Sommaire
IDéfinir, mesurer et observer la croissance économiqueALa croissance et le produit intérieur brut (PIB)1Le PIB et le taux de croissance2La croissance réelle et l'inflation3Le PIB par habitant4Les limites du PIBBLa croissance et ses fluctuations1La croissance : un phénomène récent et inégal2Un phénomène marqué par différentes phases3Les facteurs expliquant les fluctuations et les crises : les chocs d'offre et de demande4L'écart entre croissance effective et croissance potentielle pour déterminer des politiques économiquesIILes sources de la croissance économiqueAL'accumulation des facteurs de production et l'investissementBLes investissementsCLe rôle-clé du progrès technique et des innovationsDLe rôle des capitaux et des institutions de l'État dans la croissance économique1Les trois types de capitaux2Le rôle de l'État et des institutionsIIILes défis de la croissance économique : vers une croissance soutenableALes effets ambigus de la croissance économique et la croissance inclusiveBLes limites écologiques de la croissance économique1Les enjeux environnementaux2La remise en question du modèle économique actuel3L'invention de nouveaux modèles de croissanceL'analyse de la croissance économique constitue un champ important de l'économie. Les économistes cherchent à identifier les sources de la croissance et à comprendre les mécanismes qui la produisent. Ils soulignent que le mode de croissance économique actuel est confronté à des défis écologiques et sociaux qui interrogent sur sa soutenabilité.
Définir, mesurer et observer la croissance économique
La croissance économique correspond à l'accroissement durable de la production globale d'une économie sur une longue période. Elle fait l'objet de mesures statistiques (PIB, taux de croissance), qui présentent des limites. La croissance économique peut connaître des fluctuations qui ont des conséquences importantes sur l'économie.
La croissance et le produit intérieur brut (PIB)
La croissance économique est mesurée par le PIB et le taux de croissance, qui tient compte de l'inflation. Il convient de faire la différence entre PIB réel et PIB/hab. afin de mieux comparer les productions des différents pays. Le PIB présente des limites. Cela a conduit à la création d'autres indices permettant de prendre en compte d'autres facteurs que la production pour évaluer la richesse.
Le PIB et le taux de croissance
Le taux de croissance correspond au taux de variation du PIB. Cette mesure statistique s'obtient en additionnant les valeurs ajoutées de l'ensemble de la production économique d'une année.
Pour calculer le PIB, on utilise la formule suivante :
{\text{PIB = C + G + FBCF + VS + X} - \text{M}}
Avec :
- {\text{C}} = consommation finale des ménages ;
- {\text{G}} = consommation finale des administrations ;
- {\text{FBCF}} = formation brute de capital fixe, qui mesure l'investissement ;
- {\text{VS}} = variations de stocks ;
- {\text{X}} = exportations ;
- {\text{M}} = importations.
Lorsque l'on étudie la variation du PIB d'une année sur l'autre, le taux de croissance est un pourcentage d'augmentation simple. En revanche, lorsque l'on étudie la croissance sur une longue période (évolution moyenne sur plusieurs années) on doit utiliser un taux de croissance annuel moyen (TCAM) car il n'est pas juste mathématiquement d'additionner les pourcentages d'évolution du PIB de plusieurs années. On utilise donc la formule suivante :
{\text{TCAM}} = (\text{taux de croissance global}^{1/n} - 1) \times100
Avec :
- \bf{n} = le nombre d'années ;
- \bf{\text{Taux de croissance global}} = produit des coefficients multiplicateurs entre chaque année.
Le tableau suivant présente la croissance annuelle française de 2015 à 2018 :
2015 | 2016 | 2017 | 2018 |
1,1 % | 1,9 % | 2,3 % | 1,5 % |
© Insee, 2018
On cherche à calculer la croissance moyenne française entre 2015 et 2018 :
- \text{Taux de croissance global} = (\dfrac{1{,}1}{100} + 1) \times (\dfrac{1{,}9}{100} + 1) \times (\dfrac{2{,}3}{100} +1) \times (\dfrac{1{,}5}{100} + 1) = 1{,}06971
- \text{TCAM} = (1{,}06971^{1/4} - 1) \times100 = 1{,}69 \%
La croissance française entre 2015 et 2018 est en moyenne de 1,69 %.
La croissance réelle et l'inflation
Le PIB est utilisé pour mesurer la croissance. En indiquant la valeur d'échange des biens et services nouveaux produits chaque année, le PIB permet de comparer l'évolution de la richesse d'un pays. Il doit tenir compte des effets de l'inflation afin de mesurer le taux de croissance réel.
