Sommaire
ILa construction européenneALes étapes de la construction européenneBLes institutions et les modalités de décision au sein de l'Union européenne1Le Conseil européen et le triangle institutionnel2Les modalités d'adoption des politiques de l'Union européenneCLe marché unique et la zone euro1Le marché unique2La zone euro et le marché des capitaux libreIILes politiques européennes et leur rôle sur l'économieALe partage des compétencesBLa politique de la libre concurrence1Les objectifs de la politique de la libre concurrence2Les modalités de la politique de la libre concurrence3Les limites de la politique de la libre concurrenceCLa politique budgétaire et monétaire de l'Union européenne1La politique budgétaire2La politique monétaireIIILes contraintes budgétaires et les difficultés de coordinationAL'encadrement budgétaire des pays membres et ses conséquencesBLes défauts de coordination et les chocs asymétriquesDepuis les traités de Rome, en 1957, les pays de l'Union européenne ont mis en place des institutions décisionnelles (triangle institutionnel, banque centrale). Elles cherchent à coordonner les politiques nationales des États membres à travers des politiques communes (politiques sectorielles, de la concurrence, monétaire). Les États déterminent leur budget et leurs politiques nationales dans le cadre de ces traités. Les règles européennes (normes, équilibre budgétaire, redistribution) encadrent les politiques des États membres et soulèvent aujourd'hui des difficultés nouvelles de coordination et d'autonomie.
La construction européenne
L'Union européenne est une construction économique et politique progressive initiée en 1957. En 2020, elle regroupe 27 États membres. Elle repose sur des institutions qui permettent des politiques communes. Dans le domaine économique, la construction européenne met en place le marché unique et la zone euro.
Les étapes de la construction européenne
La construction européenne est née d'un projet de paix entre les pays européens. Elle s'élabore progressivement à travers de grands traités (Rome, Maastricht, Lisbonne). Elle s'est élargie des 6 pays fondateurs aux 27 États membres d'aujourd'hui.
Les pères fondateurs de l'Europe unie comme Jean Monnet, Alcide De Gasperi ou Konrad Adenauer élaborent un projet de paix dans le contexte de l'après Seconde Guerre mondiale. Il pose les bases d'une union économique puis politique entre les pays européens.
La construction européenne a été progressive. Elle repose sur :
- la création d'un marché unique et d'une zone euro : Communauté économique du charbon et de l'acier (CECA) en 1951, Communauté économique européenne (CEE) en 1957, Union économique et monétaire (UEM) en 1992 ;
- l'élargissement depuis les 6 membres fondateurs jusqu'aux 27 membres actuels ;
- des grands traités (Rome en 1957, Maastricht en 1992, Lisbonne en 2007), qui ont permis de mettre en place des institutions politiques et des politiques économiques communes.
Les étapes de la construction européenne
Les institutions et les modalités de décision au sein de l'Union européenne
Les institutions européennes (Conseil européen, Conseil de l'Union européenne, Parlement européen, Commission européenne) sont mises en place progressivement par les principaux traités. Elles reposent sur le principe électoral et de codécision et permettent la mise en place de politiques économiques communes.
Le Conseil européen et le triangle institutionnel
Le Conseil européen et le « triangle institutionnel » (Conseil de l'Union européenne, Parlement européen et Commission européenne) élaborent les politiques économiques sectorielles européennes.
Le Conseil européen réunit les chefs d'État ou de gouvernement et le président de la Commission européenne. Réuni quatre fois par an, il fixe les grandes orientations économiques de l'Union européenne et les politiques sectorielles à mener (énergétiques, agricoles, industrielles).
Le Conseil de l'Union européenne (ou Conseil des ministres) représente les États membres et réunit les ministres des différents gouvernements par domaine d'activité. Il partage le pouvoir législatif avec le Parlement européen.
Le Parlement européen est composé de 705 députés européens, élus au suffrage universel direct tous les 5 ans. Il vote les directives européennes proposées par la Commission européenne et supervise le budget nécessaire à leur application.
La Commission européenne est l'organe exécutif de l'Union européenne. Elle est composée de 27 commissaires européens dont une présidente et un haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Cette commission représente et promeut l'intérêt général de l'Union européenne au niveau mondial. Elle propose de nouvelles législations au Parlement européen et au Conseil de l'Union européenne. Elle veille au respect de la législation de l'Union européenne par les États membres.
