Sommaire
ILes transformations dans la sociétéAL'individualisme bourgeoisBLes révolutions industriellesIILe sacre du romanALa multiplication des genresBTriomphe du personnage, triomphe de l'écrivainIIILe romantismeALe roman autobiographiqueBLe roman socialCLe roman historiqueDLe roman glorifiant la natureIVLe réalisme et le naturalismeALe réalisme de BalzacBStendhal et le réalisme nuancéCLe réalisme subjectif de FlaubertDLe naturalisme de ZolaDe grands bouleversements sociaux et industriels surviennent au XIXe siècle, qui vont inspirer les écrivains et marquer l'avènement du genre romanesque en France. Le personnage et l'écrivain de roman deviennent des figures emblématiques et admirées. Plusieurs courants littéraires se développent, s'affrontent, se disputant la définition de "roman", particulièrement le romantisme et le réalisme.
Les auteurs romantiques usent principalement de lyrisme, ils idéalisent le monde autour d'eux et amplifient sentiments et beauté. En réaction à ce courant, qui leur semble trop mielleux et éloigné de la réalité de leur époque, plusieurs écrivains vont se tourner vers le réalisme. Flaubert est un acteur important de la scène littéraire. Même s'il admire certains auteurs du mouvement romantique, il rejette le lyrisme et les phrases "trop belles" et tend plutôt vers le réalisme. Il semble entre deux mouvements, et symbolise bien les débats littéraires de l'époque.
Les transformations dans la société
Les nombreuses transformations dans la société, autant industrielles que sociales, sont des sources d'inspiration pour les auteurs du XIXe siècle.
L'individualisme bourgeois
Le XIXe siècle voit la classe sociale bourgeoise prendre de plus en plus d'importance. C'est la bourgeoisie qui est à l'origine de la Révolution française, bien plus que la population pauvre de France. Elle est constituée de personnes qui s'enrichissent grâce à leur travail, mais qui n'ont pas de titre de noblesse. L'aristocratie perd de plus en plus son influence, alors que la bourgeoisie, avec l'essor de l'industrie, s'enrichit rapidement et devient la classe dirigeante.
Flaubert s'attache à décrire particulièrement cette classe sociale dans Madame Bovary. Comme de nombreux auteurs de son époque (on peut citer Baudelaire et Balzac), il critique fortement la bourgeoisie qu'il estime motivée uniquement par l'argent, et enfermée dans sa bêtise. Les bourgeois sont représentés comme des individualistes, ils ne pensent qu'à eux et ne s'intéressent pas aux grandes questions de la société.
L'un des premiers personnages littéraires que Flaubert invente est Garçon, une incarnation de la bourgeoisie, profondément idiot et ridicule. Ce personnage est présent dans des écrits de jeunesse de Flaubert, qu'il évoque avec les frères Goncourt notamment dans sa correspondance.
Les révolutions industrielles
Les changements dans la société française s'expliquent en grande partie par la révolution industrielle.
La première a lieu dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.
La première révolution repose principalement sur le charbon et sur la mise au point de la machine à vapeur.
La deuxième révolution industrielle a lieu à la fin du XIXe siècle, et touche particulièrement les sources d'énergie.
Pendant la deuxième révolution industrielle, de nouveaux matériaux sont utilisés, comme le pétrole et l'électricité.
Lors de la deuxième révolution industrielle, l'automobile se développe.
Pendant la deuxième révolution industrielle, les transports sont également modifiés par le développement des rails et du train, les échanges sont plus rapides et nombreux. Les moyens de communication évoluent, avec l'apparition du télégraphe et du téléphone.
Dans Madame Bovary, Flaubert met en scène la société française marquée par ces changements et ces évolutions. Il montre ainsi la façon dont le rythme de vie s'accélère.
Emma est particulièrement attachée à suivre la mode, suivre le mouvement, évoluer en même temps que le reste du monde.
Le sacre du roman
Les grandes transformations dans la société du XIXe siècle sont également des transformations littéraires. Le développement des moyens pour diffuser la littérature (imprimerie, transports) permet aux écrivains d'avoir un plus grand lectorat. Le roman est le genre qui triomphe partout en Europe et particulièrement en France ; le personnage de roman et l'écrivain deviennent des figures emblématiques.
La multiplication des genres
Le XIXe siècle peut être considéré comme celui du sacre du roman. Le genre romanesque n'a jamais été aussi représenté et n'a jamais connu autant de succès. Au XVIIIe siècle, ce sont les œuvres philosophiques qui primaient, même si quelques romans, surtout épistolaires, ont été bien reçus, comme La Nouvelle Héloïse de Rousseau ou Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos.
Mais au XIXe siècle, le roman prend une importance nouvelle. De nombreux auteurs se lancent dans des fresques romanesques, comme Balzac ou Zola. Il y a plusieurs courants littéraires, de nombreux débats, les écrivains s'affrontent et défendent leur conception du "roman". Le romantisme et le réalisme dominent le XIXe siècle, mais le naturalisme et le fantastique touchent également la littérature.
