Métropole, 2012, voie L
Faire le commentaire du texte suivant.
Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, chapitre XIII, (orthographe modernisée)
1578
Artisan d'origine modeste et de religion protestante, Jean de Léry participa à une expédition française au Brésil. À cette occasion, il partagea pendant quelques temps la vie des indiens Tupinambas. Vingt ans après son retour en France, il fit paraître un récit de son voyage.
Au reste, parce que nos Tupinambas sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d'aller quérir1 leur Arabotan, c'est-à-dire bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d'entre eux qui sur cela me fit telle demande : "Que veux dire que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin pour quérir du bois pour vous chauffer, n'y en a-t-il point en votre pays ?"
À quoi lui ayant répondu que oui et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même2 du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, ains3 (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) que les nôtres l'emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :
"Voire4, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon5) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises6 et de draps rouges, voire même (m'accommodant7 toujours à lui parler de choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n'en avez jamais vu par deçà8, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s'en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."
Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m'interrogeant plus outre, dit :
"Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?"
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."
Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu'au bout, il me demanda derechef :
"- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?"
"- À ses enfants, s'il en a, et à défaut d'iceux9 à ses frères, sœurs et plus prochains parents."
"- Vraiment, dit alors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n'était nullement lourdaud), à cette heure connais-je10 que vous autres Mairs, c'est-à-dire Français, êtes de grand fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il), des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu'après notre mort la terre qui nous a nourris les nourrira, sans nous en soucier plus avant, nous nous reposons sur cela."
Voilà sommairement et au vrai le discours que j'ai ouï de la propre bouche d'un pauvre sauvage américain.
1 Quérir : aller chercher
2 Ni même : ni surtout
3 Ains : mais
4 Voire : soit
5 En lui faisant trouver bon : pour le persuader
6 Frises : étoffes de laine
7 M'accommodant : essayant
8 Par deçà : chez les Tupinambas, au Brésil
9 À défaut d'iceux : s'il n'a pas d'enfants.
10 Connais-je : je me rends compte.
Au XVIe siècle se développe le mythe du "bon sauvage". Qu'est-ce que cela signifie ?
En quoi le texte suivant est-il un témoignage ?
Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, chapitre XIII, (orthographe modernisée)
1578
Artisan d'origine modeste et de religion protestante, Jean de Léry participa à une expédition française au Brésil. À cette occasion, il partagea pendant quelques temps la vie des indiens Tupinambas. Vingt ans après son retour en France, il fit paraître un récit de son voyage.
Au reste, parce que nos Tupinambas sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d'aller quérir1 leur Arabotan, c'est-à-dire bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d'entre eux qui sur cela me fit telle demande : "Que veux dire que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin pour quérir du bois pour vous chauffer, n'y en a-t-il point en votre pays ?"
À quoi lui ayant répondu que oui et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même2 du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, ains3 (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) que les nôtres l'emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :
"Voire4, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon5) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises6 et de draps rouges, voire même (m'accommodant7 toujours à lui parler de choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n'en avez jamais vu par deçà8, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s'en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."
Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m'interrogeant plus outre, dit :
"Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?"
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."
Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu'au bout, il me demanda derechef :
"- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?"
"- À ses enfants, s'il en a, et à défaut d'iceux9 à ses frères, sœurs et plus prochains parents."
"- Vraiment, dit alors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n'était nullement lourdaud), à cette heure connais-je10 que vous autres Mairs, c'est-à-dire Français, êtes de grand fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il), des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu'après notre mort la terre qui nous a nourris les nourrira, sans nous en soucier plus avant, nous nous reposons sur cela."
Voilà sommairement et au vrai le discours que j'ai ouï de la propre bouche d'un pauvre sauvage américain.
1 Quérir : aller chercher
2 Ni même : ni surtout
3 Ains : mais
4 Voire : soit
5 En lui faisant trouver bon : pour le persuader
6 Frises : étoffes de laine
7 M'accommodant : essayant
8 Par deçà : chez les Tupinambas, au Brésil
9 À défaut d'iceux : s'il n'a pas d'enfants.
10 Connais-je : je me rends compte.
Qu'est-ce qui rend le texte vivant ?
Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage en la terre du Brésil, chapitre XIII, (orthographe modernisée)
1578
Au reste, parce que nos Tupinambas sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d'aller quérir1 leur Arabotan, c'est-à-dire bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d'entre eux qui sur cela me fit telle demande : "Que veux dire que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin pour quérir du bois pour vous chauffer, n'y en a-t-il point en votre pays ?"
À quoi lui ayant répondu que oui et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même2 du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, ains3 (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) que les nôtres l'emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :
"Voire4, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon5) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises6 et de draps rouges, voire même (m'accommodant7 toujours à lui parler de choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n'en avez jamais vu par deçà8, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s'en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."
Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m'interrogeant plus outre, dit :
"Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?"
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."
Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu'au bout, il me demanda derechef :
"- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?"
"- À ses enfants, s'il en a, et à défaut d'iceux9 à ses frères, sœurs et plus prochains parents."
"- Vraiment, dit alors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n'était nullement lourdaud), à cette heure connais-je10 que vous autres Mairs, c'est-à-dire Français, êtes de grand fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il), des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu'après notre mort la terre qui nous a nourris les nourrira, sans nous en soucier plus avant, nous nous reposons sur cela."
Voilà sommairement et au vrai le discours que j'ai ouï de la propre bouche d'un pauvre sauvage américain.
1 Quérir : aller chercher
2 Ni même : ni surtout
3 Ains : mais
4 Voire : soit
5 En lui faisant trouver bon : pour le persuader
6 Frises : étoffes de laine
7 M'accommodant : essayant
8 Par deçà : chez les Tupinambas, au Brésil
9 À défaut d'iceux : s'il n'a pas d'enfants.
10 Connais-je : je me rends compte.
Pourquoi peut-on parler d'un renversement des rôles entre le vieil homme et le narrateur ?
Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage en la terre du Brésil, chapitre XIII, (orthographe modernisée)
1578
Au reste, parce que nos Tupinambas sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d'aller quérir1 leur Arabotan, c'est-à-dire bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d'entre eux qui sur cela me fit telle demande : "Que veux dire que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin pour quérir du bois pour vous chauffer, n'y en a-t-il point en votre pays ?"
À quoi lui ayant répondu que oui et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même2 du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, ains3 (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) que les nôtres l'emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :
"Voire4, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon5) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises6 et de draps rouges, voire même (m'accommodant7 toujours à lui parler de choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n'en avez jamais vu par deçà8, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s'en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."
Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m'interrogeant plus outre, dit :
"Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?"
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."
Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu'au bout, il me demanda derechef :
"- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?"
"- À ses enfants, s'il en a, et à défaut d'iceux9 à ses frères, sœurs et plus prochains parents."
"- Vraiment, dit alors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n'était nullement lourdaud), à cette heure connais-je10 que vous autres Mairs, c'est-à-dire Français, êtes de grand fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il), des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu'après notre mort la terre qui nous a nourris les nourrira, sans nous en soucier plus avant, nous nous reposons sur cela."
Voilà sommairement et au vrai le discours que j'ai ouï de la propre bouche d'un pauvre sauvage américain.
1 Quérir : aller chercher
2 Ni même : ni surtout
3 Ains : mais
4 Voire : soit
5 En lui faisant trouver bon : pour le persuader
6 Frises : étoffes de laine
7 M'accommodant : essayant
8 Par deçà : chez les Tupinambas, au Brésil
9 À défaut d'iceux : s'il n'a pas d'enfants.
10 Connais-je : je me rends compte.
Dans ce texte, que dénonce l'auteur ?
Texte A : Jean de Léry, Histoire d'un voyage en la terre du Brésil, chapitre XIII, (orthographe modernisée)
1578
Au reste, parce que nos Tupinambas sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d'aller quérir1 leur Arabotan, c'est-à-dire bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d'entre eux qui sur cela me fit telle demande : "Que veux dire que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin pour quérir du bois pour vous chauffer, n'y en a-t-il point en votre pays ?"
À quoi lui ayant répondu que oui et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même2 du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, ains3 (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) que les nôtres l'emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :
"Voire4, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon5) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises6 et de draps rouges, voire même (m'accommodant7 toujours à lui parler de choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n'en avez jamais vu par deçà8, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s'en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."
Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m'interrogeant plus outre, dit :
"Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?"
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."
Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu'au bout, il me demanda derechef :
"- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?"
"- À ses enfants, s'il en a, et à défaut d'iceux9 à ses frères, sœurs et plus prochains parents."
"- Vraiment, dit alors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n'était nullement lourdaud), à cette heure connais-je10 que vous autres Mairs, c'est-à-dire Français, êtes de grand fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il), des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu'après notre mort la terre qui nous a nourris les nourrira, sans nous en soucier plus avant, nous nous reposons sur cela."
Voilà sommairement et au vrai le discours que j'ai ouï de la propre bouche d'un pauvre sauvage américain.
1 Quérir : aller chercher
2 Ni même : ni surtout
3 Ains : mais
4 Voire : soit
5 En lui faisant trouver bon : pour le persuader
6 Frises : étoffes de laine
7 M'accommodant : essayant
8 Par deçà : chez les Tupinambas, au Brésil
9 À défaut d'iceux : s'il n'a pas d'enfants.
10 Connais-je : je me rends compte.