D'après les documents suivants, comment Adèle Hugo et Théophile Gautier ont-ils contribué à construire la légende d'Hernani ?
Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, Adèle Hugo
Dans la semaine qui précède la représentation, les journaux s'occupèrent beaucoup du drame, et excitèrent vivement leurs lecteurs, la plupart contre, quelques-uns pour. Les feuilles ministérielles essayaient d'amoindrir le bruit. La Quotidienne disait :
"On annonce pour demain la première représentation d'Hernani. Nous ne savons pas si les gens qui, avant de voir et d'entendre, se sont déclarés contre la pièce nouvelle, ont fait une ligue pour en amener la chute, mais il est certain que les amis de l'auteur s'emploient de leur mieux pour préserver de tout encombre le succès de son drame. On le conçoit, s'il est vrai qu'ils regardent cette affaire comme une question de vie ou de mort pour le romantisme... Quoiqu'il en soit Le Journal des Débats, pénétré de l'importance de l'affaire en litige, oublie aujourd'hui ses propres soucis, et, laissant un instant le soin de sa défense personnelle, se hâte d'accepter avec résignation la semonce du Globe, pour se ménager une place qu'il consacre à la cause d'Hernani, d'Hernani qui, dit-il, soulève déjà tant de passions, tant de haines, tant d'acharnement, et risque d'être choisi pour champ de bataille par tant d'intérêts opposés. Nous, qui sommes bien loin de désirer qu'Hernani soit choisi pour champ de bataille, et qui ne croyons pas que ce soit l'intention de l'auteur, nous trouvons qu'il y a imprudence de la part de ses amis à s'efforcer de donner à une question toute littéraire une sorte d'importance politique."
Histoire du romantisme, Théophile Gautier
1902
Gérard de Nerval avait dans ses poches une liasse de petits carrés de papier rouge timbrés d'une griffe mystérieuse inscrivant au coin du billet le mot espagnol : hierro, voulant dire fer. Cette devise, d'une hauteur bien appropriée au caractère d'Hernani et qui eût pu figurer sur son blason signifiait aussi qu'il fallait être, dans la lutte, franc, brave et fidèle comme l'épée. […]
Oui, nous les regardâmes avec un sang-froid parfait toutes ces larves du passé et de la routine, tous ces ennemis de l'art, de l'idéal, de la liberté et de la poésie, qui cherchaient de leurs débiles mains tremblotantes à tenir fermée la porte de l'avenir ; et nous sentions dans notre cœur un sauvage désir d'enlever leur scalp avec notre tomahawk pour en orner notre ceinture ; mais à cette lutte, nous eussions couru le risque de cueillir moins de chevelures que de perruques ; car si elle raillait l'école classique, en revanche, étalait au balcon et à la galerie du Théâtre-Français une collection de têtes chauves pareille au chapelet de crânes de la comtesse Dourga. Cela sautait si fort aux yeux, qu'à l'aspect de ces moignons glabres sortant de leurs cols triangulaires avec des tons couleur de chair et de beurre rance, malveillants malgré leur apparence paterne, un jeune sculpteur de beaucoup d'esprit et de talent, célèbre depuis, dont les mots valent les statues, s'écria au milieu d'un tumulte : "À la guillotine, les genoux !"
Pourquoi Adèle Hugo rapporte-t-elle les écrits d'un journal politique ministériel pour évoquer Hernani ?
En quoi ces deux extraits opposent-ils deux visions de la première représentation d'Hernani ?
Pourquoi les politiques essaient-ils de minimiser la réception d'Hernani ?
De qui Théophile Gautier se moque-t-il particulièrement dans son témoignage ?
Quel but commun Adèle Hugo et Théophile Gautier poursuivent-ils à travers leur témoignage ?
Pourquoi Théophile Gautier semble-t-il amusé par l'injonction : "À la guillotine, les genoux !" ?