Sommaire
IL'intitulé du parcours : « La poésie, la nature, l'intime »ADéfinition des termes du parcours1« La poésie »2« La nature »3« L'intime »BLes enjeux du parcoursIIL'auteur : Hélène DorionAUne auteure prolifiqueBParcours artistiqueIIIL'œuvre : Mes forêtsIVTextes clefs du recueilAMes forêts sont un champ silencieuxBMes forêts sont des bêtes qui attendent la nuitCIl fait un temps de foudre et de lambeauxL'intitulé du parcours : « La poésie, la nature, l'intime »
L'intitulé du parcours invite à se demander si le poème est le moyen privilégié d'évoquer la nature et l'intime.
Définition des termes du parcours
Les termes de l'intitulé du parcours invitent à s'interroger sur les liens entre la création, la nature et l'intime.
« La poésie »
Le terme « poésie » est lié à l'idée de fabriquer, de créer quelque chose.
L'étymologie grecque du mot « poésie »(poiein) renvoie à l'idée de création, de production ; elle assimile le poète à un artisan. La poésie est l'art d'évoquer des sensations, des émotions, des impressions, grâce à un travail sur les sons, les rythmes et les harmonies. Platon rattachait la poésie au travail du poète, inspiré par les dieux. À l'inverse, Aristote considérait que la poésie appartenait aux arts d'imitation.
« La nature »
Le mot « nature » englobe l'ensemble des choses et des êtres qui nous entourent.
Le terme nature est à envisager comme toute réalité matérielle indépendante de l'activité et de l'histoire humaine. Il s'agit de fait du milieu terrestre, c'est-à-dire le sol, le climat, l'eau, la végétation, les animaux. La nature peut devenir une source d'émotions ou de sensations pour le poète qui se trouve en contact avec elle. Elle devient alors une sorte de refuge qui s'oppose à la ville.
« L'intime »
Le mot « intime » fait référence à ce qu'il y a de plus profond en chaque personne.
Le terme « intime » constitue l'essence d'une chose qui reste généralement secrète ou cachée. Il s'agit de ce qui se situe ou se rattache à un niveau très profond de la vie psychique, qui est impénétrable à l'observation externe. On parle alors de la vie intérieure et secrète d'une personne.
Les enjeux du parcours
L'intitulé du parcours suggère que la poésie devient le moyen privilégié pour évoquer la nature et tout ce qu'elle provoque chez le poète, en particulier son rapport à ce qu'il y a de plus ancré en lui.
Le parcours « La poésie, la nature, l'intime »propose au lecteur de découvrir le lien privilégié que le poète entretient avec la nature, cette forme d'harmonie particulière, qui lui permet de créer divers poèmes. C'est donc une vision personnelle de la poésie qui est suggérée par ce parcours.
La création artistique ne doit de fait pas être dissociée de l'expérience personnelle du poète. Sa vie intérieure profonde devient son objet d'étude et sa source d'inspiration. La poésie d'Hélène Dorion est une poésie de l'intime, une poésie lyrique, qui trouve son inspiration dans un rapport particulier à la nature.
L'intitulé du parcours invite donc à se poser diverses questions :
- La nature peut-elle être source de création poétique ?
- Comment le poète évoque-t-il son intimité dans ses poèmes ?
- La forme poétique est-elle renouvelée grâce à un nouveau rapport à l'intime et à la nature ?
- Quelle place accorder au lyrisme poétique ?
- La création poétique doit-elle se centrer autour du « je » ?
L'auteur : Hélène Dorion
Hélène Dorion, née en 1958 à Québec, est l'une des figures majeures de la littérature québécoise et francophone. À ce jour, elle a publié plus d'une trentaine de livres. Ses œuvres s'intéressent à la beauté complexe du monde qui nous entoure mais aussi au passage éphémère de l'homme sur Terre.
Une auteure prolifique
Hélène Dorion est l'une des figures majeures de la littérature québécoise et francophone. Elle a publié de très nombreux ouvrages.
Née en 1958 à Québec, où elle habitera jusqu'à ses 22 ans, Hélène Dorion est aujourd'hui l'une des figures majeures de la littérature québécoise et francophone. À 26 ans, après avoir entrepris des études de Lettres, elle commence à enseigner la littérature durant six ans dans un cegep.
Entre 1991 et 2000, elle a dirigé les Éditions du Noroît, pour lesquelles elle a réalisé une série d'enregistrements de poésie et de musique. C'est ce qui l'engage, quelques années plus tard, à s'intéresser à la conception de concerts littéraires. Elle présente alors au Québec et en Europe des lectures-spectacles.
À partir de 1994, ses voyages commencent à se multiplier, elle traduit de plus en plus de livres, ce qui la fait participer à des lectures publiques, des colloques et festivals. Elle continue à publier des romans, des livres photos, de la littérature de jeunesse ou des poésies.
