Eugène Ionesco
1909 - 1994
Français
Théâtre
Eugène Ionesco
La Cantatrice chauve
1950
Eugène Ionesco
Les Chaises
1952
Eugène Ionesco
Rhinocéros
1958
Eugène Ionesco
Le Roi se meurt
1962
Eugène Ionesco
Macbett
1972
Eugène Ionesco naît à Slatima en Roumanie, d'un père avocat roumain et d'une mère française. Il vit en France jusqu'à ses treize ans, période où ses parents se séparent. Cela ne l'empêche pas de réussir ses études pour devenir professeur de français. Marié en Roumanie, lui et son épouse reviennent en France en raison de la montée du fascisme. Il commence par l'écriture de poèmes.
Il écrit d'abord La Cantatrice chauve qui ne remporte pas un réel succès car elle dérange le public. Ionesco a voulu retranscrire l'absurdité de l'apprentissage d'une langue vivante selon la méthode Assimil, que lui-même a essayée pour maîtriser l'anglais. Les Chaises ne remplit pas la salle non plus. Un couple de vieillards invite des amis mais ils se trouvent être des fantômes. Ionesco joue sur le fait que les fantômes sont à la fois présents et absents. En effet, ils ne peuvent pas parler malgré le fait que des acteurs les jouent sur scène. En dépit de leur présence physique, ils sont absents du discours théâtral. Ionesco, par ses écrits déroutants, réussit quand même à se faire un public qui apprécie la teneur absurde et le "non-sens" de ses pièces, les rendant comiques.
Rhinocéros, représenté à l'Odéon en 1960, fait naître la renommée du dramaturge. Il y dénonce le totalitarisme et la pièce remporte un grand succès quand elle est jouée en Allemagne car elle critique le nazisme. La pièce, en trois actes, donne vie à Jean et Béranger, deux personnages totalement opposés. L'un est autoritaire et froid, l'autre alcoolique et marginal. Un rhinocéros apparaît pendant leur discussion. Après l'apparition d'autres personnages, l'un se transforme en rhinocéros et la rhinocérite gagne du terrain dans la ville. Seul un homme ne sera pas contaminé.
La hantise de la mort est presque toujours présente dans l'œuvre de Ionesco. Dans Le Roi se meurt, le spectateur assiste comme à une cérémonie des diverses étapes qui marquent le passage de la vie à la mort. Béranger Ier parcourt tout le programme des pensées et des réactions qu'ont les hommes dans les derniers moments de leur vie : incrédulité, révolte, désespoir, résignation, oubli, impression que tout est anéantit. Sa deuxième épouse, Marie, la reine bien-aimée, essaie tant bien que mal de consoler Béranger. Mais il meurt et ne voit plus que cela. Ce qui est insupportable pour lui qui est roi. Il se comporte durant toute la pièce malgré tout comme un homme ordinaire. Le thème de la pièce, classique, donne à voir une intrigue personnelle, celle de Ionesco, dans sa tonalité pathétique. Elle invite à réfléchir sur les relations humaines, quand elle montre le Garde qui proclame les bulletins de santé et reste totalement indifférent, ou quand la première épouse du roi, Marguerite, conduit la "cérémonie" jusqu'à la mort effective du roi.
Reçu à l'Académie française, Ionesco s'intéresse essentiellement dans son théâtre à la question de l'existence humaine et à la banalité du quotidien. Il se fie à son vécu pour transcrire le plus fidèlement possible sa vision du monde. Une de ses dernières pièces est Macbett, qui reprend le Macbeth de Shakespeare en exagérant la répétition, donnant à cette pièce une tonalité à la fois comique et inquiétante.
À mesure qu'il enrichit son expérience du théâtre, Ionesco poursuit une réflexion sur l'art dramatique dans Notes et contre notes en 1962 et dans Découvertes en 1969. Dès La Cantatrice chauve, il déclare la guerre au théâtre de divertissement des années 1940 en parodiant les procédés de l'intrigue conventionnelle, la prétention à la logique et à la vraisemblance.
Il prête à ses personnages un langage automatique, absurde et saugrenu. Du même coup, il dénonce l'impossibilité de communiquer qui survient quand l'automatisme fait obstacle à la spontanéité et à la vérité des êtres. Le théâtre engagé véhicule des idéologies et apparaît comme un instrument néfaste qui tend à asservir les masses en leur donnant l'illusion de penser. Il s'élève également contre le mensonge du réalisme, qui condamne le théâtre à une psychologie superficielle et périmée. Des moyens d'investigation plus pénétrants, comme la psychanalyse, permettraient de sonder l'inconnu, en ouvrant la scène à la représentation politique de l'irrationnel, conçu par l'imagination, des cauchemars et des visions fantastiques.
Influencé par Jarry, Apollinaire et Artaud, Ionesco pense que le théâtre doit faire participer le spectateur. Pour ce faire, ses intrigues se montrent violentes ou inquiètent et ne craignent pas le scandale. Le théâtre doit toucher tous les sens, grâce aux ressources techniques modernes que sont les décors, l'éclairage et la musique : "tout est permis au théâtre". Ionesco mélange systématiquement les genres, alliant un registre noble à la farce grotesque du guignol, du music-hall ou du cirque. Il veut surprendre avec ses choix dans le langage et souhaite que les acteurs jouent "contre le texte". Les effets de rupture font rire en même temps qu'ils stimulent une réflexion.
Sombrant peu à peu dans la dépression, Ionesco se met à peindre. Il meurt à l'âge de quatre-vingt-quatre ans et est enterré à Montparnasse.
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