On compare le texte suivant extrait de la fable "La Jeune Veuve" de La Fontaine (Texte A) et sa source, "La Femme qui pleurait son mari mourant et son père qui la consolait" d'Abstémius (Texte B). Comment La Fontaine a-t-il réécrit la fable ? Justifier la réponse.
TEXTE A :
La perte d'un Époux ne va point sans soupirs,
On fait beaucoup de bruit, et puis on se console.
Sur les ailes du Temps la Tristesse s'envole ;
Le Temps ramène les plaisirs.
Entre la Veuve d'une année
Et la Veuve d'une journée
La différence est grande : on ne croirait jamais
Que ce fût la même personne :
L'une fait fuir les gens, et l'autre a mille attraits.
Aux soupirs vrais ou faux celle-là s'abandonne ;
C'est toujours même note et pareil entretien :
On dit qu'on est inconsolable ;
On le dit, mais il n'en est rien,
Comme on verra par cette fable,
Ou plutôt par la vérité.
L'Époux d'une jeune Beauté
Partait pour l'autre monde. À ses côtés, sa Femme
Lui criait : Attends-moi, je te suis ; et mon âme,
Aussi bien que la tienne, est prête à s'envoler.
Le Mari fait seul le voyage.
La Belle avait un Père, homme prudent et sage :
Il laissa le torrent couler.
À la fin, pour la consoler,
Ma fille, luit dit-il, c'est trop verser de larmes :
Qu'a besoin le Défunt que vous noyiez vos charmes ?
Puisqu'il est des vivants, ne songez plus aux morts.
Je ne dis pas que tout à l'heure
Une condition meilleure
Change en des noces ces transports ;
Mais après certain temps souffrez qu'on vous propose
Un époux beau, bien fait, jeune, et tout autre chose
Que le Défunt. Ah ! dit-elle aussitôt,
Un cloître est l'époux qu'il me faut.
Le père lui laissa digérer sa disgrâce.
Un mois de la sorte se passe.
L'autre mois, on l'emploie à changer tous les jours
Quelque chose à l'habit, au linge, à la coiffure.
Le deuil enfin sert de parure,
En attendant d'autres atours.
Toute la bande des Amours
Revient au colombier ; les Jeux, les Ris, la Danse,
Ont aussi leur tour à la fin :
On se plonge soir et matin
Dans la fontaine de Jouvence.
Le père ne craint plus ce défunt tant chéri ;
Mais comment il ne parlait de rien à notre Belle :
Où donc est le jeune mari
Que vous m'avez promis ? dit-elle.
TEXTE B :
Une femme encore jeune, dont le mari rendait l'âme était consolée par son père. Il lui disait : "Ne t'afflige pas outre mesure, ma fille. En effet, je t'ai trouvé un autre mari beaucoup plus beau que celui-ci et qui adoucira facilement le regret du premier."
La jeune femme, de son côté, incapable de supporter sa douleur, et comme si, dans son ardent amour, elle allait accompagner son mari, non seulement n'acceptait pas les propos de son père, mais blâmait cette allusion à un autre mari. Cependant, dès qu'elle vit son mari mort, elle demanda si le jeune homme était là, qu'il avait dit vouloir lui donner comme mari.
On compare le texte suivant extrait de la fable "Le Loup et le Chien" de La Fontaine (Texte A) et sa source, "Le Loup et le Chien" d'Ésope (Texte B). Comment La Fontaine a-t-il réécrit la fable ? Justifier la réponse.
TEXTE A :
Un Loup n'avait que les os et la peau ;
Tant les Chiens faisaient bonne garde.
Ce Loup rencontre un Dogue aussi puissant que beau,
Gras, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde.
L'attaquer, le mettre en quartiers,
Sire Loup l'eût fait volontiers.
Mais il fallait livrer bataille
Et le Mâtin était de taille
À se défendre hardiment.
