Sommaire
ILe fonctionnement de la presse et du journalismeALe circuit de l'informationBLes différents journaux et leur publicationCL'organisation d'un journal1La une et les différents articles2La présentation des articlesIILe rôle du journalisteALe métier de journalisteBLe devoir du journalisteCLe point de vue adopté par le journalisteIIILa presse dans la littératureALe développement de la presse et du romanBLe journalisme en littérature1La description de la vie d'un journal2Les personnages de journalistes3La critique et la défense du journalisme en littérature« Informer », du latin informare, « donner une forme », signifie « mettre en forme un fait, un événement, pour le transmettre au public ». La presse se charge de cette transmission. C'est le journaliste qui doit diffuser une information sûre et vérifiée. Il est important pour chaque citoyen de s'informer pour savoir ce qui se passe dans le monde, dans la société dans laquelle il vit, pour apprendre, pour se faire un avis sur les faits d'actualité. Le citoyen doit cependant être vigilant et bien voir si l'information donnée n'a pas été déformée, c'est-à-dire détournée de son sens premier et vrai. La littérature donne à lire de nombreux exemples de fonctionnement de la presse et du journalisme, parfois dans le but de le critiquer.
De quelle manière fonctionnent l'information et le métier de journaliste ? Comment la presse nous informe-t-elle sur l'actualité et les questions de société ? Quelle image la littérature donne-t-elle du journaliste ?
Le fonctionnement de la presse et du journalisme
Pour s'informer, il existe plusieurs médias : presse écrite, papier ou en ligne, radio, télévision, réseaux sociaux, Internet, etc. La presse écrite a été le premier support pour traiter l'information. L'information suit un circuit particulier avant d'être publiée dans différents journaux. Un journal s'organise souvent de la même façon.
Le circuit de l'information
L'information suit un parcours précis entre le moment où un événement se produit et le moment où l'information est publiée par un journaliste.
Les différents journaux et leur publication
La presse propose différents journaux qui sont souvent politiquement orientés. Les journaux paraissent à des rythmes différents.
La presse est rarement neutre : elle répond à des orientations politiques qui se retrouvent dans les articles. Dans les différents pays d'Europe, les journaux s'organisent selon différentes orientations politiques (droite, gauche, centre) et selon des thématiques précises (économique, culturelle, sportive, scientifique, etc.). Le même événement est traité différemment selon l'orientation politique du journaliste ou du journal.
En France, les grands journaux se positionnent de la manière suivante :
- Libération = gauche ;
- Le Monde = centre ;
- Le Figaro = droite.
La presse écrite suit un rythme précis pour publier ses journaux. D'un journal à l'autre, les rythmes de parution sont différents. On distingue six types de publication ou parution.
Journal quotidien
Le journal quotidien paraît tous les jours.
Le Monde paraît tous les jours, c'est un quotidien.
Journal hebdomadaire
Le journal hebdomadaire paraît une fois par semaine.
Le Journal du dimanche paraît une fois par semaine, le dimanche, c'est un hebdomadaire.
Journal mensuel
Le journal (ou la revue, le magazine) mensuel paraît une fois par mois.
Terre Sauvage est une revue qui paraît tous les mois, c'est un mensuel.
Journal bimensuel
Le journal (ou la revue, le magazine) bimensuel paraît deux fois par mois.
Astrapi est un magazine qui paraît deux fois par mois, c'est un bimensuel.
Journal bimestriel
Le journal (ou la revue, le magazine) bimestriel paraît tous les deux mois.
Les Cahiers français est une revue qui paraît tous les deux mois, c'est un bimestriel.
Journal trimestriel
Le journal (ou la revue, le magazine) trimestriel paraît tous les trois mois.
Medium est une revue qui paraît tous les trois mois, c'est un trimestriel.
Aujourd'hui, les informations sont largement diffusées par la télévision et la radio. Elles proposent tous les jours des journaux d'actualité. Certaines chaînes d'information fonctionnent en continu.
