Sommaire
ILa satire et ses objectifsADéfinition de la satireBLes buts de la satireIILes genres et les formes de la satireALes genres littérairesBLes formes littérairesCLa satire dans les médiasIIILes procédés de la satireAL'ironieBLa parodieCL'humourDLa caricatureLes travers de la société renvoient aux défauts des hommes (l'hypocrisie, l'égoïsme, la méchanceté, la violence, etc.) et de la société même. Dénoncer ces travers, c'est les critiquer pour mieux les comprendre, pour mieux les combattre. Lorsque les écrivains portent un regard critique sur les comportements humains et les sociétés humaines, ils adoptent un regard satirique.
Quelles sont les formes et les visées de la satire ?
La satire et ses objectifs
La satire est une œuvre dans laquelle un auteur critique dénonce les mœurs de ses contemporains, des défauts humains, avec humour et légèreté. La satire est un portrait moqueur et méprisant d'un groupe d'individus ou d'une société. La satire cherche à dénoncer et à corriger les travers de la société et des hommes.
Définition de la satire
Satire
La satire est un texte critique qui cherche à provoquer ou à faire réfléchir sur un sujet particulier.
Le mot satire vient du latin satura. Il désigne une pièce comique qui mêle différents genres.
« Le flot humain devant moi m'empêche de me hâter. La grande masse du peuple qui me suit me pousse dans le dos. Un me frappe du coude, l'autre me frappe avec une lourde poutre, un troisième me cogne la tête d'une solive, un autre encore avec une jarre. Mes jambes sont grasses de boues. De partout je suis écrasé par de grands pieds et un clou de soldat se fixe dans mon orteil. »
Juvénal
Satires
vers 100-125
Juvénal est un poète satirique latin de la fin du Ier siècle après Jésus-Christ. Il est reconnu pour être le créateur de la satire. Il critique Rome à son époque, il dénonce la foule (« le flot humain ») et son impossibilité à marcher dans la rue sans être gêné ou sans recevoir de coups (« me pousse », « me frappe », « me cogne »).
La satire est un genre littéraire mais c'est aussi un registre à part entière qui peut être présent dans le roman, la poésie, le théâtre, le conte philosophique, la fable, le pamphlet, la maxime et dans les médias.
Registre satirique
Le registre satirique amplifie les défauts d'une personne ou d'une institution pour les tourner en dérision. C'est la tonalité favorite de toutes les formes de critiques. Il s'appuie sur les procédés suivants : la caricature, des périphrases, des hyperboles, des antithèses.
Les buts de la satire
La satire a pour but de dénoncer les vices des hommes et de la société, de les critiquer, de s'en moquer et d'inviter le lecteur à réfléchir sur ce qui est dénoncé afin de corriger peut-être ses propres défauts.
La satire sert à dénoncer les travers de la société et les vices des hommes. On distingue deux types de dénonciation :
- une dimension morale quand elle dénonce les défauts des hommes comme l'avarice, la bêtise, la cupidité, l'hypocrisie, l'égoïsme, la jalousie, la cruauté ;
- une dimension sociale quand elle dénonce les travers de la société comme les injustices et les inégalités entre pauvres et riches, entre femmes et hommes, le racisme, l'antisémitisme, l'intolérance religieuse, l'esclavage.
La satire sert à critiquer les dysfonctionnements, les absurdités, les défauts, en portant un regard sur la société et sur le comportement des hommes pour observer les faiblesses de la société.
« C'est sans doute un très bel art que celui qui désole les campagnes, détruit les habitations, et fait périr, année commune, quarante mille hommes sur cent mille. »
Voltaire
Dictionnaire philosophique
1764
Voltaire utilise ici une antiphrase, en opposant « bel art » à des verbes comme « désole », « détruit », « fait périr ». C'est une satire, Voltaire considère la guerre comme une absurdité.
La satire sert à se moquer. Elle propose un discours ironique qui tourne en ridicule les vices, les passions déréglées, les sottises des hommes.
