Sommaire
IL'emploi et le chômageALa population active et l'emploi1Définition de la population active2Les caractéristiques et les mesures de l'emploi3Les évolutions récentes de l'emploiBLe chômage1Définir et mesurer le chômage2Les différentes formes de chômage3Le "halo" autour du chômageCL'importance de l'emploi dans l'intégration socialeIILes politiques de l'emploiALes différents types de politiques de l'emploi1Les politiques passives et actives de l'emploi2Les trois types de politiques contre trois types de chômageBLa lutte contre le chômage classique1Le chômage dans l'analyse classique et néoclassique2Les politiques de diminution du coût du travail3Les limites des politiques de diminution du coût du travailCLa lutte contre le chômage keynésien1L'analyse keynésienne du chômage et la demande anticipée2Les politiques de lutte contre le chômage conjoncturel3Les limites des politiques de relance conjoncturelleDLa lutte contre le chômage structurel1La flexibilisation contre les rigidités du marché du travail2Les limites de la flexibilisation3Les mesures de formation des chômeursL'emploi a un rôle important d'intégration sociale qui est remis en cause par les évolutions des formes d'emploi et l'existence d'un taux de chômage élevé. Les politiques publiques de l'emploi essaient donc de faire diminuer le taux de chômage et d'atténuer les effets sociaux de la perte d'emploi. La diversité des formes du chômage et des analyses qui portent sur ce phénomène expliquent la diversité des politiques de l'emploi mises en place pour y faire face. Les politiques de relance de la demande visent ainsi à résoudre le chômage keynésien, les politiques de réduction du coût du travail permettent de lutter contre le chômage classique et la flexibilisation du marché du travail doit résoudre le chômage structurel.
L'emploi et le chômage
La population active et l'emploi
Définition de la population active
La population active comprend l'ensemble des personnes ayant un emploi et les chômeurs, c'est-à-dire les personnes sans emploi, cherchant activement un emploi et étant disponibles pour travailler. La population active dépend du solde naturel et du solde migratoire, ainsi que de facteurs sociaux.
La population active dépend directement :
- du solde naturel : différence entre le nombre de naissances et de décès
- du solde migratoire : différence entre immigrants et émigrants
Elle dépend aussi des facteurs sociaux. L'entrée des femmes sur le marché du travail a accru la taille de la population active, et l'allongement des études l'a diminuée, car les personnes en études plus longtemps ne sont pas disponibles pour travailler et sont donc des inactifs.
Les caractéristiques et les mesures de l'emploi
L'ensemble des personnes en emploi, selon l'INSEE, est l'ensemble des personnes qui exercent une activité entrant dans le domaine de la production. Ces personnes peuvent être des salariés ou des travailleurs indépendants. On peut mesurer l'évolution de l'emploi par le taux d'emploi, qui rapporte le nombre de personnes en emploi à la population totale en âge de travailler. Au contraire du taux d'activité, il ne prend pas en compte les chômeurs, et permet donc d'avoir une vision synthétique de la mobilisation effective de la main-d'œuvre.
Taux d'emploi
Le taux d'emploi est le rapport entre le nombre d'actifs occupés concernés et la population totale en âge de travailler correspondante.
Taux d'activité
Le taux d'activité est le rapport entre le nombre d'actifs et la population totale en âge de travailler correspondante.
Le taux d'activité a eu tendance à diminuer depuis une vingtaine d'années, notamment pour la catégorie des 60 - 65 ans ou encore en raison de l'allongement de l'âge d'entrée sur le marché du travail.
Le taux d'emploi reflète davantage la mobilisation quantitative de la main-d'œuvre car il ne prend pas en compte les chômeurs.
Les évolutions récentes de l'emploi
Les transformations économiques de la seconde moitié du XXe siècle se sont accompagnées d'une transformation profonde de la structure et des caractéristiques de l'emploi : féminisation, salarisation, tertiarisation, formes atypiques d'emploi.
- L'emploi est de plus en plus féminin. 65 % des emplois étaient masculins en 1970, contre 52 % en 2012.
- L'emploi est de plus en plus salarié. 80 % des personnes en emploi étaient salariées en 1970, elles sont plus de 90 % en 2012.
- L'emploi est de plus en plus localisé dans le secteur tertiaire. Les services représentaient la moitié des emplois en 1970, ils en représentent 80 % en 2012.
