Sommaire
ILe Proche et le Moyen-Orient de 1914 à 1948AL'impact de la Première Guerre mondiale1Les ambitions européennes dans la région2Le démantèlement de l'Empire ottoman3La modernisation de la Turquie et de l'IranBUne zone sous domination occidentale1Les mandats français et britanniques2L'intérêt grandissant pour les ressources naturellesCLa montée des tensions1Le panarabisme et l'islamisme2L'essor du sionisme et des tensions en Palestine3La Seconde Guerre mondialeIIProche et Moyen-Orient de 1948 à 1991AProche et Moyen-Orient, un enjeu de la guerre froide1Les facteurs de tensions du Proche et Moyen-Orient2Le Proche et Moyen-Orient entrent dans la guerre froide3La crise de Suez en 1956BLes guerres israélo-arabes et le conflit israélo-palestinien1Les guerres israélo-arabes2La question palestinienneCLa multiplication des conflitsIIIProche et Moyen-Orient depuis 1991AProche et Moyen-Orient au lendemain de la guerre froide1De nombreux facteurs de déstabilisation2La guerre du Golfe (1990 - 1991)BLa question israélo-palestinienneCLe Proche et Moyen-Orient depuis 20011Les attentats du 11 septembre 2001 et leurs conséquences2Le printemps arabe3Une région déstabilisée par la montée de l'islamismeLa Première Guerre mondiale provoque la chute de l'Empire ottoman. La République turque naît sous l'impulsion de Mustafa Kemal et les territoires arabes de l'Empire passent sous le contrôle des Britanniques et des Français dans le cadre de mandats de la SDN. Malgré les promesses qui ont été faites, les territoires peuplés par les Arabes sont morcelés en plusieurs États par les deux puissances européennes dont l'intérêt pour les ressources pétrolières est grandissant. La période de l'entre-deux-guerres voit l'amplification du nationalisme arabe, la naissance de l'islamisme et le développement du sionisme qui se manifeste par des vagues de migration de populations juives en Palestine.
À la suite de la Seconde Guerre mondiale, les puissances européennes se retirent de la zone qui rentre dans la logique de la guerre froide. Les pays arabes, dont les ressources en hydrocarbures attisent les convoitises, se rapprochent soit de l'URSS, soit des États-Unis.
Dès la création d'Israël en 1948, les pays arabes entrent en guerre contre ce nouvel État et l'exil des populations arabes marque le début de la question palestinienne. Plusieurs conflits sont remportés par Israël et, dans les années 1970, la paix entre Israël et l'Égypte divise le monde arabe. La question palestinienne prend de l'importance avec l'arrivée de Yasser Arafat à la tête de l'OLP. Exclue de Jordanie, l'OLP se réfugie au Liban. Les attaques menées par l'organisation palestinienne depuis le Liban provoquent l'intervention d'Israël dans ce pays, soutenu par les milices chrétiennes. Il faut attendre les accords d'Oslo en 1993 pour que s'amorce le début du processus de paix entre Palestiniens et Israéliens. Cependant, l'action des extrémistes des deux bords empêche la réalisation de ce processus de paix qui reste bloqué.
La montée de l'islamisme radical constitue le principal facteur de déstabilisation de la région après la guerre froide. Suite aux attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis, dans le cadre d'une coalition de l'ONU, interviennent en Afghanistan puis interviennent de manière unilatérale en Irak en 2003.
Fragilisés par les printemps arabes, par l'intervention américaine et par les groupes islamistes radicaux, plusieurs pays sombrent dans le chaos (Irak, Syrie, Libye, Afghanistan). Les islamistes modérés, installés après les révolutions, cèdent la place aux militaires en Égypte et à une coalition de centre gauche en Tunisie.
Le Proche et le Moyen-Orient de 1914 à 1948
Proche-Orient
Le Proche-Orient désigne traditionnellement les régions de l'est du bassin méditerranéen, de la Turquie à l'Égypte (l'ancien "Levant").
Moyen-Orient
Le Moyen-Orient se définit comme l'ensemble des pays de l'Asie de l'Ouest et du Sud-Ouest, de la Turquie à l'Iran jusqu'à l'Afghanistan, et du sud du Caucase à la péninsule Arabique, ensemble qui comprend en outre l'Égypte.
