Sommaire
IL'estimation de l'âge de la Terre jusqu'au XIXe siècleADe l'Antiquité aux méthodes basées sur l'interprétation de la BibleBLe rôle des progrès techniques1Une datation par la vitesse de la sédimentation et de l'érosion2Des méthodes expérimentales s'appuyant sur le refroidissement des corpsIILes nouvelles méthodes utilisant la radioactivitéL'estimation de l'âge de la Terre jusqu'au XIXe siècle
Attribués dans un premier temps à des causes divines, les phénomènes terrestres ne font pas l'objet d'une étude poussée chez les Grecs. La naissance de la Terre n'y échappe pas et ne sera étudiée qu'avec l'apparition des religions monothéistes. À partir du XVIIIe siècle, les progrès techniques permettent des études poussées de l'âge de la Terre, dont la datation par la vitesse de la sédimentation et de l'érosion et des méthodes expérimentales s'appuyant sur le refroidissement des corps.
De l'Antiquité aux méthodes basées sur l'interprétation de la Bible
Durant l'Antiquité, les phénomènes terrestres sont habituellement attribués à des causes divines ou surnaturelles. C'est l'apparition des religions monothéistes qui ouvre la possibilité de dater la naissance de la Terre.
Dans l'Antiquité, les superstitions sont importantes. On croit que les phénomènes naturels sont l'oeuvre des dieux.
Chez les Grecs, les tremblements de terre sont dus à Poséidon, « l'ébranleur du sol ».
Pour Aristote, la Terre est éternelle : elle a toujours existé et existera toujours, la question de son âge ne se pose pas.
C'est avec l'apparition des religions monothéistes et l'idée qu'un Dieu unique a créé la Terre que la possibilité de dater sa naissance s'installe. On cherche à savoir depuis combien de temps cette planète existe en utilisant des méthodes basées sur l'interprétation des textes de la Bible.
À cette époque, l'existence de Dieu ne fait l'objet d'aucune discussion. La Bible est le seul ouvrage important à consulter si l'on veut apprendre quelque chose sur la Terre, sur la nature, etc.
Des savants étudient la généalogie biblique et tentent de déterminer l'âge de la Terre (Adam a vécu 930 ans, il a eu son troisième fils Seth à l'âge de 130 ans. Seth engendre Enoch à 105 ans, ce dernier a pour fils Qénân à 90 ans, etc.) :
- Johannes Kepler (1571–1630) aboutit à une date de création de la Terre remontant à 3 993 av. J.-C.
- Le révérend James Ussher (1581–1656) propose comme date de création le 23 octobre 4 004 av. J.-C.
- Isaac Newton (1643-1727) parvient à une date de 3 998 av. J.-C.
Kepler, Ussher et Newton
Ces datations sont aujourd'hui considérées fausses mais résultent d'une méthode, d'un calcul, et sont conformes à la science de cette époque.
Le rôle des progrès techniques
À partir du XVIIIe siècle, les progrès techniques permettent de développer de nouvelles méthodes scientifiques de datation de la planète, dont la datation par la vitesse de la sédimentation et de l'érosion et des méthodes expérimentales s'appuyant sur le refroidissement des corps.
Une datation par la vitesse de la sédimentation et de l'érosion
La datation par la vitesse de la sédimentation et de l'érosion repose sur l'étude du taux de sédimentation des couches géologiques.
Au XVIIIe siècle, le comte Buffon étudie le taux de sédimentation des couches géologiques : si l'on observe qu'il faut un siècle pour que se dépose 1 mm de sédiments argileux, alors devant une falaise argileuse de 10 m, on peut estimer qu'il a fallu environ 1 million d'années pour que cette falaise se constitue.
Les couches sédimentaires visibles ici ont mis des millions d'années à se déposer.
Buffon estime ainsi que la planète a 75 000 ans.
Des méthodes expérimentales s'appuyant sur le refroidissement des corps
Le comte de Buffon met également au point une méthode de datation qui mesure le temps de refroidissement de sphères chauffées.