Parcours artistique
Les œuvres d'Hélène Dorion s'intéressent à la beauté complexe du monde qui nous entoure. Elles évoquent également le passage éphémère de l'homme sur Terre.
À l'âge de cinq ans, elle vit deux expériences qui la confrontent directement à la complexité de l'existence humaine :
- Lors d'une promenade dans la forêt avec son père, elle est frappée par l'immensité de la nature et elle comprend qu'elle n'est une minuscule partie éphémère présente dans l'univers
- Elle assiste à la télévision à l'assassinat de John F. Kennedy, ce qui la renvoie à l'image de la temporalité de la vie : elle comprend que l'homme n'est que de passage sur terre, contrairement à la nature.
Hélène Dorion publie ses premiers poèmes à partir de 1981 dans la revue Estuaire, où elle intègre le comité de rédaction, ce qui lui permet de rencontrer Suzanne Paradis et Michel Beaulieu. Grâce à eux, elle présentera son premier recueil de poèmes, L'Intervalle prolongé, suivi de La Chute requise l'année suivante.
À ce jour, elle a publié plus d'une trentaine de livres, dont les plus connus sont :
- Comme résonne la vie,
- Jours de sable,
- Mondes fragiles,
- Mes forêts.
Ses œuvres s'intéressent à la beauté complexe du monde dans une recherche constante d'union et de fusion avec le monde qui nous entoure. Hélène Dorion participe également à l'élaboration de nombreux ouvrages collectifs, elle dirige des publications consacrées à la littérature québécoise et elle travaille à la rédaction de revues comme Présages ou encore Livres et auteurs québécois.
Elle parvient à atteindre une reconnaissance internationale et est traduite et publiée dans une quinzaine de pays, ce qui lui permet de recevoir de nombreuses distinctions et prix littéraires :
- le prix du Gouverneur général du Canada,
- le prix Anne Hébert,
- le prix de l'Académie Mallarmé.
Grâce à cette reconnaissance internationale, elle obtient une place de jury permanent des prix internationaux de poésie de langue française Léopold Senghor et Louise Labé. En 2007, elle devient Chevalière de l'Ordre national du Québec, officière de l'Ordre du Canada et est membre de l'Union des écrivaines et des écrivains québécois.
L'œuvre : Mes forêts
Le recueil Mes forêts est un hymne à la forêt dans lequel Hélène Dorion appelle le lecteur à voir la beauté du monde qui l'entoure.
Le recueil Mes forêts est imprégné des paysages qu'a pu découvrir Hélène Dorion. Le recueil se présente comme un hymne à la forêt. Le lecteur découvre dans chaque poème le chant de l'arbre dans une forêt de symboles qu'il doit déchiffrer petit à petit. Hélène Dorion cherche à toucher le lecteur à partir de ses impressions, de son intimité, de son introspection, et l'appelle à voir la beauté du monde qui l'entoure. Ses poèmes montrent que la célébration de la nature est à comprendre avec la découverte ou la redécouverte de l'intériorité.
Textes clefs du recueil
Mes forêts sont un champ silencieux
Mes forêts sont un champ silencieux
de naissances et de morts
la mémoire de saisons
qui se lèvent et retombent
mes forêts sont du temps qui s'immisce
à travers tronc branche racine
elles traversent le feuillage du jour
capturent l'ombre capturent l'éclat
elles sont la solitude disséminée
comme poussière de notre passage
une poignée de roches
qui savent les âges mes forêts
sont des traits de craie noire
les lettres désarticulées de mots
inconnus d'un matin qui hésite à venir
elles sont des ossements
que lèche l'invisible
une géométrie de souffles
et de pas qui se perdent
mes forêts sont lièvres et renards
jungle d'insectes qui scintillent
un soir d'été quand c'est l'hiver
elles sont coyote ours noir original
sitelle geai bleu mésange
elles dorment nues mes forêts
attendent le vent
qui les fera tanguer
comme des bêtes ivres
qui marchent vers leurs racines
si peu me fait vivre
quand c'est plein d'étoiles
et que s'avance le poème
Antithèses
Métaphores
Personnification de la forêt
Le thème de la nature
Mouvements du texte :
• Premier mouvement : quatre premières strophes, la personnification de la forêt, le témoin de notre passage sur terre
• Deuxième mouvement : quatre dernières strophes, l'animalisation de la forêt
L'essentiel à retenir du texte :
• La forêt, source de vie et de mort : dans son poème, Hélène Dorion veut montrer les pouvoirs propres aux forêts. Elles sont à l'origine de la vie et voient passer la mort. Parce qu'elles sont éternelles, elles sont le témoin privilégié du passage de toute chose sur terre : nature, animaux, hommes.