L'impact de la Première Guerre mondiale
Les ambitions européennes dans la région
L'Empire ottoman a atteint son apogée au cours des XVe et XVIe siècles. Il décline tout au long du XIXe siècle.
L'Europe, en pleine phase d'expansion coloniale, s'intéresse de plus en plus aux territoires de la "Sublime porte". Ce que l'on appelle la "question d'Orient" recoupe des intérêts différents :
- La Russie espère contrôler la zone des détroits reliant l'Asie à l'Europe. Elle revendique aussi la protection des lieux saints du christianisme et affiche sa solidarité avec les chrétiens slaves des Balkans sous autorité ottomane.
- Le Royaume-Uni cherche à obtenir la maîtrise de la route des Indes afin de favoriser la continuité de son empire colonial. Elle est aussi la première puissance à s'intéresser aux ressources pétrolifères de cette région.
- La France s'intéresse plus tardivement à la question du pétrole mais défend surtout ses ambitions dans la région au nom de la protection des chrétiens d'Orient.
Dès le début du XXe siècle, les guerres balkaniques affaiblissent l'Empire ottoman car elles conduisent à l'indépendance de plusieurs pays dont l'Albanie et la Grèce. Istanbul se rapproche alors de plus en plus de Berlin, notamment dans le cadre des relations commerciales unissant les deux pays. L'exemple le plus symbolique est le projet d'une ligne de chemin de fer de Berlin à Bassorah en passant par Istanbul et Bagdad.
Le démantèlement de l'Empire ottoman
Pendant la Première Guerre mondiale, l'Empire ottoman s'allie avec la Triple-Alliance pour lutter contre la Triple-Entente.
Lors de la guerre, les différentes minorités subissent des violences :
- Les Arméniens, à cause de leur religion et leur rapprochement avec les Russes, sont accusés d'être des "ennemis de l'intérieur" et subissent en 1915 un génocide entraînant la mort de plus d'un million de personnes.
- Plusieurs autres régions sont extrêmement sollicitées pour permettre à l'empire de satisfaire ses besoins en temps de guerre. Une famine touche la région majoritairement chrétienne de l'actuel Liban et fait plus de 150 000 morts.
Face à ces souffrances, des mouvements indépendantistes émergent. Les plus virulents se concentrent dans les zones de peuplement arabe de l'empire et sont soutenus par les Anglais et les Français.
Le chérif de La Mecque, Hussein ben Ali (descendant du prophète et protecteur des lieux saints), est proclamé "chef de la nation arabe". Il devient le "roi du Hedjaz" (le plateau de la péninsule Arabique). Il place son fils Fayçal à la direction d'une alliance faite avec des Britanniques, des Français et des Arabes afin de lutter contre les Ottomans. Thomas Lawrence (plus connu sous le nom de Lawrence d'Arabie), est un célèbre Britannique qui participe à cette alliance. Les villes de Bagdad et de Jérusalem sont prises par les Britanniques et Fayçal s'empare de Damas.
La fin de la guerre et la défaite de l'Empire ottoman en 1918 conduisent à un démantèlement de son territoire entériné par les accords de Sèvres en 1920 :
- Un État du Kurdistan est prévu sous contrôle français.
- L'Arménie se voit attribuer le Nord-Est de l'Anatolie.
- Les Italiens et Grecs occupent l'Ouest de l'Anatolie.
- Avec la création de mandats de la SDN, la France et le Royaume-Uni se partagent le Sud-Est de l'Anatolie et les territoires arabes sans tenir leur promesse de constitution d'un grand royaume arabe.
La modernisation de la Turquie et de l'Iran
Mustafa Kemal, issu de la bourgeoisie ottomane et inspiré par les idées révolutionnaires françaises de 1789, va permettre la création de la République turque sur les ruines de l'Empire ottoman. Il chasse les Européens d'Anatolie et renégocie un traité plus favorable à Lausanne en 1923 : il proclame la fin de l'Empire ottoman qu'il considère dépassé et trop conservateur car fédéré par l'islam. Il annonce la naissance de la République turque à Ankara, qui en devient la capitale.