Le PIB est mesuré à partir du prix des produits échangés. Si les prix augmentent (phénomène d'inflation), le PIB augmente mécaniquement alors que le volume produit (la quantité de biens et services) est resté le même.
Le taux de croissance réel doit donc être calculé en volume ou à prix constants (en éliminant l'effet de la hausse des prix) en enlevant le taux d'inflation.
Si le PIB nominal (c'est-à-dire en monnaie actuelle) est de 1 200 milliards d'euros en 2015 et de 1 300 milliards d'euros en 2016, la croissance économique est de 8,3 %. Par contre, si l'inflation entre 2015 et 2016 était de 3 % alors la croissance réelle est de 8,3 - 3 = 5,3 %.
Le PIB par habitant
Le PIB est également utilisé pour mesurer l'évolution du niveau de vie potentiel d'une population à travers le PIB par habitant (PIB/hab.).
Lorsque l'on compare le PIB/hab. entre différents pays, il faut tenir compte des différences de prix qui existent pour les mêmes produits. On élabore alors un PIB en PPA (parité de pouvoir d'achat) fondé sur une parité entre monnaies qui compense la différence en pouvoir d'achat.
Si le prix d'un panier de consommation (par exemple 1 litre de lait et 500 grammes de protéines) en Europe est de 3 euros et le prix du même type de panier aux États-Unis est de 4 dollars, alors le taux de change de l'euro en dollar PPA est de (4/3 soit 1,33). Ce taux est indépendant du taux de change officiel des monnaies.
Les limites du PIB
Le PIB et le PIB/hab. sont les indicateurs de richesse les plus largement utilisés. Ils permettent de comparer les productions économiques entre pays. Cependant, ces indicateurs présentent plusieurs limites : ils excluent les activités non marchandes, ne tiennent pas compte des externalités négatives et ne permettent pas d'évaluer la richesse réelle. Cela a conduit à la création de nouveaux indicateurs comme l'Indice de développement humain (IDH).
Le PIB ne prend pas en compte toute la richesse produite car il exclut ou évalue mal une grande partie des activités économiques (l'économie non marchande, l'économie domestique ou solidaire, l'économie souterraine ou illégale).
Le PIB ne tient pas compte des externalités négatives de certaines productions (épuisement des ressources, diminution ou dégradation de la biodiversité et de l'environnement).
Le PIB/hab. permet d'évaluer la richesse potentielle de la population mais pas la richesse réelle (les richesses produites sont inégalement réparties) ni le niveau de bien-être ou de développement.
Aujourd'hui, dans les pays de l'OCDE (Organisation de coordination et de développement économiques), le PIB est calculé à partir du PIB marchand (le secteur privé) et du PIB non marchand (le secteur public évalué à partir de son coût de production). Il cherche à prendre davantage d'éléments en compte.
Ces différentes limites ont conduit l'ONU (Organisation des Nations unies) et les institutions internationales à élaborer d'autres indicateurs, notamment l'Indice de développement humain (IDH), élaboré par Amartya Sen. L'IDH combine niveau de santé (espérance de vie à la naissance), d'éducation (taux de scolarisation et d'alphabétisation) et niveau de vie (PIB/hab. en PPA).
D'autres indices complémentaires permettent d'améliorer la mesure de la richesse réelle produite comme :
- l'Indicateur de développement humain ajusté aux inégalités (IDHI) ;
- l'Indice de pauvreté humaine (IPH) ;
- l'Indice de bien-être économique (IBEE).
La croissance et ses fluctuations
La croissance économique a connu une forte hausse au cours des deux derniers siècles. Elle reste cependant inégale et à court terme elle peut connaître des phases de changement rapide (crises) liées à des chocs d'offre ou de demande. L'écart entre croissance effective et croissance potentielle conduit à mettre en place des politiques pour assurer le plein-emploi et le développement économique.
La croissance : un phénomène récent et inégal
Le phénomène de croissance économique forte date du XIXe siècle. Il a connu un pic durant les Trente Glorieuses en Occident. Aujourd'hui, la croissance économique est très inégale dans le monde.
Les travaux d'Angus Maddison ont permis de montrer que la croissance forte (supérieure à 1 ou 2 %) débute réellement avec les deux révolutions industrielles (1820-1870 et 1870-1913) en Europe et aux États-Unis. La croissance atteint alors 1 à 2 % par an puis s'amplifie durant les Trente Glorieuses (1945-1975). Elle atteint alors 4 à 5 % par an dans le monde occidental.
