Sommaire
IL'auteurIIUne histoire d'amourALe titreBLe genre pastoralIIINature et civilisationAUn idéalBLa corruption socialePaul et Virginie
Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre
1789
Paul et Virginie sont deux enfants qui vivent sur l'Île-de-France (aujourd'hui île Maurice). Ils sont élevés comme frère et sœur. Leurs mères sont deux françaises, Mme de la Tour, la jeune veuve d'un aristocrate libertin, et Marguerite, une paysanne bretonne séduite et abandonnée. Elles ont fui Paris pour éviter le déshonneur. Elles élèvent ensemble leurs deux enfants, avec l'aide d'esclaves. A l'adolescence, les jeunes gens développent des sentiments amoureux. Mais la tante de Madame de la Tour envoie des gardes chercher Virginie pour la ramener en France. Elle assure qu'elle héritera ainsi d'une fortune et recevra une bonne éducation. Virginie est alors envoyée à Paris. Plusieurs années après, Virginie annonce qu'elle va rentrer sur l'île. Mais le navire qui la conduit fait naufrage. Paul assiste à cette tragédie et meurt de chagrin.
L'auteur
Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre est né en 1737 dans une famille bourgeoise. Il aime les lectures mystiques et romanesques. En 1757, il entre aux Ponts et Chaussées, et voyage beaucoup pendant dix ans. Il change plusieurs fois de métier.
Il est l'ami de Jean-Jacques Rousseau. Il publie ses premiers écrits lorsqu'il rentre à Paris. Il ne connaît pas le succès tout de suite. Il écrit à la fin des années 1780 deux ouvrages qui lui font connaître la célébrité, Études de la nature et Paul et Virginie. C'est un auteur qui traite essentiellement du lien entre nature et civilisation. De son premier mariage, il a eu deux enfants qu'il a nommés Paul et Virginie. Il meurt en 1814.
Une histoire d'amour
Le titre
Paul est un prénom à connotation chrétienne, et Virginie symbolise la virginité, la jeune femme, la vestale. Ces deux prénoms sont donc très connotés. On peut lier ainsi le roman à la religion, mais aussi à la mythologie ou l'Antiquité. L'association de ces deux noms donne un sentiment de pureté.
En effet, dès le titre, on peut constater que l'innocence va être le sujet principal du roman. Les deux héros sont jeunes, naïfs, chastes. C'est leur amour et leur sacrifice qui va être raconté. Virginie ne pourra pas devenir femme, elle va rester vierge. On pressent donc la fin tragique, Paul et Virginie ne peuvent pas être ensemble.
Le genre pastoral
Paul et Virginie est un roman pastoral, un genre littéraire courant au XVIe siècle. Il met en scène des bergères et des bergers dans un décor idyllique où les paysages sont souvent mis en avant. Ce genre de roman se termine par l'union de deux jeunes gens. L'amour est au cœur du récit.
À partir du XVIIIe siècle toutefois, ces histoires prennent une tournure tragique. De plus, le décor n'est plus celui de la campagne, mais un univers exotique. Ici, c'est l'Ile-de-France, aujourd'hui appelée île Maurice. La nature est idéalisée, la végétation est partout. C'est une sorte d'Éden qui est créé, dans lequel les deux amoureux vont évoluer.
Nature et civilisation
Un idéal
L'auteur met en avant l'harmonie des êtres et de la nature. Les enfants grandissent dans un décor paradisiaque. Ils sont en symbiose avec ce qui les entoure. L'exotisme des paysages permet de souligner le mythe des enfants de la nature. La société dans laquelle ils évoluent semble parfaite, idéale. C'est un plaidoyer en faveur de la vie retirée loin de la ville.
Les sensations sont ainsi mises en avant, la vue, l'audition, l'odorat, le goût, le toucher... Il y a un lien très fort entre environnement et êtres. La nature est le lieu idéal, merveilleux.
La corruption sociale
Dans ce roman, l'auteur oppose ainsi les vertus de la vie champêtre à la corruption sociale. L'esclavage est dénoncé comme étant contre nature par exemple. À Paris, Virginie se sent mal. Elle n'adhère pas aux principes rigides de sa tante. Celle-ci est décrite comme manipulatrice et intéressée. Virginie n'aime pas l'hypocrisie de la société parisienne.
Lorsque l'héroïne veut rentrer, c'est la nature qui semble gagner, qui la rappelle. Mais lorsque le naufrage éclate, Virginie refuse de se déshabiller devant un marin qui veut la sauver, sous prétexte que cela est contre la morale. Elle n'avait pas tant de principes quand elle vivait sur l'île. Ce choix va la conduire à la mort.
On vit alors un objet digne d'une éternelle pitié : une jeune demoiselle parut dans la galerie de la poupe du Saint-Géran, tendant les bras vers celui qui faisait tant d'efforts pour la joindre. C'était Virginie. Elle avait reconnu son amant à son intrépidité. La vue de cette aimable personne, exposée à un si terrible danger, nous remplit de douleur et de désespoir. Pour Virginie, d'un port noble et assuré, elle nous faisait signe de la main, comme nous disant un éternel adieu. Tous les matelots s'étaient jetés à la mer. Il n'en restait plus qu'un sur le pont, qui était tout nu et nerveux comme Hercule. Il s'approcha de Virginie avec respect : nous le vîmes se jeter à ses genoux, et s'efforcer même de lui ôter ses habits ; mais elle, le repoussant avec dignité, détourna de lui sa vue. On entendit aussitôt ces cris redoublés des spectateurs : "Sauvez-la, sauvez-la ; ne la quittez pas !" Mais dans ce moment une montagne d'eau d'une effroyable grandeur s'engouffra entre l'île d'Ambre et la côte, et s'avança en rugissant vers le vaisseau, qu'elle menaçait de ses flancs noirs et de ses sommets écumants. A cette terrible vue le matelot s'élança seul à la mer ; et Virginie, voyant la mort inévitable, posa une main sur ses habits, l'autre sur son cœur, et levant en haut des yeux sereins, parut un ange qui prend son vol vers les cieux.
Bernardin de Saint-Pierre
Paul et Virginie
1789