Il imagine qu'à l'origine, la Terre est comme une boule de lave. Il essaie alors de déterminer quel temps est nécessaire pour que cette boule de lave se refroidisse. Il met en place un protocole expérimental pour mesurer le temps de refroidissement de boulets métalliques de différents diamètres qui ont été chauffés auparavant. Il en tire une loi portant sur la vitesse de refroidissement en fonction du rayon.
Connaissant le rayon terrestre (6 370 km environ), il en déduit alors que la Terre a dû mettre plus de 75 000 ans pour se refroidir.
Les résultats de Buffon sont ensuite repris par lord Kelvin au XIXe siècle. Ce physicien anglais s'appuie sur des calculs mathématiques beaucoup plus fins. La modélisation mathématique lui permet d'estimer l'âge de la Terre entre 10 millions et 400 millions d'années. Il révise ensuite ses projections et estime que la Terre a entre 10 millions et 40 millions d'années.
Lord Kelvin
Toujours au XIXe siècle, Charles Darwin étudie les roches géologiques de la vallée de Weald dans le Sud de l'Angleterre. En s'appuyant sur le taux actuel d'érosion, il estime que les roches les plus anciennes ont au moins 300 millions d'années.
Charles Darwin
Les nouvelles méthodes utilisant la radioactivité
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les travaux d'Henri Becquerel puis de Pierre et Marie Curie, tous les trois prix Nobel pour cette découverte, permettent de mettre en évidence le phénomène de radioactivité. En utilisant les propriétés des atomes radioactifs et en mesurant la proportion d'atomes fils et d'atomes pères, on peut déterminer l'âge de l'échantillon. On parle alors de radiodatation.
Marie Curie
Le phénomène de radioactivité peut se résumer par la formule suivante :
\text{Atome père (instable)} \ce{->} \text{Atome fils (stable)} + \text{Émission d'énergie}
La notion de période de demi-vie (période radioactive) d'un élément est définie en 1902 par Rutherford.
Période de demi-vie
La période de demi-vie d'un élément radioactif est le temps écoulé pour que la moitié de cet élément radioactif disparaisse.
Période de demi-vie d'un élément radioactif
Plus le temps passe et plus la quantité d'un élément radioactif dans un échantillon diminue. Inversement, la quantité d'atomes fils augmente au cours du temps.
Voici les périodes de demi-vie de quelques radioéléments :
Radioéléments | Demi-vie |
\ce{^{3}_{}H} | 12 ans |
\ce{^{14}_{}C} | 5 730 ans |
\ce{^{129}_{}I} | 15,7 Ma |
\ce{^{238}_{}U} | 4,5 Ga |
En utilisant les propriétés des atomes radioactifs et en mesurant la proportion d'atomes fils et d'atomes pères, on peut déterminer l'âge de l'échantillon. On parle alors de radiodatation.
Une première utilisation de la radiodatation a été faite par Rutherford. Il parvient à un âge de 500 millions d'années, augmentant considérablement l'âge jusque-là admis.
Rutherford
Mais les calculs alors effectués ne tiennent pas compte de deux choses :
- L'uranium, en se désintégrant, donne naissance à de l'hélium. C'est cet hélium qui est utilisé par Rutherford pour sa datation. Mais celle-ci est largement sous-estimée car l'hélium s'échappe en grande partie de l'échantillon où il se forme et il ne peut donc plus être dosé.
- Les roches utilisées par Rutherford sont des roches continentales. Ce n'est que lorsque la théorie de la tectonique des plaques est admise, dans les années 1960, que l'on comprend que ces roches continentales sont sans cesse remaniées et renouvelées. Il a donc fallu trouver des échantillons de roches n'ayant été que très peu modifiées depuis la formation de la Terre.
En fait, les plus vieilles roches continentales terrestres ont des âges voisins de 3 milliards d'années.
C'est finalement dans les météorites, qui se sont constituées au moment de la formation du système solaire, que se trouvent les roches réellement contemporaines de la formation de la Terre. Elles n'ont pas été altérées. Clair Patterson utilise la méthode de radiochronologie sur des météorites et parvient à donner à la Terre l'âge de 4,55.109 ans.
Patterson
Aujourd'hui, on estime que la Terre a un âge voisin de 4,57.109 ans.