Depuis les années 1970-1980, la croissance économique est très inégale dans le monde, elle a tendance à être faible dans les pays développés (1 à 2 %) et s'est élevée dans les pays émergents (8 % en Chine).
Si les pays émergents connaissent une croissance forte depuis les années 1990, leur PIB/hab. reste très inférieur à ceux des pays développés.
Un phénomène marqué par différentes phases
À court terme, sur quelques décennies, on observe que la croissance économique est irrégulière. Elle peut connaître différentes phases : expansion, ralentissement, dépression et reprise.
Les facteurs expliquant les fluctuations et les crises : les chocs d'offre et de demande
Plusieurs facteurs permettent d'expliquer les fluctuations économiques à court terme et les crises de croissance, comme les chocs d'offre et de demande. Ces chocs peuvent augmenter ou réduire la production, ou bien accroître ou réduire la demande.
Les chocs d'offre et de demande modifient les comportements des ménages et des entreprises sur les marchés. Ils peuvent également modifier les capacités de production des entreprises dans une économie. Ces chocs peuvent :
- Augmenter ou réduire la production : innovations techniques, découverte de nouvelles ressources, raréfaction de certaines matières premières, catastrophes naturelles, etc.
- Accroître ou réduire la demande : catastrophes climatiques, raréfaction de certaines matières premières, phénomènes de mode, hausse de la fiscalité.
En 2011, les effets conjugués des grands incendies en Russie et en Australie ont entraîné des mauvaises récoltes de blé et la hausse du cours mondial des céréales.
Lorsque les fluctuations économiques présentent un caractère régulier, on parle de cycle économique. Chaque cycle est constitué de différentes phases possibles (expansion, ralentissement, crise, récession, dépression, reprise). Trois cycles principaux sont ainsi désignés par les noms des économistes qui les ont identifiés :
- les cycles de Juglar (8 à 10 ans), appelés également cycles des affaires ;
- les cycles de Kitchin (environ 40 mois), liés à la variation des stocks ;
- les cycles de Kondratiev, cycles économiques de long terme (40 à 50 ans).
L'écart entre croissance effective et croissance potentielle pour déterminer des politiques économiques
Il existe un écart entre la croissance effective (croissance réellement mesurée pendant une période donnée) et la croissance potentielle (niveau maximal de croissance durable du PIB lorsque toutes les capacités de production sont utilisées). L'écart entre croissance effective et croissance potentielle permet d'appréhender l'instabilité de la croissance. Cet écart permet donc de déterminer s'il faut suivre une politique conjoncturelle ou une politique structurelle lorsque la croissance n'assure pas le plein-emploi.
Lorsque la croissance effective est inférieure à la croissance potentielle il faut relancer l'offre ou la demande par une politique conjoncturelle.
On peut diminuer les impôts ou subventionner les industries.
Lorsque la croissance potentielle est jugée insuffisante, il faut mener une politique structurelle pour augmenter les capacités de production en travail et en capital.
Les batteries très longue durée ou les moteurs à très faible consommation font l'objet d'une politique de recherche coordonnée au sein de l'Union européenne.
Les sources de la croissance économique
Les sources de la croissance économique sont multiples. L'accumulation des facteurs de production et d'investissement est essentielle pour favoriser la croissance économique à court terme. L'innovation et le progrès technique sont importants sur le long terme. Les capitaux et les institutions peuvent également favoriser la croissance économique.
L'accumulation des facteurs de production et l'investissement
La croissance économique dépend de l'augmentation de la production. Pour que la combinaison productive (combinaison du facteur travail et du facteur capital) soit efficace, il faut mesurer la productivité du travail, et la productivité du capital. La mesure de ces productivités permet à l'entreprise de choisir une croissance extensive ou intensive pour augmenter sa production.
On distingue :
- Le facteur travail, constitué des ressources en main-d'œuvre mobilisées pour produire. Il a un aspect quantitatif (quantité de main-d'œuvre) et un aspect qualitatif (qualité de la main-d'œuvre).
- Le facteur capital, constitué des éléments matériels mobilisés pour produire. Il comprend le capital circulant ou consommations intermédiaires (les biens détruits ou transformés pendant le processus de production) et le capital fixe (ensemble des biens utilisés à plusieurs reprises).
La combinaison productive est la combinaison des facteurs travail et capital, c'est son efficacité qui permet d'accroître la production.