Le Loup donc l'aborde humblement,
Entre en propos, et lui fait compliment
Sur son embonpoint, qu'il admire.
Il ne tiendra qu'à vous, beau sire,
D'être aussi gras que moi, lui repartit le Chien.
Quittez les bois, vous ferez bien :
Vos pareils y sont misérables,
Cancres, haires, et pauvres diables,
Dont la condition est de mourir de faim.
Car quoi ? Rien d'assuré, point de franche lippée.
Tout à la pointe de l'épée.
Suivez-moi ; vous aurez un bien meilleur destin.
Le Loup reprit : Que me faudra-t-il faire ?
Presque rien, dit le Chien : donner la chasse aux gens
Portants bâtons, et mendiants ;
Flatter ceux du logis, à son maître complaire ;
Moyennant quoi votre salaire
Sera force reliefs de toutes les façons :
Os de poulets, os de pigeons,
Sans parler de mainte caresse.
Le loup déjà se forge une félicité
Qui le fait pleurer de tendresse.
Chemin faisant il vit le col du Chien, pelé :
Qu'est-ce là ? lui dit-il. Rien. Quoi ? rien ? Peu de chose.
Mais encor ? Le collier dont je suis attaché
De ce que vous voyez est peut-être la cause.
Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas
Où vous voulez ? Pas toujours, mais qu'importe ?
Il importe si bien, que de tous vos repas
Je ne veux en aucune sorte,
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.
Cela dit, maître Loup s'enfuit, et court encor.
TEXTE B :
Combien la liberté est douce, c'est ce que je vais dire en peu de mots. Un chien bien nourri se trouva par hasard sur le chemin d'un loup d'une maigreur extrême. Ils se saluent et s'arrêtent.
- D'où te vient, dis-moi, ce poil brillant ?
- Que manges-tu pour avoir un tel embonpoint ? Moi qui suis bien plus fort que toi, je meurs de faim.
Le chien, franchement, répond :
- Cette condition t'appartient si tu peux rendre au maître les mêmes services que moi.
- Lesquels ? dit l'autre.
- Garder la porte, défendre, même la nuit, la maison contre les voleurs.
- Eh bien, je suis prêt. Maintenant j'ai à supporter la neige, les pluies violentes ; dans les forêts je traîne une vie rude. Combien il me serait plus facile de vivre sous un toit et sans rien faire, de me rassasier largement.
- Alors, viens avec moi.
Chemin faisant, le loup voit le cou du chien que la chaîne avait pelé.
- D'où vient cela, ami ?
- Ce n'est rien.
- Mais encore, dis !
- Comme on me trouve un peu vif, on m'attache de jour, pour que je dorme le matin et que je veille, la nuit venue. Vers le soir on me délie et je puis errer où bon il me semble. Sans que je demande, on m'apporte du pain ; le maître me donne des os de sa table ; ses gens me jettent des morceaux et du ragoût quand personne n'en veut plus. Ainsi sans rien faire, je remplis mon ventre.
- Bien, mais si tu veux t'en aller quelque part, le peux-tu ?
- Pas tout à fait.
- Alors, jouis de ce sort si vanté, Ô chien. Je ne voudrais pas d'un royaume, s'il doit m'en coûter la liberté.
On compare le texte suivant extrait de la fable "Le Loup et l'Agneau" de La Fontaine (Texte A) et sa source, "Le Loup et l'Agneau" de Phèdre (Texte B). Comment La Fontaine a-t-il réécrit la fable ? Justifier la réponse.
TEXTE A :
La raison du plus fort est toujours la meilleure :
Nous l'allons montrer tout à l'heure.
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun, qui cherchait aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
Sire, répond l'Agneau, que Votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle ;
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau ; je tette encor ma mère
Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
Je n'en ai point. C'est donc quelqu'un des tiens :
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos Bergers et vos Chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge."
Là-dessus, au fond des forêts
Le loup l'emporte et puis le mange,
Sans autre forme de procès.