Il ne faut pas confondre le Conseil européen, qui réunit les présidents des États membres et décide des grandes orientations, et le Conseil de l'Union européenne, qui partage le pouvoir législatif avec le Parlement européen.
D'autres institutions complètent le dispositif institutionnel :
- la Cour de justice européenne qui règle les différends juridiques entre les États membres ;
- la Cour des comptes qui contrôle la gestion financière de l'Union européenne ;
- la Banque centrale européenne (BCE), chargée de superviser la politique monétaire de la zone.
Les modalités d'adoption des politiques de l'Union européenne
L'adoption des politiques économiques de l'Union européenne résulte des décisions votées au sein des institutions européennes. Celles-ci reposent à la fois sur le principe électoral (vote à la majorité simple ou à la majorité qualifiée) et sur le principe de codécision (Conseil et Parlement). Le rôle des groupes d'intérêt (lobbies) est également important et fait l'objet d'une réglementation.
Les politiques mises en place par l'Union européenne et le budget permettant de les appliquer sont proposés par la Commission au Parlement qui les amende (vote à la majorité absolue). Il les transmet au Conseil de l'Union européenne qui les vote à son tour (à la majorité simple ou qualifiée selon les textes). Depuis le traité de Lisbonne, à l'exception de procédure spéciale (politique étrangère de l'Union européenne, accords bilatéraux), le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen sont sur un pied d'égalité. En effet, un refus du Parlement ou du Conseil peut stopper la procédure (selon le principe de codécision).
Dans de nombreux domaines, le Conseil de l'Union européenne vote à la majorité qualifiée. Pour être adoptée, une mesure doit obtenir les voix de 55 % des États membres, représentant au moins 65 % de la population de l'Union européenne. Chaque État a un pourcentage de voix proportionnel à son poids démographique (par exemple, la France représente 14,98 % des voix).
Principe de codécision
Le principe de codécision rend nécessaire l'accord du Conseil de l'Union européenne et du parlement pour adopter un texte législatif européen.
Les institutions européennes, notamment le Parlement, sont également soumises à l'action des groupes d'intérêt (les lobbies). Ces groupes d'acteurs cherchent à influencer les décisions politiques et institutionnelles à leur avantage ou celui de leurs clients. Leur action est réglementée. Plus de 11 000 organisations sont déclarées légalement comme « représentantes d'intérêts » auprès des institutions européennes.
En 2020, Google emploie près de 15 lobbyistes pour défendre ou représenter ses intérêts dans les discussions européennes.
Le marché unique et la zone euro
Dans le domaine économique, les deux grandes réalisations de la construction européenne sont la mise en place du marché unique et l'instauration d'une zone euro avec une monnaie unique et un marché des capitaux libre.
Le marché unique
Le marché unique européen est mis en place en 1992. Il instaure la libre circulation des biens, des marchandises et des êtres humains au sein des pays membres de l'Union européenne. Il a pour but de favoriser la croissance et l'efficacité économique.
Le marché unique européen est issu d'une construction progressive :
- en 1951, la CECA, mise en place entre les 6 pays membres crée un marché commun de l'acier et du charbon ;
- en 1957, la CEE établit des règles douanières communes (le Tarif extérieur commun) ;
- en 1992, le marché unique européen permet la libre circulation des marchandises, des capitaux et des êtres humains à l'intérieur de l'Union européenne.
La libéralisation des échanges (suppression des droits de douane intérieurs et tarif extérieur commun) doit :
- inciter les économies nationales à se spécialiser en fonction de leur avantage comparatif ;
- permettre une meilleure allocation des facteurs de production vers les secteurs les plus productifs au sein de l'Union européenne.
L'accroissement de la taille des marchés doit :
- permettre des économies d'échelle (réduction des coûts de production) ;
- accroître les débouchés des entreprises (augmentation de la production).
La libre concurrence entre les entreprises, liée à la libéralisation des échanges, doit :
- faire baisser les prix des biens et services ;
- créer des gains pour les consommateurs en augmentant la diversité des produits.
