Sommaire
IUn auteur romantiqueALa Bohème galanteBLa folieII"El Desdichado", un autoportraitALe manqueBLa crise de l'identitéIIIL'Homme et l'EnferAUne critique de l'HommeBLe mythe d'OrphéeLes Chimères
Gérard de Nerval
1854
Les Chimères forment un ensemble de douze sonnets : "El Desdichado", "Myrtho", "Horus", "Antéros", "Delfica", "Artémis", "Le Christ aux Oliviers" (cinq sonnets) et "Vers dorés". Le nombre douze semble avoir été choisi pour symboliser les douze tribus d'Israël ou du Nouveau Testament, mais également les douze Apôtres. Il s'agit d'une évocation biblique. On peut aussi mentionner les douze apôtres entourant Jésus.
Le langage est très intéressant et très étudié. Il y a beaucoup de jeux sur les mots, mais surtout le sens des poèmes échappe encore aujourd'hui aux critiques. Nerval a composé des poèmes mystérieux que l'on qualifie souvent de symboliques ou ésotériques. "El Desdichado" est biographique, puisque le poète fait allusion aux deux crises nerveuses qu'il a eues. "Delfica" s'inspire d'une rencontre avec une jeune Anglaise à Naples. Nerval s'inspire surtout d'alchimistes, d'illuministes ou de philosophes. Il y a beaucoup d'influences mystiques dans ses écrits. Il dédicace son ouvrage à Alexandre Dumas. Il revendique l'hermétisme de son travail. Il assure que son travail perdrait tout son charme s'il devait être expliqué.
Un auteur romantique
La Bohème galante
Les années 1830 marquent l'époque de la "Bohème galante" où Narval habite avec ses amis. L'influence est alors principalement celle des poètes romantiques. Le poète est alors écrivain-journaliste et pratique tous les genres littéraires. Il est lié avec Théophile Gautier et Alexandre Dumas. Il travaille un peu pour le théâtre avant de s'abandonner à autre chose.
Cette époque est marquée par les voyages et la révolution de 1848. Le jeune homme apprend diverses choses, découvre le monde. Ses expériences façonnent l'écrivain qu'il est en train devenir. Il développe une grande sensibilité.
La folie
En 1852, paraissent Les Illuminés, récits en prose. Nerval y analyse les mentalités humaines, et en particulier la folie qui, pour lui, caractérise les hommes. Il montre que ce qui est folie à un moment peut devenir sagesse à un autre. Il pense qu'on peut beaucoup apprendre de la folie.
Le recueil Les Chimères continue cette analyse. Les cinq premiers poèmes traitent de la folie. Nerval est sujet à des crises de folie lui-même, et il utilise donc son expérience personnelle pour nourrir sa création littéraire.
"El Desdichado", un autoportrait
Le manque
Le poème "El Desdichado" est souvent considéré comme étant un autoportrait de Nerval. Il y évoque principalement le malheur et le manque. Il se décrit comme inconsolé. La mélancolie marque le texte. Le titre même signifie "déshérité". Il traduit le manque.
C'est le manque de l'amour, manque d'une personne à aimer. Le malheur du poète est d'être seul. L'actrice qu'il aimait est morte. Maintenant, sa vie est vide. Nerval traite ainsi de l'amour malheureux. Sans amour, il n'y a plus de vie. C'est la mort qui domine le poème. Le poète reste en contact avec les morts. L'absence ne peut être comblée.
La crise de l'identité
Le poème traduit aussi une crise de l'identité, symbole de folie. Le poète mélange les pronoms, on ne sait plus qui est "je", qui est "tu". Il y a une multiplication des identités. Le poème est un long questionnement sur l'être. L'identité du poète est marquée par la perte, ce qui est contradiction avec le fait d'être. L'homme ne peut être lui-même car on lui a enlevé sa moitié, la femme aimée.
Nerval se décrit comme un "veuf", il n'est plus rien d'autre. Il mêle aussi des figures mythologiques à sa description. Il se compare ainsi à Orphée qui va chercher sa femme aux Enfers.
L'Homme et l'Enfer
Une critique de l'Homme
"Vers Dorés" est un poème où Nerval critique le mouvement humaniste et rationaliste. Il pense que mettre l'homme au centre de la réflexion est une mauvaise chose. Il ne faut pas oublier la présence du divin. Il veut que l'on reconnaisse toutes les manifestations de la vie, qui sont des preuves de l'existence du créateur.
Le poète condamne la vanité et la suffisance de l'Homme qui se croit au-dessus de tout. Il dénonce la façon dont il néglige son environnement. Il appelle à plus de modestie, et assure que la nature est supérieure à l'Homme. Il faut être plus reconnaissant envers Dieu et envers la nature.
Souvent dans l'être obscur habite un Dieu caché ;
Et comme un œil naissant couvert par ses paupières,
Un pur esprit s'accroît sous l'écorce des pierres !
Nerval
"Vers dorés", Les Chimères
1854
Le mythe d'Orphée
Nerval utilise à plusieurs reprises le mythe d'Orphée. L'homme va en enfer pour récupérer la femme aimée, mais il se retourne trop tôt en sortant et perd à jamais Eurydice. Nerval traite ce mythe en lui donnant une nouvelle connotation. Il devient Orphée, celui qui veut descendre récupérer celle qu'il aime. Il est en fait l'homme tenté par le suicide pour fuir la douleur du deuil.
Heureusement, comme Orphée qui a sa lyre, le poète a sa poésie. Elle peut lui permettre de recréer la femme aimée, de tout transformer. La poésie peut dépasser le deuil et la mélancolie, car elle permet de faire revivre.