Les chaînes de télévision France 24, BFMTV et LCI fonctionnent en continu.
Internet propose aussi des informations en continu qui sont transmises via de nombreux sites ou réseaux sociaux.
L'organisation d'un journal
Le journal suit une organisation précise : il y a la une, les différents articles et le dessin de presse. Un article s'organise également d'une manière précise.
La une et les différents articles
La une correspond à la première page du journal. Dans le journal, il y a des articles courts et des articles longs qui répondent à des caractéristiques précises. Le dessin de presse utilise à la fois la forme imagée et les mots.
C'est une vitrine du journal, une image du journal. On accorde beaucoup d'importance à cette page. Elle doit attirer l'œil et faire vendre le journal. Elle permet aussi de montrer quelle information est mise en avant et comment. La une est souvent composée de la façon suivante :
Il existe 6 types d'articles courts.
Les articles courts | |
Le billet | Commentaire d'un fait d'actualité, vision personnelle et/ou humoristique. |
La brève | Article d'une dizaine de lignes maximum, information concise, sans titre, répond aux questions « qui ? », « quoi ? », « quand ? », « où ? » et parfois aux questions « comment ? » et « pourquoi ? ». |
Le filet | Une brève qui a un titre. |
L'encadré | Une brève qui est présentée dans un cadre. |
Le compte rendu | Article qui rapporte un débat, un événement, une manifestation culturelle, sportive. |
La critique | Article qui analyse favorablement ou défavorablement un livre, un film, un spectacle, un concert, une exposition, etc. |
Il existe 6 types d'articles longs.
Les articles longs | |
La chronique | Article consacré à un domaine particulier de l'actualité. La chronique est régulière (tous les jours, toutes les semaines, etc.) et personnelle. Elle raconte les faits en suivant l'ordre chronologique et en s'appuyant sur des témoignages humains. |
L'édito | Article de réflexion, commentaire rédigé par le rédacteur en chef ou le directeur de la rédaction. Il s'agit d'une réaction à une actualité. Le mot « édito » est une abréviation du terme « éditorial ». |
L'enquête | Article qui a pour but d'apporter des informations approfondies sur un fait, le journaliste a souvent mis plusieurs semaines voire plusieurs mois pour l'écrire. |
Le fait divers | Article qui traite d'un événement concernant le domaine social comme un accident, la disparition d'une célébrité une catastrophe, un enlèvement. Les journalistes le surnomment « chien écrasé ». |
L'interview | Article qui rapporte la conversation du journaliste avec une autre personne. |
Le reportage | Article qui rapporte les informations collectées au plus près de l'événement dans le temps et dans l'espace. C'est l'article de presse par excellence. |
Dessin de presse
Le dessin de presse cherche à dénoncer, à provoquer ou à émouvoir tout en informant le lecteur sur un événement ou un fait.
Dessin au sujet de la réforme de l'enseignement de Xavier Darcos
© Le Monde, Martin Vidberg, 20 novembre 2008
Ce dessin permet à l'auteur de se moquer du sérieux des réformes de l'enseignement. Le personnage qui parle le plus de la réforme répète plusieurs fois « plus ». Il porte une cravate et des lunettes. Il semble s'énerver. L'autre personnage demande un peu de « magie », une façon de rappeler que les enfants ont également besoin de temps libre.
La présentation des articles
L'article obéit à des règles précises de présentation et de rédaction. L'article répond aux questions « qui ? », « quoi ? », « où ? », « quand ? », « comment ? », « pourquoi ? ». Ce sont les règles d'or que doivent suivre les journalistes quand ils rédigent leurs articles.
Le rôle du journaliste
Le métier de journaliste est de transmettre, de diffuser une information. Le journaliste a le devoir de vérifier l'information qu'il diffuse en respectant des règles précises. Le journaliste adopte toujours un point de vue sur l'actualité qu'il transmet.
Le métier de journaliste
Le journaliste recueille l'information, la vérifie et la donne à lire, à voir ou à écouter au public. Il existe différents statuts en fonction de la spécialité du journaliste.