« Aux uns écrabouillait la cervelle, aux autres rompait bras et jambes, aux autres délochait les spondyles du cou, aux autres démoulait les reins, avalait le nez, pochait les yeux, fendait les mandibules, enfonçait les dents en la gueule, décroulait les omoplates, sphacelait les grèves, dégondait les ischies, débézillait les faucilles. »
François Rabelais
Gargantua
1534
Pour rendre compte du combat spectaculaire, Rabelais emploie l'accumulation de verbes d'action à l'imparfait : « écrabouillait », « rompait », « délochait », « démoulait », « avalait », « pochait », « fendait », « enfonçait », « décroulait », « sphacelait », « dégondait », « débézillait ». Cela crée un effet comique qui sert à dénoncer la guerre comme une chose ridicule.
Les genres et les formes de la satire
La satire est présente dans la littérature, dans certains genres littéraires et sous certaines formes littéraires. La satire est également présente dans les médias.
Les genres littéraires
On retrouve la satire dans tous les genres littéraires.
Les genres littéraires correspondent aux quatre grandes catégories de textes qui se définissent par des thèmes et des caractéristiques formelles propres. En littérature, on distingue :
- le genre narratif ;
- le genre dramatique (théâtre) ;
- le genre poétique ;
- le genre argumentatif.
Tous les genres littéraires peuvent contenir de la satire. L'écrivain critique un fait de société, une idée, un personnage, etc.
« Chemin faisant, il admira les boutiques des tailleurs, et songeant aux toilettes qu'il avait vues le matin : « Non, s'écria-t-il, je ne paraîtrai pas fagoté comme je le suis devant Mme d'Espard. » Il courut avec une vélocité de cerf jusqu'à l'hôtel du Gaillard-Bois, monta dans sa chambre, y prit cent écus, et redescendit au Palais-Royal pour s'y habiller de pied en cap. Il avait vu des bottiers, des lingers, des giletiers, des coiffeurs au Palais-Royal où sa future élégance était éparse dans dix boutiques. Le premier tailleur chez lequel il entra lui fit essayer autant d'habits qu'il voulut en mettre, et lui persuada qu'ils étaient tous de la dernière mode. Lucien sortit possédant un habit vert, un pantalon blanc et un gilet de fantaisie pour la somme de deux cents francs. Il eut bientôt trouvé une paire de bottes fort élégante et à son pied. […] À sept heures du soir, il monta dans un fiacre et se fit conduire à l'Opéra, frisé comme un saint Jean de procession, bien gileté, bien cravaté, mais un peu gêné dans cette espèce d'étui où il se trouvait pour la première fois. »
Honoré de Balzac
Illusions perdues
1837-1843
Lucien de Rubempré quitte sa province natale, Angoulême, pour connaître la gloire et la richesse à Paris. Le personnage cherche une tenue élégante pour paraître dans la société parisienne : « Non, s'écria-t-il, je ne paraîtrai pas fagoté comme je le suis devant Mme d'Espard. ». En dénonçant cette course aux achats et cette volonté de paraître, Balzac propose une satire de son personnage, il en fait un portrait dépréciatif comme le montrent la comparaison (« frisé comme un saint Jean de procession ») et la métaphore (« dans cette espèce d'étui »).
Le dialogue théâtral peut être satirique. Le dramaturge se moque des défauts des hommes. Molière en particulier a souvent recours à la satire.
« MONSIEUR JOURDAIN.
Ah vous voilà ! je m'en allais mettre en colère contre vous.
MAÎTRE TAILLEUR.
Je n'ai pas pu venir plus tôt, et j'ai mis vingt garçons après votre habit.
MONSIEUR JOURDAIN.
Vous m'avez envoyé des bas de soie si étroits que j'ai eu toutes les peines du monde à les mettre, et il y a déjà deux mailles de rompues.
MAÎTRE TAILLEUR.
Ils ne s'élargiront que trop.
MONSIEUR JOURDAIN.
Oui, si je romps toujours des mailles. Vous m'avez aussi fait faire des souliers qui me blessent furieusement.
MAÎTRE TAILLEUR.
Point du tout, Monsieur.
MONSIEUR JOURDAIN.
Comment, point du tout ?
MAÎTRE TAILLEUR.
Non, ils ne vous blessent point.
MONSIEUR JOURDAIN.
Je vous dis qu'ils me blessent, moi.
MAÎTRE TAILLEUR.
