Sommaire
ILe marché du travail selon l'approche néoclassiqueALes déterminants de l'offre et de la demande de travail1Travail et emploi2Le choix de l'offre et de la demande de travail3Les facteurs exogènes de l'offre et de la demande de travailBLe fonctionnement du marché du travail1Un marché en concurrence pure et parfaite2Un marché comme les autres3Le chômage selon l'analyse néoclassiqueIILe relâchement des hypothèses du modèle néoclassiqueALa segmentation du marché du travailBSalaire d'efficience et réfutation du marché du travail selon l'analyse keynésienneIIILe taux de salaire : fruit des négociations collectives et de l'intervention de l'ÉtatAL'extension du salariat1Le contrat de travail2Salarisation croissante de la populationBLe rôle des négociations collectives1Les partenaires sociaux2Les conventions collectivesCIntervention de l'État et évolutions contemporainesLes économistes néoclassiques analysent le marché du travail comme un marché classique où une offre (les travailleurs) et une demande (les employeurs) se confrontent et déterminent un prix d'échange du travail (le salaire).
Cependant, les hypothèses de base du modèle néoclassique restent théoriques et peuvent être affinées en considérant que le marché du travail est hétérogène ou segmenté, et qu'il existe des asymétries d'informations entre employeur et employé. Cela permet de prendre en compte d'autres modes de fixation du salaire qu'une simple confrontation entre offre et demande. Par ailleurs, la relation salariale dépend aussi des négociations entre partenaires sociaux et de l'intervention de l'État qui encadre le marché du travail par une législation garantissant les droits sociaux.
Le marché du travail selon l'approche néoclassique
Les déterminants de l'offre et de la demande de travail
Travail et emploi
- L'offre de travail émane des ménages : les individus offrent leur capacité de production contre rémunération.
- La demande de travail émane des entreprises qui proposent un emploi. Elles achètent du travail contre rémunération en versant un salaire au travailleur.
Sur le marché du travail, l'offre et la demande se rencontrent et s'ajustent par un mécanisme de fluctuation du prix du travail, qui est le salaire.
Le choix de l'offre et de la demande de travail
Les économistes (et notamment les économistes du courant de pensée néoclassique) modélisent l'offre individuelle de travail comme le résultat d'un arbitrage entre temps de loisir et désir d'un gain monétaire, le salaire.
La fonction d'offre de travail est alors déterminée par le taux de salaire réel. En effet, l'offreur de travail compare l'utilité d'une heure de loisir avec l'utilité des biens et services qu'il pourra s'acheter avec le salaire d'une heure de travail. Pour le travailleur potentiel, plus le salaire réel est élevé (c'est-à-dire plus le prix du travail qu'il offre est élevé), et plus il est intéressant de renoncer au loisir pour travailler. Lorsque le salaire réel s'élève, il devient de plus en plus intéressant de travailler. Ainsi, l'offre de travail est une fonction croissante du taux de salaire réel.
Taux de salaire réel
Le taux de salaire réel correspond au salaire horaire nominal (c'est-à-dire le salaire effectivement versé au travailleur), corrigé des effets de l'inflation. Il permet de mesurer le pouvoir d'achat d'une heure de travail pour le salarié.
Si, dans une économie, au cours d'une année, les salaires augmentent de 2 % et que l'inflation est de 5 % (les prix augmentent en moyenne de 5 %), l'évolution du taux de salaire réel est de -3 %. Les revenus d'une heure de travail permettent d'acquérir moins de biens et services à la fin de l'année, même si le salaire nominal a augmenté.
Le taux de salaire réel est une fonction croissante du taux de salaire nominal (celui qui est exprimé en monnaie courante) et fonction décroissante du prix des biens.
La demande de travail de l'entreprise consiste à choisir la combinaison de facteurs de production la plus avantageuse. En d'autres termes, le travail est demandé selon son coût et sa contribution à la production. La demande de travail émanant des chefs d'entreprises résulte d'un calcul économique mettant en rapport :
- Le coût salarial (ce que coûte à l'entreprise l'embauche d'un salarié supplémentaire, c'est-à-dire le salaire brut à lui verser et les cotisations patronales)
- Le produit de ce même travail pour l'entreprise (c'est-à-dire la productivité marginale du travail, le supplément de gain obtenu grâce à un travailleur supplémentaire).
