André Chénier
1762 - 1794
Français
Poésie
André Chénier
Élégies
1780
André Chénier
Amours
1780
André Chénier
"La Jeune Tarentine"
1802
André Chénier
Bucoliques
1819
André Chénier naît à Constantinople d'un père consul de France. Sa mère se vante d'être d'origine grecque, ce qui est sans doute faux mais peut expliquer son culte pour l'Antiquité grecque. Sa mère déménage à Paris avec ses enfants et André Chénier fait de brillantes études au collège de Navarre. Sa vocation poétique s'éveille tôt comme celle de son petit frère. Ils s'initient tous les deux à la littérature dans le salon de leur mère qui reçoit des poètes et des artistes. André Chénier lit et travaille avec passion et commence à écrire des élégies.
Chénier pratique le lyrisme élégiaque et son activité poétique peut se diviser en trois périodes. La première est consacrée aux élégies, où il chante ses amours, sa tristesse ou ses aspirations à l'indépendance, à la vie paisible et rustique. Il se montre supérieur à ses contemporains mais leur ressemble et leur emprunte des lieux communs. Il s'inspire aussi des élégiaques latins, même si ses poèmes portent surtout la marque de son siècle. Après un bref séjour dans l'armée, il voyage en Suisse et en Italie, mais ne peut réaliser le rêve de se rendre en Grèce.
Sa deuxième période montre son influence grecque. Ses goûts et ses lectures montrent son admiration pour ce lieu et cette période antique, notamment artistiquement comme David dans ses peintures. Cependant Chénier ne se contente pas d'imiter les Anciens et renouvelle la doctrine classique de l'imitation. Il empreinte à la Grèce l'harmonie de ses vers, transpose en français la musique des poètes de l'Antiquité, assouplit l'alexandrin et le rend apte à traduire des mouvements mélodiques très divers. Certains de ses poèmes sont même des chants, comme le présente Épître.
Ses Bucoliques montrent quant à elles de petits tableaux dans un ton qui devient parfois épique. Il compose ensuite de nouvelles bucoliques et d'autres élégies. La lecture d'épigrammes funéraires de l'anthologie grecque inspire une idylle à Chénier, "La Jeune Tarantine". C'est un petit tableau à la manière antique. L'originalité dans cette pièce est le détail de la facture et la sensibilité traduite par la musique des vers.
"Bacchus" montre l'auteur comme un ancêtre de l'art pour l'art. Le poème est court mais n'est pas destiné à exprimer des idées ou des sentiments. Le poète désire simplement communiquer aux lecteurs l'émotion esthétique qu'il éprouve, en prononçant les noms des dieux grecs et en évoquant les splendeurs exotiques du cortège de Bacchus. "L'Enlèvement d'Europe" montre que le poète a été séduit par la lecture d'Ovide. Il organise tout en tableaux que lui fournit la légende d'Europe. Dans le poème, un berger décrit à un étranger la scène d'une coupe de bronze comme une œuvre d'art.
Dans "Le Combat des Lapithes et des Centaures", le poète prend le ton épique pour évoquer Homère. Un aveugle inconnu charme par ses chants trois jeunes pasteurs de l'île de Syros. Les belles légendes de la mythologie grecque inspirent le vieil aède qui raconte ce fameux combat.
En 1787, André Chénier part pour Londres où il devient secrétaire d'ambassade. Son séjour ne lui est pas agréable car il le vit comme un véritable exil. Il écrit pour se consoler l'"Invention" qui expose sa doctrine. Le poète écrit une épigraphe, "audendum est", que l'on traduit par "il faut oser". Il ose donc renoncer à l'imitation servile qui risque de gâcher la sincérité de son inspiration. Son imitation ne consiste pas à répéter ce que disent les Anciens mais à exprimer en vers, en suivant leur exemple, les idées, les sentiments et les mœurs de son temps. La poésie telle qu'il la conçoit est donc à la fois moderne et antique.
Deux épopées s'ensuivent, Hermès et Amérique. L'"Invention" doit servir de préface à ses deux épopées, restés à l'état d'ébauche. Chénier rêve d'être le Lucrèce des temps modernes. En ce qui concerne les thèmes, Hermès devait être un épopée de la nature, de l'homme et des sociétés, Amérique devait relater les découvertes du Nouveau Monde, en peignant le continent et les mœurs de ses populations.
De retour en France trois années plus tard, Chénier participe au mouvement révolutionnaire qui satisfait son amour de la liberté. Il célèbre dans une ode le serment du Jeu de Paume puis collabore à la défense de Louis XVI. Devenu suspect après l'exécution du roi, il se retire à Versailles et écrit en compagnie de Fanny qui lui inspire des odes. Revenu à Paris, Chénier est arrêté puis incarcéré à Saint-Lazare. Il écrit en prison La Jeune captive et des Lambes où il attaque la tyrannie jacobine. Il fait passer à son père les manuscrits dans un paquet de linges. La Jeune captive est un poème inspiré d'une de ses compagnes de captivité, la duchesse de Fleury. Plus heureuse que lui, elle échappe à la guillotine. Le poète joint aux accents plaintifs de l'élégie le lyrisme de l'ode. Le poème devient ainsi une ode à la vie et à l'espoir.
Condamné à mort comme "ennemi du peuple", Chénier est guillotiné deux jours avant la chute de Robespierre. Il meurt à trente-et-un ans en laissant malgré tout une œuvre considérable qui marque un renouveau poétique comparable à celui de La Pléiade. Il réhabilite l'inspiration avant les romantiques, à une époque où l'on considère la poésie comme une technique, un jeu ou un exercice formel.
Son lyrisme inspire Alfred de Vigny, Victor Hugo et Musset. Les parnassiens lui rendent hommage et voient en lui un précurseur. Il ne publie presque rien de son vivant.
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