Sommaire
IIdentifier l'implication du locuteur et du destinataire dans le texteALa situation d'énonciation1Identifier la présence du locuteur2Identifier la présence du destinataire3Identifier le lieu et le moment de l'énonciation4Analyser une situation d'énonciation5Analyser le cadre spatio-temporelBLes différentes approches du locuteur vis-à-vis de son texte1Le narrateur extérieur au récit2Le narrateur interne au récitCLe point de vue adopté par le narrateur1La focalisation externe (ou point de vue externe)2La focalisation interne (ou point de vue interne)3La focalisation zéro (ou point de vue omniscient)DLes liens entre le texte et le récit1Le récit2Le discours ancré dans la situation d'énonciationIILes différents types de discoursALe discours directBLe discours indirectCLe discours indirect libreDLe discours narrativiséIdentifier l'implication du locuteur et du destinataire dans le texte
La situation d'énonciation
Identifier la présence du locuteur
Énonciation
L'énonciation est l'action d'émettre un énoncé. L'énoncé est la forme et le contenu de ce qui est dit.
La communication verbale a toujours lieu dans une situation particulière qu'on appelle "situation d'énonciation". Celle-ci englobe le locuteur, l'interlocuteur et les circonstances de temps et de lieu dans lesquelles est émis l'énoncé.
Julien, reviens !
Dans cet exemple, un locuteur émet un énoncé. Il s'adresse à Julien. Cet énoncé verbal a lieu dans une situation d'énonciation particulière.
L'énonciation étant une communication, elle nécessite un locuteur. Il s'agit de celui qui parle.
Lors d'un discours, la personne qui fait un discours s'adresse à d'autres personnes qui l'écoutent. La personne déclamant le discours est le locuteur, celui qui parle.
Identifier la présence du destinataire
Destinataire
Le destinataire d'un acte d'énonciation est celui qui reçoit le message émis par le locuteur.
Lors du plaidoyer d'un avocat, le jury est le destinataire du discours.
Identifier le lieu et le moment de l'énonciation
La communication entre le locuteur et le destinataire se réalise dans un contexte identifiable.
Le discours contre la peine de mort prononcé par Robert Badinter a eu lieu le 17 septembre 1981 à Paris.
Analyser une situation d'énonciation
Pour analyser la situation d'énonciation d'un énoncé, il faut définir qui parle (le locuteur), à qui (le destinataire), quand et où, et de quoi (l'énoncé).
Lors de son discours "I have a dream" du 28 août 1963, Martin Luther King a dit : "Je fais le rêve qu'un jour cette nation se lèvera et vivra le vrai sens de sa foi : Nous tenons ces vérités comme allant de soi, que les Hommes naissent égaux."
La situation d'énonciation :
Le locuteur : Martin Luther King
Le destinataire : les Américains
Le temps et le lieu : Washington, le 28 août 1963
L'énoncé : un appel à l'égalité
Analyser le cadre spatio-temporel
L'analyse du cadre spatio-temporel du récit passe par le relevé des indications suivantes :
- Les indications de lieu : toutes les indications qui permettent de savoir où se situe l'histoire.
- Les indications de temps : toutes les indications qui permettent de savoir à quelle époque ou à quel moment se déroule l'histoire.
À l'aube, elle partait vers le village de Plaisance, alors que le soleil semblait encore dormir. Elle arrivait vers midi sur la place du marché après un long voyage et restait quatre heures pour vendre ses légumes.
Dans l'exemple précédent, les indications de lieu sont : village de Plaisance et place du marché. Les indications de temps sont : à l'aube, midi et quatre heures.
Les différentes approches du locuteur vis-à-vis de son texte
Le narrateur est celui qui raconte l'histoire. Il ne faut pas le confondre avec l'auteur, une personne réelle qui a composé le livre. L'auteur choisit le statut de son narrateur en le rendant plus ou moins présent.
Charlotte Brontë est l'auteure de Jane Eyre (1847), et Jane Eyre en est la narratrice.
Le narrateur extérieur au récit
Narrateur extérieur
Le narrateur extérieur à l'histoire raconte des faits auxquels il n'a pas participé, comme s'il en avait été seulement le témoin. Le récit est écrit à la troisième personne.
Dès lors qu'il le vit, il s'arrêta de courir, comme si le poids de ses souffrances lui était devenu insupportable. Il n'eut de cesse de le regarder de ses yeux froids et suspicieux, d'où émanaient mille larmes, empreintes de plus de douleur que vous n'oseriez l'imaginer… Son regard devenait glacial à mesure que les instants passaient, et sa blême chair semblait le faire frémir jusqu'au cœur…
Marcel Proust
Le Temps retrouvé, Paris, éd. Gallimard
1927 (publication posthume)
Dans cet extrait, Marcel Proust écrit à la troisième personne du singulier. Le narrateur est donc extérieur à l'histoire.
