Pour chacun des extraits de texte suivant, déterminer son genre littéraire.
« Il était une fois un roi si grand, si aimé de ses peuples, si respecté de tous ses voisins et de ses alliés, qu'on pouvait dire qu'il était le plus heureux de tous les monarques. Son bonheur était encore confirmé par le choix qu'il avait fait d'une princesse aussi belle que vertueuse ; et les heureux époux vivaient dans une union parfaite. De leur mariage était née une fille, douée de tant de grâce et de charmes, qu'ils ne regrettaient pas de n'avoir pas une plus grande lignée. La magnificence, le goût et l'abondance régnaient dans son palais ; les ministres étaient sages et habiles ; les courtisans, vertueux et attachés ; les domestiques, fidèles et laborieux ; les écuries, vastes et remplies des plus beaux chevaux du monde, couverts de riches caparaçons : mais ce qui étonnait les étrangers qui venaient admirer ces belles écuries, c'est qu'au lieu le plus apparent un maître âne étalait de longues et grandes oreilles. »
(Charles Perrault, « Peau d'âne », Contes de ma mère l'Oye, 1697)
« C'est que l'amour de Christ nous presse, parce que nous sommes convaincus que si un seul est mort pour tous, tous donc sont morts. Et s'il est mort pour tous, c'était afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux. Ainsi, désormais, nous ne percevons plus personne de manière humaine ; et si nous avons connu Christ de manière purement humaine, maintenant nous ne le connaissons plus ainsi. Si quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. Et tout cela vient de Dieu qui nous a réconciliés avec lui par Christ et qui nous a donné le ministère de la réconciliation. »
(Bible, Corinthiens 5.14-21)
« Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé,
Et de tous les côtés au soleil exposé,
Six forts chevaux tiraient un Coche.
Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu.
L'attelage suait, soufflait, était rendu.
Une Mouche survient, et des Chevaux s'approche ;
Prétend les animer par son bourdonnement ;
Pique l'un, pique l'autre, et pense à tout moment
Qu'elle fait aller la machine,
S'assied sur le timon, sur le nez du Cocher ;
Aussitôt que le char chemine,
Et qu'elle voit les gens marcher,
Elle s'en attribue uniquement la gloire ;
Va, vient, fait l'empressée ; il semble que ce soit
Un Sergent de bataille allant en chaque endroit
Faire avancer ses gens, et hâter la victoire.
La Mouche en ce commun besoin
Se plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin ;
Qu'aucun n'aide aux Chevaux à se tirer d'affaire.
Le Moine disait son Bréviaire ;
Il prenait bien son temps ! une femme chantait ;
C'était bien de chansons qu'alors il s'agissait !
Dame Mouche s'en va chanter à leurs oreilles,
Et fait cent sottises pareilles.
Après bien du travail le Coche arrive au haut.
Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt :
J'ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Ça, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.
Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S'introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés. »
(Jean de La Fontaine, « Le Coche et la Mouche », Fables, 1678)
« ŒNONE.
Dieux tout-puissants ! Que nos pleurs vous apaisent.
PHÈDRE.
Que ces vains ornements, que ces voiles me pèsent !
Quelle importune main, en formant tous ces nœuds,
A pris soin sur mon front d'assembler mes cheveux ?
Tout m'afflige et me nuit, et conspire à me nuire.
ŒNONE.
Comme on voit tous ses vœux l'un l'autre se détruire !
Vous-même condamnant vos injustes desseins,
Tantôt à vous parer vous excitiez nos mains.
Vous-même rappelant votre force première,
Vous vouliez vous montrer et revoir la lumière ;
Vous la voyez, Madame, et prête à vous cacher,
Vous haïssez le jour que vous veniez chercher ?
PHÈDRE.
Noble et brillant auteur d'une triste famille,
Toi, dont ma mère osait se vanter d'être fille,
Qui peut-être rougis du trouble où tu me vois,
Soleil, je te viens voir pour la dernière fois.
ŒNONE.
Quoi ! vous ne perdrez point cette cruelle envie ?
Vous verrai-je toujours, renonçant à la vie,
Faire de votre mort les funestes apprêts ? »
(Jean Racine, Phèdre, acte I, scène 3, 1677)
« Je te vis, ma douce amie, je sentis dans mon âme
De la tendre amitié naître la douce flamme ;
Ton cœur comprit le mien, tu comblas mes vœux ;
Sous son paisible abri nous rassemblant tous deux,
Le même toit couvrit notre amitié fidèle,
Et depuis protège de nos cœurs l'union mutuelle.
Ton savoir, ta douceur, ton facile entretien,
Ton esprit plus brillant, ton âge égal au mien,
De tes soins attentifs l'aimable prévenance,
D'un avenir commun la commune espérance,
Tout enfin me charme : et mon cœur attendri
Remercie chaque jour les Dieux de t'avoir pour amie.
Ah ! préservons, protégeons cette union si tendre !
Sur le même torrent, que nous devons descendre,
Contre les mêmes flots prompts à nous réunir,
Nous serons plus gaiement portés vers l'avenir ;
Oui ! crois-moi, l'amitié, ce doux présent des Dieux,
Est plus chère à mon cœur qu'un laurier glorieux. »
(Adolphe Quetelet, « À ma douce amie », Les Poésies diverses, 1862)
« De nouveau accoudé, le sous-chef de gare expliqua qu'il avait dû quitter Le Havre, le matin même, par l'express de six heures quarante. Un ordre du chef de l'exploitation l'appelait à Paris, on venait de le sermonner d'importance. Heureux encore de n'y avoir pas laissé sa place.
— Et madame ? demanda Henri.
Madame avait voulu venir, elle aussi, pour des emplettes. Son mari l'attendait là, dans cette chambre dont la mère Victoire leur remettait la clef, à chacun de leurs voyages, et où ils aimaient déjeuner, tranquilles et seuls, pendant que la brave femme était retenue en bas, à son poste de la salubrité. Ce jour-là, ils avaient mangé un petit pain à Mantes, voulant se débarrasser de leurs courses d'abord. Mais trois heures étaient sonnées, il mourait de faim. »
(Émile Zola, La Bête humaine, 1890)