Pour mesurer l'efficacité de la combinaison productive, on mesure la productivité des facteurs travail et capital :
{\text{Productivité du travail} : \dfrac{\text{Valeur ajoutée}}{\text{Quantité de travail nécessaire (heures ou nombre de travailleurs)}}}
{\\\text{Productivité du capital} : \dfrac{\text{Valeur ajoutée}}{\text{Capital fixe}}}
Pour augmenter sa production, une entreprise a deux solutions. Elle peut augmenter la quantité utilisée d'un facteur ou des deux. C'est ce que l'on appelle la croissance extensive.
Une entreprise engage de nouveaux employés et achète des équipements neufs pour produire davantage.
Une entreprise forme ses employés pour qu'ils deviennent plus efficaces.
Les investissements
Les investissements matériels ou immatériels vont permettre d'accroître la quantité ou l'efficacité de la production.
Investir, pour une entreprise, c'est augmenter ou améliorer son stock de moyens de production. Elle peut le faire par l'investissement matériel qui permet d'augmenter le stock de capital fixe.
L'entreprise investit dans des machines.
© Wikimedia Commons
L'entreprise peut également choisir l'investissement immatériel qui permet d'augmenter le stock de capital immatériel.
L'entreprise peut investir dans la formation professionnelle.
© Wikimedia Commons
Les investissements ont plusieurs fonctions :
- augmenter les quantités produites (investissement de capacité) ;
- remplacer le matériel usé ou obsolète (investissement de renouvellement) ;
- moderniser et rendre plus efficace l'appareil de production (investissement de rationalisation).
Le rôle-clé du progrès technique et des innovations
Si l'accumulation des facteurs de production permet d'accroître la croissance à court terme, les économistes ont montré que le progrès technique et l'innovation étaient des facteurs de croissance vitaux à long terme. On peut les mesurer avec la PGF (productivité globale des facteurs). Le progrès technique et les innovations permettent d'éviter les rendements décroissants. Cependant, ils peuvent induire un phénomène de destruction créatrice.
Les études de Robert Solow sont basées sur l'observation de la croissance du PIB, du facteur travail (le nombre d'heures travaillées et la productivité) et du capital (stock d'équipement). Ces études montrent qu'une partie importante de la croissance observée n'est pas expliquée par l'augmentation des facteurs du travail et du capital. La croissance s'explique par un facteur inconnu qu'il nomme la PGF (productivité globale des facteurs).
La PGF permet de mesurer l'accroissement de la production qui n'est pas due à un accroissement de la quantité d'un facteur utilisé. L'accroissement de la PGF est attribuable au progrès technique et aux innovations.
La PGF peut également augmenter grâce à l'investissement et à l'accumulation du capital. Les progrès techniques et innovations permettent :
- l'amélioration des machines ;
- l'amélioration des procédés de fabrication ;
- l'amélioration des compétences des travailleurs.
Ils contribuent ainsi à augmenter la productivité du travail et à éviter les rendements décroissants.
Rendements décroissants
Les rendements décroissants sont un processus économique qui se caractérise par la diminution progressive du rendement des facteurs de production alors que leur quantité augmente.
Dans une usine, augmenter le nombre de machines ne permet pas forcément d'augmenter la production, car cela peut provoquer une désorganisation du travail.
Joseph Schumpeter distinguait cinq grands types d'innovations (de procédés, de produits, organisationnelles, de débouchés, de matières premières) et a mis en lumière le processus de destruction créatrice qui les accompagne.
La diffusion des technologies numériques dans l'audio et la vidéo a entraîné la disparition du secteur des cassettes audio et VHS.
Le rôle des capitaux et des institutions de l'État dans la croissance économique
Les capitaux et les institutions jouent un rôle dans la croissance économique.
Les trois types de capitaux
Il y a trois types de capitaux : immatériel, humain et public. Ils permettent d'obtenir des rendements d'échelle croissants.
Dans les années 1980, de nombreux économistes, comme Paul Romer, précisent la théorie de la croissance économique. Ils mettent en avant la capacité de la croissance économique à être endogène, c'est-à-dire auto-entretenue par l'amélioration de différentes formes de capitaux et des institutions encadrant la production.
Trois types de capitaux ont un impact sur la croissance économique :
- le capital immatériel, comme les brevets techniques et scientifiques, qui assure la protection des innovations et permet de stimuler la recherche ;
- le capital humain, qui correspond à l'ensemble des qualifications intellectuelles et professionnelles des individus qui produisent ;
- le capital public, qui correspond à l'ensemble des infrastructures économiques et sociales, mises gratuitement ou à coûts réduits à la portée de tous.
