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Marc Bloch
6 juillet 1886 - 16 juin 1944
Français
Marc Bloch est un universitaire, reçu à l'agrégation d'histoire et géographie en 1908. Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il en sort avec le grade de capitaine, décoré de la croix de guerre et de la Légion d'honneur. Marié en 1919, il est père de six enfants. Pendant l'entre-deux-guerres il mène une carrière universitaire brillante. Spécialiste du Moyen Âge, il développe une approche et une méthodologie nouvelle en Histoire : pour comprendre l'histoire d'une société à une époque donnée, il est nécessaire d'en étudier tous les aspects à la fois (démographique, climatique, économique, social, culturel, etc.). Il participe en 1929 avec Lucien Febvre à la création des Annales d'histoire économique et sociale, dans lesquels il publie de nombreux articles jusqu'à la guerre. Marc Bloch, dont la méthodologie révolutionne l'étude historique est un des historiens les plus importants de la première moitié du XXe siècle. Son œuvre principale, Les Rois thaumaturges, est publiée en 1924. Après la défaite de la France en 1940, il écrit L'Étrange Défaite (ouvrage publié après la guerre). Sous le gouvernement de Vichy, Marc Bloch connaît des difficultés, car il est juif. Il obtient une mutation pour Clermont-Ferrand puis pour Montpellier. Pendant cette période il rédige Apologie pour l'histoire, ou métier d'historien. C'est Lucien Febvre qui fait publier à titre posthume ce dernier ouvrage car Marc Bloch est fusillé par les Allemands en juin 1944.
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Charles de Gaulle
22 novembre 1890 - 9 novembre 1970
Français
Jeune officier pendant la Première Guerre mondiale, Charles de Gaulle prend conscience de l'importance des nouveaux blindés et milite, après la guerre, pour une armée équipée d'engins blindés, mais il n'est pas entendu. En juin 1940, il est promu général et nommé sous-secrétaire à la défense. Il refuse d'accepter la défaite de la France et l'armistice proposé par Pétain et gagne Londres d'où il lance un appel radiophonique le 18 juin, demandant aux Français de poursuivre le combat malgré l'armistice. Il organise les Forces françaises libres avec l'aide matérielle des Britanniques. Il essaye avec l'appui de Jean Moulin de rassembler sous son autorité les différents mouvements de résistance en France et de coordonner leurs actions, ce qui aboutit à la création du Conseil national de la résistance en 1943 (CNR). Cette année-là il s'installe à Alger. En 1944, à la Libération, le régime de Vichy s'effondre et De Gaulle rétablit l'autorité de l'État français avec l'accord des Alliés. Il fait une entrée triomphale dans Paris le 25 août 1944 et dirige le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Pétain et ses ministres, qui s'étaient réfugiés en Allemagne, sont ramenés en France et jugés. Ils sont condamnés à mort. Pétain, alors âgé de 89 ans, est gracié par De Gaulle et interné, tandis que les autres sont fusillés.
Le gouvernement provisoire formé par De Gaulle est un gouvernement d'unité qui engage des réformes importantes (dont le vote des femmes en 1944 et les nationalisations). En octobre 1945, les Français rejettent la Troisième République et réclament une nouvelle Constitution. De Gaulle propose un pouvoir présidentiel fort et une diminution du rôle des partis, mais il n'est pas suivi et démissionne en janvier 1946. Il revient au pouvoir de 1958 à 1969 et fonde la Cinquième République. La mémoire officielle de la Seconde Guerre mondiale pendant cette période se nourrit du mythe résistancialiste : l'image d'une France résistante, unie derrière le général de Gaulle. La mémoire collective veut oublier le régime de Vichy et la collaboration. L'entrée au Panthéon de Jean Moulin en 1964 illustre cette volonté de ne garder en mémoire que l'image d'une France qui résiste et d'oublier la France qui a collaboré.