L'emploi prend aussi de plus en plus des formes atypiques. En effet, l'emploi est une situation juridique encadrée par des normes d'emplois qui régissent les conditions de travail. En France, la loi énonce que "le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) est la forme normale et générale de la relation de travail". Il existe cependant des exceptions à ce type de contrat, notamment l'emploi par intérim, le contrat de travail à durée déterminée (CDD) ou le stage. Ce sont des emplois atypiques, qui prennent de plus en plus d'importance depuis les années 1980. Entre 1982 et 2012 en France, la part des CDI dans l'emploi salarié a diminué de 94 % à 87 %, et la part des CDD a augmenté de 5 % à 10 % des emplois salariés.
Une autre forme d'emploi atypique est l'emploi à temps partiel subi. C'est la situation d'un salarié qui travaille moins que la durée légale du travail prévue par la loi (35h en France) contre son gré. Le temps partiel touche plus les femmes que les hommes. En 2012, 30 % des femmes travaillent à temps partiel en France, et seulement 7 % des hommes.
Le chômage
Définir et mesurer le chômage
Le chômage désigne l'état des personnes sans emploi, disponible pour travailler et recherchant activement un emploi. En matière de mesure du chômage, il existe deux grands indicateurs : l'INSEE et Pôle emploi.
- L'INSEE mesure le chômage défini au sens du BIT (Bureau international du travail). Les chômeurs sont les individus sans emploi (les activités même très courtes sont exclues), disponibles pour travailler et recherchant activement un emploi (les chômeurs doivent préciser la nature de l'emploi cherché et les démarches effectuées). Ces données sont trimestrielles.
- Pôle emploi mesure le chômage par l'intermédiaire des DEFM (Demandeurs d'emploi en fin de mois), qui sont les personnes à qui des allocations chômage sont versées. Depuis 2008, seuls les chiffres des demandeurs de la catégorie A sont publiés (ceux qui n'ont pas du tout travaillé pendant le mois précédent).
Il existe des individus qui ne sont considérés comme chômeurs que selon l'une de ces définitions, et pas l'autre. Cela peut expliquer les différences entre les taux de chômage mesurés par les deux institutions.
Taux de chômage
\text{Taux de chômage (au sens du BIT) =}\dfrac{\text{Chômeurs}}{\text{Population active}}
Au 3e trimestre 2014, le taux de chômage de la France s'élevait à 10,4 % de la population active.
L'analyse socio-économique distingue souvent entre différents types de chômages, selon le facteur que l'on considère comme déterminant pour expliquer qu'un individu ne trouve pas d'emploi.
- Le chômage structurel est lié aux déséquilibres des structures socio-économiques comme les déséquilibres démographiques, le déclin d'activités traditionnelles, le changement dans la structure des emplois et l'inadéquation entre la formation et les attentes des employeurs, etc.
- Le chômage conjoncturel résulte d'un ralentissement de l'activité économique.
- Le chômage technologique est dû à la mise en place de nouveaux procédés de production qui économisent de la main-d'œuvre.
- Le chômage technique est une inactivité forcée dans l'entreprise en raison de circonstances particulières et indépendantes de l'entreprise.
- Le chômage partiel est une inactivité forcée et décidée par l'entreprise pour réduire la production lorsque la conjoncture est défavorable. Il consiste par exemple à exiger des salariés qu'ils diminuent leur temps de travail hebdomadaire.
Les différentes formes de chômage
L'analyse socio-économique distingue différents types de chômages, selon le facteur que l'on considère comme déterminant pour expliquer qu'un individu ne trouve pas d'emploi. On parle ainsi de cinq type de chômage : structurel, conjoncturel, technologique, technique et partiel.
- Le chômage structurel est lié aux déséquilibres des structures socio-économiques comme les déséquilibres démographiques, le déclin d'activités traditionnelles, le changement dans la structure des emplois et l'inadéquation entre la formation et les attentes des employeurs, etc.
- Le chômage conjoncturel résulte d'un ralentissement de l'activité économique.
- Le chômage technologique est dû à la mise en place de nouveaux procédés de production qui économisent de la main-d'œuvre.
- Le chômage technique est une inactivité forcée dans l'entreprise en raison de circonstances particulières et indépendantes de l'entreprise.
