Le texte suivant, extrait de Ravage de Barjavel, mettant en scène la science, est-il mélioratif ou péjoratif ?
François mangea de bon appétit. Fils de paysan, il préférait les nourritures naturelles, mais comment vivre à Paris sans s'habituer à la viande chimique, aux légumes industriels ?
L'humanité ne cultivait presque plus rien en terre. Légumes, céréales, fleurs, tout cela poussait à l'usine, dans les bacs.
Les végétaux trouvaient là, dans de l'eau additionnée des produits chimiques nécessaires, une nourriture bien plus riche et plus facile à assimiler que celle dispensée chichement par la marâtre Nature. Des ondes et des lumières de couleurs et d'intensité calculées, des atmosphères conditionnées accéléraient la croissance des plantes et permettaient d'obtenir, à l'abri des intempéries saisonnières, des récoltes continues, du premier janvier au trente et un décembre.
L'élevage, cette horreur, avait également disparu. Élever, chérir des bêtes pour les livrer ensuite au couteau du boucher, c'étaient bien là des mœurs dignes des barbares du XXe siècle. Le "bétail" n'existait plus. La viande était "cultivée" sous la direction de chimistes spécialistes et selon les méthodes, mises au point et industrialisées, du génial précurseur Carrel, dont l'immortel cœur de poulet vivait encore au Musée de la Société protectrice des animaux. Le produit de cette fabrication était une viande parfaite, tendre, sans tendons, ni peaux, ni graisses, et d'une grande variété de goûts.