Le marché européen constitue aujourd'hui un espace économique considérable (plus de 500 millions de personnes et 2e PIB mondial à l'échelle de l'Union européenne). Il joue un rôle-clé dans la structure des échanges des principaux pays membres dont l'interdépendance s'est accrue.
Ainsi, en 2018 les échanges intra-zone représentaient 39 % du PIB de l'Union européenne. La France, l'Allemagne ou l'Italie sont les premiers partenaires à l'importation comme à l'exportation.
La zone euro et le marché des capitaux libre
En 1992, les pays membres adoptent le principe d'une Union économique et monétaire (UEM). Elle vise à compléter le marché unique par l'adoption d'une monnaie commune (l'euro), en 2002, et l'instauration d'un marché des capitaux libre.
L'adoption de la libre circulation des marchandises rendait nécessaire à la fois une monnaie unique et un marché des capitaux commun pour assurer les échanges et les investissements dans l'Union européenne. Le marché des capitaux est alors ouvert : les banques peuvent intervenir dans l'ensemble des pays de l'UEM et un marché interbancaire européen se forme.
Dans le même temps, l'UEM définit des critères de convergence qui permettent aux États d'adopter l'euro :
- déficit inférieur à 3 % du PIB ;
- dette publique inférieure à 60 % du PIB ;
- inflation faible et monnaie stable.
En 2002, l'euro est officiellement adopté par 12 États. Les pièces et des billets sont mis en circulation. Les billets sont imprimés et mis en circulation par la Banque centrale européenne (BCE) ; les pièces restent fabriquées par les trésors publics des États.
En 2020, la zone euro comprend 19 pays.
La Banque centrale européenne est chargée de superviser la politique monétaire de la zone. Elle assure sa stabilité :
- en jouant le rôle de prêteur en dernier ressort ;
- en encadrant la création monétaire des banques commerciales par son taux directeur.
Les politiques européennes et leur rôle sur l'économie
Les politiques européennes sont établies selon un partage de compétences entre l'Union européenne et les États membres. La politique de la concurrence a pour objectif d'assurer une meilleure efficacité économique mais se heurte à certaines limites. La politique budgétaire finance les politiques sectorielles et contribue à celles partagées avec les États membres. Elle a pour but de favoriser la croissance. La politique monétaire est menée par la BCE de manière indépendante des États. Elle a pour objectif de stabiliser le marché monétaire et l'économie.
Le partage des compétences
Au sein de l'Union européenne, la gouvernance se fait à plusieurs niveaux. Les décisions doivent être prises au niveau qui est le mieux à même de les prendre : c'est le principe de subsidiarité. Un partage des compétences est défini entre l'Union européenne et les États. Le droit européen est constitué de directives (qui incitent) et de règlements (qui imposent).
Le traité de Maastricht (1992) :
- définit les politiques communes ;
- met en place une gouvernance multi-niveaux ;
- organise le partage des compétences entre les institutions européennes et les États.
Selon le principe de subsidiarité, les décisions doivent être prises au niveau qui est le mieux à même de les prendre. Certaines compétences relèvent exclusivement de l'Union européenne, d'autres sont partagées, d'autres demeurent l'apanage des États.
La politique étrangère de sécurité commune exige une coordination de tous les États.
Le partage des compétences définit :
- les compétences exclusives de l'Union européenne (l'union douanière, la politique commerciale et extérieure commune, la politique monétaire) ;
- les compétences partagées entre l'Union européenne et les États (politiques sociales, d'aménagement du territoire, de transport, sur l'agriculture et la pêche) ;
- les compétences exclusives des États (politiques d'éducation, de fiscalité, de sécurité intérieure, de culture, coordination des politiques économiques et de l'emploi).
L'Union européenne élabore le droit européen qui s'impose à tous les pays membres. Il comprend :
- les directives : incitations, dont l'objectif est souvent une harmonisation ;
- les règlements : actes juridiques qui s'imposent aux États membres.
L'harmonisation des diplômes européens à travers le cycle LMD (licence-master-doctorat) correspond à une directive européenne sur l'éducation.
