Sommaire
ILa gouvernance économique mondiale de 1944 à 1971ALes ambitions de la gouvernance économiqueBLes institutions internationales dominées par les États-UnisCSuccès, limites et critiques du système de Bretton WoodsIINouvelle gouvernance et instabilité économique (1971 - 1991)AUne économie plus instable1La fin du système de Bretton Woods2Les conséquences des chocs pétroliers3Les débuts de la libéralisation de l'économieBLes mutations et les critiques de la gouvernance économique1La naissance du G7, la gouvernance des pays riches2Limites et critiques de la gouvernanceIIILa gouvernance économique mondiale depuis 1991AUne gouvernance économique libérale1L'Organisation mondiale du commerce (OMC)2La multiplication des regroupements régionaux3Le consensus de WashingtonBQuelle gouvernance face à la crise économique de 2007 ?1La crise des subprimes2Les difficultés de la gouvernance mondiale face à la criseCLes contestations de la gouvernance économique mondiale libérale1Les acteurs de la critique de la gouvernance2Les critiques3Les conséquences de cette contestationEn 1944, les Alliés remportent la guerre et veulent mettre en place une gouvernance économique ayant pour objectif la stabilité économique et la sécurité collective dans le monde. Les institutions de la gouvernance économique mondiale sont dominées par les États-Unis même si le bloc de l'Est ou les pays émergents contestent ce rôle.
Le système de Bretton Woods permet de stabiliser les monnaies qui sont indexées au dollar, lui-même indexé à l'or. À partir de 1971, les États-Unis abandonnent le système de Bretton Woods.
Pour faire face à la crise économique et à l'endettement des pays provoqués par les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979, la libéralisation de l'économie est opérée.
La gouvernance « des pays riches » instituée avec le G6 en 1975 rencontre des critiques. La chute de l'URSS en 1991 généralise l'économie de marché à l'ensemble de la planète et la libéralisation de l'économie se poursuit.
En 2007, la crise des subprimes affirme la nécessité d'une nouvelle gouvernance mondiale qui est largement critiquée. Des réformes sont annoncées mais peu appliquées.
La gouvernance économique mondiale de 1944 à 1971
Les ambitions de la gouvernance économique
En 1944, alors que les Alliés sont en passe de remporter la Seconde Guerre mondiale, l'heure est au bilan.
La crise économique des années 1930 est en partie responsable de la montée du nazisme et du déclenchement du conflit. Les économies sont totalement bouleversées par la guerre et les marchés internationaux sont complètement désorganisés. En Europe et au Japon, les dégâts sont considérables et les destructions sont estimées à environ 2000 milliards de dollars.
De plus, dès la fin de la guerre, les États-Unis s'inquiètent de la progression du communisme et de l'audience que rencontrent ces partis au sein des populations que le conflit a placées dans une situation sociale précaire. En France, le rationnement dure jusqu'en 1949.
L'objectif d'une gouvernance mondiale est donc d'éviter les désordres économiques afin de créer les conditions permettant une paix durable. Un moyen essentiel de cette gouvernance est de mettre en place une coopération économique permettant la stabilité des monnaies et constituant ainsi les bases d'une croissance économique solide.
Alors que les États intervenaient le moins possible dans l'économie avant la Seconde Guerre mondiale, une rupture est engagée après le conflit.
En s'inspirant des principes keynésiens, l'État doit désormais jouer un rôle dans l'économie : il est interventionniste. L'ouverture des frontières est aussi encouragée. L'objectif est de rendre les économies solidaires entre elles grâce au développement des échanges internationaux.
Les institutions internationales dominées par les États-Unis
Les États-Unis, « arsenal des démocraties », ont renforcé leur puissance économique pendant la guerre.
Leur capacité productive a augmenté et ils possèdent les deux tiers des réserves mondiales d'or. Pour assurer des débouchés à leur industrie et éviter une progression du communisme, ils mettent en place le plan Marshall qui vient en aide aux économies dévastées par la guerre.
Leur poids prépondérant dans l'économie mondiale leur permet de dominer les institutions créées pour assurer la gouvernance mondiale.
- Lors des accords de Bretton Woods en 1944, le Système monétaire international confirme le rôle central du dollar qui devient la seule monnaie convertible en or. Pour assurer la stabilité monétaire, la valeur des autres monnaies est fixée sur le dollar. Le billet vert devient ainsi l'étalon monétaire international.
- Le Fonds monétaire international (FMI), qui siège à Washington, a pour mission de contrôler le bon fonctionnement du SMI et d'aider les pays en difficulté afin d'éviter une crise identique à celle de 1929.
- La Banque internationale de reconstruction et de développement (BIRD), qui est aussi située dans la capitale américaine, aide à la reconstruction du Japon et de l'Europe. À partir des années 1960, elle finance des projets dans les pays décolonisés.