Le journaliste recueille des informations brutes. Elles sont vérifiées et assemblées sous la forme d'un article ou d'un reportage afin de les partager avec le public. Le journaliste peut travailler sur un événement particulier ou sur un événement d'actualité.
Les élections présidentielles aux États-Unis en novembre 2020 est un événement d'actualité particulier qui a été suivi par de nombreuses personnes à travers le monde. De nombreux journalistes ont décrypté cette actualité.
Un journaliste peut avoir différents statuts en fonction de sa spécialité.
Reporter | Journaliste qui se rend directement sur le terrain pour enquêter et écrire son article. |
Photoreporter ou photographe reporter | Journaliste qui réalise des photographies, parfois des vidéos, pour illustrer un reportage. |
Rédacteur ou rédactrice | Journaliste responsable d'une rédaction dans des journaux très importants. |
Présentateur ou présentatrice | Journaliste qui présente, anime une émission. |
Pigiste | Journaliste qui est payé à la ligne ou à l'article. |
Chroniqueur | Journaliste qui est chargé de rédiger la chronique d'un journal. |
Critique littéraire, musical, cinématographique | Journaliste qui s'applique à faire un compte rendu, une critique sur un sujet précis de littérature, de musique ou de cinéma. |
Journaliste d'investigation | Journaliste qui effectue un travail de recherche très approfondi sur le fait qu'il doit traiter. |
Journaliste sportif | Journaliste qui se consacre uniquement au domaine du sport. |
Éditorialiste | Journaliste qui rédige l'éditorial d'un journal ou d'un magazine. |
Le devoir du journaliste
Le devoir du journaliste est de retranscrire et de transmettre une information vérifiée et fiable. C'est son code de déontologie.
Le journaliste est responsable des informations qu'il donne au public. Il doit respecter des règles strictes pour diffuser des informations fiables, vraies et respectueuses de la liberté d'expression et du droit à s'informer. Le journaliste s'engage à vérifier les informations transmises pour ne pas tomber dans la désinformation, c'est-à-dire une information mensongère, erronée ou manipulée. C'est ce qu'on appelle le code de déontologie de sa profession.
Déontologie
La déontologie est l'ensemble des règles morales et des devoirs d'une profession.
Le code de déontologie du métier de journaliste est inspiré par la Charte de déontologie de Munich, appelée encore Déclaration des droits et des devoirs du journaliste datant de 1971, et par la Charte d'éthique professionnelle des journalistes, revisitée en 2011.
« Les devoirs essentiels du journaliste dans la recherche, la rédaction et le commentaire des événements sont :
- Respecter la vérité, quelles qu'en puissent être les conséquences pour lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité.
- Défendre la liberté de l'information, du commentaire et de la critique.
- Publier seulement les informations dont l'origine est connue ou, dans le cas contraire, les accompagner des réserves nécessaires ; ne pas supprimer les informations essentielles et ne pas altérer les textes et documents. »
Charte de déontologie de Munich
24 novembre 1971
La Charte fixe les devoirs du journaliste qui doit respecter la vérité et défendre la liberté d'information.
Aujourd'hui, avec les technologies modernes, et surtout Internet et les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.), l'information est rapidement diffusée en ligne. Elle permet au lecteur de se tenir très rapidement au courant, mais souvent, elle n'est pas traitée. Cela crée de réels problèmes de déformation de l'information en donnant des informations fausses, déformées.
« Le journalisme d'il y a 10 ans n'est pas le même qu'aujourd'hui. Le Web 2.0 a vu le jour, les smartphones sont dans toutes les poches, ou presque, et la nouvelle technologie a envahi les foyers. […] L'ère du numérique a commencé. […] Internet est devenu le nouveau centre d'information des internautes. Il rend accessible l'actualité en temps réel. […] La toile laisse libre court aux expressions des personnes, tout le monde y va de son commentaire. »
Charlotte Penot
« Le web journalisme – l'info dans son temps ? », publié sur le blog Bookstory
29 juin 2011
Une nouvelle forme de journalisme se développe par le biais d'Internet : chacun peut prétendre être un journaliste car chacun peut rédiger un article. Cependant, les devoirs et les règles morales propres au journalisme ne sont pas respectés et l'information devient donc peu fiable.
