Sommaire
ILes origines du lyrisme : le mythe d'OrphéeIILa poésie au Moyen ÂgeIIILa poésie au XVIe siècleIVLa poésie au XVIIe siècleVLa poésie au XVIIIe siècleLes origines du lyrisme : le mythe d'Orphée
Dans les Métamorphoses (Ier siècle ap. J.-C.), Ovide raconte qu'Orphée, après la mort de son épouse, descend aux Enfers pour tenter de la récupérer. Là, il parvient à amadouer le chien Cerbère, gardien des Enfers, et Hadès lui-même, dieu des Enfers, en chantant ses poèmes, accompagné de sa lyre. Hadès lui accorde de ramener son épouse parmi les vivants. Mais, alors qu'il s'apprête à sortir des Enfers, Orphée se retourne pour voir son épouse. Contrevenant ainsi aux ordres d'Hadès qui lui avait interdit de chercher à la voir avant de sortir du royaume des morts, Orphée la perd à jamais. Depuis lors, il pleure la mort de sa bien-aimée, entouré de bêtes et d'arbres émus par ses chants.
Les poètes français s'inspirent principalement des poètes latins Horace, Ovide, Catulle, Virgile et Lucrèce, qui composent pour certains des poèmes didactiques et philosophiques, et pour d'autres plutôt des poèmes d'inspiration lyrique et élégiaque.
La poésie au Moyen Âge
Au Moyen Âge, l'amour courtois est un thème important en poésie, le lyrisme prime. De nouvelles formes, comme la ballade ou le rondeau, apparaissent. Christine de Pisan, Charles d'Orléans ou encore François Villon sont des poètes importants de cette période.
Au Moyen Âge, les textes sont composés par des clercs généralement anonymes. Ce n'est qu'à partir du XIIe siècle qu'apparaît la figure de l'auteur, qui signe ses œuvres, sans pour autant s'en estimer propriétaire.
À partir du XIe siècle se développe une conception particulièrement raffinée des rapports amoureux entre l'amant et sa dame : l'amour courtois, ou fin'amor. L'amant offre ses services et sa dévotion à la dame de son cœur. Il chante ses louanges et cherche à se perfectionner pour elle.
Le développement de l'amour courtois s'accompagne dès le XIe siècle d'une poésie lyrique destinée à louer la femme aimée, exalter le sentiment amoureux et exprimer le désespoir de l'amant. Les troubadours et trouvères, poètes musiciens, composent et interprètent cette poésie courtoise. Leurs compositions sont souvent nommées canso (« chanson »). Elles sont chantées et accompagnées généralement d'un instrument de musique.
Cette poésie lyrique, très musicale, donne naissance à partir du XIIIe siècle aux formes fixes de la ballade et du rondeau, dont les noms soulignent le lien avec la musique et la danse. Si ces formes ne se consacrent plus nécessairement à l'expression de l'amour courtois, elles conservent toutefois un caractère lyrique et expriment souvent la mélancolie.
- Christine de Pisan (1364-1431) compose des ballades amoureuses dans lesquelles elle dit son désespoir d'être abandonnée par l'objet de son cœur.
- Charles d'Orléans (1391-1465), qui passe une grande partie de sa vie en prison, écrit des poèmes à forme fixe (rondeaux et ballades) à la fois musicaux et mélancoliques.
S'éloignant de la poésie lyrique, une veine poétique tournée vers la satire et le burlesque se développe. Le poète, tel Rutebeuf au XIIIe siècle, se met lui-même en scène dans des situations cocasses, évoque sa misère, réclame les faveurs du roi ou d'un protecteur, souvent avec humour.
La poésie au XVIe siècle
Le XVIe siècle est marqué par des idées humanistes nouvelles et par la Renaissance. La langue française devient la langue officielle du royaume de France. Ces changements sont visibles en poésie. On observe un renouvellement des formes poétiques avec Clément Marot et l'école lyonnaise. Cela se confirme avec les poètes de la Pléiade comme Joachim Du Bellay et Pierre de Ronsard.
Les guerres d'Italie (1499-1512 puis 1515-1525) permettent aux Français de découvrir les arts et les lettres de cette nation, entrée depuis la fin du XIIIe siècle dans la Renaissance. Les idées nouvelles, le raffinement poétique et le perfectionnement des arts venus d'Italie se diffusent rapidement en France.
Roi éclairé, François Ier joue un rôle majeur dans la naissance de l'humanisme français. Il est le protecteur des arts et des lettres. Il reçoit à la cour de nombreux artistes italiens, favorise et protège certains poètes et artistes français, écrit lui-même, ainsi que sa sœur, Marguerite de Navarre.
François Ier, dans un souci d'unification du royaume, édicte l'ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539. Celle-ci établit la langue française comme langue officielle du royaume. Langue désormais administrative, le français devient également au fil du siècle une langue littéraire et poétique à part entière.
Clément Marot est un poète important au XVIe siècle. Héritier des « grands rhétoriqueurs » de la fin du XVe siècle, qui cultivaient l'art du raffinement et de la complexité poétiques à l'extrême, Clément Marot s'en distingue néanmoins par une poésie plus simple, une veine volontiers satirique, et surtout un renouvellement des formes poétiques. Il emprunte en effet à l'Antiquité la forme de l'épigramme, importe la forme italienne du sonnet, invente le blason à l'occasion d'un concours poétique qui rencontre un grand succès. Poète officiel du roi François Ier, il écrit pour un public de cour, lettré et raffiné.
L'Adolescence clémentine (1532) réunit toutes les œuvres poétiques composées par Marot durant sa jeunesse. D'une grande diversité, tant formelle que thématique, ce recueil place Marot au premier rang des poètes français, illustrant à la fois sa virtuosité et son inventivité.