- Les accords du GATT signés en 1947 organisent des conférences internationales (des rounds) visant à développer le libre-échange. Ils constituent un moyen pour les États-Unis d'élargir leurs marchés.
La contribution financière à ces organisations et le rôle dans la prise de décision sont proportionnels à la place que les pays occupent dans le commerce international. Ce mécanisme assure une place dominante aux États-Unis.
Succès, limites et critiques du système de Bretton Woods
Le système de Bretton Woods permet d'accompagner la croissance économique.
Les États-Unis maintiennent leur poids dans l'économie mondiale et les FTN américaines se développent. Les pays occidentaux enregistrent également une forte croissance et le niveau de vie de leurs populations augmente.
Cependant, plusieurs pays sont à l'écart du système de Bretton Woods :
- Le bloc de l'Est refuse le libéralisme et applique une politique communiste avec des économies dirigées. Le COMECON (ou CAEM) est un marché commun entre les États communistes.
- Les pays « non alignés » (pays du tiers-monde), qui se regroupent à Bandung en 1955 et qui sont rejoints ensuite par les pays décolonisés, contestent les règles de la gouvernance mondiale, qui ne tiennent pas compte des déséquilibres des échanges.
En 1964, les non-alignés créent le G77 au sein de l'ONU, dont le but est de promouvoir les intérêts économiques de ses membres et de peser sur les négociations au sein de l'ONU. Le groupe des 77 regroupe majoritairement des pays en développement.
La même année, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) vise à améliorer l'équilibre des échanges entre pays riches et pays pauvres.
Cependant, ces tentatives se soldent par des échecs et la gouvernance mondiale reste dominée par les pays riches. En 1960, la création de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) montre une volonté de la part des pays producteurs de pétrole d'avoir une influence dans la détermination des tarifs des hydrocarbures.
Nouvelle gouvernance et instabilité économique (1971 - 1991)
Une économie plus instable
La fin du système de Bretton Woods
Dès la fin des années 1960, l'économie est plus instable.
Les États-Unis connaissent des difficultés économiques et leur balance des paiements est de plus en plus déficitaire.
- La guerre froide et surtout la guerre du Vietnam augmentent leurs dépenses.
- Par ailleurs, les firmes transnationales américaines multiplient leurs investissements à l'étranger et accentuent le déficit de la balance des paiements.
- Enfin, les États partenaires des États-Unis ont de moins en moins confiance dans le dollar et l'échangent contre de l'or.
Afin d'éviter une diminution trop forte du stock d'or, Richard Nixon annonce en 1971 la fin de la convertibilité du dollar en or, c'est-à-dire la fin de la gouvernance mondiale décidée à Bretton Woods. La valeur des monnaies est désormais déterminée par le marché et évolue en fonction de l'offre et de la demande. Les accords de Kingston en 1976 entérinent la mise en place de taux de change flottants.
Les conséquences des chocs pétroliers
Les tensions au Proche-Orient ont pour conséquence deux chocs pétroliers :
- En 1973, suite à la guerre du Kippour, les pays de l'OPEP décident d'augmenter le prix du pétrole pour les pays qui soutiennent Israël.
- En 1979, suite à la révolution en Iran, les prix du pétrole connaissent une nouvelle flambée.
Cette hausse des cours du pétrole entraîne une crise mondiale qui touche d'abord les pays industrialisés. En effet, un des fondements de la croissance économique des Trente Glorieuses était la possibilité de disposer d'un approvisionnement en énergie peu cher. Avec la hausse des cours du pétrole, les coûts de production augmentent et les pays industrialisés deviennent moins compétitifs.
Pour ces pays, cette crise est accentuée par le recours de plus en plus fréquent aux délocalisations. En effet, les entreprises cherchent à produire dans des pays dans lesquels la main-d'œuvre est peu chère, notamment dans les nouveaux pays industrialisés asiatiques ou « dragons », c'est-à-dire la Corée du Sud, Taïwan, Singapour et Hong Kong.
En conséquence, les pays industrialisés rentrent dans une période nommée « les Vingt Piteuses » qui est marquée par une forte inflation et l'apparition d'un chômage massif.
Les pays en développement sont eux aussi touchés par la crise. Ils subissent la baisse de la demande et l'effondrement des cours des matières premières. Pour minimiser les effets de la crise, ils ont recours à des prêts auprès d'organismes privés.
Certains s'endettent massivement, surtout en Amérique latine. En 1982, le Mexique annonce qu'il n'est pas en mesure de rembourser sa dette et 14 pays en développement se déclarent eux aussi en cessation de paiement.