Le point de vue adopté par le journaliste
La journaliste adopte un point de vue, objectif ou subjectif. On peut étudier ce point de vue grâce au choix des mots et à leur connotation.
Le point de vue adopté peut être objectif : le journaliste relate l'information de manière neutre. Il n'exprime pas une opinion.
« Le Japon, situé à la jonction de quatre plaques tectoniques, est habitué aux tremblements de terre. Mais la série de secousses qui frappent le sud du pays depuis jeudi rappelle par sa violence la catastrophe de mars 2011, qui avait déclenché un tsunami et la catastrophe nucléaire de Fukushima. »
Laurence Defranoux
© Liberation.fr
17 avril 2016
La journaliste Laurence Defranoux rappelle de manière neutre et objective les caractéristiques géographiques du Japon : « situé à la jonction de quatre plaques tectoniques ». Elle décrit l'événement objectivement : « la série de secousses qui frappent le sud du pays depuis jeudi ». Elle n'exprime pas d'émotions : « rappelle par sa violence la catastrophe de mars 2011, qui avait déclenché un tsunami et la catastrophe nucléaire de Fukushima ».
Le point de vue adopté peut être subjectif : le journaliste relate l'information en exprimant son opinion ou ses émotions.
« Cinq ans après, pourtant, comme si rien ne s'était passé, comme si, trente ans après l'autre désastre majeur – l'explosion, le 26 avril 1986, du réacteur ukrainien de Tchernobyl –, aucune leçon n'avait vraiment été tirée de cette tragédie, le Japon pousse de nouveau les feux du nucléaire. […]
Aveuglement d'un gouvernement, celui du Premier ministre conservateur Shinzo Abe, pressé par les industriels nippons de tourner au plus vite la page de Fukushima, alors même que le chantier de démantèlement de la centrale durera près d'un demi-siècle et que, dans la zone d'évacuation de 20 km autour du site nucléaire, des villages fantômes sont à jamais condamnés ? »
© Lemonde.fr
11 mars 2016
Le journaliste exprime son opinion. On ressent son inquiétude et sa colère grâce à différents moyens : l'utilisation de la phrase interrogative, la répétition de « comme si », des mots qui touchent comme « tragédie », « aveuglement », « aucune leçon », la comparaison avec la catastrophe de Tchernobyl.
Les procédés d'écriture (vocabulaire, structure des phrases, ton humoristique, dramatique, etc.) permettent de capter l'attention du lecteur, de faire appel à son émotion, de susciter des réactions. Le lecteur peut analyser ces procédés et déterminer si le journaliste est subjectif ou non.
Des mots ou expressions pour exprimer le doute | « Il semble que », « il paraît que », « peut-être », etc. |
Des adjectifs pour exprimer la certitude avec des degrés divers | « Certain », « probable », « sûr », « avéré », « plausible », « possible », etc. |
Des adverbes pour exprimer la certitude | « Absolument », « certainement », « infailliblement », « indéniablement », « sûrement », « immanquablement », « indubitablement », « incontestablement », etc. |
Des noms pour exprimer la rumeur | « Les bruits », « les racontars », « les rumeurs », « les on-dit », « les ragots », etc. |
Le lecteur doit faire preuve d'esprit critique, de réflexion pour bien comprendre et analyser l'information donnée et ne pas se laisser manipuler.
La presse dans la littérature
L'histoire de la presse est étroitement liée à la littérature et notamment au développement du roman au XIXe siècle. Le journalisme est un thème récurrent en littérature.
Le développement de la presse et du roman
L'histoire de la presse est proche de celle du roman. Au fil des siècles, la presse et le roman se développent de plus en plus. Le XIXe siècle correspond à l'essor de la presse et du roman.
