Sommaire
IL'essor des villesAUne croissance spatiale et démographiqueBLes villes : des carrefours commerciauxIIL'émancipation des bourgeois et l'autonomie des villesAL'émancipation des bourgeois face aux seigneursBL'autonomie des villesIIIDe nouveaux modes de vie urbainsAUne société hiérarchisée et organiséeBLa naissance d'une culture urbaineLa population d'Europe occidentale augmente à partir du XIe siècle, et avec elle celle des villes. Du XIIe au XVe siècle, une nouvelle société urbaine émerge, regroupée essentiellement autour de quelques régions comme le Nord de l'Italie, la Flandre ou le Nord de la France. Un commerce international se développe entre les villes, qui s'émancipent aussi de la domination des seigneurs et deviennent parfois des « communes » en s'administrant elles-mêmes. Dans la société inégalitaire urbaine, le groupe social de la bourgeoisie commerçante devient le plus puissant et de nouveaux modes de vie s'y développent.
L'essor des villes
À partir du XIe siècle, les villes connaissent une croissance démographique, spatiale et économique sans précédent. Si d'anciennes villes poursuivent leur développement, certains carrefours commerciaux deviennent de véritables pôles économiques.
Une croissance spatiale et démographique
Les villes, grâce au dynamisme économique des campagnes qui peuvent les nourrir, connaissent une croissance démographique importante à partir du XIe siècle. Elles se développent au-delà des remparts antiques.
À partir du XIe siècle, on assiste :
- soit à la création de nouvelles villes ;
- soit au peuplement de nouveaux quartiers, à côté des villes plus anciennes ou au-delà de leurs anciens remparts.
La proportion de la population urbaine passe de 10 % à 20 % en deux siècles. Certaines grandes villes de l'Antiquité comme Florence, Milan ou Paris connaissent une renaissance et se développent fortement. Certaines villes voient leur population exploser.
- Paris passe de 50 000 habitants en 1200 à 200 000 habitants en 1300.
- Florence passe de 40 000 habitants en 1200 à 100 000 habitants en 1300.
L'essor des villes est dû à plusieurs facteurs :
- l'expansion des campagnes, qui entraîne une augmentation des productions agricoles permettant de nourrir une population grandissante ;
- une commercialisation importante en ville des surplus agricoles ;
- des artisans de plus en plus nombreux, pour satisfaire les besoins croissants de la population urbaine ;
- les défrichements, qui entraînent la fondation de nombreuses villes par les seigneurs.
Limoges fait partie des villes qui ont connu une très forte croissance entre le XIe et le XIVe siècle, en se développant sur les terres agricoles alentour. Sa croissance s'établit à partir de deux pôles :
- Tout d'abord, un château est construit sur un site à l'est, après l'assèchement des marais et à partir des lieux religieux historiques de la ville.
- Ensuite, la ville s'agrandit à partir du fleuve et ses faubourgs rejoignent alors l'enceinte du château.
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Les villes : des carrefours commerciaux
L'artisanat et le commerce alimentent l'essor des villes. Les plus dynamiques deviennent des points de passage incontournables sur les routes internationales de commerce.
L'essor des villes contribue au dynamisme économique de l'Europe occidentale. Les villes situées sur les grandes routes commerciales européennes connaissent un fort développement. L'artisanat bénéficie de l'augmentation de la demande en ville, avec l'arrivée de nouveaux produits issus du commerce ou de produits agricoles à transformer (boulangers, bouchers, etc.).
Les ports comme ceux de Bruges ou Venise, les villes du Nord de l'Italie, les villes de Flandre, ou encore les grandes villes de foire comme Troyes se développent grâce au grand commerce de l'Europe occidentale. Les voies maritimes et terrestres relient l'Europe du Nord à l'Europe du Sud et permettent également d'échanger de nombreux produits avec l'Afrique du Nord et l'Europe de l'Est.
L'émancipation des bourgeois et l'autonomie des villes
Le commerce enrichit les artisans, les marchands et les banquiers des villes. Ces bourgeois renforcent leur puissance économique et cherchent à s'affranchir de la tutelle des seigneurs.
L'émancipation des bourgeois face aux seigneurs
Le développement économique des villes rend les bourgeois assez puissants pour s'émanciper. Certaines villes obtiennent des chartes de franchises accordées par les seigneurs, qui les reconnaissent comme communes libres de s'administrer.
Bourgeois
Les bourgeois sont des habitants d'une ville qui ont obtenu des libertés urbaines de la part d'un seigneur. Cette catégorie sociale est composée de tous les travailleurs riches et puissants, qui ne sont pas seigneurs.
Le développement démographique et économique des villes enrichit considérablement les bourgeois, qui exercent diverses professions telles que banquier, marchand ou artisan.