• Dans l'intimité de la forêt : le lyrisme est omniprésent dans le poème, notamment à travers l'emploi du déterminant possessif « mes », du pronom possessif « me », mais également à travers les sensations et sentiments évoqués. De plus, les forêts semblent ne former qu'un avec tous les éléments qui les entourent comme le montrent les métaphores et l'animalisation des forêts.
• La nature comme source d'inspiration poétique : c'est grâce à une harmonie avec la nature que la poétesse parvient à créer son poème. Les forêts deviennent alors le sujet du poème et le témoin direct de l'acte créateur d'Hélène Dorion. Elles l'aident à trouver les mots justes quand l'inspiration manque.
Mes forêts sont des bêtes qui attendent la nuit
Mes forêts sont des bêtes qui attendent la nuit
pour lécher le sang de leurs rêves
gratter la terre gratter l'écorce
boire l'offrande et se glisser
dans un lit rempli de lucioles
mes forêts sont une planète silencieuse
une éclipse qui fléchit
le bois de barques à la dérive
alors qu'on croirait tout immobile
elles sont un dessin de nature morte
ignorant les écrans
sur lesquels on les regarde
sans jamais les voir mes forêts
sont chemin de chair et marées de l'esprit
un verbe qui se conjugue lentement
loin de facebookinstagramtwitter
mes forêts sont des rivages
accordés à mes pas la demeure
où respire ma vie
Anaphore de « mes forêts »
Métaphores des forêts
Personnification de la forêt
Divinisation de la forêt
Mouvements du texte :
• Premier mouvement : deux premières strophes, les forêts agissent dans un silence absolu
• Deuxième mouvement : les forêts nous permettent de vivre dans un monde meilleur
L'essentiel à retenir du texte :
• Le silence des forêts : le pouvoir créateur des forêts ne peut se développer que la nuit, lorsqu'il n'y a aucun bruit et que le monde est immobile. C'est à ce moment-là qu'elles montrent leur toute-puissance en s'ouvrant au monde et aux hommes. De fait, elles sont personnifiées.
• La divinisation des forêts : Hélène Dorion fait découvrir au lecteur une image des forêts peu classique, puisqu'elle les divinise en montrant qu'elles sont partout et qu'elles sont tout à la fois : rivages, marées, dessins de nature morte, planète, animaux. Elles peuvent se transformer à l'infini et se propagent autour de nous. Il y a donc une forme de symbiose entre les forêts et le monde, ils ne font qu'un.
• Les forêts permettent une renaissance de l'homme : c'est loin de la société qu'Hélène Dorion nous propose de découvrir une nouvelle vie. L'homme doit s'échapper du rythme de vie rapide que propose la vie en société pour se tourner vers une vie plus lente, au rythme des bruits de la nature.
Il fait un temps de foudre et de lambeaux
Il fait un temps de foudre et de lambeaux
d'arbres abattus
au-dedans de soi
il fait pluie maigre
un temps de glace
et de rêves qui fondent
dans le labyrinthe des miroirs
le dos courbé le poids des silences
guerres famines tristes duretés
c'est seulement l'hiver
sur l'écran d'aujourd'hui
s'annoncent les orages de demain
des chiffres pour ne rien dire
de l'inquiétude qui brûle nos mots
lettres échevelées
bientôt cassées comme pib
nip fmi
il fait un temps à s'enfermer
dans nos maisons de forêt
avec le bruit secret des nuages
qui souffle
de l'autre côté de la nuit
Un monde chaotique
Champ lexical du temps
Anaphore
L'intimité de la nature
Mouvements du texte :
• Premier mouvement : deux premières strophes, la description d'un monde chaotique
• Deuxième mouvement : dernière strophe, un nouveau rapport intime à la nature
L'essentiel à retenir du texte :
• Un monde post apocalyptique : le monde qui nous entoure n'est fait que de catastrophes et de destruction de la nature : « arbres abattus, temps de glace, guerres, famines, tristes duretés ». C'est un monde qui détruit petit à petit l'homme et l'empêche de créer, comme le montre la métaphore « brûle nos mots ».
• L'homme est perdu dans le monde actuel : l'homme ne parvient plus à trouver sa place dans ce monde qu'il ne reconnaît pas et qu'il ne comprend pas. Ce monde n'est fait que de « chiffres » qui ne signifient rien et détournent l'homme de l'essentiel, puisqu'il ne fait que l'inquiéter sur des sujets sans importance.
• Un nouveau rapport à la nature : il faut se détacher du monde et de la société pour retourner à une vie en harmonie avec la nature. La nature devient alors un véritable refuge, une nouvelle « maison », pour l'homme et une confidente. Si l'homme accepte de se réfugier dans la nature, alors elle lui confiera également tous ses secrets.