À l'origine, le mot « presse » désigne la partie de l'imprimerie qui sert à presser les feuilles afin de les imprimer. Le premier journal a été publié en 1605 à Strasbourg. Les progrès techniques du XVIIIe siècle permettent de développer la presse. La liberté de la presse est permise grâce à la Révolution française même si elle est souvent remise en question et victime de censure.
À la fin du XIXe siècle, la construction des chemins de fer favorise une diffusion plus rapide des publications. La presse et le roman connaissent alors un essor particulier avec une impression et une diffusion de plus en plus simplifiée et importante.
Par ailleurs, de nombreux romans sont publiés sous forme de feuilleton dans les journaux avant d'être publiés dans leur totalité dans un livre. Ainsi, presse et roman sont liés.
- Les Mystères de Paris d'Eugène Sue paraît en feuilleton entre 1842 et 1843 dans Le Journal des débats.
- Les Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas paraît en feuilleton en 1844 dans le journal Le Siècle.
- Madame Bovary de Flaubert paraît en feuilleton entre 1856 et 1857 dans La Revue de Paris.
Le journalisme en littérature
Le journalisme devient un thème central en littérature au XIXe siècle, que l'on retrouve dans les romans des XXe et XXIe siècles. L'écrivain décrit le fonctionnement du journal et le métier de journaliste. Il peut critiquer les mauvaises pratiques du journalisme mais aussi défendre les journalistes et la liberté d'expression.
La description de la vie d'un journal
Au XIXe siècle, plusieurs romans abordent le thème du journalisme et reconstituent la vie de la rédaction d'un journal, notamment les romans réalistes et naturalistes.
Illusions perdues de Balzac (1837) ou Bel-Ami de Maupassant (1885) sont deux romans très célèbres mettant en scène la rédaction d'un journal.
« Une odeur étrange, particulière, inexprimable, l'odeur des salles de rédaction, flottait dans ce lieu. Duroy demeurait immobile, un peu intimidé, surpris surtout. […] C'étaient tantôt des jeunes gens, très jeunes, l'air affairé, et tenant à la main une feuille de papier qui palpitait au vent de leur course ; tantôt des ouvriers compositeurs, dont la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde ; et ils portaient avec précaution des bandes de papier imprimé, des épreuves fraîches, tout humides. Quelquefois un petit monsieur entrait, vêtu avec une élégance trop apparente, la taille trop serrée dans la redingote, la jambe trop moulée sous l'étoffe, le pied étreint dans un soulier trop pointu, quelque reporter mondain apportant les échos de la soirée. D'autres encore arrivaient, graves, importants, coiffés de hauts chapeaux à bords plats, comme si cette forme les eût distingués du reste des hommes. »
Guy de Maupassant
Bel-Ami
1885
Le narrateur décrit l'effervescence et le dynamisme dans une salle de rédaction. Il cite différentes personnes qui y travaillent : « des jeunes gens », « des ouvriers compositeurs », « un petit monsieur », « quelque reporter ». Il décrit leurs tenues vestimentaires : « la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde », « avec une élégance trop apparente, la taille trop serrée dans la redingote, la jambe trop moulée sous l'étoffe, le pied étreint dans un soulier trop pointu ».
Les personnages de journalistes
Dans les romans, on trouve différentes représentations de journalistes : l'apprenti, le bon journaliste ou le journaliste corrompu.
On trouve des personnages de journaliste apprenti dans la littérature. Le journaliste apprenti apprend le métier, l'écrivain peut alors souligner quelles qualités sont nécessaires au journalisme.
Dans Bel-Ami (1885), Maupassant montre que Georges Duroy, un journaliste apprenti, n'a pas du tout les qualités requises pour être journaliste puisqu'il ne se soucie pas vraiment de la véracité des propos et il ne parvient pas à trouver les bons mots pour rédiger son article, il n'a pas d'aisance rédactionnelle ni de méthodologie.