Le narrateur extérieur peut cependant se manifester pour donner son avis. Il emploie alors souvent la première personne du pluriel et se confond avec le "je" de l'auteur.
Ce que fut l'épreuve, nous renonçons à le dire.
Victor Hugo
Les Misérables, Paris, éd. Albert Lacroix et Cie
1862
Dans Les Misérables de Victor Hugo, le narrateur se permet des interventions en utilisant le "nous".
Le narrateur interne au récit
Narrateur-personnage
Le narrateur-personnage raconte à la première personne des faits auxquels il est censé avoir participé. Cette technique accentue l'effet de vraisemblance, en particulier dans les récits fantastiques.
Je m'attendais à quelque ouvrage du Bas-Empire ; je voyais un chef-d'œuvre du meilleur temps de la statuaire. Ce qui me frappait surtout, c'était l'exquise vérité des formes, en sorte qu'on aurait pu les croire moulées sur nature, si la nature produisait d'aussi parfaits modèles.
Prosper Mérimée
"La Vénus d'Ille", La Vénus d'Ille, Paris, éd. Charpentier (1845)
1837
Dans la nouvelle "La Vénus d'Ille" de Prosper Mérimée, le narrateur raconte l'histoire à la première personne. Le lecteur est tenté de croire à son témoignage.
Il ne faut pas confondre le roman écrit à la première personne (œuvre de fiction) avec le récit autobiographique, relatant des faits réellement vécus par l'auteur.
Hier au soir je me promenais seul ; le ciel ressemblait à un ciel d'automne ; un vent froid soufflait par intervalles. A la percée d'un fourré, je m'arrêtai pour regarder le soleil : il s'enfonçait dans des nuages au-dessus de la tour d'Alluye, d'où Gabrielle, habitante de cette tour, avait vu comme moi le soleil se coucher il y a deux cents ans. Que sont devenus Henri et Gabrielle ? Ce que je serai devenu quand ces Mémoires seront publiés.
François-René de Chateaubriand
Mémoires d'outre-tombe , Paris, éd. Penaud frères
1849-1850
Dans Mémoires d'Outre-tombe de Chateaubriand, l'auteur raconte sa vie. Il utilise le "je" autobiographique.
Le point de vue adopté par le narrateur
La focalisation externe (ou point de vue externe)
La focalisation externe (ou point de vue externe) se réfère à un narrateur externe : celui-ci raconte les faits comme quelqu'un qui les observe de l'extérieur. Il ne peut pas communiquer les sentiments ou les pensées des personnages.
Pour s'essuyer le front, ils retirèrent leurs coiffures, que chacun posa près de soi ; et le petit homme aperçut écrit dans le chapeau de son voisin : Bouvard ; pendant que celui-ci distinguait aisément dans la casquette du particulier en redingote le mot : Pécuchet.
Gustave Flaubert
Bouvard et Pécuchet, Paris, éd. Alphonse Lemerre
1881 (posthume)
Cet extrait est raconté comme si le narrateur était placé à côté des personnages. Il n'en dit pas plus que ce qu'il voit. Le narrateur adopte donc un point de vue externe.
La focalisation interne (ou point de vue interne)
La focalisation interne permet au lecteur de suivre les péripéties à travers les pensées et les sentiments d'un personnage précis.
Un matin, avant le jour, le Tétrarque Hérode Antipas vint s'y accouder et regarda. Les montagnes, immédiatement sous lui, commençaient à découvrir leurs crêtes, pendant que leur masse, jusqu'au fond des abîmes, était encore dans l'ombre. Un brouillard flottait, il se déchira, et les contours de la mer Morte apparurent. L'aube, qui se levait derrière Machaerous, épandait une rougeur.
Gustave Flaubert
"Hérodias", Trois contes, Paris, éd. Charpentier
1877
Dans cet extrait, le narrateur décrit ce que voit le personnage. Il se place donc d'un point de vue interne.
La focalisation zéro (ou point de vue omniscient)
Avec la focalisation zéro, le narrateur n'adopte pas le point de vue d'un personnage précis, il n'y a pas de restriction du champ de vision. Il est omniscient, c'est-à-dire qu'il sait tout de ses personnages ainsi que des événements passés ou à venir.