Ces capitaux font l'objet d'investissements qui permettent de contrecarrer les effets des rendements décroissants. Ils permettent d'obtenir des rendements d'échelle croissants et s'opposent aux rendements décroissants du capital.
Rendement d'échelle croissant
Le rendement d'échelle croissant est le processus économique qui se caractérise par l'augmentation non proportionnelle du rendement des facteurs de production lorsque leur quantité augmente.
Une innovation technique, comme l'invention de l'ordinateur, peut permettre d'accroître la production dans plusieurs domaines à la fois.
Le rôle de l'État et des institutions
Il y a trois types de politiques que l'État peut mettre en place : des politiques éducatives, des politiques sanitaires et sociales et des politiques d'aménagement du territoire ou d'infrastructures. Les institutions favorisent le développement économique en mettant en place un cadre stable.
À partir des années 1990, des économistes comme Douglass North montrent que le rôle de l'État est fondamental dans la constitution du capital humain et du capital public. Les investissements publics jouent notamment un rôle moteur dans la croissance endogène. Les institutions de l'État peuvent mettre en place :
- des politiques éducatives nationales qui assurent une formation minimale pour tous et permettent d'augmenter le stock de connaissances du pays ;
- des politiques sanitaires et sociales qui assurent un bon état général de santé de la population, ce qui a un impact direct sur la productivité de la main-d'œuvre ;
- des politiques d'aménagement du territoire en infrastructures de communication et de transport (routes, chemins de fer, ports, services de communication) indispensables à l'activité économique et au commerce national et international.
Les institutions favorisent le développement économique de long terme. Elles mettent également en place un cadre institutionnel et juridique stable comme :
- le droit à la concurrence ;
- le droit à la propriété ;
- les règles monétaires.
Les défis de la croissance économique : vers une croissance soutenable
Aujourd'hui, le modèle de croissance économique connaît des défis importants. Les inégalités économiques entre les pays sont nombreuses. La croissance inclusive est une solution, elle permet de mieux répartir les richesses. La croissance économique actuelle a également des limites écologiques importantes. Des solutions existent avec de nouveaux modèles économiques pour parvenir à une croissance soutenable, c'est-à-dire une croissance qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre l'avenir des générations futures.
Les effets ambigus de la croissance économique et la croissance inclusive
Les effets de la croissance économique sont souvent ambigus, car la croissance a un aspect positif (elle favorise le développement) et négatif (elle peut accentuer les inégalités). La production de richesses est inséparable de la question de la répartition des richesses. De nombreux économistes appellent donc à la mise en place d'une croissance inclusive, c'est-à-dire d'une allocation des produits de la croissance économique plus favorable à la réduction des inégalités.
La relation entre croissance économique et inégalités est en effet ambiguë :
- la croissance favorise le développement : au cours des deux derniers siècles, on observe une corrélation positive entre la croissance économique et le niveau de développement ou de richesse des habitants. La croissance serait donc un phénomène qui permettrait de réduire la pauvreté à long terme ;
- la croissance peut accroître les inégalités : les travaux d'économistes montrent cependant que les écarts de richesse ont tendance à s'accroître à l'intérieur des pays qui connaissent une croissance forte récente (pays émergents) ou qui ont connu une croissance forte ancienne (pays occidentaux). Par ailleurs, ils soulignent que la relation positive entre croissance et bien-être s'atténue, passé un certain seuil de richesse.
Les effets de la croissance économique sont donc complexes et inégaux.
Les limites écologiques de la croissance économique
Le modèle économique actuel, qui pousse à la croissance économique à tout prix, a des répercussions importantes sur l'environnement. On le remet alors en question car il ne permet pas d'affronter les nouveaux enjeux environnementaux. Il faut inventer des nouveaux modèles économiques.
Les enjeux environnementaux
Trois principaux enjeux sont à prendre en compte pour définir un modèle économique plus soutenable. Le défi démographique est important : il faut subvenir aux besoins d'une population croissante sans polluer l'environnement. Il faut empêcher l'érosion de la biodiversité et l'épuisement des ressources naturelles. Enfin, il faut prévenir la pollution du sol, de l'air et des eaux.
Le défi démographique correspond à l'augmentation de la population mondiale. Il devrait y avoir 7,5 milliards d'habitants en 2020. Il faut subvenir aux besoins de cette population croissante sans continuer à polluer la planète.