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Claude Lanzmann
27 novembre 1925 - 5 juillet 2018
Français
Claude Lanzmann est né dans une famille juive et, à l'âge de dix-huit ans en 1943, il s'engage dans la résistance communiste. Après la guerre, il fait des études de lettres et de philosophie. Il devient journaliste puis réalisateur et s'engage politiquement aux côtés des anticolonialistes. Il fait la connaissance de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir en 1952 et collabore à leur revue Les Temps modernes, dont il devient le responsable après la mort de Simone de Beauvoir en 1986. Ses films majeurs sont tous centrés sur Israël et sur l'extermination des Juifs pendant la guerre. Son documentaire, Shoah (1985), qui a exigé douze ans de travail et qui dure presque dix heures, tente de retranscrire sans images d'archives l'histoire du génocide. Il réalise également : Pourquoi Israël (1973) ou encore Tsahal (1994), documentaire consacré à l'armée israélienne et qui provoque une vive polémique.
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Jean Moulin
20 juin 1899 - 8 juillet 1943
Français
Jean Moulin, préfet de Chartres en 1940, tient tête aux Allemands et refuse de ratifier un texte qu'il juge déshonorant. Le gouvernement de Vichy le démet de ses fonctions et le met en disponibilité. Moulin, sous une fausse identité, circule en France et noue des contacts avec des résistants puis rejoint De Gaulle à Londres. Le général lui confie alors la mission d'unifier les forces de la résistance intérieure. Il est parachuté en France et parvient à étendre son autorité clandestine, au nom de De Gaulle dans les deux zones françaises (zone occupée et zone libre). En mai 1943, il crée le Conseil national de la Résistance (CNR) dont il préside la première réunion à Paris. Un mois plus tard, le 21 juin, il est arrêté par la Gestapo, sans doute à la suite d'une dénonciation. Torturé, il meurt pendant son transfert vers l'Allemagne. En décembre 1964, Jean Moulin entre au Panthéon. Le ministre André Malraux est l'auteur d'un magnifique éloge funèbre qu'il récite en présence du président de la République, l'homme du 18 juin. Cette grande cérémonie et l'entrée au Panthéon de Jean Moulin entretiennent la mémoire officielle de la France résistante, unie derrière De Gaulle. On veut oublier les divisions au sein de la Résistance, la guerre civile, le régime de Vichy, la collaboration avec les nazis et la participation à la déportation des Juifs de France.
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François Mitterrand
26 octobre 1916 - 8 janvier 1996
Français
Pendant la Seconde Guerre mondiale, François Mitterrand travaille pour le gouvernement de Vichy, avant de rejoindre la Résistance. Il est élu député en 1946, puis occupe différents postes ministériels sous la Quatrième République. Farouche opposant de De Gaulle, il se présente pour la première fois aux élections présidentielles en 1965, mais il est vaincu. Il doit attendre les élections de mai 1981 pour être enfin élu et devenir ainsi le premier président socialiste de la Cinquième République. La campagne électorale est perturbée par l'affaire Papon qui éclate entre le premier et le deuxième tour des élections. En 1992, alors que se prépare la commémoration de la rafle du Vélodrome d'Hiver de 1942, la presse provoque un scandale en révélant que chaque année François Mitterrand dépose une gerbe de fleurs sur la tombe de Pétain et il est de nouveau question de son passé trouble de vichysto-résistant. Il est sifflé lors de la cérémonie de commémoration mais dépose tout de même une gerbe de fleurs sur la tombe du maréchal Pétain le 11 novembre 1992. En 1993, il décide de créer une journée nationale commémorative des persécutions racistes et antisémites commises sous l'autorité du gouvernement de Vichy entre 1940 et 1944. Cette journée est fixée au dimanche qui suit le 16 juillet, date anniversaire de la rafle du Vélodrome d'Hiver. Un monument, rendant hommage aux victimes, érigé à proximité de l'ancien vélodrome, est inauguré le 17 juillet 1994.
Maurice Papon
3 septembre 1910 - 17 février 2007
Français
Fils de notables et haut fonctionnaire avant la guerre, Maurice Papon est nommé secrétaire général à la préfecture de la Gironde le 1er juin 1942, sous l'autorité du préfet Maurice Sabatier. Il collabore sous Vichy, mais il rejoint en 1943, et surtout en 1944, des réseaux de résistance et il cache plusieurs fois des résistants dont des Juifs chez lui. À la Libération, en août 1944, il est nommé préfet des Landes puis il continue sa carrière au Maroc, en Corse, à Paris. Il est préfet régional pour l'Est de l'Algérie de 1956 à 1958 et enfin à son retour en France, préfet de police de 1958 à 1967.