Surnommé Atatürk ("le père des Turcs"), Mustafa Kemal veut moderniser la nation. Il met en place une laïcisation de l'État, la scolarisation pour tous, et prône la démocratie. En réalité, le pays devient une dictature. Il entreprend une réforme linguistique afin de retirer à la langue turque ses emprunts à l'arabe et au perse. Il abandonne également l'écriture en arabe au profit de l'alphabet latin.
De son côté, l'Iran est également traversé par un mouvement de modernisation. L'empire Qadjar est renversé par Reza Chah Pahlavi en 1925. Ce dernier entreprend "l'occidentalisation du pays". Il fonde des universités, industrialise le pays, interdit le port du voile et oblige les hommes à s'habiller "à l'occidentale".
Une zone sous domination occidentale
Les mandats français et britanniques
Les anciens territoires arabes de l'Empire ottoman sont confiés aux Français et aux Britanniques sous la forme de mandats, provoquant le mécontentement des populations arabes.
En 1920, Fayçal ben Hussein est proclamé roi du royaume arabe de Syrie, qui comprend dans un grand État la Syrie, la Palestine et la Transjordanie. La France s'oppose à cette grande Syrie qu'elle divise en deux en créant le Liban. Elle réprime les troupes arabes et pousse Fayçal à l'exil.
La méthode de colonisation française, qui tend à l'assimilation, provoque de forts mécontentements au sein de la population arabe. La France ne prend pas la juste mesure des revendications nationales et apparaît comme un "ennemi du monde arabe". En 1925, la révolte druze s'étend au Liban et en Syrie. La population revendique l'indépendance et l'unité syrienne.
Les Britanniques prennent davantage la mesure des enjeux nationalistes et appliquent une politique de concession, octroyant l'indépendance à des États en échange de concessions économiques :
- L'Égypte devient indépendante en 1922 en échange du maintien du contrôle britannique sur le canal de Suez.
- En Irak, Londres installe sur le trône Fayçal Ier en 1921 et reconnaît l'indépendance du pays en 1932. En échange, l'Angleterre continue l'exploitation du pétrole de la région.
- Les Britanniques appuient également Ibn Saoud qui prend le pouvoir au Hejaz en 1924 et crée l'Arabie-Saoudite en 1932.
La Grande-Bretagne continue néanmoins de faire venir des Juifs en Palestine, ce qui nourrit les tensions dans la zone.
L'intérêt grandissant pour les ressources naturelles
Toutes ces situations complexes et cumulées empêchent le développement de la stabilité du Proche-Orient dont les ressources en énergie attisent les convoitises.
Depuis le début du XXe siècle, les Britanniques sont ceux qui profitent le plus du potentiel pétrolier de la région. En 1901, ils signent un accord avec l'Iran qui leur octroie pendant soixante ans une concession très avantageuse.
Les ressources pétrolières attirent aussi la France et les États-Unis :
- La France est présente avec la Compagnie française des pétroles créée en 1924.
- Les États-Unis sont à l'origine d'environ 70 % de la production de pétrole. Les compagnies américaines de l'industrie pétrolière grandissent et s'intéressent de plus en plus aux ressources du Moyen-Orient. Les États-Unis se rapprochent notamment de la famille Saoud à la tête de l'Arabie qui possède des réserves pétrolières considérables.
À partir de 1928, les entreprises européennes et américaines forment un cartel nommé les Sept Sœurs, qui domine la production pétrolière de la région.
La montée des tensions
Le panarabisme et l'islamisme
D'un côté, l'idée d'une union de tous les peuples arabes, le panarabisme, apparaît déjà au XVIIIe siècle en réaction à l'occupation ottomane.
Le panarabisme, ou nationalisme arabe, se développe au cours du XIXe siècle. Ce projet d'un grand État arabe se répand au-delà des différences religieuses et les chrétiens arabes le soutiennent.
Negib Azoury, arabe chrétien, écrit en 1905 Le Réveil de la nation arabe dans l'Asie turque.
Le panarabisme s'affirme durant la Première Guerre mondiale. Engagé dans cette guerre, l'Empire ottoman mène une répression sans faille contre les tenants de cette idéologie. En effet, la naissance d'un État arabe serait une menace directe pour l'unité de l'Empire ottoman.