L'entreprise a intérêt à augmenter sa demande de travail (c'est-à-dire embaucher des salariés) tant que le coût salarial est inférieur à la productivité marginale d'une unité supplémentaire de travail. Suivant la loi des rendements décroissants, cette productivité marginale est décroissante, et fini par égaliser le coût salarial. Ainsi, plus le taux de salaire réel est élevé, moins la demande de travail sera importante.
Il peut y avoir des effets contradictoires à l'augmentation du salaire. Dans un premier temps, si le salaire réel augmente, le salarié va être incité à travailler plus et à substituer du travail au loisir, car il devient plus intéressant de travailler : on dit que le coût d'opportunité du loisir augmente. C'est "l'effet de substitution".
Cependant, si le salaire réel continue d'augmenter, les salariés peuvent aussi se dire qu'ils peuvent désormais acquérir la même quantité de biens et services qu'avant en travaillant moins. Ils vont alors être incités à substituer du loisir au travail (c'est-à-dire remplacer du travail par du loisir). C'est l'"effet de revenu". Par exemple, si mon taux de salaire réel double, je peux obtenir le même revenu qu'avant en travaillant deux fois moins.
Seule une analyse empirique des effets d'une augmentation des salaires peut permettre de savoir quel est l'effet qui domine.
Les facteurs exogènes de l'offre et de la demande de travail
Au niveau microéconomique, chaque offreur potentiel et demandeur potentiel de travail choisit la quantité qu'il offre ou demande en fonction du taux de salaire réel. Cependant, au niveau macroéconomique (c'est-à-dire du marché tout entier ou de l'économie dans son ensemble), les volumes globaux d'offre et de demande de travail peuvent être influencés par d'autres facteurs :
- Des variables démographiques : si la population totale augmente, l'offre de travail augmente.
- Des facteurs juridiques : notamment l'âge légal du travail (l'interdiction du travail des mineurs) ou la durée de la scolarité obligatoire et du départ à la retraite qui vont modifier la quantité des offreurs de travail.
- Des facteurs sociaux : historiquement, l'allongement de la durée moyenne des études a diminué le nombre d'offreurs de travail le temps que les étudiants terminent leurs études, et l'entrée des femmes sur le marché du travail a fait augmenter l'offre de travail.
- Des facteurs économiques : il s'agit notamment du prix des biens et son évolution, c'est-à-dire l'inflation. Une augmentation du prix des biens équivaut à une diminution du salaire réel.
La demande de travail peut être influencée par :
- Des facteurs techniques : lorsque le progrès technique capitalistique augmente, les entreprises ont besoin de moins de main-d'œuvre pour accomplir une même production.
- Des facteurs juridiques, par exemple les types de contrats de travail : un argument des économistes libéraux est que des contrats plus flexibles peuvent inciter les entreprises à embaucher plus car elles savent qu'en cas de difficultés financières elles pourront facilement se séparer des travailleurs.
- Des facteurs économiques, comme le coût du travail : si les cotisations patronales augmentent, employer des travailleurs coûte plus cher à l'employeur, qui peut donc être conduit à diminuer le travail qu'il achète.
Autres déterminants de la demande et de l'offre de travail
Le fonctionnement du marché du travail
Un marché en concurrence pure et parfaite
Pour comprendre la réalité, les économistes utilisent des modèles. Un modèle est une représentation simplifiée de la réalité utilisée pour mieux comprendre les situations réelles.
Les économistes néoclassiques (courant théorique libéral, apparu à la fin du XIXe siècle avec notamment Stanley Jevons, Léon Walras et Vilfredo Pareto) ont construit un modèle de marché dit de "concurrence pure et parfaite", où les mécanismes du marché peuvent jouer sans restriction. Ce modèle doit permettre de comprendre comment agissent les agents sur le marché et en tirer des lois explicatives. L'analyse néoclassique réfléchit sur le marché du travail en considérant qu'il est un marché en concurrence pure et parfaite, et qu'il suit donc les cinq hypothèses de la concurrence pure et parfaite :
- L'atomicité des agents : aucun agent, ni parmi les offreurs ni parmi les demandeurs de travail, ne peut à lui seul influencer les prix.
- La libre entrée et libre sortie : les agents peuvent librement entrer et sortir du marché, c'est-à-dire choisir d'offrir ou non et de demander ou non du travail.