Nourrir la population actuelle est destructeur pour l'environnement. La croissance économique repose sur une agriculture intensive qui détruit et pollue : si elle est maintenue, les effets seront dramatiques.
L'érosion de la biodiversité et l'épuisement des ressources naturelles provoque la disparition de la faune et de la flore qui sont à la base de nombreuses activités économiques productives et porteuses de progrès : l'agriculture, la pharmaceutique, la chimie, etc.
15 à 30 % des espèces terrestres sont en voie de disparition.
Pour tenter de mesurer la diminution des ressources terrestres au regard de la production économique, des ONG ont élaboré l'indicateur du dépassement écologique. Il correspond au moment de l'année où les sociétés ont consommé davantage de ressources que la Terre n'en régénère naturellement chaque année selon les conditions techniques actuelles.
Les productions économiques et industrielles actuelles, pour parvenir à la croissance économique, polluent le sol, l'air et l'eau tout en altérant la santé des êtres vivants.
Les engrais chimiques polluent les sols, les gaz à effet de serre polluent l'air, des rejets toxiques polluent la mer.
La remise en question du modèle économique actuel
Le modèle de croissance économique actuel est fondé sur la destruction du capital naturel lors du processus productif (les énergies fossiles, notamment). Cela épuise les ressources naturelles et pollue l'environnement. Il faut repenser la notion de croissance économique en cherchant à tenir compte des différentes ressources permettant la production (capital productif ou physique, capital naturel, capital humain et capital institutionnel). On parle de plus en plus de soutenabilité en économie : c'est le caractère soutenable, donc durable du modèle économique. La croissance économique doit reposer sur l'entretien ou la consommation raisonnée des capitaux qui doivent être renouvelés pour ne pas disparaître.
Les différentes ressources dont il faut tenir compte en repensant le modèle économique et en redéfinissant la notion de croissance économique sont :
- le capital productif ou physique : le stock de biens durables (bâtiments, machines, infrastructures etc.) mis à la disposition d'une collectivité pour produire des biens et services satisfaisant les besoins et améliorant le bien-être ;
- le capital naturel : l'ensemble des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables (minerais, ressources halieutiques, etc.) utilisées dans le cadre du processus de production ;
- le capital humain : l'ensemble des compétences et connaissances qui rendent les individus productifs, et leur permettent d'obtenir un certain niveau de revenus ;
- le capital institutionnel : l'ensemble des institutions politiques, institutionnelles ou juridiques qui permettent d'établir des cadres et contraintes humaines structurant les interactions politiques, économiques et sociales.
L'invention de nouveaux modèles de croissance
Alors que la croissance semble s'essouffler notamment dans les pays développés, les économistes cherchent désormais à inventer de nouveaux modèles de croissance en stimulant le progrès technique et l'innovation pour répondre aux enjeux environnementaux, tout en permettant une croissance plus soutenable.
Les théories économiques sur les réponses à apporter aux limites écologiques et sociales des modèles de croissance actuel divergent et font débat.
Certains économistes comme Robert Gordon ont élaboré la notion de « stagnation séculaire ». Pour eux, les effets des révolutions industrielles sont à présent passés et inclus dans l'économie. Ces effets sont par ailleurs marqués par un rendement décroissant : la croissance est donc naturellement amenée à reprendre une progression faible similaire à celle des époques préindustrielles, de l'ordre de 0,5 % à 1,5 % par an.
D'autres économistes, comme Philippe Aghion, soulignent que les indicateurs de croissance actuels basés sur des mesures de quantité (comme la productivité ou le PIB) ne sont pas adéquats pour rendre compte du progrès de la qualité des productions. Ils proposent deux solutions pour relancer la croissance économique de façon positive :
- Les innovations de frontières, c'est-à-dire la création de technologies entièrement nouvelles porteuses de croissance forte à long terme. Celles-ci sont favorisées par des investissements en capital humain (recherche, éducation).
- Une politique étatique bien orientée incitant au développement de technologies écologiques (énergies renouvelables, cycle de production circulaire).
Inséré dans une « croissance verte », le mode de production serait alors plus soutenable.
L'énergie solaire, dans le domaine industriel, et le commerce équitable dans le domaine social sont des innovations porteuses de croissance plus soutenable.
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Un autre courant économique prône à l'inverse une réduction de la croissance (courant de la décroissance) comme modalité pour atteindre un développement plus durable. Ce courant, qui encourage une limitation de la consommation des ressources terrestres, se heurte cependant à la nécessité actuelle de développement des pays pauvres et émergents.