- Le chômage partiel est une inactivité forcée et décidée par l'entreprise pour réduire la production lorsque la conjoncture est défavorable. Il consiste par exemple à exiger des salariés qu'ils diminuent leur temps de travail hebdomadaire.
Le "halo" autour du chômage
L'Insee définit le "halo du chômage" comme l'ensemble "des personnes qui souhaiteraient travailler, mais qui ne sont pas classées comme chômeurs". Elles peuvent être classées comme inactives (par exemple si elles n'ont pas activement recherché un emploi récemment) ou actives (si elles ne travaillent que quelques heures par semaine mais cherchent un emploi à temps complet).
Avec la précarisation de l'emploi, il devient parfois compliqué de cerner la différence entre emploi, chômage et inactivité. Par exemple, le temps partiel choisi est à cheval entre l'activité et l'inactivité.
Jacques Freyssinet dans Le Chômage en 1998 met en évidence le chevauchement entre activité, inactivité et chômage, selon le schéma suivant.
Chevauchement entre emploi, chômage et inactivité
Jacques Freyssinet
En France métropolitaine, au 3e trimestre 2014, parmi les personnes inactives au sens du BIT, 1,4 million souhaitent un emploi sans être comptées dans la population des personnes au chômage au sens du BIT : elles constituent le halo autour du chômage. Leur nombre augmente de 40 000 sur le trimestre et de 70 000 sur un an.
L'importance de l'emploi dans l'intégration sociale
Le travail est valorisé dans la société et valorisant pour les individus, car il est à la fois une source légitime de revenus et à la fois, une norme nécessaire à la reconnaissance sociale. De nombreuses études ont montré que les conséquences du chômage ne sont pas seulement monétaires et économiques, mais aussi sociales.
Robert Castel a mené une analyse de la société salariale et de son effritement dans la France contemporaine. Ses travaux montrent que la situation des individus dans le monde du travail est un élément déterminant pour comprendre l'intégration ou l'exclusion sociale. Il montre que l'exclusion est un processus social et non un état, et que ce processus passe par des situations de précarité et de chômage. Il détermine trois situations possibles pour les individus, qui peuvent aussi être des phases du processus d'exclusion :
- Une zone d'intégration : les individus bénéficient d'un emploi stable et de fortes relations sociales.
- Une zone de vulnérabilité : l'emploi devient précaire, voire les individus perdent leur emploi. La sociabilité s'amoindrit.
- Une zone de désaffiliation : les individus perdent progressivement les liens sociaux qui les relient aux autres et à la société dans son ensemble.
La précarisation de l'emploi favorise ce processus : l'instabilité de l'emploi empêche la constitution de relations sociales stables et la faiblesse des revenus gênent ces relations (difficulté à recevoir, impossibilité de sortir, etc.). Précarité et chômage sont ainsi des processus cumulatifs : dégradation des revenus, des relations sociales, des relations familiales, etc., sont constitutifs de l'exclusion.
Les politiques de l'emploi
Au niveau de l'économie, le chômage consiste en une sous-utilisation des ressources de l'économie, car des travailleurs au chômage pourraient produire de la valeur ajoutée s'ils étaient en emploi, et augmenter le stock global de richesses. Au niveau des individus, le chômage est synonyme d'appauvrissement et peut être un facteur d'exclusion sociale. Les responsables politiques cherchent donc à limiter l'ampleur et les effets du chômage pour maintenir une bonne cohésion de la société et le bien-être général.
Les différents types de politiques de l'emploi
Les politiques passives et actives de l'emploi
Les mesures d'indemnisation des chômeurs pour diminuer les effets du chômage sont une politique passive.
Les politiques actives ont pour but d'augmenter le volume total d'emploi (création de nouveaux emplois).
La meilleure formation des demandeurs d'emploi pour qu'ils retrouvent un emploi est une politique active.
Les trois types de politiques contre trois types de chômage
On distingue traditionnellement trois grands types de chômage, qui peuvent correspondre à différentes caractéristiques des économies ou à différentes époques : le chômage dit « classique », le chômage dit « keynésien » et le chômage structurel. Selon le type de chômage considéré, des politiques différentes doivent être adoptées pour le traiter.
- Le chômage dit "classique" est soit temporaire, soit volontaire (les chômeurs considéreraient que le salaire proposé est trop bas). Il repose sur le jeu de l'offre et de la demande sur le marché du travail.