Les débuts de la libéralisation de l'économie
Pour répondre à la crise économique, certains États, dont les précurseurs sont les États-Unis sous la présidence de Ronald Reagan et la Grande-Bretagne dirigée par Margaret Thatcher, décident d'appliquer les idées néolibérales.
Les politiques libérales ont pour objectif une augmentation de la circulation des capitaux permettant une reprise de la croissance.
- Les dépenses publiques sont réduites.
- Les prestations sociales diminuent drastiquement et les entreprises publiques sont privatisées.
Le but est de provoquer l'afflux de capitaux dans ces secteurs ouverts à la concurrence et la réduction des impôts permise par la réduction des dépenses publiques.
Par ailleurs, en baissant les droits de douanes, les échanges commerciaux internationaux sont favorisés et facilités.
Les pays en développement cherchent à obtenir des rééchelonnements de la dette et des aides pour leur développement. Le FMI et la Banque mondiale conditionnent ces aides à la mise en place de plans d'ajustements structurels qui imposent des mesures drastiques de libéralisation de l'économie et de baisse des dépenses publiques.
Cette libéralisation de l'économie provoque un recul de l'intervention des États et un rôle accru des acteurs privés. Les banques centrales, elles, s'émancipent de la tutelle des États.
Les mutations et les critiques de la gouvernance économique
La naissance du G7, la gouvernance des pays riches
La fin du système de Bretton Woods et les difficultés causées par la crise économique conduisent les États les plus riches à mettre en place le G6.
Le G6 est une réunion régulière des chefs d'État et de gouvernement des États les plus riches (États-Unis, Japon, France, Italie, Grande-Bretagne et RFA). À l'initiative de la France, leur première réunion se tient à Rambouillet en 1975. Le Canada rejoint ce groupe en 1976, il devient alors le G7.
L'objectif du G7 est de permettre une coopération entre les économies les plus riches afin de coordonner les politiques économiques et monétaires. Le groupe s'occupe aussi des questions relatives à l'énergie, à l'emploi et à l'aide au développement.
Limites et critiques de la gouvernance
Le G7 est victime de nombreuses critiques.
On lui reproche d'être un « club de riches » qui prend des décisions dans son seul intérêt au détriment des pays en développement.
En effet, la situation économique mondiale s'est fortement dégradée.
- La précarité des populations les plus fragiles a augmenté dans les pays riches.
- Dans les pays en développement, la baisse des dépenses de santé et d'éducation a des conséquences sur le bien-être des populations et menace l'avenir de ces pays.
- La dette mondiale a quasiment triplé durant les années 1980. Elle était de 560 milliards de dollars en 1980, elle est passée à 1450 milliards de dollars en 1990.
- La dérégulation des pays en voie de développement a augmenté l'instabilité de leurs économies.
Une nouvelle conception du développement, basée sur le respect de l'environnement et la réduction des inégalités émerge en 1987 avec la notion de développement durable, conceptualisée par la norvégienne Gro Harlem Brundtland.
La gouvernance économique mondiale depuis 1991
Une gouvernance économique libérale
L'Organisation mondiale du commerce (OMC)
La fin de l'URSS en 1991 marque la victoire du capitalisme à l'échelle mondiale.
Les États-Unis sont les grands vainqueurs de la guerre froide et l'idéologie libérale, qui se développe depuis la fin des années 1970, peut désormais s'appliquer à l'ensemble du globe. La Russie rejoint en 1998 le G7 qui devient alors le G8.
L'OMC est créée en 1995 pour remplacer le GATT. Son objectif, inscrit dans la doctrine libérale, est de favoriser l'ouverture commerciale des États et de régler les conflits commerciaux entre ses États membres. Elle a des compétences élargies qui englobent l'industrie, mais aussi le commerce, les services, l'agriculture et la propriété intellectuelle. Un organe de règlement des conflits est mis en place afin de trancher les différends commerciaux.
La multiplication des regroupements régionaux
L'OMC partage son influence avec celle des accords économiques régionaux qui se multiplient.
Ces unions régionales visent à mettre en place des zones de libre-échange :
- L'Europe économique, qui est en marche depuis les années 1950, adopte l'Acte unique en 1986 et réalise la mise en place du marché commun en 1992.
- Le MERCOSUR est une union économique du Sud de l'Amérique créée en 1991.
- L'ASEAN devient une zone de libre-échange en 1991.
- L'ALENA associe le Mexique, les États-Unis et le Canada en 1994.
En plus de ces unions, des traités bilatéraux sont signés.
Le consensus de Washington
Les plans d'ajustement structurels utilisés dès les années 1980 deviennent les principaux outils des institutions de la gouvernance économique internationale.