Vous vous imaginez cela.
MONSIEUR JOURDAIN.
Je me l'imagine, parce que je le sens. Voyez la belle raison ! »
Molière
Le Bourgeois gentilhomme, acte II, scène 5
1670
Monsieur Jourdain est un riche bourgeois qui veut acquérir les manières de la noblesse. Molière fait la satire de son personnage : il tourne en dérision l'échec de cette tentative. Le Maître Tailleur se moque de Monsieur Jourdain en exagérant le nombre d'employés qui confectionnent le vêtement à l'aide d'une hyperbole « vingt garçons après votre habit », et en utilisant l'humour, notamment le comique de situation (des bas qui sont trop étroits, les pieds trop serrés dans les souliers), et le comique de mots, reflété dans le désaccord entre Maître Tailleur et Monsieur Jourdain.
La poésie peut également avoir une visée satirique.
« Sa grandeur éblouit l'histoire.
Quinze ans, il fut
Le dieu qui traînait la victoire
Sur un affût ;
L'Europe sous sa loi guerrière
Se débattit.
– Toi, son singe, marche derrière,
Petit, petit. […]
Toi, tu te noieras dans la fange,
Petit, petit. »
Victor Hugo
Les Châtiments
1852
Victor Hugo est très hostile à Napoléon III qui a pris le pouvoir lors d'un coup d'État. Le poète oppose Napoléon Ier (« Sa grandeur éblouit l'histoire. ») à Napoléon III (« Toi, son singe, marche derrière, / Petit, petit. »). L'antithèse (« grandeur » opposé à « petit »), la répétition de l'adjectif « petit », l'animalisation de Napoléon III en animal (« singe ») servent la satire même de Napoléon III.
Les formes littéraires
Dans chaque genre littéraire, il existe différentes formes littéraires. Certaines sont particulièrement utilisées pour la satire :
- la fable ;
- le conte philosophique ;
- le pamphlet ;
- la maxime.
La fable a souvent une visée satirique. C'est notamment le cas des fables de La Fontaine. Il analyse la nature humaine et met en évidence ses failles. Les animaux ont une dimension allégorique : ils représentent des types, des personnages identifiés par un trait de caractère ou un comportement remarquable.
« Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre. […]
Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune. […]
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J'ai dévoré force moutons.
Que m'avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m'est arrivé quelquefois de manger
Le Berger. […]
L'Âne vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'en un pré de Moines passant [...]
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net. […]
Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir. »
Jean de La Fontaine
« Les Animaux malades de la Peste », Fables
1668-1694
La Fontaine propose la satire de la justice en révélant les défauts des hommes et les injustices commises. Le Lion incarne le roi, le Loup, un de ses conseillers, et l'Âne, un de ses sujets. Son statut et son pouvoir empêchent le Lion d'être condamné même s'il a dévoré beaucoup de moutons et parfois le berger sans aucune raison, comme le souligne la question rhétorique (« Que m'avaient-ils fait ? »). Le Loup est égoïste, il se protège en dénonçant le crime de l'Âne et en donnant de lui une vision péjorative comme le prouve l'accumulation des trois groupes nominaux « ce maudit animal, ce pelé, ce galeux ». L'Âne est donc condamné à mort car il révélé naïvement son péché (« Je tondis de ce pré la largeur de ma langue. / Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net. »). La Fontaine critique la partialité de la justice qui rend ses arrêts selon la position sociale de l'accusé ou du plaignant.
Le conte philosophique reprend les éléments du conte traditionnel en ajoutant une visée plus morale et critique, portant généralement sur la conduite du personnage principal. Voltaire, philosophe des Lumières, a écrit au XVIIIe siècle de nombreux contes philosophiques.