- Le chômage dit "keynésien" est un chômage de long terme et involontaire, qui s'explique par un niveau d'activité économique trop faible.
- Le chômage "structurel" renvoie à une inadéquation entre la demande et l'offre de travail. Il peut s'expliquer par le caractère trop rigide du marché du travail qui ne parvient pas à apparier les deux.
La lutte contre le chômage classique
Le chômage dans l'analyse classique et néoclassique
Selon l'analyse économique classique et néoclassique, le marché du travail atteint un équilibre sur le long terme s'il est en situation de concurrence pure et parfaite. Le travail est considéré comme une marchandise homogène. Le chômage peut alors prendre deux formes : le chômage frictionnel et le chômage volontaire. Les politiques de lutte contre ce type de chômage cherchent à favoriser la loi de l'offre et de la demande sur le marché du travail et à en réduire les rigidités qui empêchent la fixation d'un équilibre entre offreurs, demandeurs et salaires.
- Un dysfonctionnement temporaire appelé chômage frictionnel. Il correspond au temps de l'ajustement entre l'offre et la demande de travail, c'est-à-dire le temps que le salaire (qui est le prix du travail) s'ajuste pour équilibrer l'offre et la demande de travail.
- Lorsque le chômage persiste, il est volontaire, car cela signifie que les individus refusent de voir à la baisse leurs prétentions salariales et n'acceptent pas le salaire du marché. Les entreprises ne peuvent cependant augmenter ce salaire proposé sur le marché, car sinon leurs coûts de production augmenteraient et il ne serait plus rentable de produire.
Les politiques de lutte contre ce type de chômage cherchent à favoriser la loi de l'offre et de la demande sur le marché du travail et à en réduire les rigidités qui empêchent la fixation d'un équilibre entre offreurs, demandeurs et salaires. Il s'agit alors d'assouplir les règles fixant les salaires et de supprimer les trappes à inactivité. Les rigidités des salaires sont notamment imposées par l'État sous la forme d'un salaire minimal, ou par les syndicats qui refusent une baisse collective des salaires. Ces rigidités qui garantissent les droits sociaux ne permettent cependant pas de réaliser des ajustements du salaire à la baisse si nécessaire.
Si le prix des produits diminue à cause de la concurrence étrangère, si le coût des matières premières augmente, ou s'il y a une augmentation de l'offre de travail telle que le nouveau salaire d'équilibre devrait se situer sous le niveau du salaire minimal, les rigidités des salaires ne sont pas une solution.
Les trappes à inactivité se produisent lorsque l'indemnisation du chômage poussent les chômeurs à ne plus chercher de travail. Dans ce cas, il existe :
- Un coût du travail trop élevé qui désincite les entreprises à investir et à embaucher car la rentabilité est insuffisante.
- Une impossibilité pour les chômeurs qui le souhaitent de proposer leur force de travail à un prix inférieur à celui du marché.
Les politiques de diminution du coût du travail
Pour réduire le chômage classique, on peut diminuer le coût salarial, c'est-à-dire le coût du travail pour les entreprises (en faisant accepter une diminution de salaire aux chômeurs volontaires, ou en diminuant les cotisations sociales patronales). Cela comporte plusieurs effets positifs du côté des entreprises (qui sont à la fois demandeurs de travail et offreurs de biens).
- Les entrepreneurs seront incités à embaucher davantage.
- La baisse du coût salarial devrait rendre les entreprises plus compétitives : cela permet une baisse des coûts de production, dans un marché concurrentiel cela diminue les prix de vente et permet aux entreprises d'augmenter leurs parts de marché.
- La baisse du coût du travail augmente le profit des entreprises : cela favorise l'investissement.
- La baisse du salaire réel devrait inciter un certain nombre de salariés à se retirer du marché du travail, ce qui contribue à faire diminuer le chômage en faisant passer certains individus de chômeurs à inactifs.
