Pour chacun des textes descriptifs suivants, identifier le temps qui domine.
« Cela se passait en plein hiver et les flocons de neige tombaient du ciel comme un duvet léger. Une reine était assise à sa fenêtre encadrée de bois d'ébène et cousait. Tout en tirant l'aiguille, elle regardait voler les blancs flocons. Elle se piqua au doigt et trois gouttes de sang tombèrent sur la neige. Ce rouge sur ce blanc faisait si bel effet qu'elle se dit : "Si seulement j'avais un enfant aussi blanc que la neige, aussi rose que le sang, aussi noir que le bois de ma fenêtre !" Peu de temps après, une fille lui naquit ; elle était blanche comme neige, rose comme sang et ses cheveux étaient noirs comme de l'ébène. On l'appela Blanche-Neige. Mais la reine mourut en lui donnant le jour. »
Jacob et Wilhelm Grimm, « Blanche-Neige », Contes de l'enfance et du foyer, 1812
« Ce sont des heures d'une insouciance admirable. Au-dessus de nous, le ciel bleu. À l'horizon, sont suspendus des ballons captifs, de couleur jaune, traversés de lumineux rayons, ainsi que les petits nuages blancs des shrapnells. Parfois, lorsqu'ils poursuivent un aviateur, ils se déploient en une haute gerbe. [...]
Et tout autour de nous s'étend la prairie en fleurs. Les tendres pointes de l'herbe se balancent ; des papillons blancs s'approchent en voletant ; ils planent dans le vent chaud et moelleux de l'été arrivé à sa maturité ; quant à nous, nous lisons des lettres et des journaux, nous fumons, nous ôtons nos calots et nous les posons à terre à côté de nous ; la brise joue avec nos cheveux ; elle joue avec nos paroles et nos pensées. »
Erich Maria Remarque, À l'Ouest, rien de nouveau, © Le Livre de poche, 1929
« Il était une fois un mari et sa femme qui avaient depuis longtemps désiré avoir un enfant, quand enfin la femme fut dans l'espérance et pensa que le bon dieu avait bien voulu accomplir son vœu le plus cher. Sur le derrière de leur maison, ils avaient une petite fenêtre qui donnait sur un magnifique jardin où poussaient les plantes et les fleurs les plus belles ; mais il était entouré d'un haut mur, et nul n'osait s'aventurer à l'intérieur parce qu'il appartenait à une sorcière douée d'un grand pouvoir et que tout le monde craignait. Un jour donc que la femme se tenait à cette fenêtre et admirait le jardin en dessous, elle vit un parterre planté de superbes raiponces avec des rosettes de feuilles si vertes et si luisantes, si fraîches et si appétissantes, que l'eau lui en vint à la bouche et qu'elle rêva d'en manger une bonne salade. Cette envie qu'elle en avait ne faisait que croître et grandir de jour en jour ; mais comme elle savait aussi qu'elle ne pourrait pas en avoir, elle tomba en mélancolie et commença à dépérir, maigrissant et pâlissant toujours plus. »
Jacob et Wilhelm Grimm, « Raiponce », Contes de l'enfance et du foyer, 1812
« La session judiciaire qui commence après la Saint-Michel vient de s'ouvrir, et le lord chancelier siège dans la grande salle de Lincoln's Inn. Un affreux temps de novembre ; autant de boue dans les rues que si les eaux du déluge venaient seulement d'abandonner la surface de la terre, et l'on ne serait pas surpris de rencontrer un megalosaurus, gravissant, dans la vase, la colline de Holborn. La fumée tombe des tuyaux de cheminée, bruine molle et noire, traversée de petites pelotes de suie qu'on prendrait pour des flocons de neige portant le deuil du soleil. On ne reconnaît plus les chiens sous la boue qui les couvre. Les chevaux, crottés jusqu'aux oreilles, ne sont guère mieux que les chiens. Les parapluies se heurtent, et les piétons, d'une humeur massacrante, perdent pied à chaque coin de rue, où des milliers de passants ont trébuché depuis le commencement du jour (si toutefois on peut dire que le jour ait commencé), ajoutant de nouveaux dépôts aux couches successives de cette boue tenace, qui s'attache au pavé et s'y accumule à intérêts composés. »
Charles Dickens, La Maison d'Âpre-Vent, 1852
« Il y avait une fois une dame, qui avait deux filles. L'aînée, qui se nommait Aurore, était belle comme le jour, et elle avait un assez bon caractère. La seconde, qui se nommait Aimée, était bien aussi belle que sa sœur, mais elle était maligne, et n'avait de l'esprit que pour faire du mal. La mère avait été aussi fort belle, mais elle commençait à n'être plus jeune, et cela lui donnait beaucoup de chagrin. Aurore avait seize ans, et Aimée n'en avait que douze ; ainsi, la mère qui craignait de paraître vieille, quitta le pays où tout le monde la connaissait, et envoya sa fille aînée à la campagne, parce qu'elle ne voulait pas qu'on sût qu'elle avait une fille si âgée. »
Jeanne-Marie Leprince de Beaumont, « Aurore et Aimée », Contes, XVIIIe siècle