- La transparence : l'information circule parfaitement sur le marché, ce qui fait que tous les acteurs, offreurs et demandeurs, connaissent tous les prix, c'est-à-dire les taux de salaire, proposés par les entreprises et exigés par les travailleurs.
- L'homogénéité des produits : il n'existe qu'une sorte de travail proposé par tous les travailleurs et acheté par toutes les entreprises. Il s'échange à un prix unique, le taux de salaire horaire, qui est le même pour tous les travailleurs.
- La parfaite mobilité des facteurs de production : les entreprises peuvent librement acheter et acquérir d'autres facteurs de production que le travail pour organiser leur combinaison de production (ces facteurs peuvent être le capital, ainsi que d'autres types de travail que celui qui est échangé, par exemple du travail qualifié si on est dans le cas d'un marché du travail non-qualifié).
Un marché comme les autres
Dans l'analyse néoclassique, le marché du travail est un marché comme les autres régit par la loi de l'offre et de la demande et le travail est considéré comme une marchandise comme les autres.
Le salaire réel est donc le prix du travail et se fixe dans la confrontation entre l'offre et la demande de travail. Pour ce taux de salaire réel d'équilibre, la quantité de travail proposée par les salariés correspond à celle demandée par les employeurs. Sous les hypothèses de concurrence pure et parfaite, le niveau d'emploi qui est déterminé par ce salaire réel correspond à un niveau de plein-emploi car l'offre d'emplois est égale à la demande d'emplois (il ne devrait pas exister d'offreur de travail qui ne trouve pas d'emploi).
Dans ce modèle théorique, les entreprises et les individus ajustent en permanence leur offre et leur demande de travail, et toute fluctuation dans la quantité de l'offre et de la demande de travail sur le marché est immédiatement répercutée sur le prix du travail, c'est-à-dire le taux de salaire. Cette vision du marché du travail souligne alors les capacités autorégulatrices du marché :
- Si l'offre de travail est supérieure à la demande de travail, il y a plus de travailleurs que d'emplois disponibles. Alors le taux de salaire réel diminue, car les individus au chômage sont prêts à travailler pour un coût moindre. Les entreprises embauchent davantage, et des individus se retirent du marché car ils considèrent que le salaire est trop bas. Le marché du travail revient alors vers l'équilibre de plein-emploi.
- Si la demande de travail est supérieure à l'offre de travail, les entreprises ont besoin de plus de travailleurs qu'il n'y en a de disponibles. Le travail devient rare. Pour attirer des travailleurs, les entreprises augmentent les taux de salaire réel proposés (le prix du travail augmente), ce qui incite de nouveaux travailleurs à offrir leur travail plutôt que prendre du loisir. Cela pousse aussi des entreprises à se retirer du marché, car pour certaines le travail coûte désormais plus qu'il ne rapporte. À nouveau, le marché converge vers un équilibre de plein-emploi.
Le chômage selon l'analyse néoclassique
Selon les néoclassiques, si le marché fonctionne en situation de concurrence pure et parfaite, c'est-à-dire que la loi de l'offre et de la demande n'est en rien modifiée, il ne peut alors y avoir que deux sortes de chômage : le chômage frictionnel et le chômage volontaire.
- Le chômage frictionnel est un chômage temporaire, lié au temps d'ajustement entre l'offre et la demande de travail. C'est par exemple le temps pour un individu de trouver un emploi.
- Le chômage volontaire représente le cas où un travailleur estime que le taux de salaire fixé sur le marché est trop bas, et renonce à offrir sa force de travail.
Selon l'analyse néoclassique, s'il existe d'autres types de chômage (notamment un chômage involontaire de longue durée), c'est parce que les hypothèses de la concurrence pure et parfaite ne sont pas respectées. Ce serait notamment à cause d'une rigidité des salaires, qui serait due aux entraves apportées au bon fonctionnement du marché du travail par les syndicats et la réglementation de l'État, par exemple à travers l'instauration d'un salaire minimum qui empêche le prix du travail de se fixer librement dans la confrontation de l'offre et de la demande. En effet, si un salaire minimum est fixé au-dessus du salaire réel d'équilibre, on aboutit à un phénomène de rationnement qui correspond à une situation dans laquelle les agents économiques ne trouvent pas à acheter ou à vendre autant de travail qu'ils le souhaitent pour un salaire réel donné. L'ajustement sur le marché se fait alors par les quantités et non par les prix.