TEXTE B :
Au même ruisseau étaient venus le loup et l'agneau, pressés par la soif. Le loup se tenait en-dessus et l'agneau beaucoup plus bas. Alors, poussé par son insatiable voracité, le brigand prit un prétexte pour lui chercher querelle.
- Pourquoi, dit-il, as-tu troublé l'eau pendant que je buvais ?
L'agneau, tremblant, lui répondit :
- Comment pourrais-je, dis-moi, faire ce dont tu te plains, ô loup ? C'est de toi que descend vers mes lèvres l'eau que je bois.
L'autre, vaincu par la force de la vérité :
- Il y a six mois, dit-il, tu as médit de moi.
L'agneau reprit :
- Moi ? Je n'étais pas né !
- Eh bien, c'est ton père, dit le loup, qui a médit de moi.
Et là-dessus, il le saisit, le déchire, lui inflige une mort injuste.
On compare le texte suivant de la fable "Le Chêne et le Roseau" de La Fontaine (Texte A) et sa source extraite de la fable "Le Roseau et l'Olivier" d'Ésope (Texte B). Comment La Fontaine a-t-il réécrit la fable ? Justifier la réponse.
TEXTE A :
Le Chêne un jour dit au roseau :
Vous avez bien sujet d'accuser la Nature ;
Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
Le moindre vent qui d'aventure
Fait rider la face de l'eau,
Vous oblige à baisser la tête :
Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d'arrêter les rayons du soleil,
Brave l'effort de la tempête.
Tout vous est aquilon ; tout me semble zéphir.
Encor si vous naissiez à l'abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage,
Vous n'auriez pas tant à souffrir :
Je vous défendrais de l'orage ;
Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La Nature envers vous me semble bien injuste.
Votre compassion, lui répondit l'Arbuste ,
Part d'un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu'à vous redoutables.
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu'ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos ;
Mais attendons la fin. Comme il disait ces mots,
Du bout de l'horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût porté jusque-là dans ses flancs.
L'Arbre tient bon ; le Roseau plie.
Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu'il déracine
Celui de qui la tête au ciel était voisine,
Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts.
TEXTE B :
Le roseau et l'olivier se querellaient au sujet de leur résistance, de leur force et de la tranquillité de leur vie. Comme l'olivier invectivait le roseau, lui reprochant d'être faible et de céder facilement à tous les vents, celui-ci resta sans mot dire. Il n'attendit pas longtemps. Un vent violent ayant soufflé, le roseau qui était secoué et ployait sous la tempête, se tira d'affaire facilement. L'olivier, au contraire, qui s'était raidi contre le vent, fut brisé brutalement. Cette fable signifie que ceux qui ne résistent pas aux circonstances et aux puissants sont dans une condition meilleure que ceux qui entrent en lutte contre les forts.
On compare le texte suivant extrait de la fable "La Cigale et la Fourmi" de La Fontaine (Texte A) et sa source extraite de "La Cigale et les Fourmis" d'Ésope (Texte B). Comment La Fontaine a-t-il réécrit la fable ? Justifier la réponse.
TEXTE A :
La Cigale, ayant chanté
Tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu'à la saison nouvelle.
Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l'août, foi d'animal,
Intérêt et principal.
La Fourmi n'est pas prêteuse ;
C'est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
Vous chantiez ? j'en suis fort aise :
Et bien ! dansez maintenant.
TEXTE B :
Pendant l'hiver, leur blé étant humide, les fourmis le faisaient sécher. La cigale, mourant de faim, leur demandait de la nourriture. Les fourmis lui répondirent : "Pourquoi en été n'amassais-tu pas de quoi manger ? - Je n'étais pas inactive, dit celle-ci, mais je chantais mélodieusement". Les fourmis se mirent à rire.
"Eh bien, si en été tu chantais, maintenant que c'est l'hiver, danse."