Dans chacun des extraits suivants, quels sont les procédés utilisés par l'auteur pour traduire la situation conflictuelle ?
LORENZO :
Je suis très fort sur l'histoire romaine. Il y avait une fois un jeune gentilhomme nommé Tarquin le fils.
CATHERINE :
Ah ! c'est une histoire de sang.
LORENZO :
Pas du tout ; c'est un conte de fées. Brutus était un fou, un monomane, et rien de plus. Tarquin était un duc plein de sagesse, qui allait voir en pantoufles si les petites filles dormaient.
CATHERINE :
Dites-vous aussi du mal de Lucrèce ?
LORENZO :
Elle s'est donné le plaisir du péché et la gloire du trépas. Elle s'est laissé prendre toute vive comme une alouette au piège, et puis elle s'est fourré bien gentiment son petit couteau dans le ventre.
MARIE :
Si vous méprisez les femmes, pourquoi affectez-vous de les rabaisser devant votre mère et votre sœur ?
LORENZO :
Je vous estime, vous et elle. Hors de là, le monde me fait horreur.
(Alfred de Musset, Lorenzaccio)
VALÈRE :
C'est donc ainsi qu'on aime ? Et c'était tromperie
Quand vous...
MARIANE :
Ne parlons point de cela, je vous prie.
Vous m'avez dit tout franc que je dois accepter
Celui que pour époux on me veut présenter :
Et je déclare, moi, que je prétends le faire,
Puisque vous m'en donnez le conseil salutaire.
VALÈRE :
Ne vous excusez point sur mes intentions.
Vous aviez pris déjà vos résolutions ;
Et vous vous saisissez d'un prétexte frivole
Pour vous autoriser à manquer de parole.
MARIANE :
Il est vrai, c'est bien dit.
VALÈRE :
Sans doute ; et votre cœur
N'a jamais eu pour moi de véritable ardeur.
MARIANE :
Hélas ! permis à vous d'avoir cette pensée.
VALÈRE :
Oui, oui, permis à moi ; mais mon âme offensée
Vous préviendra peut-être en un pareil dessein ;
Et je sais où porter et mes vœux et ma main.
(Molière, Tartuffe)
PÈRE UBU :
Merdre !
MÈRE UBU :
Oh ! voilà du joli, Père Ubu, vous êtes un fort grand voyou.
PÈRE UBU :
Que ne vous assom'je, Mère Ubu !
MÈRE UBU :
Ce n'est pas moi, Père Ubu, c'est un autre qu'il faudrait assassiner.
PÈRE UBU :
De par ma chandelle verte, je ne comprends pas.
MÈRE UBU :
Comment, Père Ubu, vous estes content de votre sort ?
PÈRE UBU :
De par ma chandelle verte, merdre, madame, certes oui, je suis content. On le serait à moins : capitaine de dragons, officier de confiance du roi Venceslas, décoré de l'ordre de l'Aigle Rouge de Pologne et ancien roi d'Aragon, que voulez-vous de mieux ?
MÈRE UBU :
Comment ! après avoir été roi d'Aragon vous vous contentez de mener aux revues une cinquantaine d'estafiers armés de coupe-choux, quand vous pourriez faire succéder sur votre fiole la couronne de Pologne à celle d'Aragon ?
PÈRE UBU :
Ah ! Mère Ubu, je ne comprends rien de ce que tu dis.
MÈRE UBU :
Tu es si bête !
(Alfred Jarry, Ubu roi)
TRISSOTIN :
Vos vers ont des beautés que n'ont point tous les autres.
VADIUS :
Les grâces et Vénus règnent dans tous les vôtres.
TRISSOTIN :
Vous avez le tour libre, et le beau choix des mots.
VADIUS :
On voit partout chez vous l'ithos et le pathos.
TRISSOTIN :
Nous avons vu de vous des églogues d'un style
Qui passe en doux attraits Théocrite et Virgile.
VADIUS :
Vos odes ont un air noble, galant et doux,
Qui laisse de bien loin votre Horace après vous.
TRISSOTIN :
Est-il rien d'amoureux comme vos chansonnettes ?
VADIUS :
Peut-on voir rien d'égal aux sonnets que vous faites ?
TRISSOTIN :
Rien qui soit plus charmant que vos petits rondeaux ?
VADIUS :
Rien de si plein d'esprit que tous vos madrigaux ?
TRISSOTIN :
Aux ballades surtout vous êtes admirable.
VADIUS :
Et dans les bouts-rimés je vous trouve adorable.
TRISSOTIN :
Si la France pouvait connaître votre prix.
VADIUS :
Si le siècle rendait justice aux beaux esprits.
TRISSOTIN :
En carrosse doré vous iriez par les rues.
(Molière, Les Femmes savantes)
AGNÈS :
Pourquoi me criez-vous ?
ARNOLPHE :
J'ai grand tort en effet.
AGNÈS :
Je n'entends point de mal dans tout ce que j'ai fait.
ARNOLPHE :
Suivre un galant n'est pas une action infâme ?
AGNÈS :
C'est un homme qui dit qu'il me veut pour sa femme ;
J'ai suivi vos leçons, et vous m'avez prêché
Qu'il se faut marier pour ôter le péché.
ARNOLPHE :
Oui, mais pour femme moi je prétendais vous prendre,
Et je vous l'avais fait, me semble, assez entendre.
AGNÈS :
Oui, mais à vous parler franchement entre nous,
Il est plus pour cela, selon mon goût, que vous ;
Chez vous le mariage est fâcheux et pénible,
Et vos discours en font une image terrible :
Mais las ! il le fait lui si rempli de plaisirs,
Que de se marier il donne des désirs.
ARNOLPHE :
Ah, c'est que vous l'aimez, traîtresse.
AGNÈS:
Oui je l'aime.
(Molière, L'École des femmes)