Sommaire
IDes grandes découvertes à la constitution des premiers empires coloniauxALe début des grandes découvertesBLes voyages de découvertes et les débuts de la mondialisationCLa constitution des premiers empires coloniaux européensIILe commerce atlantique : de l'esclavage à l'enrichissement de l'EuropeALa mise en place de l'esclavageBLe commerce atlantique : un commerce triangulaire reposant sur l'esclavageCL'enrichissement des EuropéensIIILa polémique autour du traitement réservé aux AmérindiensALe sort des Amérindiens : un effondrement démographique sans précédentBLa « question amérindienne » : la controverse de ValladolidÀ la fin du XVe siècle, les Européens cherchent de nouvelles routes vers l'Orient, et notamment vers l'Inde. Ils se lancent dans les grandes découvertes qui modifient les équilibres géopolitique et géo-économique. Les grandes découvertes transforment la vision que les Européens ont du monde : en se plaçant en son « centre », ils veulent le dominer. Les Européens possèdent progressivement de vastes empires coloniaux, contrôlent les flux économiques et asservissent des populations entières. Le sort réservé aux populations amérindiennes est dramatique.
Comment la découverte du Nouveau Monde bouleverse-t-elle le monde et quelles en sont les conséquences ?
Des grandes découvertes à la constitution des premiers empires coloniaux
Les grandes découvertes désignent les voyages d'exploration organisés par les Européens à la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle. De grands explorateurs se lancent dans de longs voyages, grâce à de nouveaux navires. On peut parler d'un début de mondialisation. Les premiers empires coloniaux européens se forment alors.
Le début des grandes découvertes
Les grandes découvertes débutent à la fin du XVe siècle. Elles ont lieu grâce à des explorateurs comme Christophe Colomb. Elles sont rendues possibles par les progrès faits dans la navigation.
Plusieurs voyages sont entrepris avant le XVe siècle :
- Marco Polo s'est rendu en Chine et a tiré de ce voyage un Livre des merveilles au XIIIe siècle.
- Jean de Plan Carpin voyage en Asie centrale et en fait le récit dans son Histoire des Mongols appelés par nous Tartares également au XIIIe siècle.
Mais c'est au début du XVe siècle que les voyages s'accélèrent :
- Depuis 1415, les Portugais, sur l'initiative de leur roi Henri le Navigateur, explorent les côtes africaines et ont le projet de joindre l'Asie par la mer.
- En août 1492, trois bateaux quittent le port de Palos en Andalousie et prennent le large : la Niña, la Pinta et la Santa Maria. Elles sont dirigées par Christophe Colomb. Il a réussi à convaincre les rois catholiques d'Espagne, Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon de financer son expédition. Après des semaines de voyage, l'équipage accoste à San Salvador en octobre 1492. Au nom de la monarchie espagnole, Christophe Colomb prend possession d'un territoire qui reste encore à explorer. Ce voyage est emblématique : on considère que Christophe Colomb a découvert l'Amérique.
- Par la suite, plusieurs voyages sont organisés et d'autres navigateurs s'intéressent à ces terres nouvelles. Ainsi, en 1498, Vasco de Gama double le cap de Bonne-Espérance au sud de l'Afrique et atteint l'Inde.
Au cours du XVe siècle, des progrès considérables sont accomplis dans le domaine de la navigation :
- Les portulans (sorte de carte de navigation) améliorent la connaissance des côtes et permettent d'envisager plus sereinement le voyage en mer.
- La boussole et l'astrolabe (instrument d'observation astronomique et de calcul) offrent aux navigateurs la possibilité de prendre le large sans crainte : il est en effet possible de se repérer grâce aux astres, les marins ne sont plus obligés de longer les côtes (cabotage).
Un navire robuste et maniable est également mis au point, la caravelle.
Une caravelle
Livro das Armadas, Domaine public © Wikimedia Commons
Les voyages de découvertes et les débuts de la mondialisation
La mondialisation est le processus de mise en réseau des territoires à l'échelle mondiale. On estime que ce processus est initié par les Européens à la fin du XVe siècle avec les grandes découvertes. La première circumnavigation (tour du monde) est un élément fondateur et emblématique de ce processus. Elle a lieu en 1519 et est entreprise par Fernand de Magellan. La succession des voyages permet de définir des voies maritimes pour le commerce. Les Européens commencent à s'implanter un peu partout dans le Nouveau Monde.
Les routes maritimes nouvellement ouvertes permettent aux Européens d'établir des relations commerciales et diplomatiques avec les nouveaux territoires « découverts ». Les expéditions sont financées et soutenues par les monarques européens dans le but d'étendre leur pouvoir. Ainsi :
- John Cabot, découvre l'Amérique du Nord pour le compte des Anglais.
- Pedro Alvares Cabral découvre le Brésil en 1500 pour le compte du roi du Portugal.
- Jacques Cartier est envoyé par le roi de France François Ier au large de l'Amérique du Nord. En 1534, il aborde le golfe du Saint-Laurent. Il devient le « découvreur » du Canada.