Dans le cas d'un marché en concurrence pure et parfaite, la rencontre de l'offre et de la demande de travail amène à échanger une quantité d'équilibre q^* de travail à un prix (le salaire) w^*.
Cependant, si l'État impose un salaire minimum supérieur à w^*, alors l'offre de travail des ménages augmente (Q_o) car il est plus intéressant de travailler, et la demande de travail de la part des entreprises diminue (Q_d) car le travail devient plus cher et il est moins intéressant d'embaucher. La différence entre Q_o et Q_d est un chômage involontaire et durable causé par l'établissement d'un salaire minimum.
Le relâchement des hypothèses du modèle néoclassique
La segmentation du marché du travail
Dans les années 1960 et 1970, les premiers travaux sur la segmentation du marché du travail sont apparus. Ces théories de la segmentation remettent en cause l'unicité et l'homogénéité du marché du travail. Cette remise en cause et l'hypothèse d'un marché segmenté constituent une réponse à la persistance de certaines inégalités de salaires ou de conditions de travail inexpliquées par la théorie néoclassique. En d'autres termes, ces travaux permettent de mettre de côté ("relâcher") certaines hypothèses des modèles néoclassiques afin d'obtenir des résultats plus conformes à la réalité empirique observée.
Segmentation du marché du travail
La segmentation du marché du travail est une hypothèse selon laquelle le marché du travail serait segmenté en plusieurs parties (souvent deux) étanches et inégalitaires. Un premier compartiment favorise des emplois stables, un second des emplois précaires. Les travailleurs sont assignés à l'un ou l'autre de ces segments, et ne peuvent que difficilement en changer.
Les théoriciens de la segmentation intègrent des aspects socio-économiques et institutionnels pour expliquer les écarts de salaires. Ils mettent en avant le fait qu'il existe des différences parmi les emplois, notamment en termes de conditions de travail et de rémunération. Le travail n'est donc pas une marchandise homogène.
Le marché du travail peut être modélisé en deux parties cloisonnées (c'est-à-dire que les travailleurs passent rarement de l'un à l'autre) :
- Le marché primaire, constitué d'emplois stables, qualifiés et bien rémunérés, avec des avantages sociaux importants et des perspectives d'évolutions intéressantes.
- Le marché secondaire, constitué d'emplois précaires, peu qualifiés et mal rémunérés, avec de faibles avantages sociaux et peu de perspectives d'évolution.
Les modes d'allocation du travail ne sont pas les mêmes sur ces deux types de marché. Le mode marchand d'ajustement entre offre et demande de travail selon le salaire réel, qui obéit au modèle néoclassique, ne se déroule que sur le marché secondaire. Sur le marché primaire, le modèle néoclassique ne fonctionne pas, car les modifications dans la structure des emplois se font par des mobilités internes (par exemple lorsque des personnes sont mutées à de nouveaux postes dans les entreprises). Les offreurs de travail sur le marché interne ne sont pas mis en concurrence avec les offreurs de travail sur le marché externe.
Salaire d'efficience et réfutation du marché du travail selon l'analyse keynésienne
Selon l'analyse classique et néoclassique, au niveau microéconomique, le salaire se fixe au niveau de la productivité marginale du travail (le salarié est rémunéré selon la valeur ajoutée qu'il apporte à l'entreprise). Les hausses de salaires sont donc un effet de la hausse de la productivité des travailleurs.
Cependant, plusieurs économistes du courant néokeynésien (qui poursuivent les analyses de Keynes en un sens microéconomique) ont remis en cause ce lien en s'intéressant à la relation qui existe entre un employeur et son employé. L'ensemble de ces analyses fait partie des théories du salaire d'efficience, et montre qu'il peut exister une relation inverse entre productivité et salaire.
Les théories du salaire d'efficience partent de l'hypothèse qu'il existe une asymétrie d'information entre l'employeur et l'employé. L'employeur rémunère l'employé pour qu'il travaille, mais ne peut observer directement les efforts fournis par ce dernier. En effet, il ne peut qu'observer les effets de ces efforts, voire ne pas pouvoir le faire.
Un patron industriel peut observer les marchandises produites par un ouvrier, mais il est plus difficile d'observer l'effort réellement fourni par l'ouvrier. Dans le cas des services, un ménage peut employer quelqu'un pour sortir son chien et lui faire faire de l'exercice, mais peut difficilement vérifier que l'employé fait réellement faire de l'exercice à l'animal, voire l'emmène réellement en promenade et pas chez lui.