Le consensus de Washington est mis en place. Il inclut des mesures libérales appliquées aux économies en difficulté par des institutions comme le FMI et la Banque mondiale, soutenues par le Trésor américain. Ces dix mesures sont théorisées par l'économiste américain John Williamson. On trouve notamment :
- la libéralisation de l'économie et la déréglementation des marchés ;
- la réorientation des dépenses publiques vers des secteurs plus productifs que ceux de la santé ou de l'éducation ;
- la rigueur budgétaire et les privatisations.
Quelle gouvernance face à la crise économique de 2007 ?
La crise des subprimes
Aux États-Unis, profitant de la déréglementation des finances, des banques et des assurances ont proposé des prêts subprimes afin de financer des achats immobiliers.
Les prêts subprimes permettent à des ménages à faibles revenus de s'endetter pour acheter des maisons. Comme ces prêts subprimes représentent un certain risque pour les créanciers qui les financent (les emprunteurs ayant une faible capacité de remboursement) les taux d'intérêt, faibles au départ, augmentent fortement par la suite et rendent ces investissements très rentables pour les créanciers.
Dès 2006, le système rencontre des difficultés et provoque une crise économique d'ampleur mondiale. Avec l'augmentation des taux, plus de deux millions de foyers ne peuvent plus rembourser leurs prêts. Les créances immobilières qui ne pourront pas être remboursées s'élèvent à 500 milliards de dollars.
En 2007, le marché américain de l'immobilier s'effondre et la banque Lehman Brothers est en faillite. Comme nombre de ce que l'on appelle des « créances pourries » ont été vendues à l'étranger, la crise devient mondiale. Il s'agit de la plus grosse crise économique depuis celle de 1929.
Les difficultés de la gouvernance mondiale face à la crise
Les institutions de la gouvernance internationale éprouvent de nombreuses difficultés pour remédier à la crise.
L'OMC, qui fonctionne sur le consensus, est déjà confrontée à un échec des négociations entreprises en 2001 dans le cycle de Doha. Elle est incapable de trouver des solutions à la crise des subprimes.
Le FMI intervient auprès de certains États (notamment européens, comme l'Islande, le Portugal, la Grèce et l'Espagne) en recapitalisant les banques afin d'éviter la faillite, mais les aides du FMI restent conditionnées à des politiques libérales de rigueur.
Le G20 (qui regroupent les pays du G7 et les pays émergents) se réunit en 2008 afin de trouver des solutions. Quelques décisions sont prises, notamment en ce qui concerne les paradis fiscaux, mais elles n'aboutissent pas réellement.
Pays émergent
Les pays émergents sont des pays qui ont un PIB/habitant inférieur à celui des pays développés mais qui connaissent une forte croissance.
Les BRICS, Brésil, Russie (qui n'est pas à proprement parler un pays émergent), l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud sont les principaux pays émergents.
Les contestations de la gouvernance économique mondiale libérale
Les acteurs de la critique de la gouvernance
Différentes voix se lèvent alors contre la gouvernance libérale de l'économie mondiale.
C'est le cas du mouvement altermondialiste.
- Certaines associations, comme ATTAC créée en France en 1998, critiquent la mondialisation libérale.
- En 1999, des heurts éclatent à Seattle lors d'une rencontre de l'OMC.
- À partir de 2001, le Forum social mondial se rencontre chaque année pour discuter des alternatives aux politiques de l'OMC, du FMI et de la Banque mondiale.
La crise de 2008 conduit également à l'apparition de mouvements citoyens contestant l'ordre libéral. C'est le cas des Indignés ou du mouvement Occupy Wall Street. De nouveaux partis de gauche tels que Podemos en Espagne ou Syriza en Grèce voient le jour.
Les ONG, par leur travail sur le terrain, constituent aussi des acteurs de la contestation de la gouvernance internationale.
Les critiques
Plusieurs sujets sont au cœur des débats.
Le climat est une de leurs préoccupations. En effet, le réchauffement climatique provoqué par les activités humaines constitue une menace à laquelle les différents sommets étatiques (comme ceux de Kyoto en 1997, de Johannesburg en 2002 et de Copenhague en 2009) n'ont pas su répondre de manière efficace.
Les plans d'ajustement structurels sont aussi l'objet de critiques : ils ont en effet pour conséquence une augmentation du chômage et des inégalités et n'ont pas permis de relancer la croissance.
Les conséquences de cette contestation
Les résultats de ces contestations sont modérés.
En effet, le mouvement altermondialiste manque de cohésion et d'unité.
Malgré cela, certains changements ont été réalisés dans les institutions internationales.
- La Banque mondiale et le FMI ont modifié leur droit de vote en 2010 permettant aux pays émergents d'avoir plus de poids dans la prise de décision.
- Le FMI et la Banque mondiale ont remis en cause le consensus de Washington en reconnaissant la nécessité de l'intervention de l'État et le contrôle des flux de capitaux.
- Le G20 de 2012 prône la régulation bancaire.