Théorie quantitative de la monnaie des monétaristes
Milton Friedman
Milton Friedman
Inflation et systèmes monétaires
1968
Milton Friedman (1912 - 2006) est le fondateur de "l'École de Chicago" et a été un critique virulent de l'interventionnisme étatique et des politiques économiques keynésiennes. Il est le père fondateur des "monétaristes" et va permettre de rétablir la théorie quantitative de la monnaie des néoclassiques, en prolongeant les travaux d'Irving Fisher (1911).
Selon ce courant, la monnaie n'a d'influence que sur le niveau général des prix et non sur le fonctionnement de l'économie. C'est par ailleurs l'augmentation de la masse monétaire qui est la cause unique de la hausse des prix.
L'analyse de Friedman s'inscrit dans une période de forte inflation et va permettre d'expliquer la "stagflation" (croissance faible et forte inflation).
Il ne suffit pas de diminuer les taux d'intérêt (ce qui favorise en retour l'inflation) pour relancer l'investissement et la consommation. Friedman va recommander de lutter contre l'inflation, phénomène dangereux et pour lui sans bienfait sur l'économie, en réduisant la masse monétaire par le biais d'une hausse des taux d'intérêt.
Friedman considère que la demande de monnaie dépend de plusieurs facteurs, mais surtout du niveau anticipé des prix. S'il y a une diminution du taux d'intérêt, la consommation des agents augmente, mais l'augmentation des prix qui suit ralentira rapidement cette hausse.
Selon les monétaristes, il n'y a donc pas d'effet durable de la politique monétaire. Elle influence le niveau des prix et non le pouvoir d'achat (c'est-à-dire la quantité de biens et services que l'on peut se procurer).
L'inflation est toujours et partout un phénomène monétaire en ce sens qu'elle est et qu'elle ne peut être générée que par une augmentation de la quantité de monnaie plus rapide que celle de la production.
Milton Friedman
Inflation et systèmes monétaires
1968
Cette citation confirme l'idée selon laquelle la monnaie n'a d'influence que sur les prix et ne détermine pas la quantité de biens et services produits. L'émission excessive de monnaie, par rapport aux prévisions de production à venir, est seule responsable de l'inflation qui suivra.
La théorie quantitative de la monnaie, reprise par Friedman et les monétaristes, a d'abord été énoncée par les économistes classiques, à la fin du XIXe siècle. La formulation la plus célèbre est celle de Jean-Baptiste Say.
La monnaie n'est qu'un voile qui recouvre le troc.
Jean-Baptiste Say
1803
La production suppose des revenus supplémentaires pour ceux qui les produisent et la possibilité pour ces produits d'être demandés. L'inadéquation entre l'offre et la demande est provisoire, car pour Say, l'offre crée sa propre demande. La monnaie ne joue donc pas de rôle direct et serait neutre.
Théorie quantitative de la monnaie
John Maynard Keynes
John Maynard Keynes
Essais sur la monnaie et l'économie
1931
John Maynard Keynes
Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie
1936
Pour Keynes, la monnaie n'est pas neutre, c'est-à-dire qu'elle n'est pas sans influence sur le fonctionnement de l'économie. Keynes explique que la monnaie peut être thésaurisée, c'est-à-dire conservée pour elle-même (par précaution ou par spéculation). Cette thésaurisation de la monnaie rend possible l'existence de déséquilibre entre l'offre et la demande, ce qui est une preuve de l'influence de la monnaie, qui n'est pas qu'un "voile".
Plus les revenus augmentent, plus l'épargne est importante, ce qui se fait au détriment de la demande de biens. Les entrepreneurs vont donc limiter la production et limiter les embauches, ce qui génère un équilibre de sous-emploi. Cela justifie l'intervention de l'État afin de corriger les déséquilibres sur le marché. L'intervention publique doit soutenir le pouvoir d'achat des ménages, à travers la manipulation du taux d'intérêt.
La hausse de l'emploi constitue l'objectif final de la politique monétaire. En augmentant l'offre de monnaie, donc en optant pour une politique monétaire expansionniste, les
autorités monétaires obtiennent une diminution du taux d'intérêt qui a une influence sur le comportement des ménages et des entreprises :
- Des taux d'intérêt plus bas poussent les ménages à demander et utiliser de la monnaie pour des motifs de transaction (consommation, investissement) plutôt qu'à la conserver, ce qui a un effet positif sur la demande globale et la demande effective.
- La baisse des taux d'intérêt fait que des investissements deviennent rentables. Par exemple, un investissement qui rapporte 5% de l'argent investi n'est pas rentable s'il faut emprunter l'argent pour investir à 10% de taux d'intérêt, mais devient rentable si le taux d'intérêt passe sous les 5%. Cette baisse des taux d'intérêt pousse donc les entreprises à investir plutôt qu'à placer leurs fonds sur le marché financier. Cela stimule la demande de biens de production et la demande effective, donc la croissance.
Le long terme est un horizon peu intéressant. À long terme, nous serons tous morts. Les économistes n'apportent rien si, en pleine tempête, tout ce qu'ils trouvent à dire est qu'une fois l'orage passé la mer sera calme.
John Maynard Keynes
Essais sur la monnaie et l'économie
1931
Il s'agit d'une critique fondamentale de la théorie quantitative de la monnaie des économistes néoclassiques qui voudrait que la monnaie soit un "voile" neutre et qui préconise par ailleurs le "laissez-faire", car cette théorie quantitative n'est vraie qu'à long terme, et n'a donc, selon Keynes, aucun intérêt.