La lutte des nationalistes arabes devient une lutte armée avec la révolte menée par le chérif de La Mecque. Britanniques et Français, en guerre contre l'Empire ottoman, soutiennent cette révolte qui affaiblit leur ennemi. En 1918, alors que les Ottomans se retirent des territoires arabes au profit des Britanniques et des Français, le nationalisme arabe se dirige contre ces deux puissances européennes qui occupent désormais la zone.
En Égypte, le parti Wafd regroupe Coptes (chrétiens) et musulmans contre la présence britannique.
L'essor du sionisme et des tensions en Palestine
D'un autre côté, le sionisme est un courant politique qui a pour objectif la création d'un État juif.
Ce mouvement prend de l'ampleur avec les nombreuses persécutions et les pogroms, dont sont victimes les Juifs d'Europe de l'Est. De nombreux Juifs immigrent alors vers la Palestine.
En 1917, les Britanniques publient la déclaration Balfour qui propose la création d'un "foyer national juif" et encourage les vagues migratoires des Juifs. Rapidement, des tensions apparaissent entre les deux communautés. En effet, les Arabes, attachés à l'idée d'un grand État arabe indépendant, perçoivent comme une menace cet État peuplé d'Européens coupant définitivement en deux leur territoire. Avec l'accroissement du nombre de Juifs en Palestine, les tensions s'exacerbent.
La Seconde Guerre mondiale
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le contrôle du Proche-Orient est un enjeu considérable.
En effet, il permet aux grandes puissances de s'approvisionner en pétrole et constitue un axe de circulation privilégié avec le canal de Suez.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les mandats européens dans la région se terminent. Le Liban devient indépendant en 1943 et la Syrie en 1946.
En 1945, les États-Unis, première puissance mondiale, concluent un pacte avec l'Arabie saoudite qui leur donne accès au pétrole en échange d'une protection militaire.
L'ampleur des massacres contre les Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale accentue les revendications d'un État juif. La situation est très tendue. Les Britanniques ne sont plus en mesure de garantir la paix dans la région car des milices juives s'opposent à leur autorité et matent les révoltes arabes. Les Britanniques quittent la région en 1947. L'ONU propose un plan de partage entre Palestiniens et Israéliens. Les Juifs acceptent le plan tandis que les Arabes le refusent.
L'État d'Israël est proclamé par David Ben Gourion le 14 mai 1948 et provoque la première guerre entre Israël et ses voisins arabes.
Proche et Moyen-Orient de 1948 à 1991
Proche et Moyen-Orient, un enjeu de la guerre froide
Les facteurs de tensions du Proche et Moyen-Orient
En 1945, de nombreux enjeux économiques, politiques et culturels font du Proche et du Moyen-Orient une région stratégique à l'échelle mondiale.
- La zone est une importante réserve d'hydrocarbures, de pétrole et de gaz, dont l'exploitation est nécessaire pour les économies industrialisées.
- C'est un carrefour de circulation essentiel entre l'Asie et l'Europe.
- C'est enfin le berceau des trois grandes religions monothéistes (judaïsme, christianisme et islam) abritant les lieux saints.
Le cas des lieux saints est emblématique des tensions de la région.
- En effet, les Juifs considèrent la terre d'Israël comme la Terre promise par Dieu à Abraham au "peuple élu" en échange du respect de la loi de Dieu. Les premiers royaumes hébreux sont nés dans cette région et à Jérusalem se trouve le Mur des lamentations, le lieu le plus saint pour les Juifs, qui est une partie du temple détruit par les Romains.
- Pour les chrétiens, la Palestine est l'endroit où a vécu le Christ et où il a fait ses miracles. Son tombeau se trouverait à Jérusalem, ville dans laquelle il a été crucifié, ressuscité et d'où il serait monté au paradis.
- Enfin les musulmans ont leurs deux principaux lieux saints en Arabie : La Mecque et Médine. Ce sont les villes où est né l'islam avec Mohammed et à partir d'où la religion musulmane s'est développée. Jérusalem est aussi importante, c'est le troisième lieu saint pour les musulmans. À l'endroit qui abrite actuellement le dôme du Rocher, Mohammed aurait effectué un voyage nocturne et, de cet endroit, il serait monté au paradis.
Socialement, la zone est très hétérogène. Au début des années 1950, les inégalités de richesse sont importantes.
En 1953, le revenu annuel par habitant en Irak et en Égypte est respectivement de 85 et 115 dollars alors qu'il est de 389 et 539 dollars pour le Liban et Israël.