« Jeannot et Colin étaient fort jolis pour des Auvergnats ; ils s'aimaient beaucoup [...]. Le temps de leurs études était sur le point de finir, quand un tailleur apporta à Jeannot un habit de velours à trois couleurs, avec une veste de Lyon de fort bon goût ; le tout était accompagné d'une lettre à monsieur de La Jeannotière. Colin admira l'habit, et ne fut point jaloux ; mais Jeannot prit un air de supériorité qui affligea Colin. Dès ce moment Jeannot n'étudia plus, se regarda au miroir, et méprisa tout le monde. Quelque temps après un valet de chambre arrive en poste, et apporte une seconde lettre à monsieur le marquis de La Jeannotière : c'était un ordre de monsieur son père de faire venir monsieur son fils à Paris. Jeannot monta en chaise en tendant la main à Colin avec un sourire de protection assez noble. Colin sentit son néant, et pleura. Jeannot partit dans toute la pompe de sa gloire. »
Voltaire
Jeannot et Colin
1764
Voltaire fait la satire des nouveaux riches ou parvenus qui écrasent de leur prétention leurs anciens amis, ici Colin. L'ascension sociale modifie les sentiments de Jeannot envers les autres : « Dès ce moment Jeannot n'étudia plus, se regarda au miroir, et méprisa tout le monde. », « Jeannot partit dans toute la pompe de sa gloire. ».
Le pamphlet est un écrit bref et virulent qui critique violemment quelque chose ou quelqu'un. Il appartient à la littérature polémique. L'écriture y est engagée ou militante.
« Depuis que ma raison est développée, je n'ai encore pu m'accoutumer à voir des pauvres parmi les hommes. Qu'est-ce qu'un pauvre ? C'est un être dénué, infiniment au-dessous des insectes et des oiseaux, des souris et des rats. C'est un être isolé qui n'a droit à rien sur la terre ; qui, privé des richesses sociales, n'a plus celles de la Nature qu'il a sacrifiées originairement pour posséder les premières. […] Pauvres ! ô fous qui méritez votre sort, levez, levez la main sur vos tyrans ! Assemblez-vous, soutenez-vous, prenez le poisson des rivières, le fruit des vergers, l'herbe des champs et mangez votre suffisance. Mais ne massacrez pas le riche, humiliez-le seulement et l'empêchez de vous affamer !... »
Nicolas Edme Restif de La Bretonne
Lettre d'un singe aux êtres de son espèce
1781
Le narrateur de ce texte est un singe apprivoisé qui se nomme César-singe. Il fait la satire de la société humaine en critiquant les inégalités sociales. César-singe répond à sa propre question rhétorique (« Qu'est-ce qu'un pauvre ? ») en brossant le portrait du pauvre. Les nombreuses négations montrent qui c'est un homme privé de tout. Ne pouvant supporter une telle injustice, César-singe invite les pauvres à se rebeller comme le souligne l'accumulation des impératifs (« levez, levez », « Assemblez-vous, soutenez-vous, prenez […] mangez ») qui invitent les pauvres à réagir.
La maxime est généralement une phrase courte qui donne une règle de conduite morale.
« Ce qui fait que si peu de personnes sont agréables dans la conversation, c'est que chacun songe plus à ce qu'il veut dire qu'à ce que les autres disent ».
François de La Rochefoucauld
Réflexions ou sentences et maximes morales
1665
La Rochefoucauld fait la satire d'un trait de caractère d'une personne en soulignant son égoïsme : elle n'écoute qu'elle et ne prête pas attention aux propos des autres.
La satire dans les médias
La satire est présente dans les médias (presse écrite, radio, télévision, Internet) sous différentes formes comme l'article, le dessin de presse, la chronique.
La presse revendique la liberté d'expression et utilise l'article pour partager ses idées, pour informer, mais également pour critiquer, pour dénoncer par le biais de la satire. La presse satirique observe de près l'actualité. Elle cherche à faire connaître et à dénoncer les différents scandales qui existent dans le monde du pouvoir politique, économique, social.