Balzac a écrit un roman réaliste avec des caractéristiques fantastiques, La Peau de chagrin. En effet, si le roman commence en suivant les critères réalistes (peinture fidèle de l'époque, des vêtements, de la ville, souci du détail dans les descriptions), le surnaturel surgit lorsqu'est révélé que la peau de chagrin a des propriétés magiques.
Le public de l'époque a alors pris l'habitude de classer les romans selon des genres et des sous-genres :
- Roman noir
- Roman personnel
- Roman sentimental
- Roman historique
- Roman d'aventures
- Roman de mœurs
- Roman de cape et d'épée
- Roman mondain
- Roman psychologique
- Roman scientifique
Si les écrivains semblent choisir leur camp, il s'avère parfois difficile de les ranger dans tel ou tel courant littéraire. Le roman devient protéiforme.
Triomphe du personnage, triomphe de l'écrivain
Le personnage de roman subit des transformations profondes. Il devient de plus en plus psychologique, les écrivains s'intéressant particulièrement à exposer ses motivations, ses sentiments, ses doutes. Il finit par prendre toute la place dans le roman. Le XIXe est le sacre du roman, mais aussi celui du personnage romanesque.
Si les raisons de ce succès sont multiples, il faut tout de même rappeler que la multiplication des publications de romans s'explique notamment par la diversification des supports éditoriaux. Ils peuvent être publiés :
- En volumes
- En feuilletons dans des journaux
- En recueils
Les modes de diffusion se diversifient aussi :
- Cabinets de lecture
- Collections
- Compilations
Les écrivains obtiennent un nouveau statut. Très lus, ils peuvent être adulés par la population.
Victor Hugo a connu un succès immense de son vivant. Le jour de ses funérailles, ce sont quelque deux millions de personnes qui convergent vers le lieu des obsèques. Un succès, aujourd'hui encore, inégalé.
Le romantisme
Romantisme
Le romantisme est un mouvement littéraire qui s'est répandu en Europe au XVIIIe siècle. Il se caractérise par une volonté d'exprimer de façon lyrique les sentiments de l'homme, à travers les thèmes de la nature et de l'amour.
Le roman René de Chateaubriand est caractéristique du mouvement romantique. Ce roman détaille les souffrances éprouvées par un personnage central désespérément amoureux de sa cousine.
Victor Hugo est le chef de file français du romantisme en littérature.
Le roman autobiographique
Les romans autobiographiques sont une bonne illustration du romantisme. Les écrivains expriment leurs sentiments avec lyrisme, ils exaltent leurs émotions. L'introspection est à la mode. Les romantiques sont les "romanciers du moi".
L'un des auteurs romantiques les plus célèbres est Chateaubriand, qui relate sa vie et les événements tragiques qui l'ont marquée dans Mémoires d'outre-tombe.
Le roman social
Un autre genre de roman qui se développe est le roman social. Les romantiques s'intéressent particulièrement aux souffrances du peuple. C'est une époque où de nombreux événements historiques ont marqué la France (Révolution française, première République, Premier Empire, deuxième République, Second Empire, la Commune, etc.).
Les auteurs romantiques s'intéressent aux revendications de la population. Plusieurs écrivains ont d'ailleurs une carrière politique et s'attachent à défendre les plus démunis, comme Lamartine.
Le roman social emblématique du romantisme est Les Misérables de Victor Hugo. Le peuple devient martyr, il est idéalisé et défendu à travers la figure de Jean Valjean, ancien forçat qui trouve la rédemption à la fin du roman.
Le roman historique
Le mouvement romantique entraîne aussi la multiplication des romans historiques. Il s'agit de faire revivre des événements historiques forts ou importants, de plonger le lecteur dans une autre époque qu'il ne connaît pas et la faire revivre sous ses yeux. Le cadre historique sert souvent de prétexte, c'est un décor pittoresque qui permet de divertir le lecteur.
Dans Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, l'écrivain plonge le lecteur dans la France du Moyen Âge.
Alexandre Dumas est un des plus célèbres représentants du roman historique. L'Histoire est toujours en arrière-plan des intrigues qu'il invente. Il écrit ainsi Les Trois Mousquetaires qui se déroule sous le règne de Louis XIII, mais aussi son grand roman de vengeance Le Comte de Monte-Cristo qu'il situe au début du règne de Louis XVIII.
Le roman glorifiant la nature
Certains romans se focalisent essentiellement sur la glorification de la nature, thème privilégié par les romantiques, qui est idéalisée. Les descriptions de paysage sont au cœur de plusieurs œuvres importantes au XIXe siècle.
Stendhal s'applique à décrire les paysages de l'Italie dans La Chartreuse de Parme.
La nature peut être sauvage et inquiétante, comme chez Chateaubriand, ou champêtre et agréable, comme dans les romans de George Sand.