Georges Duroy doit écrire un article sur l'Algérie. Mais il ne parvient pas du tout à le rédiger.
« Il restait le front dans sa main, les yeux fixés sur le carré blanc déployé devant lui.
Qu'allait-il dire ? Il ne trouvait plus rien maintenant de ce qu'il avait raconté tout à l'heure, pas une anecdote, pas un fait, rien. Tout à coup il pensa : « Il faut que je débute par mon départ. » Et il écrivit : « C'était en 1874, aux environs du 15 mai, alors que la France épuisée se reposait après les catastrophes de l'année terrible… »
Et il s'arrêta net, ne sachant comment amener ce qui suivrait, son embarquement, son voyage, ses premières émotions.
Après dix minutes de réflexions il se décida à remettre au lendemain la page préparatoire du début, et à faire tout de suite une description d'Alger.
Et il traça sur son papier : « Alger est une ville toute blanche…. » sans parvenir à énoncer autre chose. […]
Il sentait vaguement des pensées lui venir ; il les aurait dites, peut-être, mais il ne les pouvait point formuler avec des mots écrits. »
Guy de Maupassant
Bel-Ami
1885
Georges Duroy peine énormément pour rédiger son article car les mots ne lui viennent pas : « ne sachant comment amener ce qui suivrait », « sans parvenir à énoncer autre chose », « mais il ne les pouvait point formuler avec des mots écrits. » Il ne sait pas organiser ses idées puisqu'il ne s'en rappelle plus : « Il ne trouvait plus rien maintenant de ce qu'il avait raconté tout à l'heure, pas une anecdote, pas un fait, rien. » Il ne sait pas non plus donner une structure à son article. Il se trompe en voulant partir de son imagination car l'article requiert une certaine objectivité et attend des faits réels, vérifiés.
On trouve des personnages de bon journaliste dans les romans. Le bon journaliste est doué de qualités rédactionnelles mais il doit également se renseigner sur l'information à traiter. Il mène scrupuleusement une enquête, fait preuve de réflexion et de dynamisme.
Gaston Leroux met en scène dans son roman Le Mystère de la chambre jaune (1907) un reporter hors du commun, Joseph Rouletabille.
« J'ai connu Joseph Rouletabille quand il était petit reporter. […] Comment, si jeune – il avait, quand je le vis pour la première fois, seize ans et demi – gagnait-il déjà sa vie dans la presse ? Voilà ce qu'on eût pu se demander si tous ceux qui l'approchaient n'avaient été au courant de ses débuts. Lors de l'affaire de la femme coupée en morceaux de la rue Oberkampf – encore une histoire bien oubliée – il avait apporté au rédacteur en chef de L'Époque, journal qui était alors en rivalité d'informations avec Le Matin, le pied gauche qui manquait dans le panier où furent découverts les lugubres débris. Ce pied gauche, la police le cherchait en vain depuis huit jours, et le jeune Rouletabille l'avait trouvé dans un égout où personne n'avait eu l'idée de l'y aller chercher. Il lui avait fallu, pour cela, s'engager dans une équipe d'égoutiers d'occasion que l'administration de la ville de Paris avait réquisitionnée à la suite des dégâts causés par une exceptionnelle crue de la Seine. »
Gaston Leroux
Le Mystère de la chambre jaune
1908
Joseph Rouletabille est un reporter hors du commun, il fait preuve de dynamisme et de grande perspicacité. Sa réflexion est récompensée : « Ce pied gauche, la police le cherchait en vain depuis huit jours, et le jeune Rouletabille l'avait trouvé dans un égout où personne n'avait eu l'idée de l'y aller chercher ». C'est un homme très intelligent.
On trouve également des personnages de journalistes corrompus en littérature. Ils ne respectent pas le code de déontologie propre à leur profession, ils écrivent des articles mensongers, ils ne vérifient pas leurs sources, ils ne recherchent pas minutieusement les informations, ils disent le contraire de ce qu'ils pensent, ils mentent.