« Dans Auto, « la voiture », comme le dit sans excès de modestie, et en allemand dans le texte, la maison Volkswagen, fait, depuis lundi, un sacré bruit de casserole. Un bruit de diesel qui est parti d'un petit bled de Virginie de l'Ouest, aux États-Unis, et qui n'a pas fini de retentir dans le monde entier. Et de produire des effets renversants. Depuis qu'à la suite des essais d'un obscur prof de l'université de M…, l'Agence fédérale de protection de l'environnement américaine a découvert que Volkswagen équipait ses voitures diesel d'un logiciel de trucage qui, en cas de contrôle, limitait automatiquement les émissions de gaz polluants, l'affaire est devenue un moteur à explosion… en chaîne. »
Le Canard enchaîné
23 septembre 2015
Le Canard enchaîné est un journal satirique hebdomadaire qui analyse l'actualité pour en faire une lecture critique basée sur l'humour. Cette colonne dénonce le constructeur automobile, « Volkswagen », qui a truqué les tests d'émission de gaz polluants sur ses véhicules (« Volkswagen équipait ses voitures diesel d'un logiciel de trucage qui, en cas de contrôle, limitait automatiquement les émissions de gaz polluants »). Le Canard enchaîné joue avec humour sur les mots afin de faire sourire et de rendre sa critique plus mordante. Ainsi, il joue sur le décalage entre l'image moderne de la marque et l'expression « un sacré bruit de casserole », attribuée normalement aux vieilles voitures. L'implicite de l'expression finale (« un moteur à explosion... en chaîne » : moteur à explosion comme bombe destructrice, « en chaîne » renvoie à la construction des automobiles qui se fait à la chaîne) dénonce avec humour la publicité mensongère de la marque. Enfin, le terme explosion souligne le choc qu'a provoqué cette information sur l'opinion publique.
Les journalistes ont recours au dessin de presse très souvent caricatural pour dénoncer une situation, une personne, un fonctionnement de la société.
Dans des émissions, la radio peut également utiliser la satire pour dénoncer, pour critiquer, par l'humour, des faits d'actualités, des fonctionnements absurdes.
Dans une de ses chroniques à Radio France, le journaliste Philippe Meyer dénonce, avec ironie, l'analyse de « spécialistes » qui ne visent qu'une réduction d'instruments pour des raisons économiques sans tenir compte du fait que l'orchestre joue selon des partitions.
Il existe également des émissions satiriques à la télévision ou des chaînes satiriques sur YouTube.
Les Guignols de l'info est une émission de télévision satirique française qui fait intervenir des marionnettes. Ces dernières parodient le journal télévisé et proposent la caricature de personnes politiques, de faits de société et du monde actuel.
Les procédés de la satire
Il existe plusieurs procédés d'écriture pour mettre en œuvre la satire : l'ironie, la parodie, l'humour ou encore la caricature.
L'ironie
L'ironie est une forme de comique qui consiste à laisser entendre autre chose que ce que l'on dit littéralement. Elle est une arme de dénonciation efficace, car elle ridiculise l'adversaire, permet de contourner la censure et d'amuser le lecteur, l'amenant ainsi plus facilement à la réflexion.
« Arrias a tout lu, a tout vu, il veut le persuader ainsi ; c'est un homme universel, et il se donne pour tel. »
Jean de La Bruyère
Les Caractères
1688
En réalité, Arrias ne sait rien ; c'est tout le contraire de ce qu'il prétend être.
Pour mettre en œuvre l'ironie, on peut utiliser différents mots de vocabulaire :
Des verbes | « Se moquer de », « railler », « ironiser sur », « brocarder », « se gausser de », « se rire de », « ridiculiser », « caricaturer » |
Des noms | « Moquerie », « raillerie », « ironie », « brocards » |
Des adjectifs | « Moqueur », « risible », « railleur », « piquant », « mordant », « cuisant », « incisif » |
Des expressions | « Avoir l'esprit caustique », « faire un portrait à charge », « forcer le trait » |
La parodie
La parodie est un moyen d'écriture qui sert à la satire.
La parodie transforme et déforme le texte d'origine ou le sujet abordé pour en donner une vision différente souvent basée sur l'humour, l'ironie et la critique.
« Ce disant, mit bas son grand habit et se saisit du bâton de la croix, qui était de cœur de cormier, long comme une lance, rond à plein poing et quelque peu semé de fleurs de lys, toutes presque effacées. Ainsi, sortit en beau sayon, mit son froc en écharpe et de son bâton de la croix et donna si brusquement sur les ennemis […] sans dire gare qu'il les renversait comme des porcs, frappant à tort et à travers, à vieille escrime. »
François Rabelais
Gargantua
1534
Le moine, Frère Jean, décide de défendre l'abbaye, assiégée par les troupes du roi Picrochole. À travers ce personnage, Rabelais parodie le chevalier médiéval. Frère Jean n'a pas d'armure mais un « grand habit » et une blouse de travail « en beau sayon ». Il n'a pas d'arme mais un « bâton ».