Pendant la guerre d'Algérie, pour mettre fin aux actions violentes et terroristes du FLN sur le territoire français, Maurice Papon suggère au gouvernement de De Gaulle des mesures exceptionnelles qui sont acceptées et appliquées. Il organise la répression et après de très nombreux attentats contre les forces policières en 1961, un couvre-feu est imposé aux Nord-Africains le 5 octobre. Le 17 octobre 1961, ils manifestent à l'appel du FLN contre le couvre-feu, et la répression policière, sous les ordres de Papon, fait des dizaines de morts algériens. Les forces de l'ordre ouvrent le feu et jettent les manifestants dans la Seine. Le 8 février 1962, une manifestation contre l'OAS et la guerre d'Algérie fait plusieurs morts à la station de métro Charonne, à Paris.
Après 1967, Papon occupe différentes fonctions, maire, député puis ministre. Il est ministre du Budget dans le gouvernement Barre quand éclate en 1981 "l'affaire Papon", en pleine campagne électorale présidentielle. Tout commence avec un article dans Le Canard enchaîné qui révèle l'active participation de Maurice Papon dans la déportation des Juifs de Bordeaux, quand il était secrétaire général de la préfecture de Gironde sous le gouvernement de Vichy. En décembre 1981, les Matisson, dont une partie des membres de la famille a été déportée en 1942, portent plainte contre Maurice Papon pour crimes contre l'humanité. Il est finalement inculpé en 1983, mais c'est après dix-sept ans de bataille juridique que le procès commence en octobre 1997. Maurice Papon est reconnu coupable de complicité de crimes contre l'humanité (mais pas de complicité d'assassinat) et est condamné à dix ans de réclusion en avril 1998. Il sort de la prison de Fresnes pour raison de santé en 2002 et est assigné à résidence. Il décède en 2007 et est inhumé avec la Légion d'honneur qui lui a été retirée et qu'il n'avait plus le droit de porter en public, à la suite de sa condamnation.
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Philippe Pétain
24 avril 1856 - 23 juillet 1951
Français
Le colonel Pétain, sorti de Saint-Cyr en 1876, est proche de la retraite quand éclate la Première Guerre mondiale. Il montre des qualités de commandement et de sang froid et remporte de belles victoires en 1914 - 1915. Il est promu général et Joffre lui confie le secteur de Verdun, puis l'ensemble des armées du centre en 1916. Pétain, le vainqueur de Verdun, devient commandant en chef en 1917 et est fait maréchal de France en 1918. Il préside le Conseil supérieur de la guerre de 1920 à 1931 et est le principal inspirateur des choix militaires français de cette époque. Il est deux fois ministre de la Guerre (en 1934 et 1935) et est nommé ambassadeur auprès de Franco en 1939. Pendant la débâcle de mai 1940, Paul Reynaud fait de Pétain le vice-président du Conseil. Le maréchal propose la solution de l'armistice en juin. Laval parvient à convaincre une large majorité de députés de l'Assemblée nationale, réunis à Vichy de donner les pleins pouvoirs à Pétain (10 juillet).
La grande popularité du maréchal lui permet, ainsi qu'à son ministre Laval, de mettre en place un régime autoritaire. Une véritable dictature qui repose sur le contrôle policier de la population et le culte du Maréchal est mise en place. Les libertés sont supprimées. Pétain et Laval font le choix de la collaboration avec l'Allemagne. Le 22 octobre 1940, Pétain rencontre Hitler à Montoire et le régime de Vichy entre dans une collaboration économique, politique, militaire et policière. La persécution des Juifs est rapidement mise en place dès octobre 1940. Le régime de Vichy se radicalise sous l'impulsion de Laval. En 1942, les rafles de Juifs se multiplient et, en janvier 1943, la milice est créée. Les miliciens traquent les résistants et les Juifs. En 1944, à la libération, le régime de Vichy s'effondre. En août, Pétain et ses ministres sont conduits en Allemagne par les SS. À la fin de la guerre, ils sont ramenés en France pour être jugés. Pétain, Laval et d'autres ministres sont condamnés à mort par la Haute Cour de justice. Pétain, alors âgé de 89 ans, est gracié par De Gaulle et interné à l'île d'Yeu, tandis que les autres sont fusillés.