Georges Duroy doit écrire un article sur l'Algérie. Mais il ne parvient pas du tout à le rédiger. Il demande donc de l'aide et des conseils à son ami Forestier qui l'adresse à son épouse pour l'initier à l'art de l'écriture journalistique.
« Elle imaginait maintenant les péripéties de la route, portraiturait des compagnons de voyage inventés par elle, et ébauchait une aventure d'amour avec la femme d'un capitaine d'infanterie qui allait rejoindre son mari.
Puis, s'étant assise, elle interrogea Duroy sur la topographie de l'Algérie, qu'elle ignorait absolument. En dix minutes, elle en sut autant que lui, et elle fit un petit chapitre de géographie politique et coloniale pour mettre le lecteur au courant et le bien préparer à comprendre les questions sérieuses qui seraient soulevées dans les articles suivants.
Puis elle continua par une excursion […] fantaisiste.
Et elle prononça d'une voix joyeuse : « La suite à demain ! ». Puis se relevant : « C'est comme ça qu'on écrit un article, mon cher monsieur. »
Guy de Maupassant
Bel-Ami
1885
L'article sur l'Algérie n'est pas rédigé par un journaliste mais l'épouse d'un journaliste, Madame Forestier. Elle ne mène pas d'enquête, ne se renseigne pas sur son sujet. Elle ne sait rien sur l'Algérie : « qu'elle ignorait absolument ». Elle invente totalement les éléments : « Elle imaginait maintenant les péripéties de la route », « une excursion […] fantaisiste ». Elle semble plus écrire un récit d'aventure et d'amour (« ébauchait une aventure d'amour ») qu'un article de presse.
La critique et la défense du journalisme en littérature
Au XIXe siècle, de nombreux écrivains ont dénoncé les mauvaises pratiques du journalisme et la corruption du milieu. Toutefois, de nombreux écrivains défendent au contraire ce métier lorsqu'il est bien fait et luttent pour la liberté d'expression.
Au XIXe siècle, de nombreux romans réalistes ou naturalistes montrent l'envers du journalisme, révèlent ses défauts et la corruption du milieu. Ainsi, Maupassant et Balzac critiquent la figure du mauvais journaliste ou du journaliste corrompu qui propose un travail basé sur le mensonge sans vérifier ses sources.
Dans Bel-Ami, Saint-Potin est le collègue de George Duroy. Il lui explique ses astuces pour écrire un article concernant la visite du général chinois Li-Theng-Fao à Paris. Saint-Potin va reprendre un ancien article concernant la venue d'un autre général chinois et se contenter de changer le nom, les titres et l'âge des nouveaux personnages concernés.
Le journalisme peut aussi être une affaire d'argent. Le journal est financé par des hommes très riches afin d'assurer son développement et de surpasser les autres journaux. Ce qui compte, ce n'est pas l'information, mais faire de l'argent.
Dans Bel-Ami, le propriétaire du journal La Vie française est un homme de finances. Il s'enrichit grâce à des placements boursiers au Maroc, de faible valeur, qu'il revend ensuite beaucoup plus chers. Il se sert de son journal comme couverture de ses manigances financières.
Certains écrivains défendent le métier de journaliste et ses valeurs. Plusieurs écrivains ont ainsi exercé le métier de journaliste et cherchent à défendre la liberté de la presse.
Durant toute sa vie, Albert Camus a rédigé des articles de journaux en plus de son œuvre littéraire. Au tout début de la Seconde Guerre mondiale, il écrit un article dans lequel il défend la liberté de la presse en contexte de guerre. Cet article est censuré. Il est retrouvé dans les archives de l'auteur et publié pour la première fois dans le journal Le Monde en mars 2012.
Les écrivains ont parfois recours au journalisme et à la presse pour défendre la liberté d'expression et la justice. C'est le cas d'Émile Zola qui a utilisé la presse pour défendre Dreyfus dans sa célèbre lettre « J'accuse…! ».
« J'accuse...! » d'Émile Zola, le 13 janvier 1898