La ville de Lyon, carrefour commercial et culturel important sur la route de l'Italie, devient un foyer artistique et poétique majeur au XVIe siècle. Des cercles de poètes s'y constituent : Maurice Scève et Louise Labé en font partie. Ils développent une poésie raffinée, inspirée des poètes italiens mais également de Clément Marot.
Maurice Scève publie en 1544 Délie, recueil inspiré par l'amour impossible que le poète voue à l'une de ses jeunes élèves. S'y dessinent une image de la femme idéale et une peinture de la mélancolie amoureuse.
Au milieu du XVIe siècle, à Paris, de jeunes nobles amoureux des belles lettres se regroupent et se donnent le nom de « Pléiade », en référence à un groupe de sept poètes d'Alexandrie et à la constellation de la Pléiade. Du Bellay et Ronsard sont les plus connus de ces poètes, qui apportent un profond renouvellement à la poésie française.
Du Bellay met en forme leurs idées communes dans Défense et illustration de la langue française (1549) :
- imitation des œuvres des Anciens en imprimant sa sensibilité personnelle ;
- enrichissement de la langue par néologismes et par dérivations du grec ou du latin ;
- exaltation de la mission du poète inspiré des dieux qui allie travail et inspiration pour accéder à l'immortalité ;
- renouveau des formes poétiques et rejet des genres médiévaux, auxquels ils préfèrent les genres antiques (ode, épopée) et le sonnet, venu d'Italie.
Les poètes de la Pléiade s'inspirent de la poésie antique mais aussi de la poésie de la Renaissance italienne, en particulier du Canzoniere de Pétrarque (XIVe siècle), recueil lyrique et amoureux dans lequel le poète chante les louanges de sa bien-aimée Laure, figure féminine idéalisée.
Les poètes de la Pléiade privilégient l'alexandrin au décasyllabe et à l'octosyllabe utilisés au Moyen Âge et établissent des règles de versification telles que la règle d'alternance des rimes féminines et masculines.
- Joachim Du Bellay est l'auteur de Défense et illustration de la langue française, que l'on considère comme le manifeste de la Pléiade. Il met en pratique les principes qu'il y édicte dans son premier recueil poétique, L'Olive (1549-1550), composé de sonnets inspirés de Pétrarque. Son voyage à Rome lui inspire Les Antiquités de Rome (1558) et Les Regrets (1558), recueils dans lesquels il exprime sa déception devant les vestiges antiques, son regret de la terre natale, et fait la satire des courtisans du Vatican.
- Surnommé « prince des poètes », Pierre de Ronsard s'inspire de la poésie antique à laquelle il emprunte des formes telles que l'ode, et de la poésie de Pétrarque. Sa poésie amoureuse est également teintée d'une influence épicurienne, illustrée par le thème du carpe diem (formule latine du poète Horace, signifiant : « Cueille le jour ») fréquent dans ses poèmes.
Les Amours (1552), Continuation des amours (1555) et Nouvelle continuation des amours (1556) sont composés de sonnets lyriques inspirés de Pétrarque et dédiés par Ronsard à ses muses : Cassandre, Marie, Hélène, qui sont à la fois des femmes réelles et des figures idéalisées.
La poésie au XVIIe siècle
La poésie du XVIIe siècle stabilise les formes poétiques inventées ou adoptées au XVIe siècle ainsi que les règles formelles établies par les poètes de la Pléiade. Deux mouvements poétiques s'affirment : le baroque et le classicisme.
La période baroque est marquée par un foisonnement poétique. Les poètes, très nombreux, revendiquent une inspiration libre et diverse :
- poésie engagée (à la suite des guerres de religion) : d'Aubigné ;
- poésie religieuse et philosophique : Malherbe, Chassignet ;
- poésie lyrique : Théophile de Viau, Saint-Amant, Tristan L'Hermite ;
- poésie burlesque : Scarron.
Les classiques écrivent très souvent en vers, y compris au théâtre, mais la poésie tend à décliner. Le classicisme, qui exalte la raison, est peu enclin au lyrisme, à l'inspiration et à l'imagination poétiques. La forme versifiée est principalement mise au service des genres didactiques, tels que les fables de La Fontaine, qui tiennent à la fois de la poésie, du récit et de l'argumentation.
Les règles de versification, appliquées depuis plus d'un siècle pour certaines d'entre elles, sont formulées par Boileau dans son Art poétique (1674) et ainsi fixées pour longtemps. Celui-ci compose également des poèmes, notamment des satires, dans lesquelles il brosse un portrait des ridicules humains.
La poésie au XVIIIe siècle
Dans le prolongement du classicisme, le siècle des Lumières est peu enclin au lyrisme poétique, et si les auteurs de cette époque écrivent beaucoup en vers, la poésie en tant que telle, peu propice à la diffusion des idées, connaît une crise incontestable.
Toutefois, Voltaire, qui s'exerce à des genres multiples, demeure un grand poète. Son long poème Le Mondain (1736) et plus tard le Poème sur le désastre de Lisbonne (1756) en témoignent.
À la fin du siècle, une figure isolée, celle d'André Chénier, annonce la résurrection de la poésie lyrique. Inspiré par l'Antiquité, il compose des bucoliques et des élégies. Emprisonné pendant la Terreur, il écrit « La Jeune Captive » (1794), qui exalte la liberté et exprime la peur de la mort avec des accents déjà très romantiques. Guillotiné en 1794, Chénier devient une figure de martyr. Sa poésie, découverte en 1819, enthousiasme les romantiques.