Il est aussi possible de réduire le chômage frictionnel. Il faut pour cela faire diminuer le temps d'ajustement entre l'offre et la demande de travail, c'est-à-dire le temps que le salaire s'ajuste en fonction des évolutions de l'offre et de la demande, ou le temps qu'un salarié retrouve un emploi. Une mesure possible est de rendre les mécanismes d'appariement (c'est-à-dire de rencontre entre l'offre et la demande de travail) plus efficaces, par exemple en centralisant toutes les offres d'emplois et les caractéristiques de tous les chômeurs pour trouver une offre correspondant à chaque profil. Il est aussi possible d'inciter ou d'obliger les chômeurs à retrouver un emploi plus vite en acceptant le premier emploi qu'on leur propose.
En France, si un chômeur refuse sans motif valable à deux reprises une offre d'emploi considérée comme "raisonnable" par Pôle emploi, il peut être radié de cet organisme pendant plusieurs mois et ne plus toucher d'allocations.
Les limites des politiques de diminution du coût du travail
On assiste depuis plusieurs années à des politiques de réduction du coût du travail qui suivent ces analyses, avec par exemple une diminution des cotisations sociales. Celles-ci portent notamment sur les bas salaires, car ce sont les salariés les moins qualifiés qui ont le plus de mal à trouver du travail. La diminution du coût salarial peut aussi prendre la forme de contrats aidés, c'est-à-dire des contrats subventionnés par l'État afin que les chômeurs soient embauchés à moindre coût par les entreprises. Cela permet aux chômeurs d'acquérir une qualification ou une expérience professionnelle pour faciliter leur accès à un emploi stable.
L'efficacité de la réduction des coûts du travail est cependant remise en cause par plusieurs phénomènes :
- Effet d'aubaine : une entreprise peut embaucher un chômeur à moindre coût, par exemple avec un contrat aidé, alors qu'elle l'aurait de toute façon embauché parce qu'elle en avait besoin.
- Effet de substitution : les contrats aidés sont ciblés sur certaines catégories de travailleurs. Elles les avantagent donc relativement au détriment d'autres catégories de travailleurs. De plus, les diminutions des coûts salariaux profitent généralement aux emplois peu qualifiés, ce qui dessert la productivité et nuit à la compétitivité des entreprises.
- Coût élevé : ces mesures représentent une perte de recettes pour l'État (notamment lorsqu'il diminue les cotisations patronales), ce qui pèse sur les dépenses publiques.
- Effet pervers : ralentissement du pouvoir d'achat puisque la baisse du coût salarial par une diminution des salaires pèse sur la consommation, donc la production des entreprises, et par là sur l'emploi. Il peut donc y avoir un effet pervers qui fait que l'économie s'enferme dans une situation où la production et l'emploi sont faibles.
La lutte contre le chômage keynésien
L'analyse keynésienne du chômage et la demande anticipée
J.-M. Keynes a critiqué l'analyse libérale des néoclassiques. Keynes montre qu'il peut exister un équilibre de sous-emploi, c'est-à-dire une situation durable dans une économie où des facteurs (capital et travail) sont disponibles mais restent inemployés. Il existe alors du chômage involontaire. En effet, pour Keynes, le niveau de production dépend de la demande effective, qui est la demande anticipée par les producteurs et sur laquelle ils se basent pour fixer leur niveau de production. Si, suite à un événement quelconque, les producteurs deviennent plus pessimistes quant à la demande qui leur sera adressée dans le futur, ils diminuent leurs capacités de production, et licencient des travailleurs. Ceux-ci se retrouvent donc au chômage, et sans salaire, ils ne peuvent plus consommer. Cela provoque une diminution de la demande globale, ce qui conduit les entrepreneurs à maintenir leurs prévisions pessimistes et un niveau de production bas, donc à ne pas réembaucher.
Demande anticipée
La demande anticipée est la demande à laquelle les entrepreneurs anticipent qu'ils seront confrontés dans le futur. C'est en se basant sur elle que les producteurs déterminent le niveau de production qu'ils mettent effectivement en œuvre. C'est pourquoi Keynes l'appelle "la demande effective".
Le chômage keynésien correspond ainsi à une insuffisance de la demande de biens et services anticipée par les entreprises, ce qui les conduit à limiter leur production et donc l'emploi. Le chômage est donc involontaire et entretient le cycle de la récession/dépression : la faiblesse des revenus freine la demande globale. L'économie est donc bien dans un équilibre de sous-emploi, au sens où cette situation de sous-emploi des facteurs se poursuivra tant qu'aucun élément extérieur n'aura modifié les paramètres structurels de l'offre et de la demande de biens et services.
