Sommaire
IArgumentation directe et argumentation indirecteARaisonnements de l'argumentation directeBRaisonnements de l'argumentation indirecteIIArgumenter sur la question de l'hommeADiverses définitions de l'hommeBLa place de l'hommeCQuelques questions sur l'homme qui ont fait débat1L'humanité d'autrui2La torture3La peine de mort4La misèreArgumentation directe et argumentation indirecte
Raisonnements de l'argumentation directe
Il existe plusieurs types de raisonnements qui s'appliquent à l'argumentation directe.
Dans son Traité sur la tolérance, Voltaire use d'un raisonnement inductif : en dénonçant la manière dont a été instruite et jugée l'affaire Calas, il met en exergue les travers de la justice de son époque.
Dans le livre II d'Émile ou De l'éducation, Jean-Jacques Rousseau emploie un raisonnement déductif pour convaincre son lecteur de laisser la santé des enfants aux aléas de la nature : puisque les affections sont moins violentes dans l'enfance qu'à l'âge adulte, mieux vaut laisser les enfants être malades lorsqu'ils sont encore jeunes.
Dans son Discours de la méthode, René Descartes emploie de nombreux raisonnements logiques. Le premier consiste d'abord à poser deux vérités : l'homme peut douter de tous ses sens et l'homme doute. Il en déduit que l'homme ne peut pas douter de son doute, donc qu'il pense.
Dans son discours sur la peine de mort prononcé devant l'Assemblée constituante le 30 mai 1791, Maximilien de Robespierre emploie un raisonnement concessif : certes, l'instinct pousse naturellement l'homme à se venger des exactions qu'il a subies, mais la mort d'un individu ne peut être cautionnée par la collectivité.
Dans De l'horrible danger de la lecture, Voltaire emploie un raisonnement par l'absurde. Après avoir fait formuler par un sultan imaginaire diverses lois contraires aux idéaux des Lumières (que Voltaire défend habituellement), son énonciateur en vient finalement à interdire à ses lecteurs de... lire ! Comment alors recevoir le message qu'il vient de formuler ?
Dans son chapitre "De l'esclavage des nègres" extrait de De l'esprit des lois, Montesquieu fait preuve d'ironie : il énonce plusieurs préjugés et fausses vérités si contraires aux idéaux qu'il défend habituellement que le lecteur perçoit la dimension critique de son discours.
Raisonnements de l'argumentation indirecte
Le roman, la fable ou le conte philosophique sont des genres très prisés pour développer un raisonnement qui s'appuie sur l'argumentation indirecte.
Le Dernier jour d'un condamné de Victor Hugo est un exemple d'argumentation indirecte. L'auteur ne développe pas directement des arguments convaincants. Il expose dans une nouvelle, à la manière d'un journal intime, les pensées et émotions ressenties par un condamné à mort dans les derniers jours avant son exécution. Ce récit a pour objectif de dénoncer l'atrocité d'un tel châtiment.
Dans la fable "La Génisse, la Chèvre et la Brebis en société avec le Lion" de Jean de La Fontaine, le Lion fait preuve de mauvaise foi. Il utilise plusieurs prétextes pour conserver la totalité de la proie à partager en quatre : il est le roi, le plus fort, le plus vaillant et celui qui peut tuer tous ceux qui tenteront de s'octroyer la dernière part.
Thomas More a écrit L'Utopie, un roman qui met en scène une île sur laquelle tout semble parfait. En décrivant une société idéale et juste, More condamne les injustices de l'Angleterre du XVIe siècle, entre les hommes et les femmes, les riches et les pauvres.
Voltaire a écrit de très nombreux contes philosophiques dans lesquels il développe ses idées indirectement. Ses personnages sont souvent sans épaisseur psychologique et incarnent alors une idée. C'est le cas de Candide, de l'histoire éponyme, qui représente l'innocence et la naïveté face à un monde violent, cruel et injuste.
Argumenter sur la question de l'homme
Diverses définitions de l'homme
L'argumentation permet de développer différentes visions de l'homme.
Dans De la dignité de l'homme, l'humaniste Jean Pic de la Mirandole définit l'être humain comme la création ultime du dieu unique. Ni bon ni mauvais, l'homme est un être au centre du monde.
Dans le chapitre "Des cannibales" paru dans ses Essais, Montaigne pose la question de l'étendue du genre humain : les peuples indigènes des Amériques, bien que différents, montrent autant (si ce n'est davantage) d'humanité que les Européens.
La lettre que Gargantua envoie à son fils dans Pantagruel de François Rabelais défend une vision progressiste de l'homme, qui, fort de ses connaissances, dirige son univers avec raison et sagesse.
Dans ses Pensées, Pascal définit l'idéal de l'homme, qui se doit d'être "honnête", c'est-à-dire raisonné, modéré, humble et cultivé.
Sapere aude ! (Ose penser) Aie le courage de te servir de ton propre entendement !