Pour résoudre cette asymétrie d'information, les entrepreneurs peuvent mettre en place des dispositifs de surveillance et de contrôle, ou mettre en place des dispositifs d'incitation financière. Parmi ces dispositifs d'incitation financière, le salaire d'efficience est un salaire élevé censé motiver l'employé à fournir des efforts.
Salaire d'efficience
Le salaire d'efficience désigne le salaire nécessaire pour inciter un travailleur à être aussi productif que possible. La théorie du salaire d'efficience suppose que les entreprises peuvent librement fixer le prix du travail, par exemple au-dessus du niveau du salaire d'équilibre sur le marché du travail. Le salaire d'efficience répond à un problème d'asymétrie d'informations entre l'employeur et son employé. Selon cette théorie, ce sont les salaires élevés offerts par les entrepreneurs qui ont pour conséquence une productivité élevée des employés, et pas l'inverse.
On peut par exemple interpréter le salaire d'efficience en considérant que si le salaire que reçoit un employé dans une entreprise est plus élevé que le salaire concurrentiel (celui qui résulterait de la confrontation de l'offre et de la demande sur le marché du travail), alors le salarié a intérêt à garder cet emploi et à ne pas risquer de tomber au chômage. L'employé fournit alors un effort maximal pour éviter que l'entreprise fasse faillite, ou pour ne pas prendre le risque d'être licencié.
Le salaire d'efficience permet donc de réduire les asymétries d'information sur le marché du travail. Il explique aussi la rigidité des salaires et le chômage involontaire. En effet, les chômeurs qui seraient prêts à travailler pour un salaire inférieur n'arrivent pas à se faire embaucher, car les employeurs ne veulent pas diminuer ce salaire d'efficience. S'ils le diminuaient, ils pourraient perdre les salariés en place dont la productivité est élevée.
La logique d'incitation par le salaire d'efficience connaît cependant des limites. Notamment, le salarié peut concentrer ses efforts uniquement sur les éléments que l'entreprise peut contrôler pour évaluer sa productivité, et négliger les autres aspects de son emploi (par exemple, en ne respectant pas les consignes de sécurité pour aller plus vite).
Le taux de salaire : fruit des négociations collectives et de l'intervention de l'État
L'extension du salariat
Le contrat de travail
Le salarié est celui qui vend sa force de travail à un employeur qui utilise cette force de travail afin de produire. Le marché du travail est encadré par des règles et des contraintes légales.
Le contrat de travail engage l'employeur et le salarié qui effectue un travail au profit du chef d'entreprise en échange d'une rémunération. C'est donc une relation marchande entre des personnes, fondée sur un lien de subordination.
Contrat de travail
Le contrat de travail est une convention fondée sur un lien de subordination entre employeur et employé. Il stipule les droits et devoirs de deux parties (et notamment la durée du contrat, la rémunération, les tâches). Il y a force de loi entre les deux parties qui l'ont signé.
Salarisation croissante de la population
Le salariat est un mode d'organisation du travail qui repose sur la fourniture d'une prestation par une personne, contre rémunération et sous lien de subordination juridique avec un employeur.
La relation salariale définit pour le salarié un statut professionnel, mais aussi un statut social, car à cette position sont attachés un certain nombre de droits et de devoirs, notamment en termes de protection sociale.
Taux de salarisation
\text{Taux de salarisation = }\dfrac{\text{Nombre de salariés}}{\text{Population active occupée}}\times100
Le rôle des négociations collectives
Les partenaires sociaux
Le plus souvent, les intérêts des employeurs et des salariés ne coïncident pas. Le rapport de force semble d'abord jouer en défaveur du salarié puisque celui-ci dépend de l'employeur pour obtenir de quoi vivre. Cependant, des salariés mobilisés peuvent faire pression sur les employeurs pour faire valoir leurs intérêts, par exemple à travers des grèves, qui nuisent à la rentabilité de l'entreprise. Pour défendre les intérêts collectifs des salariés et des employeurs, des organisations salariales et patronales se sont mises en place.
Partenaires sociaux
Les partenaires sociaux désignent l'ensemble des syndicats patronaux et de salariés. Ils permettent le dialogue social, c'est-à-dire une discussion entre les différents acteurs de l'entreprise et l'État, afin de gérer pacifiquement les conflits.