L'Atlantique devient une interface majeure sillonnée de centaines de navires. Des flux commerciaux, humains et culturels mettent en réseau l'Europe et l'Amérique. Plus tard, avec le commerce triangulaire, le commerce se fait également avec l'Afrique. C'est donc bien le début de la mondialisation.
La constitution des premiers empires coloniaux européens
L'empire colonial désigne des territoires que des États se sont appropriés, généralement par la force. Ils font l'objet d'une domination politique, culturelle et économique souvent violente. Dès le début des grandes découvertes, les Européens, et en particulier les Espagnols, décident de s'approprier ces nouvelles terres et de dominer les populations qui les habitent. C'est le temps des conquistadors. Les premiers empires coloniaux européens se forment.
Progressivement, les terres nouvellement découvertes passent sous la domination des États européens. Le traité de Tordesillas est signé en 1494, sous l'égide du pape Alexandre VI. Il vise à partager le Nouveau Monde entre la Castille et le Portugal. Le méridien passant à l'ouest du Cap-Vert sert de délimitation. Bien que remis en cause, ce traité marque la volonté des Européens de s'approprier le monde. On peut parler d'impérialisme européen.
Impérialisme
L'impérialisme est une situation de domination politique, économique et culturelle d'un territoire par un pays étranger. Ce dernier entend dominer et exploiter ce territoire de manière plus ou moins directe et à son profit quasi exclusif.
La conquête européenne est permise par plusieurs conquistadors européens (des conquérants) :
- Juan Ponce de Leon s'empare de Porto Rico (dont il sera gouverneur).
- Vasco Nunez de Balboa s'établit au Panama en 1512, où il fonde la première ville européenne du continent.
- Hernan Cortés s'empare de l'immense et puissant Empire aztèque. En 1519, il s'enfonce dans le continent. Les premiers combats lui donnent l'avantage et il est bientôt aux portes de Tenochtitlan, la capitale aztèque (aujourd'hui Mexico). L'empereur Moctezuma est fait prisonnier et l'Empire aztèque disparaît en août 1521. La Nouvelle-Espagne est créée.
- Francisco Pizarro s'empare de l'Empire inca en 1533 après avoir emprisonné et condamné à mort l'empereur Atahualpa lors de la bataille de Cajamarca.
Cortès et l'accueil des Espagnols par les Aztèques
© Wikimedia Commons
Le commerce atlantique : de l'esclavage à l'enrichissement de l'Europe
La conquête du Nouveau Monde mène vite à l'esclavage des populations amérindiennes. Le commerce atlantique, un commerce triangulaire, est mis en place : il repose sur l'esclavage.
La mise en place de l'esclavage
Les Européens asservissent très vite les populations du Nouveau Monde à l'esclavage. Ils les utilisent comme main-d'œuvre et les forcent à travailler pour eux dans des conditions très dures. Ces pratiques suscitent des critiques sur le continent européen.
Avant la conquête européenne, les Aztèques pratiquent une forme particulière d'esclavage. Le statut d'esclave (tlacotin) est un statut personnel et non héréditaire qui permet de posséder des biens et des terres, voire des esclaves. L'affranchissement est possible et assez fréquent. Ainsi, à la mort du maître, l'esclave est généralement libre.
Avec l'arrivée des Européens en Amérique, l'esclavage prend une autre ampleur. Assez rapidement, les Amérindiens sont soumis au travail forcé. Il s'agit là de ce que l'on appelle l'encomienda. Cette main-d'œuvre gratuite est utilisée pour travailler dans les mines d'or et d'argent mais aussi les exploitations agricoles.
Un esclave
© Wikimedia Commons
Ces pratiques suscitent des critiques et l'Église catholique romaine tente d'imposer une réforme aux rois d'Espagne : les punitions sont interdites, les travailleurs amérindiens doivent être rémunérés et évangélisés. Mais la mise en pratique de ces règles est assez aléatoire.
Le commerce atlantique : un commerce triangulaire reposant sur l'esclavage
Les conditions de travail des Amérindiens provoquent une augmentation importante du taux de mortalité : les Européens cherchent alors les moyens de s'approvisionner ailleurs en esclaves. C'est ainsi qu'est mise en place la traite des Noirs : les Européens vont chercher des esclaves en Afrique. Cette traite prend son essor au XVIIe siècle et atteint son apogée au XVIIIe siècle. Elle est massive et brutale. Le commerce atlantique, un commerce triangulaire, est ainsi mis en place entre l'Amérique, l'Europe et l'Afrique. Il est très lucratif pour les Européens.
Les Européens sollicitent les rois africains afin que ceux-ci leur fournissent des esclaves qu'ils appellent « bois d'ébène ». Ces hommes et ces femmes sont transportés dans des navires négriers à travers l'Atlantique. Les conditions de vie sur les bateaux sont effroyables et les esclaves meurent par centaines. Ils sont entassés, mal ou pas nourris, sans aucune hygiène possible. Les Noirs qui parviennent vivants en Amérique sont immédiatement vendus à des propriétaires et mis au travail.
