est-ce le désert où évoluent les hommes bleus? Ou bien celui auquel Lalla aspire? Peut-être que ce titre évoque la solitude du personnage de Lalla, qui est toujours en errance. Peut-être est-ce le désert des villes modernes, qui sont décrites par l'auteur comme étant déshumanisées.
Le titre suggère un travail de réflexion de la part du lecteur, qui doit chercher à interpréter cette donnée. Est-ce un désert métaphorique, symbolique ? En ce sens, le roman de Le Clézio est teinté de mystère.
Un roman à deux voix
Si Lalla est le personnage central du récit, le roman est tout de même à deux voix. Les deux histoires s'entrecroisent, celle des hommes bleus et celle de Lalla, sans jamais se rencontrer puisqu'elles ne se déroulent pas à la même époque.
Typographiquement, l'auteur a choisi de différencier ces deux histoires. Ainsi, le récit des hommes bleus est présenté dans une colonne étroite sur la droite de la page. Cela rappelle les manuscrits antiques. Celui de Lalla est écrit en pleine page. L'espace blanc à côté du premier récit laisse une impression de vide. Peut-être celui du désert. Cette différence dans la typographie montre bien que les deux récits décrivent deux mondes différents.
Le désert : une parabole de la liberté
Le désert des touaregs s'oppose à la ville puisque l'homme y semble vraiment libre. La liberté humaine est aussi vaste que le désert et ne peut se satisfaire de la sensation d'étouffement de la ville. Le désert symbolise l'homme pur, l'homme primitif. C'est le monde d'avant la ville. C'est un endroit sans limite, un espace de légende. Il a quelque chose d'universel. C'est une parabole.
Le Clézio cherche à louer la nature, le simple. Il n'oublie pas de montrer la dure réalité du désert, mais celle-ci n'est pas aussi terrible que celle de la ville. L'errance des touaregs a un but, celui de la vie. Dans la ville, Lalla manque de mourir.
Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit. Ils étaient apparus, comme dans un rêve, en haut d’une dune, comme s’ils étaient nés du ciel sans nuages, et qu’ils avaient dans leurs membres la dureté de l’espace. Ils portaient avec eux la faim, la soif qui fait saigner les lèvres, le silence dur où luit le soleil, les nuits froides, les lueurs de la Voie lactée, la lune ; ils avaient avec eux leur ombre géante au coucher du soleil, les vagues de sable vierge que leurs orteils écartés touchaient, l’horizon inaccessible. Ils avaient surtout la lumière de leur regard, qui brillait si clairement dans la sclérotique de leurs yeux.
Le Clézio
Désert
1980