Les politiques de lutte contre le chômage conjoncturel
Le chômage keynésien est conjoncturel, lié à une situation de sous-emploi dans l'économie. Afin de lutter contre ce chômage, il faut donc mettre en œuvre des politiques conjoncturelles de relance par la demande, en agissant sur ses deux leviers majeurs : la consommation des ménages et l'investissement des entreprises. Cette relance de la demande ne peut se faire, selon Keynes, sans l'action volontariste de l'État.
- Politique de relance budgétaire : en augmentant ses dépenses par le biais des investissements publics ou encore des dépenses de protection sociale, l'État actionne le mécanisme du multiplicateur d'investissement qui engendre une vague successive de revenus permettant de soutenir la demande globale.
- Politique de relance monétaire : l'État doit diminuer les taux d'intérêt afin d'inciter les agents économiques à emprunter, afin d'investir et de produire plus, ce qui induit des revenus supplémentaires et une hausse de la demande.
Keynes est à l'origine de la plupart des politiques économiques menées par les États-Unis après la Seconde Guerre mondiale. Cette politique keynésienne semble également avoir du succès au moment de la crise de 2008 - 2009.
Les limites des politiques de relance conjoncturelle
Les politiques keynésiennes connaissent plusieurs limites :
- La contrainte extérieure : si l'appareil productif national n'est pas compétitif en matière de prix et que l'économie est ouverte aux échanges extérieurs, toute relance de la demande par l'État va se traduire par une hausse des importations plus que de la production nationale. Alors, le déficit extérieur se creuse, et le chômage ne se résorbe pas. Pour retrouver une compétitivité-prix, les États peuvent mener des politiques de réduction du coût du travail, mais ces politiques d'austérité ralentissent la croissance et risque d'augmenter le chômage.
- La contrainte budgétaire : lorsque le déficit budgétaire devient permanent, la dette de l'État augmente fortement, et le paiement des intérêts de la dette creuse à son tour le déficit : c'est l'effet boule de neige, qui peut faire perdre confiance aux créanciers dans les capacités de remboursement d'un État. Dans ce cas, cet État risque de ne plus pouvoir emprunter. Les États sont donc contraints de diminuer, voire d'annuler leur déficit budgétaire, en diminuant les dépenses publiques et en augmentant les recettes fiscales. Ces politiques entretiennent récessions et ralentissement de la croissance qui ont des effets négatifs sur l'emploi et le chômage.
- Le progrès technique permet des gains de productivité qui économisent le travail. En période de croissance, les entreprises peuvent alors investir pour profiter de ces gains de productivité plutôt qu'embaucher de nouveaux travailleurs. À long terme, la croissance de l'emploi risque donc d'être moins rapide que la croissance de la production ; il n'y a donc pas de lien évident entre croissance et création d'emplois.
- SI l'État mène une relance monétaire, il existe par ailleurs un risque de tensions inflationnistes (en raison de l'augmentation de la masse monétaire). L'augmentation des prix dégrade le bilan des entreprises et peut être néfaste pour la croissance. C'est la vision monétariste de Milton Friedman.
La lutte contre le chômage structurel
La flexibilisation contre les rigidités du marché du travail
Dans les années 1970 et 1980, le maintien d'un taux de chômage élevé alors que les économies connaissaient des périodes de croissance a conduit les économistes à parler d'un taux de chômage structurel.
Le chômage structurel est engendré par le fonctionnement trop rigide du marché du travail et par une inadaptation qualitative de l'offre de travail par la population active à la demande de travail émanant de l'appareil productif. Une des solutions pour résoudre le chômage structurel est alors de flexibiliser le marché du travail en éliminant les rigidités qui empêcheraient les ajustements : il faut donc ajuster le travail par la quantité ou les prix à la production. Un système productif est flexible lorsque la quantité de travail et le salaire sont capables de s'adapter instantanément aux variations de la demande.
Flexibilité du marché du travail
La flexibilité du marché du travail représente l'ensemble des mesures mises en place afin d'adapter la production et l'emploi aux évolutions rapides de la demande. Ces politiques visent à lutter contre les rigidités du marché du travail.
Ces mesures visent à adapter le volume de l'emploi (flexibilité externe) ; la qualité des emplois (flexibilité interne) ; les salaires (flexibilité salariale).
