On donne la scène suivante extraite de la pièce L'Île des esclaves de Marivaux :
CLÉANTHIS :
Vous souvenez-vous d'un soir où vous étiez avec ce cavalier si bien fait ? J'étais dans la chambre ; vous vous entreteniez bas ; mais j'ai l'oreille fine : vous vouliez lui plaire sans faire semblant de rien ; vous parliez d'une femme qu'il voyait souvent. "Cette femme-là est aimable, disiez-vous : elle a les yeux petits, mais très doux." ; et là-dessus, vous ouvriez les vôtres, vous vous donniez des tons, des gestes de tête, de petites contorsions, des vivacités. Je riais. Vous réussîtes pourtant, le cavalier s'y prit; il vous offrit son cœur. "À moi ? lui dîtes-vous. - Oui, Madame, à vous-même, à tout ce qu'il y a de plus aimable au monde. - Continuez, folâtre, continuez", dîtes-vous, en ôtant vos gants sous prétexte de m'en demander d'autres. Mais vous avez la main belle ; il la vit, il la prit, il la baisa ; cela anima sa déclaration : et c'était là les gants que vous demandiez. Eh bien ! Y suis-je ?
TRIVELIN (à Euphrosine) :
En vérité, elle a raison.
CLÉANTHIS :
Écoutez, écoutez, voici le plus plaisant. Un jour qu'elle pouvait m'entendre, et qu'elle croyait que je ne m'en doutais pas, je parlais d'elle, et je dis : "Oh ! pour cela il faut l'avouer, Madame est une des plus belles femmes du monde." Que de bontés, pendant huit jours, ce petit mot-là ne me valut-il pas ! J'essayai en pareille occasion de dire que Madame était une femme très raisonnable : oh ! je n'eus rien, cela ne prit point ; et c'était bien fait, car je la flattais.
EUPHROSINE :
Monsieur, je ne resterai point, ou l'on me fera rester par force ; je ne puis en souffrir davantage.
TRIVELIN :
En voilà donc assez pour à présent.
CLÉANTHIS :
J'allais parler des vapeurs de mignardises auxquelles Madame est sujette à la moindre odeur. Elle ne sait pas qu'un jour je mis à son insu des fleurs dans la ruelle de son lit pour voir ce qu'il en serait. J'attendais une vapeur, elle est encore à venir. Le lendemain, en compagnie, une rose parut, crac, la vapeur arrive.
Que représentent les deux personnages ?
Quel personnage domine et au moyen de quels arguments ?
Quel est l'enjeu de la scène ?