Les partenaires sociaux ont permis le développement :
- Du droit du travail
- De la protection sociale
- Des conventions collectives
Les conventions collectives
Conventions collectives
Les conventions collectives sont des accords signés entre les partenaires sociaux d'une branche d'activité et concernent principalement l'évolution des salaires et les conditions de travail.
La relation salariale n'est pas un simple échange de cette marchandise que serait le travail. Elle s'est construite historiquement à travers les négociations salariales, souvent influencées par l'intervention de l'État.
La plupart des États ont rendu obligatoires les négociations collectives à différents niveaux. Le niveau des salaires n'est donc pas le résultat d'un processus individuel de négociation entre le salarié et son employeur, mais est souvent encadré et défini par les conventions collectives de branches signées entre les représentants des salariés et des employeurs.
Les conventions collectives sont issues d'un rapport de force et d'un compromis dans la négociation collective : elles fixent les conditions minimales de rémunérations et organisent les grilles de qualification et de salaires.
On distingue plusieurs niveaux de négociations auxquels des conventions collectives peuvent être établies :
- Niveau national interprofessionnel (négociations par les syndicats représentatifs au niveau national, pour toutes les branches d'activité à la fois)
- Niveau de la branche d'activité (négociations entre les syndicats représentatifs dans une branche d'activité et les employeurs dans cette branche)
- Niveau du groupe d'entreprise (négociations entre les syndicats représentatifs d'un groupe d'entreprises, c'est-à-dire un ensemble d'entreprises contrôlées par une même entreprise, et l'employeur de cette entreprise dominante)
- Niveau de l'entreprise ou de l'établissement (négociations entre les délégués syndicaux, désignés par les syndicats représentatifs dans l'entreprise, et les représentants de la direction de l'entreprise)
Ces négociations collectives sont influencées par l'État et la loi. En effet, les négociations collectives, à quelque niveau que ce soit, ne peuvent qu'améliorer la situation des salariés par rapport à la situation minimale prévue par la loi.
Par exemple, une convention collective ne peut pas aboutir à un accord sur un salaire minimal inférieur au salaire minimum national (le SMIC), même si toutes les parties sont d'accord.
De plus, l'État a un pouvoir de contrainte qui s'applique à tous les partenaires sociaux. L'État peut notamment obliger les parties à négocier collectivement des accords. Il intervient ainsi sur les négociations salariales.
Par exemple, dans toutes les entreprises où des sections syndicales sont constituées, l'employeur doit obligatoirement convoquer tous les ans les délégués syndicaux pour négocier sur les salaires et le temps de travail, l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés, l'égalité professionnelle et salariale entre hommes et femmes.
Intervention de l'État et évolutions contemporaines
L'État n'intervient pas seulement sur l'organisation du marché du travail à travers son influence dans les négociations collectives. Dans de nombreux pays, l'État garantit aussi par la loi un seuil de salaire minimum (SMIC en France), et en détermine l'évolution. Il assure ainsi à tous les citoyens de pouvoir accéder aux biens et aux services de base qui sont censés permettre l'intégration sociale. Il évite aussi l'exploitation des salariés les plus vulnérables, qui ne pourraient pas négocier à leur avantage avec les employeurs. Le salaire minimum permet enfin de réduire les écarts salariaux, en empêchant de trop grandes disparités en bas de l'échelle des salaires. Le salaire ne résulte donc pas d'un simple arbitrage économique réalisé sur le marché, c'est un arbitrage politique et social.
Salaire minimum
Le salaire minimum légal correspond à un niveau de salaire en dessous duquel un employeur ne peut rémunérer un salarié. Il est fixé par l'État.
En France, il a été instauré en 1950, et est réévalué tous les ans, notamment pour tenir compte de l'inflation. Le 1er janvier 2018, le SMIC net en France était de 7,83 € par heure.
L'État intervient aussi sur les relations salariales dans la définition de la forme des contrats de travail possibles. C'est le cas dans la définition de la durée légale du travail (en France, 35h par semaine depuis 2000), et dans la définition des types de contrat de travail. La norme est celle du CDI (Contrat de travail à temps plein et à durée indéterminée), mais la législation française prévoit un certain nombre d'exceptions à cette norme, qui sont de plus en plus courantes. Ce sont les contrats de travail atypiques : contrat à durée déterminée, contrat à temps partiel, stage, intérim, etc.