L'humour
L'humour sert la satire.
Le mot humour signifie tout d'abord, « tendance, trait de caractère ». Puis au XVIIe siècle, il prend le sens de « gaieté, aptitude à voir ou à faire voir le comique des choses ».
L'humour est donc une forme d'esprit qui insiste sur le caractère comique ou ridicule d'un personnage, d'une situation. L'humour souligne les éléments d'une situation qui prêtent à rire.
Pour cela, on a recours au comique et à ses différentes formes :
- le comique de situation qui porte sur la situation même et ses circonstances ;
- le comique de mots qui porte sur la manière dont les personnages parlent ;
- le comique de gestes qui renvoie aux attitudes et déplacements physiques des personnages.
Le fils de Géronte fait croire à son père qu'il a été enlevé par des pirates. Il a besoin d'argent pour payer la rançon. C'est son valet Scapin qui se charge d'aller chercher l'argent auprès du père.
« GÉRONTE.
Tu dis qu'il me demande…
SCAPIN.
Cinq cent écus. […]
GÉRONTE.
Sait-il bien ce que c'est que cinq cents écus ?
SCAPIN.
Oui, Monsieur, il sait que c'est mille cinq cents livres. […]
GÉRONTE.
Mais que diable allait-il faire à cette galère ? […]
SCAPIN.
Oh ! que de paroles perdues ! Laissez là cette galère, et songez que le temps presse, et que vous courez le risque de perdre votre fils. […]
GÉRONTE.
N'est-ce pas quatre cents écus que tu dis ?
SCAPIN.
Non : cinq cents écus. […]
GÉRONTE.
Tiens, Scapin, je ne me souvenais pas que je viens justement de recevoir cette somme en or, et je ne croyais pas qu'elle dût m'être si tôt ravie. (Il lui présente sa bourse, qu'il ne laisse pourtant pas aller ; et, dans ses transports, il fait aller son bras de côté et d'autres, et Scapin le sien pour avoir la bourse.) »
Molière
Les Fourberies de Scapin
1671
Géronte est un père avare. Molière critique son avarice et ses hésitations à ne pas venir en aide à son fils. Pour cela, il utilise différents procédés comiques :
- le comique de situation : l'avarice du père ; le valet qui vient réclamer l'argent et qui va duper le père ;
- le comique de mots : les différentes répétitions des sommes d'argent ; le changement de la somme par une fausse incompréhension du père, qui passe de cinq cents écus à quatre cents ;
- le comique de geste : la didascalie révèle les mouvements de balancier effectués par Scapin pour essayer d'attraper la bourse.
Tous ces procédés comiques servent à la satire de l'avarice qui est présentée comme une passion égoïste et irraisonnée pour l'argent.
La caricature
La caricature sert la satire.
La caricature est la représentation d'un modèle qui exagère certains traits pour le ridiculiser. La caricature, en plus de déclencher le rire, sert à dénoncer une situation ou une personne en utilisant les procédés de grossissement, d'énumération et de transformation, l'homme pouvant être assimilé par exemple à l'animal.
« Les lecteurs ont peut-être, dès sa première apparition, conservé quelque souvenir de cette Thénardier grande, blonde, rouge, grasse, charnue, carrée, énorme et agile ; elle tenait, nous l'avons dit, de la race de ces sauvagesses colosses qui se cambrent dans les foires avec des pavés pendus à leur chevelure. Elle faisait tout dans le logis ; les lits, les chambres, la lessive, la cuisine, la pluie, le beau temps, le diable. Elle avait pour tout domestique Cosette ; une souris au service d'un éléphant. »
Victor Hugo
Les Misérables
1862
Victor Hugo brosse là le portrait de son personnage en utilisant la caricature. Il grossit ses traits par l'énumération (« grande, blonde, rouge, grasse, charnue, carrée, énorme et agile ») et la donne à voir sous les aspects d'un animal comme le suggèrent l'expression « de la race de ces sauvagesses colosses » et la métaphore « au service d'un éléphant ».