- La flexibilité externe consiste à faire varier les effectifs en fonction de la demande.
- La flexibilité interne consiste à faire varier le temps de travail et les postes de travail des salariés (flexibilité dite fonctionnelle) en fonction de la demande
- La flexibilité salariale (ou des rémunérations) consiste à lier l'évolution des salaires aux résultats de l'entreprise, et des mouvements conjoncturels, ce qui suppose qu'ils ne soient pas indexés aux prix des produits, et qu'ils soient segmentés selon les branches et individualisés.
Il existe plusieurs avantages à l'augmentation de la flexibilité sur le marché du travail :
- Les coûts de production sont réduits, en évitant les sureffectifs et en réduisant les acquis sociaux.
- Les entreprises peuvent travailler en flux tendus, en s'adaptant très rapidement aux variations de la demande (notamment en licenciant les salariés si nécessaires), ce qui accroît la compétitivité des firmes.
L'étude de la flexibilité a donné lieu à des analyses de la "flexisécurité". Il s'agit d'une stratégie visant à renforcer à la fois la flexibilité des travailleurs et la sécurité de l'emploi (garantir des revenus, avoir l'assurance de ne pas être au chômage sur une longue période, etc). La flexisécurité a été au centre des débats de la Commission européenne sur le marché du travail.
Le modèle danois est la référence en matière de flexisécurité. Il consiste en un marché du travail au niveau national où les contrats de travail sont flexibles, la protection sociale forte et les politiques de l'emploi actives. Ainsi, les entreprises peuvent facilement licencier les salariés si la conjoncture économique n'est pas bonne, mais en contrepartie, les salariés bénéficient d'allocations chômage élevées. Celles-ci sont cependant conditionnées à des obligations de formation, afin que les chômeurs retrouvent rapidement un emploi.
Les limites de la flexibilisation
De manière générale, on assiste depuis la fin des années 1970 à une déréglementation des marchés du travail qui va de pair avec une flexibilisation de l'emploi, même si tous les pays n'adoptent pas les mêmes dispositifs pour flexibiliser l'emploi.
En France, en 2008, a été introduit l'outil juridique de la rupture conventionnelle de CDI, connu sous le nom de "rupture à l'amiable". Elle permet une rupture de contrat sans licenciement ou démission, et allège donc la procédure de rupture.
Ces politiques connaissent plusieurs limites :
- La flexibilisation de l'emploi fragilise la position des salariés, qui sont de plus en plus souvent dans des situations précaires. Cette flexibilisation a entretenu le phénomène de la "nouvelle pauvreté" qui touche les travailleurs pauvres.
- Les contrats précaires favorisent un chômage répétitif et peuvent freiner l'intégration des travailleurs dans la société.
- L'augmentation du nombre de contrats précaires entraîne une segmentation du marché du travail. Ce sont souvent les individus appartenant à des catégories sociales défavorisées qui se voient imposer des contrats flexibles (femmes, jeunes, immigrés), et qui perdent donc rapidement leur emploi en cas de crise.
En Allemagne, la réforme du marché du travail initiée par les lois Hartz de 2002 à 2005 a introduit une flexibilisation du marché du travail et une transformation profonde dans l'organisation de la protection sociale avec en particulier une réduction du niveau des prestations et de leur durée et un durcissement des conditions d'accès à l'allocation chômage. Elle est alors devenue une société très inégalitaire, connaissant jusqu'à la crise de 2008 la croissance des inégalités la plus forte des économies occidentales.
Les mesures de formation des chômeurs
Les politiques de formation ont également un rôle important à jouer dans le domaine de l'emploi. Elles constituent un bon exemple d'activation des dépenses passives de traitement du chômage. Les politiques de formation permettent d'améliorer la qualification des travailleurs. Leurs objectifs sont de :
- Renforcer l'employabilité, notamment des plus jeunes (le diplôme reste un rempart contre le chômage)
- Améliorer la compétitivité des entreprises en formant une main-d'œuvre qualifiée et productive
- Faciliter l'ajustement entre offre et demande de travail, par exemple en formant des chômeurs aux nouveaux emplois qui se développent dans les services, ou en aidant à la maîtrise des nouvelles technologies.
Qualification
La qualification désigne l'ensemble des savoir-faire et des compétences acquises par un travailleur à travers sa formation et son expérience.