La politique de la libre concurrence
La politique de libre concurrence est établie par la Commission européenne. Elle constitue l'un des éléments fondamentaux de la construction européenne. Ses orientations s'imposent à tous les États membres. Son objectif est d'assurer un bon fonctionnement du marché et une plus grande efficacité économique. Elle s'applique à deux niveaux : les entreprises et les États. Elle se heurte à deux principales limites : elle peut affaiblir certains pays moins compétitifs et avoir des conséquences négatives sur l'emploi.
Les objectifs de la politique de la libre concurrence
La politique de la libre concurrence doit permettre des gains de productivité et des gains pour les consommateurs.
- des gains de productivité : pour être compétitives, les entreprises doivent innover, améliorer leurs coûts de production ou la qualité et la diversité des produits ;
- des gains pour les consommateurs : la plus grande compétitivité des entreprises doit améliorer la qualité ou la diversité des productions et diminuer leur prix.
Les modalités de la politique de la libre concurrence
La politique de la concurrence européenne comporte deux volets : l'un s'applique aux entreprises, l'autre aux États. Au niveau européen, la Commission veille à ce que les règles de libre concurrence soient bien appliquées.
Le premier volet de la politique de la libre concurrence s'applique aux entreprises : la Commission européenne interdit les ententes entre entreprises sur les prix ou les quantités. Elle contrôle les concentrations d'entreprises sur un marché afin d'éviter une situation qui pourrait mener à un abus de position dominante et à des monopoles. Pour cela, elle sanctionne les accords illicites et les abus de position dominante par des amendes.
En 2016, l'Union européenne a condamné plusieurs groupes industriels fabriquant des camions (le cartel des camions) à une amende de 2,9 milliards d'euros pour entente illégale sur les prix de vente.
Le second volet de cette politique s'applique aux États : la Commission contrôle ou interdit les aides ou subventions versées aux entreprises. Par ailleurs, l'Union européenne incite les États à ouvrir à la concurrence leurs services publics afin d'étendre la concurrence sur les marchés nationaux.
Les pays membres ont engagé une politique de privatisation des secteurs de l'énergie (GDF-Suez devenu Engie en France) et des transports pour répondre aux directives européennes.
L'autorité de la concurrence est l'organisme qui veille, dans chaque pays, au respect des principes de la libre concurrence sur le marché. Au niveau européen, c'est la Commission qui veille à l'application directe des règles européennes de concurrence. Ces règles sont définies dans les articles 101 et 109 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), en collaboration avec les autorités nationales.
Les limites de la politique de la libre concurrence
La politique de la libre concurrence de l'Union européenne se heurte à deux principales limites : elle peut affaiblir certains pays moins compétitifs et avoir des conséquences négatives sur l'emploi.
La politique de la libre concurrence peut favoriser les inégalités de dotation, de compétitivité entre les pays ou certains secteurs. Cela a pour effet d'accroître les difficultés de certains pays et de diminuer la croissance économique globale de la zone.
La politique de la libre concurrence peut également avoir des conséquences négatives sur l'emploi européen en engendrant des délocalisations ou du dumping social.
L'ouverture à la concurrence du secteur du lait en France a mis en difficulté cette agro-industrie-clé pour les exploitants agricoles des régions de Normandie et de Bretagne.
La politique budgétaire et monétaire de l'Union européenne
Le budget de l'Union européenne lui permet de financer ses politiques sectorielles et de contribuer à celles partagées avec les États membres. L'objectif est de favoriser la croissance et le développement territorial. Le budget est voté par le Parlement. La politique monétaire est menée par la Banque centrale européenne, indépendamment des États. Elle intervient pour stabiliser le marché monétaire et l'économie.
La politique budgétaire
L'Union européenne dispose d'un budget qui lui permet de financer les politiques sectorielles de ses domaines d'intervention et de contribuer à celles partagées avec les États membres. Les sources de ce budget sont multiples.
Il existe une dizaine de domaines de politiques sectorielles européennes. Elles concernent principalement :
- la cohésion économique des différents territoires européens ;
- la construction de la Politique agricole commune (PAC) ;
- la recherche et l'innovation ;
- les politiques éducatives et de formation ;
- la protection de l'environnement ;
- les réseaux de transports.
La PAC (Politique agricole commune) est l'une des grandes politiques européennes. Elle a permis d'instaurer des aides aux agriculteurs et des rachats de production pour soutenir la concurrence mondiale.