Enfin, certaines ressources naturelles, comme l'eau, font défaut dans plusieurs régions. La forte croissance démographique à partir des années 1950 amplifie la pression sur les ressources naturelles et peut devenir une source de tensions.
Le Proche et Moyen-Orient entrent dans la guerre froide
Dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'URSS et les États-Unis, engagés dans la guerre froide, rivalisent au Proche et au Moyen-Orient :
Les troupes soviétiques, présentes en Iran pendant la guerre, stationnent dans le pays. Sous la pression des États-Unis, Staline évacue l'Armée rouge en 1946. Le soutien des Soviétiques aux milices communistes en Grèce et en Turquie conduit Truman à définir la politique de l'endiguement, qui consiste à empêcher la propagation du communisme.
Les pays du Proche et du Moyen-Orient rentrent dans la logique de la guerre froide et intègrent les blocs. Certains pays rejoignent le bloc occidental :
- L'Arabie saoudite reste un allié des États-Unis.
- La Turquie et l'Iran reçoivent des aides financières des États-Unis. La Turquie intègre d'ailleurs l'OTAN en 1952.
- Le pacte de Bagdad, en 1955, permet une alliance entre les États-Unis, le Royaume-Uni, le Pakistan, l'Iran et la Turquie.
L'URSS s'appuie sur le nationalisme arabe pour s'installer dans la région. Elle devient un soutien de Nasser qui prend le pouvoir en Égypte en 1952 et incarne ce nationalisme. Elle dénonce l'État d'Israël et défend la cause des Arabes palestiniens.
La crise de Suez en 1956
Les Britanniques ont concédé l'indépendance de l'Égypte contre le maintien de leurs intérêts sur le canal de Suez. En 1956, Nasser, président de l'Égypte, proche de l'URSS et ardent défenseur du nationalisme arabe, décide de nationaliser le canal de Suez. Une coalition entre les Britanniques, les Français et les Israéliens attaque l'Égypte. L'armée égyptienne subit des défaites et doit se replier. L'URSS menace alors la coalition d'une riposte nucléaire. Pour calmer la situation, les États-Unis exigent le retrait des forces occidentales. Nasser remporte une éclatante victoire qui marque le recul définitif des Européens dans la région. Suite à ce conflit, Israël est définitivement considéré comme un État pro-occidental.
Dans les années 1970, la Syrie, l'Irak et le Yémen se rapprochent de l'URSS. Avec la révolution islamique de 1979, l'Iran quitte le bloc occidental. Dans les années 1980, l'Irak et l'Égypte rejoignent finalement le bloc de l'Ouest.
Les guerres israélo-arabes et le conflit israélo-palestinien
Les guerres israélo-arabes
Le lendemain de la création d'Israël, le 14 mai 1948, les États arabes voisins attaquent le pays et déclenchent la première guerre israélo-arabe.
En effet, le 15 mai 1948, l'Égypte, la Jordanie, l'Irak, la Syrie et le Liban attaquent Israël. À la surprise générale, Israël remporte le conflit et accroît son territoire au détriment des zones peuplées par les Arabes. 700 000 Arabes de Palestine s'enfuient ou sont expulsés ils se réfugient dans les pays arabes voisins où ils sont parqués dans des camps. Cette fuite est appelée la Naqba ("catastrophe" en arabe) et constitue le point de départ de ce qu'on appelle la "question palestinienne".
L'affrontement israélo-arabe rentre dans la logique de la guerre froide. En effet, Israël s'allie avec les États-Unis tandis que les pays arabes sont soutenus par l'URSS.
En 1967, commence la guerre des Six-Jours. Après des mois d'incidents frontaliers avec les pays arabes, les Israéliens déclenchent une "guerre préventive" contre l'Égypte, la Syrie et la Jordanie. En six jours, ils conquièrent le Sinaï, la Cisjordanie, Jérusalem-Est, Gaza et le Golan. C'est une victoire pour Israël.
L'alliance forte entre les États-Unis et Israël est scellée durant cette période. Toutefois, la résolution 242 de l'ONU exige la restitution des territoires occupés par l'État hébreu et la reconnaissance, par les États arabes, d'Israël.