Navire négrier
Domaine public, © Wikimedia Commons
Le commerce atlantique est dit « triangulaire » car il lie l'Europe à l'Afrique et l'Afrique à l'Amérique. Il met donc en relation le Nouveau Monde et le Vieux Continent.
Le commerce triangulaire
L'enrichissement des Européens
Le commerce atlantique est lucratif pour les Européens. Il leur permet de s'enrichir en métaux précieux et de découvrir de nouveaux produits.
De nombreux ports négriers profitent du commerce des esclaves. C'est le cas des ports de Bordeaux ou Nantes en France qui s'enrichissent considérablement.
En Amérique, les Européens exploitent des mines pour trouver des métaux précieux. Ils découvrent également de nouveaux produits comme la pomme de terre, mais aussi le poivron, la courgette, le maïs, les haricots, la tomate, ainsi que le cacao.
Les Européens croient trouver en Amérique des richesses incroyables. On raconte que des empereurs indigènes se lavent le matin avec de la poudre d'or. C'est le mythe de l'Eldorado.
La polémique autour du traitement réservé aux Amérindiens
La population amérindienne est victime des conquêtes européennes : un véritable effondrement démographique a lieu à cause du traitement qui leur est réservé. Pourtant, les Européens ne s'opposent pas tous à ces violences. La controverse de Valladolid illustre cette opposition entre ceux qui veulent défendre les Amérindiens, et ceux qui justifient leurs mauvais traitements.
Le sort des Amérindiens : un effondrement démographique sans précédent
Les populations amérindiennes souffrent de la conquête des Européens. Leurs conditions de vie après l'arrivée des Européens sont difficiles : victimes des combats, réduits en esclavage, forcés de se convertir au christianisme, ils sont également contaminés par des maladies contre lesquelles ils ne sont pas immunisés. On parle d'effondrement démographique de la population amérindienne.
La conquête ne se fait pas paisiblement. La violence des combats est terrible et entraîne la mort de milliers d'Amérindiens. Les Européens utilisent des armes à feu contre les Amérindiens qui ne disposent que de lances et de flèches : c'est pour cette raison que quelques milliers d'Européens sont parvenus à asservir des empires amérindiens peuplés et puissants.
L'esclavage des populations, dans des conditions difficiles, explique également la mort de nombre d'entre eux. Les Amérindiens meurent par milliers dans les mines du Nouveau Monde, notamment celles du Potosi (en Bolivie actuelle).
De plus, l'Amérique est perçue comme un continent qu'il faut convertir au christianisme. L'idée circule que Dieu soutient les chrétiens dans leurs entreprises et qu'il les porte dans leur volonté d'évangéliser le monde à tout prix. Les conquistadors sont accompagnés de religieux, souvent des Dominicains et des Franciscains, qui œuvrent à la conversion des Amérindiens. Cette évangélisation est imposée aux Amérindiens, et des méthodes violentes sont mises en œuvre pour les obliger à reconnaître le Christ (humiliations, exécutions, etc.).
C'est surtout le « choc microbien » (impact des maladies infectieuses apportées par les Européens lors de la conquête) qui semble être la cause de l'effondrement démographique de la population amérindienne. Vecteurs de maladies infectieuses, les Européens ont contaminé les Amérindiens dont les organismes n'étaient pas préparés à lutter contre la rougeole, la variole ou la coqueluche.
On estime que ces épidémies ont tué entre 50 % et 60 % de la population autochtone. Le taux de mortalité pourrait avoir atteint 90 % pour certains groupes de population.
Les études de démographie historique montrent que la population amérindienne est passée de 54 millions de personnes à la fin du XVe siècle à 25 millions en 1519 pour atteindre un million au début du XVIe siècle. C'est l'un des plus violents chocs démographiques connus.
Évolution de la population amérindienne au XVIe siècle
La « question amérindienne » : la controverse de Valladolid
La controverse de Valladolid est un célèbre débat qui permet d'illustrer les deux visions qui s'opposent alors chez les Européens, entre ceux qui justifient l'asservissement des Amérindiens et ceux qui les défendent. Elle oppose Las Casas, défenseur des Amérindiens, à Sepulveda. Elle mène à la reconnaissance de la dignité des populations amérindiennes.
Face à la violence des traitements infligés aux Amérindiens, certains Européens remettent en question la légitimité des Européens à asservir d'autres hommes. Ainsi, Bartolomé de Las Casas alerte à de multiples reprises le roi d'Espagne et le pape sur les horreurs commises en leurs noms par les conquistadors et les colons. Il est invité à participer à la controverse de Valladolid (un débat), en Espagne. Celle-ci est organisée par le légat du pape Jules II en 1550-1551. Ce débat oppose Las Casas à Sepulvelda, qui défend la supériorité des Européens sur les autres peuples.
Au terme du débat, les Amérindiens sont finalement reconnus comme égaux en dignité et en nature aux Européens. L'évangélisation est jugée légitime mais l'esclavage et les mauvais traitements sont interdits.