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Benjamin Stora
Né le 2 décembre 1950
Français
Né en 1950 à Constantine, en Algérie, Benjamin Stora est un historien, professeur à l'université Paris-XIII, et depuis 2013, inspecteur général de l'Éducation nationale. Il est considéré comme le spécialiste français du Maghreb, de l'Algérie, des guerres de décolonisation et de l'immigration nord-africaine en France. Benjamin Stora a publié une trentaine d'ouvrages et a dirigé plusieurs publications. Parmi ses œuvres les plus notables, figurent sa biographie de Messali Hadj en 1982 et rééditée en 2004, ses travaux sur la guerre d'Algérie (dont La Gangrène et l'Oubli, 1991), sur l'Algérie contemporaine et sur l'immigration algérienne en France (Ils venaient d'Algérie, 1992).
Robert Paxton
Né le 15 juin 1932
Américain
Robert Paxton est un historien américain, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale et de la France sous le régime de Vichy. Sa thèse universitaire est consacrée au corps des officiers français sous Pétain : Parades and Politics at Vichy (1966). Par la suite il écrit un ouvrage, paru en 1972, traduit et édité en France en 1973 sous le titre, La France de Vichy, qui donne une nouvelle vision de la France de Vichy, beaucoup moins complaisante et qui relance le débat sur la responsabilité de l'État français dans la déportation des Juifs. Il casse l'image d'un gouvernement de Vichy, jouant double jeu et qui aurait partiellement protégé les Juifs, s'interposant entre eux et le pouvoir nazi. À partir des archives allemandes, saisies par les Américains, ses recherches révèlent la pleine et entière collaboration du gouvernement de Vichy, qui bien souvent a devancé les exigences allemandes.
Henry Rousso
Né le 23 novembre 1954
Français
Né au Caire en Égypte, Henry Rousso est un historien français, agrégé d'histoire, membre du CNRS et qui participe à la création de l'Institut d'histoire du temps présent (IHTP) qu'il dirige de 1994 à 2005. Spécialiste de la Seconde Guerre mondiale et du XXe siècle, il travaille sur le régime de Vichy et l'épuration, puis s'oriente vers un nouveau champ d'études, l'histoire de la mémoire collective. Il est alors connu pour ses travaux et ses réflexions sur les relations entre mémoire et histoire, avec son livre, Le Syndrome de Vichy (1987). Il invente les termes "résistancialisme", pour décrire l'image de la résistance entretenue par les gaullistes et les communistes, et "négationnisme", pour décrire le fait de nier la réalité du génocide contre les Juifs pendant la guerre.
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Adolf Eichmann
19 mars 1906 - 31 mai 1962
Allemand
De retour en Allemagne en 1934, après avoir vécu en Autriche, il rejoint Hitler et le parti nazi. Il fait partie du service de sécurité de Himmler et Heydrich. D'abord envoyé en Autriche pour s'occuper du "problème juif", il est ensuite chargé d'exterminer les Juifs de Pologne. Après la mort de Heydrich, en 1942, c'est Eichmann qui dirige la déportation et l'extermination des Juifs d'Europe orientale. Réfugié à la fin de la guerre en Argentine, il est traqué et enlevé par des Israéliens en 1960. Ramené en Israël, il est jugé, condamné à mort et pendu en 1962.
Pendant plusieurs semaines en avril et mai 1961, le procès de Eichmann à Jérusalem attire l'attention des médias du monde entier. Quinze ans après les faits, l'horreur de la Shoah est dévoilée, le génocide des Juifs apparaît au grand jour. De plus, ce procès d'un responsable nazi de second rang permet de démontrer comment le génocide des Juifs a été méthodiquement organisé par des fonctionnaires et des bureaucrates. Le procès a permis aussi de libérer la parole des Juifs rescapés. Les témoignages sont nombreux.