Déterminer si les textes suivants visent principalement à persuader, convaincre ou délibérer.
La liberté de la presse, c'est la raison de tous cherchant à guider le pouvoir dans les voies de la justice et de la vérité. (Sensations diverses). Favorisez, messieurs, favorisez cette grande liberté, ne lui faites pas obstacle ; songez que le jour où, après trente années de développement intellectuel et d'initiative par la pensée, on verrait ce principe sacré, ce principe lumineux, la liberté de la presse, s'amoindrir au milieu de nous, ce serait en France, ce serait en Europe, ce serait dans la civilisation tout entière l'effet d'un flambeau qui s'éteint ! (Sensation).
Victor Hugo, « Discours sur la liberté de la presse à l'Assemblée constituante », 11 septembre 1848
Boris hésite à rejoindre la Résistance en Angleterre pour poursuivre le combat, car il craint de faire souffrir sa fiancée en l'abandonnant.
Boris se laissa retomber sur son lit. Il pensait : « Je ne peux pas lui faire ça, je ne peux pas m'en aller pour la deuxième fois sans lui demander son avis. Si je restais pour elle, pensa-t-il, ça serait une preuve d'amour. […] A-t-on le droit de rester pour rendre une femme heureuse ? Présenté comme ça, je penserais plutôt que non. Mais a-t-on le droit de partir, si ça fait le malheur de quelqu'un ? »
Jean-Paul Sartre, La Mort dans l'âme, 1949
Je soutiens que le roman de Madame Bovary, envisagé au point de vue philosophique, n'est point moral. Sans doute Madame Bovary meurt empoisonnée ; elle a beaucoup souffert, c'est vrai ; mais elle meurt à son heure et à son jour, mais elle meurt, non parce qu'elle est adultère, mais parce qu'elle l'a voulu ; elle meurt dans tout le prestige de sa jeunesse et de sa beauté ; elle meurt après avoir eu deux amants, laissant un mari qui l'aime, qui l'adore, qui trouvera le portrait de Rodolphe, qui trouvera ses lettres et celles de Léon, qui lira les lettres d'une femme deux fois adultère, et qui, après cela, l'aimera encore davantage au-delà du tombeau. Qui peut condamner cette femme dans le livre ? Personne. Telle est la conclusion. Il n'y a pas dans le livre un personnage qui puisse la condamner. [...] Donc, si dans tout le livre, il n'y a pas un personnage qui puisse lui faire courber la tête, s'il n'y a pas une idée, une ligne en vertu de laquelle l'adultère soit flétri, c'est moi qui ai raison, le livre est immoral !
Ernest Pinard, « Réquisitoire demandant la condamnation de Madame Bovary », 1857
Celui qui vous maîtrise tant, n'a que deux yeux, n'a que deux mains, n'a qu'un corps, et n'a autre chose que ce qu'a le moindre homme du grand nombre infini de vos villes ; sinon qu'il a plus que vous tous c'est l'avantage que vous lui faites, pour vous détruire. D'où il a pris tant d'yeux, dont vous épie-t-il, si vous ne les lui donnez ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s'il ne les prend de vous ? Les pieds dont il foule vos cités, d'où les a-t-il, s'ils ne sont les vôtres ? Comment a-t-il aucun pouvoir sur vous, que par vous autres mêmes ? [...] Vous semez vos fruits, afin qu'il en fasse le dégât. Vous meublez et remplissez vos maisons pour fournir à ses voleries, vous nourrissez vos filles, afin qu'il ait de quoi saouler sa luxure ; vous nourrissez vos enfants, afin qu'il les mène pour le mieux qu'il leur fasse, en ses guerres [...]. Vous vous affaiblissez, afin de le faire plus fort et roide, à vous tenir plus courte la bride ; et de tant d'indignités, que les bêtes mêmes, ou ne sentiraient point, ou n'endureraient point, vous pouvez vous en délivrer, si vous essayez, non pas de vous en délivrer, mais seulement de le vouloir faire. Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres.
Étienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire, 1576