Le garçon leva les yeux, reconnaissant, il essaya de sourire, et une sorte de lumière éclaira un bref instant son visage pâle. Il y avait toujours l'amère solitude d'une créature fragile, innocente, humiliée, sans défense; le désir désespéré d'un peu de consolation ; un sentiment pur, douloureux et très beau qu'il était impossible de définir.
Dino Buzzati
"Pauvre petit garçon !" ("Povero bambino!"), Le K, trad. Jacqueline Remillet, Paris, éd. Robert Laffont (1967)
1966
Dans cet extrait, le narrateur semble tout connaître du passé et des pensées de l'ensemble des personnages. Il se place donc selon une focalisation zéro.
Un romancier peut varier les focalisations à l'intérieur d'une même œuvre. Étudier la focalisation dans un extrait de roman permet d'évaluer les informations données par le narrateur au lecteur.
Les liens entre le texte et le récit
Le récit
Le récit est un discours coupé de la situation d'énonciation dans laquelle évoluent les personnages. Il s'agit du message proféré par le narrateur.
Discours coupé de la situation d'énonciation
Le discours coupé de la situation d'énonciation correspond aux éléments écrits dans le récit et qui ne sont pas formulés par les personnages. C'est le discours du narrateur.
Dans un récit, les actions des personnages appartiennent au discours coupé de la situation d'énonciation.
Le discours ancré dans la situation d'énonciation
Dans le récit, il existe souvent un discours entre les personnages. Ce discours est un échange entre les personnages qui se situe dans le temps et le lieu du récit.
Discours ancré dans la situation d'énonciation
Le discours ancré dans la situation d'énonciation correspond aux paroles prononcées par les personnages. Il peut être :
- Du discours direct
- Du discours indirect (ralentit la vitesse et donne une dimension théâtrale au récit)
- Du discours indirect libre
- Du discours narrativisé
Un dialogue appartient au discours ancré dans la situation d'énonciation.
Les différents types de discours
Le discours direct
Discours direct
Le discours direct rapporte les paroles des personnages telles qu'elles ont été prononcées.
Rappelle-moi !
Dans cet exemple, les paroles sont rapportées telles qu'elles ont été prononcées.
On reconnaît le discours direct :
- À la présence de guillemets au début et à la fin du discours.
- Au changement de locuteur signifié par un retour à la ligne et un tiret à chaque nouvelle prise de parole.
- À l'emploi du présent d'énonciation.
- À la présence de propositions juxtaposées incises (entre virgules, à la suite des paroles des personnages) où le sujet et le verbe sont inversés.
Le discours indirect
Discours indirect
Le discours indirect rapporte le contenu du discours d'un personnage dans une proposition subordonnée conjonctive.
Marianne répond qu'elle ne veut plus aller au cinéma.
Dans cet exemple, le discours du sujet est rapporté après la conjonction "que". Il est introduit par le verbe de parole "répond". La proposition "qu'elle ne veut plus aller au cinéma" est une proposition subordonnée conjonctive.
Le discours indirect accélère légèrement le récit. Le narrateur a alors une place d'intermédiaire. C'est lui qui rapporte les paroles et peut les transformer. Il peut créer des imprécisions au service du récit. Le lecteur n'a pas les paroles exactes des personnages et peut se poser les questions suivantes : le narrateur lui ment-il ? Lui cache-t-il des informations ? Comment interpréter ces paroles ?
Le discours indirect libre
Discours indirect libre
Le discours indirect libre rapporte les paroles d'un personnage de manière indirecte sans employer de proposition subordonnée indirecte, de sorte que le lecteur ne peut parfois pas identifier si ces paroles sont celles du narrateur ou celles d'un personnage.
L'heure était venue.
Dans cet exemple, le lecteur peut difficilement savoir qui s'exprime, un personnage ou le narrateur. Le discours est ici très impersonnel.
Le discours indirect libre crée un doute. Le lecteur ignore qui parle, le narrateur ou le personnage. Cela permet notamment de transmettre les pensées d'un personnage (le narrateur s'étant introduit dans son esprit) ou de camoufler certains commentaires du narrateur.
Le discours narrativisé
Discours narrativisé
Le discours narrativisé résume les paroles d'un ou plusieurs personnages.
On parla des dispositions à prendre avant de servir le dessert.
Dans cet exemple, le narrateur choisit de ne pas s'attarder sur la conversation. Il précise qu'il y a eu un échange verbal, mais n'en donne pas le contenu. C'est du discours narrativisé.
Ce type de discours est en particulier utilisé lorsque le narrateur cherche à ne pas s'attarder sur les paroles prononcées. Le récit peut être grandement accéléré.