Anouar el-Sadate arrive au pouvoir en 1970 après la mort de Nasser. Pendant un temps, il poursuit la politique contre Israël. Il est d'ailleurs à l'origine de la guerre du Kippour en 1973. En attaquant le jour de la fête du Kippour, il mise sur l'effet de surprise, mais Israël réussit à contrer cette attaque.
Cette guerre a des conséquences internationales. Soviétiques et Américains aident les belligérants. En 1973, les pays arabes, réunis au sein de l'OPEP, décident de mettre en place des restrictions dans l'approvisionnement du pétrole pour les pays qui soutiennent Israël et provoquent le premier choc pétrolier.
Sadate change ensuite de politique. Il entreprend un rapprochement entre l'Égypte et Israël. En 1979, la paix est signée entre Israéliens et Égyptiens dans le cadre des accords de Camp David (1978). L'Égypte reconnaît Israël et récupère le Sinaï. Cette paix provoque des divisions au sein du monde arabe. L'Égypte est exclue de la Ligue arabe et Sadate est assassiné par les islamistes.
La question palestinienne
Depuis la guerre des Six-Jours en 1967, Israël domine la Cisjordanie (dont Jérusalem) et Gaza, territoire qui abrite 1 million et demi d'Arabes palestiniens.
Suite à la guerre, le mouvement national palestinien se radicalise. Yasser Arafat, chef du Fatah, prend la tête de l'OLP (Organisation de Libération de la Palestine). Il profite de l'échec des pays arabes durant la guerre des Six-Jours pour affranchir l'OLP de la tutelle de ces États.
L'OLP lance des actions armées contre Israël. Toutefois, le mouvement étant basé en Jordanie, qui souhaite normaliser ses liens avec l'État hébreux, l'OLP est expulsée en septembre 1970 (appelé le "septembre noir"). L'organisation se réfugie alors dans le sud du Liban et se radicalise. Les Palestiniens organisent des détournements d'avion et des attentats, dont celui des Jeux olympiques de Munich en 1972 contre les athlètes israéliens.
Le conflit israélo-palestinien s'exporte au Liban. L'OLP, soutenue par Moscou, s'allie aux partis progressistes libanais. En 1982, Israël lance une opération militaire au Liban, nommée "Paix en Galilée", pour mettre un terme aux opérations de l'OLP. Il occupe alors l'Ouest de Beyrouth. Les milices chrétiennes libanaises organisent les massacres dans les camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila avec le consentement de l'armée israélienne. L'OLP quitte le pays et se réfugie à Tunis. Trois ans plus tard, Israël quitte le Liban.
Au début des années 1980, la création du Hezbollah, mouvement armé chiite soutenu par la Syrie et l'Iran, reprend la lutte contre Israël. Il devient aussi un important facteur de tensions pour le Liban.
La situation sociale est très précaire dans les territoires palestiniens occupés par Israël en Cisjordanie et la première Intifada éclate en 1987 à Gaza. Il s'agit d'un soulèvement de la population palestinienne contre l'occupation israélienne. Le Hamas, mouvement palestinien islamiste radical, est créé en 1987.
La multiplication des conflits
Les conflits se multiplient au Proche et au Moyen-Orient.
Une guerre éclate entre l'Iran et l'Irak de 1980 à 1988. En effet, en 1979, Saddam Hussein accède au pouvoir en Irak en s'appuyant sur les sunnites du pays. La même année, l'ayatollah Khomeini prend le pouvoir en Iran et crée une république islamique chiite. Les causes religieuses (chiites contre sunnites), ethniques (Arabes contre Perses) et géopolitiques (ancien conflit frontalier entre l'Irak et l'Iran) conduisent Saddam Hussein à lancer ses troupes contre l'Iran.
Malgré des victoires initiales, il s'avère que Saddam Hussein a sous-estimé son adversaire. L'intense propagande du régime iranien amène à un enrôlement en masse des soldats. La guerre dure huit ans, fait un million de morts et ne permet aucune victoire décisive.
Une autre guerre liée à la guerre froide éclate, celle d'Afghanistan, qui dure de 1979 à 1989. Elle commence avec l'intervention de l'URSS qui cherche à secourir le gouvernement socialiste menacé par les milices tribales. Les troupes de l'Armée rouge enregistrent quelques victoires mais le combat se prolonge contre les milices qui sont armées par les États-Unis. L'URSS se retire en 1989, la guerre est terminée mais le pays est complètement divisé.
