Sommaire
ILe roman policierIILe hêtreAUn arbre inquiétantBUn complice du crimeIIIEnquête et archéologie : un programme de lectureDebout les morts
Fred Vargas
2006
Un matin, la cantatrice Sophia Siméonidis découvre un arbre dans son jardin. C'est un hêtre, mais elle ignore ce qu'il fait là. Qui l'a planté et pourquoi ? Son mari Pierre ne s'intéresse pas à l'arbre. Mais Sophia a peur. Elle n'arrive plus à dormir. Elle demande à ses voisins, trois garçons un peu déjantés, s'ils veulent bien creuser sous l'arbre, juste pour voir. Quelques semaines plus tard, Sophia disparaît. On découvre au même moment un corps calciné. La police enquête, avec les voisins. L'apparition du hêtre se trouve au cœur de l'enquête.
Lex, la nièce de Sophia qui adore sa tante mais a tout à gagner à sa mort, apparaît. Il y a aussi le vieux Vandoosler, l'oncle de Marc le médiéviste, et surtout Juliette la propriétaire du "Tonneau" où Sophia mangeait tous les jeudis à midi, qui est aussi sa plus grande amie. D'autres meurtres suivent, avant qu'on découvre que la criminelle est Juliette. Son vrai nom est Nathalie Domesco. Elle avait été la doublure de Sophia et était très jalouse d'elle. Elle voulait percer mais n'y parvenait pas. Cela avait eu lieu quinze ans plus tôt. Elle avait alors tué deux critiques. Elle a changé de nom et Sophia ne l'a pas reconnue. Elle est devenue son amie pour mieux se venger.
Le roman policier
Le roman policier est un genre difficile à définir. Il mêle souvent les registres. On peut y voir une réflexion sur le mal. L'origine du polar serait dans l'Antiquité, avec Œdipe qui doit mener une enquête pour découvrir qui est l'assassin de son père (qui n'est autre que lui-même). Le roman policier devient populaire au milieu du XIXe siècle. À l'époque, la classe ouvrière est perçue comme une menace, et les bourgeois ont peur des assassins. La police prend alors de l'importance, et le genre policier naît véritablement.
Edgar Allan Poe va donner ses lettres de noblesse au genre. Plus tard, ce sont les enquêtes de Sherlock Holmes qui vont marquer les esprits.
En France, c'est le personnage de Rouletabille créé G. Leroux qui est emblématique, ainsi que Maigret, commissaire inventé par Simenon. Le roman noir américain va apporter un nouveau souffle au genre. L'énigme passe au second plan et les personnages et la société sont au cœur du récit.
Fred Vargas est une figure emblématique du polar français aujourd'hui.
Le hêtre
Un arbre inquiétant
L'arbre est l'élément le plus inquiétant du récit. Il est banal, pas très grand. Mais il est apparu du jour au lendemain. Ce qui est étrange, c'est cela. L'aspect normal de l'arbre, sa réalité banale, et son apparition. Quelque chose de familier apparaît du jour au lendemain, ce qui le rend très étrange.
Lorsque la cantatrice disparaît, l'arbre devient terrifiant, puisqu'il est associé à son enlèvement. L'auteure joue sur la façon dont quelque chose de familier peut faire frémir. L'arbre devient source d'angoisse. L’étrangeté du réel domine le roman. Les personnages sont persuadés que l'arbre et Sophia sont liés, mais ils ne savent pas comment.
Un complice du crime
Plusieurs passages font de l'arbre un suspect ou un complice du crime. Fred Vargas le personnifie et elle utilise le discours indirect libre quand Marc étudie l'arbre. Elle écrit : "On n'étrangle pas un arbre. Un arbre, ça ferme sa gueule, c'est muet, c'est pire qu'une carpe". L'arbre devient un complice du crime. Le personnage de Marc est persuadé qu'il a tout vu, qu'il sait quelque chose.
Le suspect interrogé devient donc l'arbre. L'auteure joue avec les codes du roman policier, elle s'amuse. Cela donne un aspect comique à la scène. L'arbre est un élément de suspense. On ignore comment il est apparu, pourquoi, à cause de qui. Il y a un secret autour de lui.
Enquête et archéologie : un programme de lecture
Fred Vargas a suivi une formation d'historienne et d'archéologue avant de devenir auteure de romans policiers. Elle utilise ici ses connaissances archéologiques. On trouve dans le roman un vocabulaire très technique : "limoneuse", "humus", "sédiment", "couches". L'archéologie rappelle une enquête. On plonge dans le passé, on gratte la surface, on tente de percer le secret. L'historien est un enquêteur, l'archéologue est un enquêteur.
Les personnages tentent à plusieurs reprises de creuser pour déraciner l'arbre. L'idée de "creuser" revient à plusieurs reprises. Enquêter, c'est creuser. Mais finalement, écrire, c'est creuser aussi. Et surtout, lire, c'est creuser. L'auteure s'amuse ici sur plusieurs niveaux. Elle parle d'une enquête policière, d'un travail d'archéologue ou d'historien, mais aussi de l'écriture et de la lecture. Bien lire, c'est voir sous la surface des choses, c'est aller au fond des choses.