Giovanni Arnolfini est un marchand du XVe siècle, né en Italie. Il s'est établi à Bruges et y a amassé une fortune grâce au commerce et aux activités bancaires. Il fournit la cour de Bourgogne en draps de luxe. Le peintre Jan van Eyck l'a représenté avec son épouse dans un tableau qui souligne l'opulence dans laquelle ils vivent.
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Les bourgeois s'unissent dans des communes pour réclamer des libertés et le droit de gouverner la ville. Ils obtiennent des chartes de franchises, qui leur confèrent le droit d'être dirigés par leurs propres représentants.
Charte de franchises
Une charte de franchises est un document dans lequel le seigneur accorde des droits et des privilèges aux bourgeois, en leur garantissant une autonomie pour gérer la ville.
Les bourgeois établissent ainsi des conseils qui administrent la ville sans le seigneur.
L'autonomie des villes
Dans les villes, les bourgeois s'organisent et s'unissent. L'autonomie des villes s'illustre par des constructions symboliques qui témoignent de leur indépendance.
Les bourgeois s'unissent dans les villes et obtiennent des chartes de franchises. Cette autonomie des villes vis-à-vis des seigneurs s'affirme notamment par des symboles comme les tours (les beffrois de Flandre). Les bourgeois qui siègent au conseil communal sont des échevins. Ils construisent des palais qui témoignent de leur richesse et de leur pouvoir.
Bruges est l'une des villes les plus peuplées du XIIIe siècle, avec 50 000 habitants. Grâce au développement de son artisanat et de ses nombreux liens avec le grand commerce maritime et terrestre, la ville connaît une prospérité exceptionnelle. De très nombreux navires y débarquent leurs marchandises chaque jour afin qu'elles soient transportées jusqu'au centre. En 1281, la ville reçoit une charte de franchises qui précise les rapports entre le comte, seigneur des Flandres, et le conseil communal, composé de bourgeois. Le beffroi est ainsi construit au XIIIe siècle pour illustrer la puissance de la ville et y faire siéger le conseil de la commune.
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De nouveaux modes de vie urbains
Par rapport aux campagnes, la ville est un monde nouveau, plus étroit et plus encombré. Les différentes corporations qui la constituent sont organisées en métiers. La société urbaine est très inégalitaire et les habitants les plus riches concentrent les pouvoirs.
Une société hiérarchisée et organisée
Les nombreux artisans qui peuplent les villes s'organisent en corporations pour défendre leurs intérêts. Les élites concentrent la majeure partie des pouvoirs politiques et économiques.
Corporation
Une corporation est une association de personnes exerçant le même métier. Une corporation peut notamment choisir les personnes qui ont le droit d'y entrer et celles qui en sont exclues.
Chaque activité artisanale est encadrée au sein d'une corporation. Celle-ci réglemente le travail et organise les relations entre les apprentis et leurs maîtres. Elles favorisent ainsi les transferts de savoir-faire, tout en protégeant leurs membres. Il existe de nombreuses activités économiques en ville, autour de différents métiers :
- le travail du textile, composé de drapiers qui contrôlent la chaîne de production, de la tonte des animaux au tissage des vêtements ;
- le travail des métaux ;
- les métiers liés à l'alimentation comme les bouchers et les boulangers ;
- les métiers du bâtiment, stimulés par l'agrandissement des villes et la construction des bâtiments publics ou de gigantesques cathédrales.
Ce vitrail du métier des drapiers se trouve dans une chapelle construite en l'honneur de saint Blaise. C'est le patron de cette confrérie, c'est-à-dire qu'il est un saint protecteur pour la profession. Un total de huit scènes évoque le travail des différents métiers de la corporation.
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Une élite urbaine, composée des plus riches personnages de la ville et des habitants siégeant au conseil de la commune, domine la société bourgeoise. Cette hiérarchie sociale au sein des villes peut créer des tensions, notamment avec les petits artisans indépendants ou avec ceux qui ne possèdent rien et qui constituent une part non négligeable de la population.
La naissance d'une culture urbaine
Les villes sont très dynamiques sur le plan culturel. Les riches habitants commandent de nombreux tableaux, vitraux et autres objets d'art. Ils attirent dans les villes des artistes et stimulent la vie intellectuelle.
Les religieux et les riches habitants des villes commandent des portraits, des vitraux ou font construire de splendides demeures pour matérialiser leur richesse et leur puissance. Ces commandes stimulent les activités culturelles dans les villes et attirent des artistes.
Des universités apparaissent dès le XIIe siècle dans des villes comme Paris, Montpellier ou Bologne.
Certaines villes se lancent dans la construction de bâtiments religieux colossaux comme les cathédrales. Ces bâtiments nécessitent la mobilisation de plusieurs milliers d'ouvriers et des moyens financiers considérables.
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