Emmanuel Kant
Qu'est-ce que les Lumières ?, (Was ist Aufklärung ?), trad. Jules Barni, Paris, éd. Auguste Durand (1853)
1784
Dans Qu'est-ce que les Lumières ?, Emmanuel Kant définit l'homme comme un être de connaissance et de raisonnement.
Dans L'Existentialisme est un humanisme publié en 1948, Jean-Paul Sartre défend une définition plus individualiste de l'être humain : chaque homme étant différent, chacun est maître de sa propre existence.
La place de l'homme
L'argumentation permet de se poser la question de la place de l'homme sur Terre et dans l'Univers.
Dans De la dignité de l'homme, l'humaniste Jean Pic de la Mirandole place l'homme à la fois au centre du monde et en position de maîtrise de celui-ci : selon ses écrits, Dieu a créé le monde pour l'homme, pour qu'il l'habite et le modèle à son idée.
Dans son Sermon sur la mort et brièveté de la vie, Bossuet présente l'homme comme un locataire provisoire de la Terre. Ce dernier doit préparer son âme à la mort et à la rencontre avec Dieu.
Quelques questions sur l'homme qui ont fait débat
L'humanité d'autrui
Dans son roman La Controverse de Valladolid paru en 1992, Jean-Claude Carrière réécrit les annales d'un débat qui a eu lieu en Espagne au XVIe siècle au sujet des peuples indigènes des Amériques, afin de déterminer s'ils devaient être considérés ou non comme des hommes.
Dans la lettre inaugurale à ses Réflexions sur l'esclavage des nègres, Condorcet dénonce l'hypocrisie des Européens à considérer les esclaves africains comme des animaux.
La torture
Celui qui peut les supporter cache la vérité, autant que celui qui ne peut pas les supporter.
Michel de Montaigne
"De la conscience", Essais, Livre II, Bordeaux, éd. Simon Millanges
1580
Montaigne met en doute l'efficacité de la torture. Cette dernière peut avoir l'effet inverse de celui escompté.
Dans son Traité sur la tolérance, Voltaire dénonce l'inefficacité et la barbarie de la torture. Pour cela, il évoque la mort de Jean Calas, qui, torturé sur la roue, au lieu d'avouer un crime (qu'il n'a pas commis), demande à Dieu de pardonner à ses bourreaux.
Lorsque ces pratiques s'appliquent, par exemple, à ceux qui, en Algérie, n'hésitent pas à massacrer l'innocent ni, en d'autres lieux, à torturer ou à excuser qu'on torture, ne sont-elles pas aussi des fautes incalculables puisqu'elles risquent de justifier les crimes mêmes que l'on veut combattre ? Et quelle est cette efficacité qui parvient à justifier ce qu'il y a de plus injustifiable chez l'adversaire ?
Albert Camus
Actuelles III. Chroniques algériennes, Paris, éd. Gallimard, NRF, coll. "Blanche"
1958
Dans cet article qui traite de la question algérienne, Camus dénonce la pratique de la torture, en particulier du côté français. Cette pratique, censée éviter d'autres morts, ne fait que conforter les indépendantistes dans l'idée de l'utilité d'intensifier les attentats et les enlèvements.
La peine de mort
Dans Le Dernier Jour d'un condamné, Victor Hugo interpelle le lecteur sur la barbarie de la peine capitale en faisant ressentir à ce dernier toute la détresse éprouvée par un condamné fictif.
La peine de mort est nécessaire, disent les partisans de l'antique et barbare routine ; sans elle il n'est point de frein assez puissant pour le crime. Qui vous l'a dit ? Avez-vous calculé tous les ressorts par lesquels les lois pénales peuvent agir sur la sensibilité humaine ? Hélas ! Avant la mort, combien de douleurs physiques et morales l'homme ne peut-il pas endurer !
Maximilien de Robespierre
Discours à l'Assemblée constituante
30 mai 1791
Robespierre rappelle que la peine de mort n'est pas la seule peine envisageable pour un crime. Il met également en doute l'efficacité de la peine de mort vis-à-vis de la criminalité.
Parce qu'aucun homme n'est totalement responsable, parce qu'aucune justice ne peut être absolument infaillible, la peine de mort est moralement inacceptable.
Robert Badinter, ministre de la Justice
Discours à l'Assemblée nationale pour l'abolition de la peine de mort en France, Paris
17 septembre 1981
Pour défendre l'abolition de la peine de mort, Robert Badinter rappelle qu'un doute existe toujours sur la culpabilité du condamné, même après un jugement équitable.
La misère
Dans son discours "Détruire la misère" prononcé devant l'Assemblée constituante en 1849, Victor Hugo exhorte le corps législatif à lutter de toute urgence contre la misère en France.
Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l'avait expulsée... Chaque nuit, ils sont plus de deux mille recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d'un presque nu.
L'abbé Pierre
Discours radiophonique sur Radio-Luxembourg
1er février 1954
Dans ce discours historique, l'abbé Pierre appelle à la solidarité nationale, afin de faire face à la mort, qui guette des milliers de sans-abris, en proie à un hiver particulièrement froid.