Proche et Moyen-Orient depuis 1991
Proche et Moyen-Orient au lendemain de la guerre froide
De nombreux facteurs de déstabilisation
Au lendemain de la guerre froide, malgré la fin de l'opposition entre les deux blocs, la région reste très divisée.
Le Proche et le Moyen-Orient restent une zone comprenant de nombreux facteurs de tensions dont les enjeux sont internationaux.
Certains de ces facteurs sont très anciens :
- La région possède 50 % des réserves mondiales de pétrole connues, ce qui attire les convoitises.
- L'eau est assez rare dans le secteur. Depuis les années 1970, les tensions sont très vives entre la Turquie, l'Irak et la Syrie suite à la construction de barrages sur les fleuves. Le problème du partage des eaux est aussi déterminant dans le conflit israélo-palestinien car Israël contrôle de nombreuses nappes phréatiques.
- La présence de minorités, enfin, est instrumentalisée. Saddam Hussein s'appuie sur les sunnites et les chrétiens et réprime les chiites et les Kurdes. Les Kurdes subissent une oppression en Turquie et en Syrie. Le régime d'Assad s'appuie sur les alaouites et les chrétiens.
À ces anciens facteurs s'ajoutent de nouveaux éléments qui contribuent à la déstabilisation de la région. Le plus important de ces facteurs est le développement de l'islamisme radical :
- L'Iran impose à la société iranienne un islamisme chiite fondamentaliste.
- Le Hamas a augmenté son influence en Palestine.
- Le Hezbollah est bien implanté au Liban.
- En Afghanistan, à la suite d'une guerre contre le gouvernement de 1992 à 1996, les talibans sont à la tête de l'État. Le mouvement Al-Qaïda y est installé, dirigé par Oussama ben Laden qui entreprend des opérations terroristes à partir de 1993.
La guerre du Golfe (1990 - 1991)
Après l'échec de Saddam Hussein contre l'Iran, l'Irak est très endetté, notamment auprès des monarchies pétrolières de la péninsule Arabique. La guerre du Golfe débute dans ce contexte.
En effet, n'obtenant pas l'annulation des dettes, Saddam Hussein cherche des ressources financières et envahit le Koweït en août 1990. Il veut s'accaparer les réserves pétrolières du pays qui représentent 20 % des réserves mondiales.
Hussein instrumentalise la question palestinienne. Il refuse de quitter le Koweït si Israël ne quitte pas les territoires qu'il occupe en Palestine. Une coalition, sous mandat de l'ONU, intervient et libère le Koweït en février 1991.
Saddam Hussein entreprend alors une féroce répression contre les populations kurdes et chiites en Irak. Il utilise des armes non conventionnelles comme des gaz chimiques.
La guerre du Golfe est marquée par la non-intervention de l'URSS qui est en proie à une grave crise interne. George Bush parle de ce conflit comme symbolique du "nouvel ordre international" qui s'installe au lendemain de la guerre froide, un ordre basé sur le multilatéralisme.
La question israélo-palestinienne
À la fin de la guerre froide, au cœur du conflit israélo-palestinien, l'OLP ne peut plus compter sur le soutien de l'URSS.
Yasser Arafat doit trouver une issue au conflit et les États-Unis veulent favoriser un retour à la paix dans la région entre les Israéliens, les Palestiniens et les pays arabes.
Cela aboutit à la signature des accords d'Oslo en 1993 entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin. Ces accords permettent la reconnaissance mutuelle d'Israël et de l'OLP, et la création d'une autorité palestinienne en Cisjordanie et à Gaza. En 1994, un traité de paix est enfin signé entre la Jordanie et Israël.
Mais les extrémistes des deux bords empêchent la poursuite du processus de paix :
- Les colons juifs refusent d'évacuer les colonies.
- Les attentats-suicides menés par le Hamas et le djihad islamique se poursuivent.
- Yitzhak Rabin est assassiné en 1995 par un extrémiste israélien.
La situation s'aggrave en 2000. Ariel Sharon, Premier ministre israélien opposé aux accords d'Oslo, se rend sur l'esplanade des Mosquées (le troisième lieu saint de l'islam) ce qui provoque le début de la deuxième Intifada.