Ces politiques menées par l'Union européenne jouent un rôle-clé dans le développement territorial et la croissance économique des pays membres en contribuant à l'activité économique conjoncturelle (emploi, production, subventions).
Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T), mis en place à travers la politique européenne de financement des infrastructures, a subventionné de nombreuses autoroutes en Espagne ou en Italie du Sud. Cela a permis de créer de l'emploi et induisant un accroissement du commerce.
Pour mettre en place ces politiques, l'Union européenne dispose d'un budget qui est constitué par les contributions relatives de chaque État membre. Ce budget est voté et contrôlé par le Parlement par périodes de 6 ans. Pour la période 2014-2020, il atteint environ 908 milliards d'euros soit environ 1 % du PIB global des États membres.
Les principales sources du budget sont :
- La contribution forfaitaire des États membres : elle est fixée à 0,73 % du revenu national brut des pays et représente environ 65 % des ressources de l'Union européenne.
- Le reversement d'une partie de la TVA prélevée par les États membres de l'Union européenne est fixé à 0,3 % de celle-ci.
- Les droits de douane perçus notamment aux frontières extérieures de l'Union européenne.
- Certaines taxes et certains droits (sur les produits subventionnés par la PAC, par exemple).
La politique monétaire
La politique monétaire de la zone euro est menée par la Banque centrale européenne (BCE). La BCE intervient pour stabiliser le marché monétaire et l'économie. Elle supervise et contrôle les grandes banques européennes.
La mise en place de la monnaie unique a rendu impossibles les politiques monétaires au niveau national. Les États européens de la zone euro ont abandonné leur souveraineté monétaire au profit de la BCE car c'est elle qui maîtrise l'offre de monnaie (la production des euros).
La BCE fixe le taux d'intérêt directeur : celui-ci permet aux banques commerciales de se refinancer et sert en théorie d'indicateur pour les taux d'intérêt pratiqués par les banques. Ainsi, lorsque la BCE l'augmente, les crédits bancaires sont plus chers et l'offre de monnaie se rétracte, l'inflation diminue. Lorsque la BCE le diminue, les crédits bancaires sont moins chers, l'offre de monnaie et l'inflation augmentent.
La BCE influence les taux de change de l'euro face aux autres monnaies, en produisant plus de monnaie ou en modifiant ses taux directeurs. Cela peut accroître la compétitivité des exportations ou au contraire des importations.
Lorsque l'euro se déprécie, le taux de change diminue. Face au dollar, les exportations européennes sont plus compétitives aux États-Unis, les importations américaines plus chères. Inversement, lorsque l'euro s'apprécie, le taux de change augmente, les exportations européennes sont moins compétitives aux États-Unis.
En achetant les dettes des États ou des banques (quantitative easing), la BCE peut permettre aux États de relancer leur investissement et aux banques de relancer leur crédit.
En 2011 est survenue la crise des dettes souveraines : la charge de la dette des États a suscité l'inquiétude des banques qui avaient prêté. Mario Draghi, alors président de la BCE, a lancé des rachats massifs d'obligations gouvernementales afin d'apporter des liquidités sur ce marché pour éviter une situation d'illiquidité critique.
Par ailleurs, la BCE supervise et contrôle les grandes banques européennes qui doivent avoir une partie de leur réserve en dépôts sur leurs comptes à la BCE. La BCE joue donc un rôle de prêteur en dernier ressort lors des crises financières.
Les contraintes budgétaires et les difficultés de coordination
En intégrant l'Union européenne, les États membres acceptent de se soumettre aux règles qui la gouvernent, et notamment d'adapter leurs politiques publiques aux orientations européennes. Les contraintes budgétaires imposées par le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) limitent les dépenses et les investissements des États. Il existe des problèmes de coordination et des chocs asymétriques qui contribuent à limiter le rôle de zone monétaire optimale de la zone euro.
L'encadrement budgétaire des pays membres et ses conséquences
L'adoption de la monnaie unique s'est accompagnée de mesures encadrant la liberté budgétaire des États : le Pacte de stabilité et de croissance (PSC). Ces mesures influencent la politique conjoncturelle des États.