La Mare au diable ou La Petite Fadette de George Sand mettent en scène la campagne. Elle devient le lieu du bonheur, loin de la ville et de sa corruption. On parle de roman champêtre.
Le réalisme et le naturalisme
En parallèle du romantisme, et souvent en réaction contre lui, se développe le réalisme, puis le naturalisme. Leur but est de représenter la réalité telle qu'elle est, de décrire la société sans l'embellir.
Réalisme
Le réalisme est la volonté de rendre par les mots la réalité elle-même.
Les Illusions perdues est un roman réaliste de Balzac. Ce roman raconte les déconvenues successives d'un jeune homme qui tente de se faire une place dans la société parisienne.
Balzac est le chef de file français du réalisme en littérature.
Le réalisme de Balzac
Balzac veut faire "concurrence à l'État civil". Son but est de représenter fidèlement le monde qui l'entoure, mais aussi de l'expliquer. Il étudie tous les milieux sociaux, du plus pauvre au plus aisé. Il situe ses histoires dans ces différents milieux, mais aussi différents décors (la ville, la campagne, les villages de province, etc.).
Balzac classe ses œuvres en trois rubriques : "Études analytiques", "Études philosophiques" et "Études de mœurs". Il y a donc une réelle intention d'expliquer le monde, de l'étudier, de l'analyser. L'écrivain devient celui qui enregistre la réalité et propose une vision dénuée d'idéalisme sur sa société.
Stendhal et le réalisme nuancé
Stendhal, qui se situe entre le romantisme et le réalisme, définit ainsi le roman : "C'est un miroir qu'on promène le long d'un chemin." Cette citation souligne bien l'importance nouvelle accordée au roman. C'est un genre qui doit renvoyer à l'homme sa propre image, et donc le faire réfléchir sur lui-même.
Pour son roman Le Rouge et le Noir, Stendhal s'inspire d'un fait divers, l'affaire Berthet.
Toutefois, le réalisme de Stendhal reste nuancé, puisque l'exaltation des sentiments demeure une donnée essentielle de sa littérature.
Le réalisme subjectif de Flaubert
Flaubert est considéré comme un auteur réaliste. Il admire beaucoup Balzac. Son projet est de "faire des tableaux, montrer la nature telle qu'elle est, mais des tableaux complets, peindre le dessus et le dessous des choses". Il pense que le réel doit primer sur le romanesque. En cela, il semble dans la même lignée que Balzac.
Le travail de l'écrivain est avant tout un travail de recherche pour Flaubert, qui se documente longuement avant de commencer la rédaction de ses ouvrages. Il rejette l'héroïsme et préfère mettre en scène des personnages inadaptés à leur environnement, souvent médiocres.
Flaubert va toutefois plus loin que Balzac, puisqu'il veut "disparaître", il pense que l'auteur ne doit jamais être présent dans le roman, il est en quête de "neutralité". On peut se demander si Flaubert a réussi son projet. Il est difficile de dire que son œuvre est neutre, tant il se montre ironique à plusieurs reprises dans ses romans.
Flaubert se dit "en haine du réalisme". S'il admire Balzac, il n'hésite pourtant pas à le critiquer fortement, estimant qu'il manque de style. En effet, Flaubert accorde une grande importance à l'écriture même, qui doit être travaillée, précise, mais surtout poétique. Il prête aussi beaucoup d'attention à la peinture psychologique de ses personnages. Le narrateur exprime souvent les sentiments des protagonistes dans ses romans. Contrairement à ce qu'il dit, Flaubert est rarement objectif. On parle donc pour lui de réalisme subjectif.
Madame Bovary est un roman réaliste dans lequel la subjectivité de Flaubert apparaît à plusieurs reprises.
Le naturalisme de Zola
Le naturalisme découle du réalisme. Le chef de file de ce mouvement littéraire est Émile Zola. Il a publié de nombreux romans, dont une fresque littéraire qui suit la famille des Rougon-Macquart. L'auteur s'inspire de Balzac et de sa Comédie humaine. Il sous-titre d'ailleurs son œuvre "Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire".
Comme Flaubert, Zola se documente énormément avant d'écrire. Il est aussi journaliste. Son but n'est pas simplement de décrire la société telle qu'elle est, mais de dénoncer les injustices de son temps. Il accorde une grande importance à la science, et ses romans se basent sur l'idée de l'influence de l'hérédité et de l'environnement sur un individu.
Le naturalisme se démarque toutefois du réalisme par son lyrisme. En effet, si les romans de Zola sont souvent sombres et très réalistes dans la peinture de la misère humaine, ils contiennent tous des passages où Zola idéalise la nature ou la vie, qui semble plus forte que tout.
Germinal est un roman naturaliste de Zola, dans lequel il décrit avec exactitude et précision la vie des mineurs. Cependant, la fin du roman est lyrique, la nature est exaltée et l'écrivain livre un message d'espoir.