Après avoir lu le texte suivant, répondre aux questions qui permettront de l'étudier.
Pot-Bouille
Émile Zola
1882
« — Vous n'avez pas d'enfant, monsieur. Ça viendra… Ah ! C'est une responsabilité surtout pour une mère !
— Moi, quand cette petite-là est née, j'avais quarante-neuf ans, monsieur, un âge où l'on sait heureusement se conduire. Un garçon encore pousse tout seul, mais une fille ! Et j'ai la consolation d'avoir fait mon devoir, oh ! Oui !
Alors par phrases brèves, elle dit son plan d'éducation. L'honnêteté d'abord. Pas de jeux dans l'escalier, la petite toujours chez elle, et gardée de près, car les gamines ne pensent qu'au mal. Les portes fermées, les fenêtres closes, jamais de courants d'air, qui apportent les vilaines choses de la rue. Dehors, ne point lâcher la main de l'enfant, l'habituer à tenir les yeux baissés, pour éviter les mauvais spectacles. En fait de religion, pas d'abus, ce qu'il en faut comme frein moral. Puis, quand elle a grandi, prendre des maîtresses, ne pas la mettre dans les pensionnats, où les innocentes se corrompent ; et encore assister aux leçons, veiller à ce qu'elle doit ignorer, cacher les journaux bien entendus, et fermer la bibliothèque.
— Une demoiselle en sait toujours de trop, déclara la vieille en terminant.
Pendant que sa mère parlait, Marie, les yeux vagues, regardait dans le vide. Elle revoyait le petit logement cloîtré, ces pièces étroites de la rue Durantin, où il ne lui était pas permis de s'accouder à la fenêtre. C'était une enfance prolongée, toutes sortes de défenses qu'elle ne comprenait pas, des lignes que sa mère raturait à l'encre sur leur journal de mode, et dont les barres noires la faisaient rougir, des leçons expurgées qui embarrassaient ses maîtresses elles-mêmes, lorsqu'elle les questionnait. Enfance très douce d'ailleurs, croissance molle et tiède de serre chaude, rêve éveillé où les mots de la langue et les faits de chaque jour se déformaient en significations niaises. Et, à cette heure encore, les regards perdus, pleine de ces souvenirs, elle avait aux lèvres le rire d'une enfant, restée ignorante dans le mariage.
— Vous me croirez si vous voulez, dit M. Vuillaume, mais ma fille n'avait pas encore lu un seul roman, à dix-huit passés… N'est-ce pas, Marie ?
— Oui, papa.
— J'ai, continua-t-il, un George Sand très bien relié, et malgré les craintes de sa mère, je me suis décidé à lui permettre, quelques mois avant son mariage, la lecture d'André, une œuvre sans danger, toute d'imagination, et qui élève l'âme… Moi, je suis pour une éducation libérale. La littérature a certainement des droits… Cette lecture lui produisit un effet extraordinaire, monsieur. Elle pleurait la nuit, en dormant : preuve qu'il n'y a rien de tels qu'une imagination pure, pour comprendre le génie.
— C'est si beau ! murmura la jeune femme, dont les yeux brillèrent. »
Quel est le genre littéraire de ce texte ?
Quel est le type de ce texte ?
Quels sont les personnages de cet extrait ?
Quel est le sujet de cet extrait ?
Quel est le registre de cet extrait ?
Dans le passage suivant, par quels moyens d'écriture le plan d'éducation de Mme Vuillaume est-il présenté ?
« L'honnêteté d'abord. Pas de jeux dans l'escalier, la petite toujours chez elle, et gardée de près, car les gamines ne pensent qu'au mal. Les portes fermées, les fenêtres closes, jamais de courants d'air, qui apportent les vilaines choses de la rue. Dehors, ne point lâcher la main de l'enfant, l'habituer à tenir les yeux baissés, pour éviter les mauvais spectacles. En fait de religion, pas d'abus, ce qu'il en faut comme frein moral. Puis, quand elle a grandi, prendre des maîtresses, ne pas la mettre dans les pensionnats, où les innocentes se corrompent ; et encore assister aux leçons, veiller à ce qu'elle doit ignorer, cacher les journaux bien entendus, et fermer la bibliothèque. »
Comment pourrait-on qualifier ce plan d'éducation réservé aux filles ?
Quel événement permet de raviver la joie dans les yeux de la jeune femme ?