La politique budgétaire est du ressort de chaque pays membre mais elle est contrainte par les traités européens, avec la mise en place du Pacte de stabilité et de croissance. Son objectif est de favoriser la croissance économique par le libre marché et de mettre fin aux crises de surendettement des dettes souveraines. Cependant, il réduit la capacité de relance économique et d'investissement des États les plus faibles économiquement.
Le déficit doit être limité à 3 % du PIB. Le blocage du déficit budgétaire (lorsque les dépenses d'une année sont supérieures aux revenus) entraîne une réduction des capacités de l'État à fournir des services publics. En effet, les dépenses sont croissantes de façon structurelle (augmentation de la population et donc du coût des services publics) alors que les revenus de l'État ont tendance à diminuer avec les politiques européennes (les privatisations, la concurrence internationale, l'abandon des taxes et des douanes).
La dette doit être limitée à 60 % du PIB. Les États ne peuvent emprunter sur les marchés des capitaux qu'en respectant cette limite. Dans le cas où elle serait atteinte, ils ne peuvent plus financer de futurs investissements.
L'inflation doit être maintenue à un faible niveau. Cela contraint à la fois les prix et les salaires et provoque une faible croissance.
Les critères du PSC sont donc contraignants pour les politiques conjoncturelles des États membres qui doivent limiter leurs dépenses et donc leurs investissements à la base de leurs politiques économiques nationales.
En 2011, l'économie grecque connaît une crise importante, le chômage est fort et la croissance faible. La dette de la Grèce atteint 135 % du PIB et son déficit atteint 13 % du PIB. Le PSC empêchant toute autre solution (emprunt, politique de relance), l'État grec est contraint par les institutions européennes à réduire ses dépenses sociales (éducation, santé) de façon catastrophique.
Les défauts de coordination et les chocs asymétriques
Les caractéristiques propres de l'intégration européenne conduisent à des problèmes de coordination et d'asymétrie de choc qui contribuent à limiter son rôle de zone monétaire optimale. Des économistes réfléchissent à des solutions.
Les caractéristiques de l'intégration européenne mettent en lumière des problèmes de coordination. Les directives européennes imposent une harmonisation des modes de production et d'échange et une libre concurrence. Cela favorise la compétition à l'intérieur de l'espace européen. Dans le même temps, il n'existe pas de politique fiscale commune sur le travail et le capital. La faible mobilité des facteurs entraîne donc des phénomènes de dumping fiscal et social qui peuvent amplifier le chômage et les crises dans les régions les moins compétitives.
L'intégration européenne engendre d'importants flux de travailleurs quittant leur région en crise, comme les espaces agricoles de Pologne ou de Roumanie, touchés par la concurrence de l'agro-industrie allemande.
De plus, les structures économiques sont différentes entre les pays (économie agricole ou industrielle, importatrice ou exportatrice). Ces différences rendent chaque politique commune complexe car elle peut favoriser un pays par rapport à un autre. C'est ce que l'on appelle des chocs asymétriques. C'est le cas par exemple de la politique monétaire qui est nécessairement commune à tous les pays de la zone mais dont les conséquences sont différentes selon les pays.
La France importe beaucoup. Elle nécessiterait donc d'un euro fort par rapport au dollar alors que l'Allemagne, au contraire, exporte beaucoup et nécessiterait en théorie une politique monétaire opposée.
Face à ces difficultés, de nombreux économistes comme Robert Mundell mettent en avant la nécessité de transformation des institutions européennes pour permettre à l'Union européenne de fonctionner comme une zone monétaire optimale. Ils réfléchissent à des mécanismes de différenciation entre des groupes de pays. Ils envisagent également un renforcement des dispositifs de redistribution comme le Fonds social européen (FSE). Son rôle est de réduire les inégalités entre régions par transfert fiscal (subventions des pays riches vers les moins riches). Cependant, ces mécanismes nécessiteraient une hausse du budget européen et un nouvel équilibre de pouvoir au sein de l'Union européenne.
Zone monétaire optimale (ZMO)
Une zone monétaire optimale (ZMO) est une région géographique dans laquelle il serait bénéfique d'établir une monnaie unique lorsque certains critères sont réunis (fiscalité commune, circulation des facteurs de production).