En 2005, la bande de Gaza est évacuée par les Israéliens. Le Hamas et le Hezbollah multiplient les attaques contre Israël et le Hamas prend le pouvoir dans la bande de Gaza en 2007. Le Fatah, dirigé par Mahmoud Abbas, doit alors affronter cette nouvelle autorité palestinienne concurrente à Gaza.
Israël entreprend des actions militaires au Liban en 2006 et à Gaza : l'opération "Plomb durci" de 2009 et l'opération de 2014. Un mur de séparation entre l'État hébreu et la Cisjordanie est construit.
Le processus de paix piétine. Israël conditionne la reprise des discussions à la fin des attaques sur son territoire. Le Hamas veut, préalablement aux négociations, une levée du blocus qui asphyxie Gaza. Certains problèmes sont difficiles à régler, comme le statut de Jérusalem, l'occupation des colonies et la question des réfugiés.
Le Proche et Moyen-Orient depuis 2001
Les attentats du 11 septembre 2001 et leurs conséquences
L'islamisme radical constitue l'un des premiers facteurs de désordre.
Le réseau international Al-Qaïda, qui pratique une série d'attentats depuis 1993, organise les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Les villes de New York et de Washington sont touchées. George W. Bush, président des États-Unis à l'époque, décide de mener une guerre contre ce qu'il appelle l"axe du mal".
- En 2001, une coalition internationale, sous mandat de l'ONU, attaque le régime des talibans en Afghanistan qui héberge Al-Qaïda.
- En 2003, les États-Unis entrent en guerre contre l'Irak de Saddam Hussein, suspectée de détenir et de fabriquer des armes de destruction massive. Les États-Unis n'obtiennent pas le soutien de l'ONU face à l'opposition de plusieurs pays, dont la France.
L'intervention en Irak permet la chute de Saddam Hussein mais voit l'émergence d'un mouvement de protestation international contre la politique unilatérale des États-Unis.
Le printemps arabe
En 2010, un mouvement de colère monte en Tunisie et aboutit à la "révolution du Jasmin" qui renverse le dictateur Ben Ali.
En effet, la précarité sociale qui touche de larges couches de la population et le mécontentement envers le pouvoir despotique permettent ce "printemps arabe" qui va toucher plusieurs pays :
- En Égypte, Hosni Moubarak est chassé du pouvoir.
- Au Yémen, Ali Abdallah Saleh s'enfuit en Arabie saoudite.
- Une coalition franco-britannique soutient les rebelles libyens et détruit le régime de Kadhafi.
- Des troubles ont lieu au Maroc et au Bahreïn.
- La Syrie entre dans une guerre civile.
Une région déstabilisée par la montée de l'islamisme
Les islamistes modérés remportent plusieurs victoires suite à la déstabilisation de la région.
Ainsi, en Turquie, l'AKP d'Erdogan dirige le pays depuis 2002 et remet en cause de nombreuses libertés fondamentales, violant les Droits de l'Homme. En Tunisie et en Égypte, les islamistes sont élus au pouvoir au lendemain des révolutions.
Ailleurs, ce sont les islamistes radicaux qui gagnent du terrain. En Afghanistan, où les troupes américaines sont toujours présentes, les talibans contrôlent encore de nombreuses régions. À cheval sur la Syrie et l'Irak, un État se revendiquant de l'islam fondamentaliste s'est créé. Il s'agit de Daech, qui mène une intense propagande pour le recrutement de djihadistes. Enfin, la Libye est en proie à une guerre civile dans laquelle les groupes islamistes sont des acteurs fondamentaux.
En 2014, les gouvernements islamistes élus en Égypte et en Tunisie sont remplacés par des gouvernements laïques :
- En Égypte, l'armée, derrière le général Fattah el-Sissi, reprend le pouvoir et mène une intense répression contre les islamistes.
- En Tunisie, la coalition laïque de centre-gauche dirigée par Beji Caïd Essebsi, est élue en décembre. Le président sortant qui a gouverné avec les islamistes perd les élections.
À l'inverse, en Turquie, malgré un important mouvement protestataire en 2013, le gouvernement d'Erdogan enregistre des succès électoraux et restreint de plus en plus les libertés.